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Du rififi à port Nordland

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海 軍

∆ Zombie War P2 ∆


Luvneel, un immense royaume jouissant d’une certaine autonomie en comparaison de ses pairs. Bien qu’originaire de North Blue, la jeune militaire de Tanuki ne s’y était jamais rendu de sa vie. C’était un comble à bien y penser, mais la chose n’était plus si étonnante que cela depuis qu’elle était membre de la marine. Il était après tout de notoriété publique que ses membres n’étaient pas bienvenus sur place. Si le Gouvernement Mondial se chargeait de la défense des côtes, celle des terres était à la seule charge de la milice locale. Ambrosias n’aimait pas beaucoup la situation de quasi-indépendance de ce pays, mais elle n’avait pas son mot à dire et se contentait de suivre les ordres. D’un autre côté, elle comprenait la volonté des locaux à disposer d’eux-mêmes. Ayant troqué sa veste d’officier pour un épais manteau en fourrure de mouton angora de Tanuki, la jeune femme observait au loin le port de Nordland. Bien qu’elle ne soit plus aussi inculte qu’elle ne l’était à l’époque, il fallait reconnaître malgré tout que l’endroit était gigantesque. La jeune femme se sentait toujours aussi petite en arrivant dans des lieux de cette envergure. Un cigare fumant aux lèvres, elle grelottait légèrement. Depuis qu’elle avait quitté la région, elle avait l'impression d’être moins résistante au froid qu’auparavant. Peut-être se faisait-elle des idées, mais cela ne l'empêchait pas de s’emmitoufler au mieux.


« Magnifique, n’est-elle pas ? »


Arrivant sans s’annoncer, Lord Althias de Mistoltin surprit la vétérinaire qui se retourna à la hâte. Gardant toute contenance, bien que difficilement, elle hocha légèrement la tête de bas en haut.


« Oui, vous avez raison.

- Je n’étais qu’un enfant quand j’ai vu pour la première fois les lumières de Nordland. Encore aujourd’hui je ne m’en lasse pas.

- Le port de Tanuki parait si petit en comparaison.

- Minuscule même ! Pourquoi pensez-vous que je voyage autant ? Être le maître d’un mouchoir de poche est vite lassant.

- Je vous crois sur parole. »



Pensive, la jeune femme se demandait bien ce qu’elle faisait ici. Durant toute son adolescence, elle n’avait cessé de regarder de loin le magnifique Althias. Depuis toujours ou presque, elle était amoureuse de lui sans lui avoir jamais parlé, et voilà qu’aujourd’hui elle était son invitée. Après l’avoir croisé sur Tanuki, quand elle s’occupait de l’instauration de sa première clinique vétérinaire sur place, il lui avait proposé de l’accompagner à Luvneel. L’inauguration d’une grande statue allait s’avérer être un prétexte pour une belle cérémonie et un immense banquet. Bien que totalement étrangère à ce genre de mondanités, Ambrosias avait accepté de suite la proposition du noble. Comment aurait-elle pu lui refuser quoi que ce soit de toute manière ? Par chance, la militaire et son équipage venaient de se voir accorder de belles permissions pour se reposer avant de repartir sur Grand Line. Le Commodore Epinondas souhaitait que sa future seconde soit fraîche et disponible pour l’aider dans sa tâche. Mieux encore, il lui avait fait comprendre que son arrivée coïnciderait avec une promotion. D’ici peu de temps, elle serait Lieutenant-colonel et cela l’emplissait de bonheur. Chasser les pirates aux côtés des Broyeurs serait un véritable honneur et une magnifique occasion de continuer à faire ses preuves après la chute de Gerritzon sur Little Garden. La jeune femme avait le vent en poupe et elle le savait, la seule chose à faire était de ne pas se planter misérablement. Ayant laissé ses hommes et le Béluga sur Tanuki, elle avait pris la mer sur le navire d’Althias en direction de Luvneel.


« Vous serez ravie d’apprendre que nous séjournerons chez un bon ami à moi. Monsieur Dogaku.

- Sigurd Dogaku ? L’homme à l’origine du remède contre la rouboule ?

- Lui-même. Vous aviez eu l’occasion de faire sa connaissance ?

- Brièvement, je doute qu’il se souvienne aussi bien de moi que je ne me rappelle de lui.

- Un homme formidable, qui sait, peut-être vous surprendra-t-il sur ce point.

- Qui sait. »



Que Sigurd se souvienne de l’ancienne vétérinaire était vraiment peu probable. La jeune femme n’avait été qu’un insignifiant bip sur son radar lors des évènements qui l’avaient vu venir régler la situation sur Tanuki. Quoiqu’il en soit, elle était réellement contente de faire de nouveau sa connaissance, l’homme lui ayant laissé un très bon souvenir. Son cigare toujours aux lèvres, la militaire alla se mettre dans un coin pour ne pas gêner les matelots durant la manœuvre d’accostage. Une fois la coupée mise à terre, elle suivit Althias. Non loin, un jeune homme bien apprêté attendait les visiteurs de Tanuki pour les mener au manoir du sieur Dogaku. Arrivée sur place, Ambrosias oublia la forte impression que lui avait faite le port de Nordland. En comparaison de la demeure familiale des Mistoltin, la bâtisse de Sigurd était gargantuesque. Elle hurlait au monde à quel point elle était grande, somptueuse et débordante de faste. La commandante en aurait presque eu le vertige. Muette, elle se tenait à quelques mètres d’Althias, le suivant comme son ombre. Non loin de l’entrée, les deux amis se saluèrent chaleureusement avant que le noble de Tanuki ne fasse signe à la militaire.


« Je te présente mon invitée, la commandante Ambrosias, rassure toi elle est en permission. Vous vous êtes déjà rencontré sur Tanuki il y’a quelques années, elle y travaillait comme vétérinaire.

- Ravie de vous revoir monsieur Dogaku. Je vous remercie sincèrement de bien vouloir nous héberger. »



Tendant une main bienveillante vers le riche civil, la militaire aux nombreuses brûlures offrit un léger sourire à Sigurd, chose assez rare pour être soulignée. Un peu de repos ne ferait pas de mal à la jeune femme avant de repartir traquer les pirates sur la route de tous les périls. Avoir la chance de passer quelques jours dans un manoir pareil était une véritable chance sur laquelle elle n’allait pas cracher.



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- Moshi Moshi ! Fit Nox de Beaufroi, après quelques sonneries sous forme de "pululu pululu pululu" sur son den den. Il savait pertinemment que c'était pas la bonne formule, mais persistait à faire cette blague au début de chaque communication, le genre de blague qui casse la croûte. Ou la dalle, selon le revêtement au sol.

- T'as entendu la nouvelle ? Y paraît que Gluttonny a changé de cravate, et qu'il a lâché sa place de corsaire ! Déjà, l'ancien sergent de la scientifique cracha son morceau de biscuit, et faillit s'étouffer avec le thé au lait qu'il prennait tout les matin. Comment ?! Et t'en as d'autre comme ça à m'annoncer, Gaston ? Le mec s'appelait pas gaston, c'était un nom de code. Ou alors simplement l'obstination de Nox à ne jamais se souvenir du prénom de cet énergumène. Dans tous les cas, son interlocuteur passa le cap, et n'en tint pas rigueur au bon gars qu'était le pirate. Ouai, selon Mimi, l'ancien collègue d'une copine à ma soeur, qui s'est engagé chez lui dès qu'il a sentit le vent tourné, il paraît qu'il a décidé de s'attaquer à pas mal de coin du monde. Si je t'appelle, c'est qu'on va p'tet faire une descente à Luvneel, paraît qu'il va attaquer la bas, et nous on va profiter de la diversion ... Malin pas vrai ? L'envie de se taper la main contre le front fut forte, mais il rassura son informateur, un gars rencontré dans un bar dont il avait effacé une dette d'argent, en rejouant aux cartes le double de la somme. Malin.... oui, dangereux plutôt. On se recontacte. Il raccrocha l'escargophone et souffla.

Avait-il vraiment le choix ? En cet période de 1628 ou il n'avait pas encore rencontré le duo Aze et Ren, et toute la clique, il était encore très attaché à la liberté d'autrui, plus qu'à la sienne. Quand il voyait une injustice, il devait retrousser ses manches, et mettre les mains en plein dans le camboui. Il arrêta son petit déjeuner séance tenante, ça tombait bien il n'était qu'a quelques îles de Luvneel, et de son port réputé pour ses transactions douteuses parfois, souvent exubérante, qui faisait toute l'économie de la famille royale. Encore un truc qui le chafouinait ça, mais il était plus important de mettre des bâtons dans les roues de l'ancien Corsaire. Il le connaissait de réputation, quand il était élite on pleurait dans les chaumières à son passage, et il n'avait jamais fais de cadeaux, pas même à ses "alliés" de circonstances. On savait que travailler avec lui était aussi dangereux que rentable, et quand il bossait pour Booker, l'avait-il déjà entendu prononcer son prénom en tremblant, comme s'il lui devait quelque chose.

Des années plus tard, tout ça lui revenait en mémoire dans des mélanges de flashs et de murmures, d'ombres qu'on ne percevait qu'en s'en occupant pas, dans le coin du regard. Et il avait beau écarter l'idée d'aller aider ses pauvres gens contre leur futur tortionnaire, encore un qui s'était goulument moqué de la justice et qui en avait profité, se goinfrant jusu'à l'œsophage, à presque en éclater ... Il ne pouvait l'écarter totalement de son esprit, elle revenait comme une mouche bien décidé à vous empêcher de dormir, ou bien une mélodie entrainante, que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître, un truc entêtant, qu'il avait dans la peau, qu'il avait dans la tête. Il se leva du lit de fortune qu'il avait mendié dans une auberge, contre quelques services de réparation sommes toute bénins. Un baquet remplit de paille, et recouvert d'une toile de jute, dans une partie propre de l'écurie. L'ancien palefrenier n'était plus là, et les affaires tournaient mal, le contexte géopolitique actuelle, ne tendant plus au tourisme dans ce coin du monde.

Il s'habilla consciencieusement, et enfila les gants de cuir qui ne le quittaient guère. Il attrapa l'étuit de contrebasse qui lui servait a transporter ses armes discrètement, et ses outils les plus imposants. Tout était rangé, parfaitement ordonné, chaque chose à sa place, et chaque place a sa chose. Il revérifia une seconde fois que tout était parfait. C'était du suicide de s'opposer aux corsaires, et pourtant ... Le véritable courage se teinte parfois de la plus intense des folies.

Il va falloir recourir aux grands moyens ... Il prit son den den dans une mains, et souffla. Cela faisait des années qu'il n'avait pas revu l'homme, mais il savait qu'il pouvait compter sur lui. Lui aussi, malgré les tâches sur sa carrière, était un bon gars.

"Pululu Pululu Pululu"

- Ouaip ?
- Wayne ? C'est Nox, il va falloir que tu me crois sur parole, et que tu t'assois.... Commença ainsi la conversation entre le marine Wayne Macallan, et Nox de Beaufroi. Il savait que Luvneel, était importante pour le marine. Qui de mieux pour l'aider à la défendre ? Je sais que ça fait longtemps, mais j'ai une info qui va t'intéresser ... Il faudrait qu'il le croit sur parole... Etait-il au courant de sa déféction des forces de la marine ? Le corsaire Gluttonny, ça te parle ? Sa prochaine cible serait Luvneel, et j'ai pensé que l'idée te plaira pas, autant qu'à moi.

Il finirent leur conversation sur un rendez vous, en pleine mer, sur les côtes méridionales de l'île. Nox sur son navire à peine plus grand qu'une barque, et Wayne, surement avec tous les moyens possibles et légaux que lui offrirait la marine. Enfin, Nox l'espérait. Parce qu'à deux, ils allaient avoir du mal contre les hommes de Léonov.  
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Quelques jours auparavant...


C'était censé être une superbe perm'. Quand on a retiré la suite des opérations à "Sissi" sur Zaun, c'est littéralement ce qu'on m'a promis : un superbe perm'. Bien sur que j'aurais aimé pousser cette purge jusqu'au bout, cette île, véritable putain de verrue sur les mers bleues ne mérite rien de plus. Mais non Wayne. C'est pas ton job, va te reposer qu'ils disaient.. va profiter d'une superbe perm'.. prends du bon temps, tu l'as mérité... Mon cul ouais. J'étais là, sur le pont du Couperet, mon croiseur, quand James m'a apporté l'escargophone. Ouaip le DenDen qui a foutu en l'air ma "superbe perm". Au bout du fil, une voix familière, un type que j'n'avais pas entendu depuis un bail. Comme s'il était revenu d'entre les morts, Nox de Beaufroi m'informait alors qu'il y aurait prochainement du grabuge et que ca concernerait le tout récemment Ex-Glutonny. Ouais depuis que Kutroshinsky avait renvoyé sa carte de membre du club très sélecte des Shichibukai au Gouvernement Mondial, parait qu'il frappait un peu partout dans le monde et si son objectif restait encore inconnu, fallait avouer qu'en quelques semaines, il avait foutu un sacré bordel. Vint alors ce frisson... Un frisson qui me parcoura le corps dans son intégralité quand Nox m'expliqua la raison de son appel. Il me donna sur un plateau la prochaine cible de Kutroshinsky et c'est clair que ça ne m'fit pas plaisir puisqu'il s'agissait ni plus ni moins du Royaume de Luvneel.

Je laissais alors panner un léger silence, le temps de digérer l'truc. Comment pourrais-je vérifier l'info ? Après tout, aux dernières nouvelles, ce brave Nox de Beaufroi avait lui même envoyé l'état major se faire foutre en quittant sa fonction pour une vie plus.. exotique. Devais-je prendre le risque de répondre favorablement à son invitation ? Quelles raisons aurait il de me piéger ? Probablement aucune. Ce lascar s'était toujours montré réglo, lui et moi avions d'ailleurs une vision assez proche du système actuel... M'appeler comme ça après tant de temps... Voilà qui était bien curieux. Mais je ne pouvais clairement pas me payer le luxe d'ignorer cette information et n'étant qu'à quelques jours du Royaume de Luvneel, j'acceptais alors d'aller à sa rencontre, sur un terrain neutre, en pleine mer... Et comme pour assurer mes arrières, j’pense soudain à passer un coup de fil. Après Zaun, Raines doit pas être bien loin et si ça doit réellement péter, j’sais que c’est le genre de gars à avoir dans les parages.


... Aujourd'hui, non loin des côtes Luvneeloises


Mer agitée, aucune trace du moindre pavillon noir et pourtant me voici à quelques minutes du port de Norland, à bord du Couperet. Les gars sont aux aguets, je les ai briefé avant même de vérifier l'info de mon indic, faudrait pas qu'un détail nous passe sous le nez. Après plusieurs heures à attendre sur le pont à la proue de mon croiseur, cherchant du regard l'embarcation de mon contact, mon escargophone sonne enfin et lorsque je décroche, c'est la voix de Nox que j'entends.


... te voilà enfin Wayne ... faut qu'on cause ... permission d'monter à bord ? ...

J'vois pas de raison de refuser.. pour l'instant. Amène-toi.


Communication coupée, la vigie s'met à beugler. Parait qu'un navire non identifié approche, avec un gus qui agite un drapeau blanc, je me précipite alors pour vérifier par moi même. Et effectivement, notre gaillard et bel et bien là, en chair et en os, surgissant sur bâbord marée, j’aperçois alors un petit navire, tout juste plus grand qu'une chaloupe. J'ordonne à ce qu'on le laisse approcher, je sens d'ailleurs que James reste méfiant. Quand je lui ai expliqué la raison de notre venue, faut dire qu'il était pas très très chaud à l'idée d'accorder du crédit à un hors la loi. Mais en l'état, hors la loi, déserteur ou peu importe ce que Nox de Beaufroi serait, aujourd'hui, à mes yeux, il n'était qu'un citoyen aspirant à sauver des vies. Lorsqu'il grimpa à bord, je reconnu aussitôt l'ancien Marine d’Élite, lui et moi avions collaboré sur plusieurs fronts et il n'avait pour ainsi dire pas changé d'un pouce. J'ordonne alors aux gars de garder les yeux bien ouverts et j'invite Nox à me suivre dans mes quartiers histoire de causer.

Installés dans ma cabine, je sors une bouteille de scotch et deux verres. J'sais que boire en service ne renvoie pas une superbe image de moi.. mais vu que j'suis censé être en perm'... Je m'installe à mon bureau face au type à la chevelure cendrée et lui sert un verre avant de m'en servir un.


Nox de Beaufroi... Ça fait une paye... Je pensais que t'étais mort.

Faut croire que non. me dit-il en prenant son verre. C'est tout c'que t'as ? Un simple croiseur ?

J'suis pas en service. Et je peux pas franchement appeler du renforts parce qu'un hors la loi m'a filé un tuyau... Tu sais bien que dans la reg' ça ne fonctionne pas comme ça.

Ouais... Encore et toujours les mêmes lourdeurs administratives. Mon tuyau est solide, et crois moi.. quand les types de Kutroshinsky vont se pointer... commença-t-il.

Alors on saura les recevoir comme il se doit. coupais-je.


S'ensuit alors une longue conversation durant laquelle Nox me révèle deux trois trucs sur son propre indic, un malfrat de bas étage qui a prévu de profiter du bordel provoqué par Léonov pour s'en mettre dans les poches. Mais le plus intéressant vient après, quand il m'explique que l'Ex-Corsaire à l'intention de frapper très fort et les gouvernement Luvneelois étant ce qu'il est... Y'a fort à parier que l'île soit réellement ravagée. Je repense alors à l'attaque qui a jadis emporté Sylla et Lyonna... Et cette fois, je suis plutôt déterminé à tout tenter pour empêcher que ce genre de chose se reproduise. Je me lève alors de ma chaise et m'approche de la fenêtre. Certainement pas le moment de réclamer du renfort ici et maintenant... Le Royaume de Luvneel n'étant pas à proprement dit affilié au Gouvernement Mondial, on m'enverrait surement chier. Pire on me donnerait sans doute l'ordre de quitter le territoire, prétextant que ça ne nous regarde pas... Non. Faut la jouer fine. Organiser un semblant de défense, attendre que ces connards se pointent et signaler à l'état major que Kutroshinsky est en train d’frapper. Sur le fait accompli, le Gouvernement Mondial n’aura pas vraiment de choix, il ne résistera surement pas à une opportunité aussi belle de se faire mousser devant le peuple Luvneelois. Et quand bien même je me gourerais, je suis certain que l’idée de contrecarrer la manœuvre du gros porc en séduira plus d’un.

Je remonte alors pour donner mes ordres, état d'alerte maximal. Que Le Couperet se mette en manœuvre de combat, peut être bien présomptueux de ma part de penser que j'ai une chance, mais je me prépare pas vraiment à affronter ces types de front. J’suis pas stupide… Non l’objectif ici c’est sera plutôt de les retarder au maximum, et mon avantage, c'est que je connais trop très bien le coin... Et en parlant de renfort, faudrait pas oublier Raines. Le bougre doit pas être bien loin et ne tardera sûrement pas à rejoindre la fête. Que tout le monde se tienne prêt à réceptionner et accueillir les pirates comme il se doit dès l'instant ou ils montreront le bout de leur nez.
    -Al’ !
    -Sig’ !
    -Heeeeeey !

    Les deux hommes s’exclamèrent à l’unisson en fusant l’un vers l’autre, le noble de Tanuki faisant preuve d’à peine plus de distinction que son compère lorsqu’ils tendirent tous les deux un poing pour se saluer en les entrechoquant. Le geste, qui relevait bien plus d’un débordement d’entrain que d’une démonstration de force, les amusa autant qu’à l’accoutumée.

    A la surprise d’Ambrosias, qui avait toujours vu son prince charmant plus distingué que ça. Mais Althias, qui s’encombrait peu de fioritures même quand il se comportait avec toute l’élégance attendue de par son rang, réagissait avec beaucoup trop d’enthousiasme face au grand sourire abruti d’un vieil ami qu’il était heureux de revoir.

    Puis il présenta son invitée. Que Sigurd regarda en faisant de son mieux, sans succès, pour ne pas se retrouvé distrait et malaisé par les énormes, terribles, atroces et dérangeantes marques de brûlures qui lui lacéraient un pan du visage. Et possiblement davantage, même si ça n’était pas visible avec sa tenue qui la protégeait de la sempiternelle brise Luvneeloise. Au moins, il ne pleuvait pas, aujourd’hui.

    Enfin, il ne pleuvait plus depuis une demi-heure, quoi, on restait sur Luvneel.

    -Ravie de vous revoir monsieur Dogaku. Je vous remercie sincèrement de bien vouloir nous héberger.
    -Oh bah avec plaisir Madame, dit-il en lui rendant sa poignée de main.

    Il réalisa qu’il avait oublié son nom à elle, même s’il le demanderait probablement un peu plus tard. A moins qu’il ne lui propose qu’ils en passent aux prénoms, ce qui était le plus probable.

    -Et pour l’invitation vous en faîtes vraiment pas, j’ai de la place et les amis de mes très bons amis sont probablement des gens biens donc j’peux les inviter. En plus je crois que je me souviens de vous, même si… je vais être super maladroit et dire que je ne sais pas ce qui vous arrivé depuis. Mais pas besoin de répondre je veux pas être indiscret.
    -Oui, ça ne sera pas nécessaire, intervint Althias.
    -Yep. On a jamais eu l’occasion de causer ensemble mais je pense bien que je vous ai vu de loin plusieurs fois. Je crois que c’était chez le bon gars qui tenait un restaurant sur le port, pas loin des quais, où ils font de chouettes ragoûts bien réconforts et des hachis parmentier au canard qui flairent bon le terroir. J’dis des bêtises ?
    -Avec plusieurs sculptures de bois à l’effigie de moutons Angora et toute une collection de coquillages exposée en guise de décoration ?
    -Ca, oui ! Et une cascade de laine tricotée qui rendait super bien pas très loin de l’entrée. J’y allais souvent avec une amie à l’époque. J’étais dans la marine marchande, c’était y’a presque dix ans. Wouh l’temps passe vite. Fait longtemps que j’ai pas eu des nouvelles de Nera’ d’ailleurs.
    -C’est le restaurant de mon cousin, vous avez bonne mémoire. Il n’a quasiment pas changé. Mais c’est un très modeste établissement à coté de tout ce que vous devez avoir dans le port Nordland.
    -Ah, c’est le port de Norland, corrigea Sigurd. Vous avez pas lu la fiche d’île dans la brochure touristique vous, hein ?
    -… mh ?
    Mes excuses. Je crains n’avoir dans mes bagages qu’une brochure rédigée dans un ancien patois, elle date de plusieurs dizaines d’années.

    Prise à défaut, la militaire sembla se raffermir, sans aller jusqu’à adopter une attitude défensive. Peut-être l’impressionnait-il malgré sa nonchalance et ses efforts pour avoir l’air humain. Ou alors, c’était son naturel, envisagea Sigurd : elle avait l’air d’être une femme rigide, pas un distributeur de sourire à en voir le timide qu’elle lui avait adressé, et davantage prise au dépourvu qu’incommodée par la bonhommie avec laquelle Sigurd lui parlait. Mais pas désagréable et probablement loin de là si on la mettait à l’aise, ce qui était son but.

    -Je plaisante. C’était juste pour info. Et pour chez votre cousin… boaaah, je sais bien que je suis absolument pas crédible quand je dis ça, mais j’ai le souvenir que son rapport Q/P était extra, l’ambiance superbe et qu’on s’y posait volontiers, donc moi j’en ai un bon souvenir.
    -Tu préférais quand même venir manger chez moi, à l’époque, lui glissa Mistoltin.
    -Je serais pas devenu riche si j’étais pas un parasite professionnel, non mais, ricana l’autre. Mwarh har har. ‘Fin bref. Je vous propose qu’on aille à l’intérieur ? Besoin d’aide pour les bagages ?

    Trois minutes plus tard, Ambrosias révisa son jugement : le manoir qu’occupait Dogaku n’était pas plus grand que celui de son mécène à elle, en particulier si on comptait toutes les annexes, cours, étables, jardins, bassins, dont bénéficiait le domaine du noble de province et qui manquaient en pleine ville. Par contre, cette demeure était bien plus riche, avec des tapisseries et du mobilier d’une valeur historique qui surclassaient complètement celles du noble de Tanuki. Althias était pourtant un passionné d’œuvres d’art, malgré ses goûts un brin particuliers.

    Vu l’heure de la journée, elle avait simplement demandé un verre d’eau quand il leur proposa des boissons. Mais la commandante fut surprise de se voir servir une verrine de lentilles parfumée d’agrumes et de petits légumes en guise de collation, bien différente des soupes et des petits poissons marinés que se partagèrent les deux autres. Une réserve que remarqua son mécène :

    -Je lui ai indiqué que vous ne mangiez pas de viande ou de produits animaux.
    -Y’a des œufs de poisson dans la soupe, précisa Sigurd.
    -Je vous remercie sincèrement de l’attention. C’est excellent, rajouta-t-elle immédiatement après sa première bouchée.
    -C’est lui qu’il faut remercier et féliciter, dévia Sigurd en tendant le bras pour désigner un mur sur sa droite. Si jamais vous avez un petit creux à n’importe quel moment, j’ai un chef qui se rend disponible à l’heure des repas et prépare des petites grignotteries-au-cas-où pour quand il est pas là. Si vous avez des préférences ou envie d’essayer des trucs, il aime faire découvrir. Sinon, miss Nilson, une de nos domestiques, est aussi une cheffe en formation et elle est excellente. Mais je connais pas son emploi du temps pour la semaine, je crois qu’elle sera pas souvent là.

    La discussion s’entretint naturellement sur la demi-heure qui suivit. Ambrosias ne pouvait pas partager l’enthousiasme des deux amis qui se retrouvaient, mais les voir ainsi mettait de bonne humeur, et elle n’y fit pas exception. Ils abordèrent pêle-mêle une ribambelle de sujets, comment les choses allaient sur Tanuki pour les quelques personnes qu’il y connaissait, une brève présentation de Luvneel et du port de Norland, et de quoi satisfaire la curiosité de Sigurd sur l’arme que la commandante avait préféré garder à sa ceinture jusqu’à la porte d’entrée plutôt que de l’avoir à encombrer ses bagages. Un mariage improbable de fusil et de sabre qui devait probablement comporter son lot d’inconvénients, mais qui marchait si bien qu’il était répertorié en tant que meitou depuis des décennies sans que personne ne remette son statut en question. Etrangement, ce ne fut pas tant Sigurd qu’Althias qui demanda à la voir en détail et la tenir dans ses mains.

    Une question en amenant une autre, Ambrosias remarqua que son hôte avait l’air de savoir un certain nombre de choses à son sujet. Questionné indirectement à ce sujet, Sigurd se justifia simplement :

    -Althias m’a un peu parlé de vous, oui.
    -Il avait le cuir hérissé quand j’ai prononcé le mot « commandante », j’ai dû l’amadouer, s’excusa l’autre.
    -Je suis pas très potins et encore moins qui casse les dents de qui entre la marine et les pirates, mais j’ai retenu les hauts faits. Rocher d’Huile et Casque de fer, c’est ça ?
    -Hulm et Chapeau de fer, corrigea son ami.
    -J’plaide non coupable, je suis très nul pour ces choses-là. Mon nom est Bigurd Grogaku et mes blagues sont très lourdes.

    « Ah par contre j’ai entendu parler d’un truc dont tu m’as pas causé étrangement, c’est quoi cette histoire de gros bateau de guerre en cadeau, là ? Pour un gars qui me dit que c’est trop fastidieux d’investir dans des navires depuis la dernière mise à jour des formalités administratives, t’es pas très cohérent là. Ou alors il est apparu comme par magie et t’en avais pas l’usage, c’ça ? ».

    Mais il se retint, estimant que ç’aurait été être un petit peu trop taquin, et surtout, que ça ne le regardait pas.

    -Au fait, faudra que je disparaisse en milieu d’après-midi, j’aurais du monde à voir. Mais je reste avec vous en attendant. Vous voulez peut-être voir et choisir vos chambres ? Je suis nul pour faire visiter, c’est Haylor que ça amuse d’habitude, mais elle est partie visiter son père pour un petit moment. Eeeeet… pour la cérémonie, ça sera demain matin, en milieu de matinée. Tiens au fait j’me demandais, comment va Anford ?
    -Qui ça ?
    -Anford Galleon Junior Junior Junior Junior Junior Junior Junior Junior, fils d’Anford Galleon Junior Junior Junior Junior Junior Junior Junior, petit-fils de… vous voyez? C’est lui qui m’avait tout expliqué pour le sheepball, c’était vraiment extra. D’ailleurs ça c’est un truc qu’aucune île d’où que ce soit peut voler à Tanuki, qu’on se le dise.
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    1628 est une année riche en rebondissements. J’avais tort de penser que mon début de carrière sur les blues serait paisible et tranquille… En résumé, qu’il serait ennuyeux. Au final, les mers cardinales sont depuis le début de cette année le théâtre d’affrontements de grande envergure. Elles sont en pleine effervescence. Je n’ai peut-être pas toujours réussi à pleinement tirer mon épingle de ce jeu dangereux, mais je fais de mon mieux. Je parviens à sauver de nombreuses vies, à chacune de mes missions… Et ce même si je manque de puissance pour être vraiment décisif et sauver tout le monde. Mon échec à Koneashima, bien que minimisé sans doute par les actions d’Ike Basara, me laisse toujours un goût particulièrement amer en bouche. Quand je ferme les yeux, je revois les corps ensevelis sous la roche. J’entends leurs cris, quelques instants avant qu’ils ne meurent. Ces images et ces sons me hantent chaque nuit qui passe.

    J’ai essayé de traquer, comme je le pouvais, des informations sur Gluttony ou sur Izumi. Savoir où ils pourraient se terrer. Mais les deux pirates semblent introuvables, insaisissables, comme des fantômes. Alors j’ai fini par me dire qu’il vaudrait mieux que je passe à autre chose. Que je devienne rapidement plus fort, pour éviter qu’une tragédie comme celle de Koneashima ne se reproduise. Et puis… Il y a cette vente d’esclaves en Amerzone qui approche, où plusieurs centaines d’âmes vont compter sur moi. Mon esprit se focalise sur ça.

    Jusqu’à ce que je reçoive cet appel du Lieutenant-colonel Macallan. Je me doutais que ce n’était pas un appel pour me féliciter pour ma promotion, et encore moins un appel de courtoisie. Mes yeux se sont écarquillés et mon sang n’a fait qu’un tour lorsqu’il m’a annoncé avoir des informations sur la prochaine cible du Glouton. Je lui ai demandé si sa source était fiable, mais il n’a pas développé. J’ai alors été en proie à un dilemme. Devais-je lui faire confiance et aller l’épauler à Luvneel, North Blue, à l’exact opposé du lieu de ma prochaine mission ?

    Pour une chance de retomber sur Izumi et de lui faire expier ses crimes ? La question elle est vite répondue.

    Étant affecté à une mission sur South Blue, je ne pouvais pas bouger comme je le voulais. Fort heureusement, mon supérieur le Sous-Amiral Niromoto et son équipe sont d’immenses flemmards. Je n’ai eu aucun mal à les faire céder et à m’autoriser à m’octroyer une petite période de vadrouille avant la mission sous la menace de leur donner du travail administratif à effectuer. Faire du chantage à mon supérieur hiérarchique me hérisse les poils, mais aux grands mots les grands remèdes.

    Laissant mes hommes faire acte de présence et préparer le terrain en Amerzone, en bonne compagnie de Trembol D. Black et de son équipage, j’ai dû entamer le voyage seul et c’est ainsi que je me suis retrouvé à bord d’une ridicule embarcation unipersonnelle. La vulgaire coque de noix avance en fendant les eaux calmes et froides de la mer du nord, à mesure que je me rapproche des côtes du royaume de Luvneel. Allongé avec les mains croisées derrière la tête et les doigts de pied en éventail, je profite de ces rares moments de calme… Et me laisse aller au bruit d’une houle douce et réconfortante, oubliant tout ce qui se passe autour de moi.

    Ceci est notre dernier avertissement, nous vous laissons 10 secondes pour vous identifier, après quoi nous serons obligés de vous considérer comme hostiles !

    Je me réveille en sursaut quand j’entends la voix amplifiée par l’escarghaut-parleur. Je remarque alors que mon frêle esquif est doucement en train de s’approcher d’un navire beaucoup plus gros : un croiseur de la marine, qui mouille dans la rade du port de Norland… Et dont les canons me sont braqués dessus. Compte tenu de la différence écrasante de taille… Ce ne serait pas un peu démesuré, comme réponse ? Je reconnais toutefois sa figure de proue assez singulière : une longue lame équivoque du nom du navire… Le Couperet, le croiseur du Lieutenant-Colonel Macallan. J'esquisse un sourire enjoué en me levant dans ma barque, étirant mes cuisses encore engourdies alors que le décompte s'approche dangereusement de zéro.

    Et puis d'un coup, je m'élance dans les airs et grâce à mon Kamisori, je me retrouve en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire sur le pont du croiseur, nez-à-nez avec les hommes de Macallan.

    Adjudant Bowmore ! Je m’écrie en atterrissant droit devant le Viandard au costume impeccable.
    Commandant Raines ? C’est vous ? Vous étiez attendu, mais j'avoue que je ne pensais pas que vous débarqueriez comme ça, tout seul...
    Négatif, adjudant ! C’est Lieutenant-colonel Raines maintenant ! Je le corrige en me recoiffant, affichant un air fier alors que je bombe le torse.
    Ah… Euh… Félicitations ?
    Le Lieutenant-colonel est dans le coin ? Je passe directement à autre chose, cherchant du regard le marine à l’air anormalement bourru, même pour un marin.
    Il est en train de débriefer la situation avec son contact, au niveau du pont supérieur. Je vous y accompagne ?

    J’acquiesce en silence. Macallan m’a assuré que ses informations étaient fiables, et que son contact était sûr, sans toutefois vouloir me le révéler. Alors, je me pose des questions sur son identité et mon cerveau travaille. Nous arrivons, après avoir monté plusieurs escaliers, à la cabine du capitaine.

    Wayne, le Comm… Lieutenant-colonel Raines est arrivé. M’introduit l’Adjudant Bowmore en poussant la lourde porte en fer. J’esquisse un salut militaire rapide à celui qui a été mon supérieur à Zaun et est aujourd’hui mon égal hiérarchique.
    Lieutenant-colonel Macallan. C’est un plaisir de vous revoir ! Mon regard s’attarde sur le verre d’alcool que je ne suis pas surpris de voir dans sa main, et il sent qu’il y a un peu de jugement dans mes yeux.
    Merci Bowmore. Il congédie son subordonnée, et se tourne vers moi. Vous arrivez à point nommé, Raines. Je vous présente le contact dont je vous parlais… Nox de Beaufroi. Nox, j’ai bossé avec Raines à Zaun. C’est un bon marine, et un marine efficace… Et qui de toute évidence a reçu une promotion depuis notre mission commune ?

    Je hoche la tête.

    Lieutenant-colonel Alex Raines, du G-3 de West Blue. Enchanté de faire votre connaissance… Je tends la main vers la connaissance de Macallan, le fameux Nox de Beaufroi. Mon regard s’attarde sur lui. C’est un homme mûr, qui doit avoir à peu près le même âge que le capitaine du Couperet et dont les cheveux dont la couleur s’est déjà effacée lui donne un certain charisme. Il a une certaine élégance, une certaine prestance… Bref, il dégage quelque chose. Mais quelque chose me saute immédiatement aux yeux. J’ai une connaissance exemplaire du code et du règlement… Et reconnais tout de suite que l’uniforme, bien qu’un peu customisé, que porte monsieur de Beaufroi est un uniforme de capitaine de la marine. Macallan, bien qu’il semble éprouver un malin plaisir à enchaîner les infractions, ne me semble pas du genre à omettre d’annoncer le grade de son invité. Un ancien marine, alors ? On lui aurait fait rendre l’uniforme lorsqu’il aurait rendu les armes… Ne restent que deux options. Soit il obtenu cet uniforme par un parent, au marché noir, ou en pillant des cadavres…

    Il est stipulé dans la loi qu’il est illégal de porter sans autorisation un uniforme dont le port est réservé par la loi à certaines personnes exerçant une mission de service public ou dépositaire de l'autorité publique. Donc, dans le meilleur des cas… Il est dans l’illégalité à ce niveau là. Bien que ça ne soit pas un crime de grande envergure, et que ce serait bien le genre de Macallan de n’en avoir absolument rien à cirer… Cela ne me fait pas vraiment partir du bon pied avec lui. Et ça se sent dans le regard que je lui lance.

    Excusez-moi, mais… A qui exactement ai-je l’honneur… ? La question s’adresse aussi bien à l’un qu’à l’autre. Je peux cautionner quelques entorses innocentes à un protocole qui est souvent un peu trop rigide pour certains soldats. Je sais également comment réfléchit le Lieutenant-colonel Macallan. Sans compter qu’il m’a sauvé la vie… Je ne remets pas en question son intégrité… Mais ils doivent jouer cartes sur table avec moi.

    C’est juste quelqu’un qui veut aider, Raines. Quelqu’un qui ne veut pas que des innocents meurent. Le Lieutenant-colonel Macallan coupe court à la légère tension qui s’était installée dans la pièce. Je lui lance un regard qu’il comprend aussitôt. Il conclut. Je m’en porte garant.

    Les images de Koneashima flashent à nouveau devant mes yeux. Je n’aime pas quand les choses sortent du cadre protocolaire. Mais s’il faut empêcher que pareille tragédie ne se reproduise… Alors je peux faire ce léger écart sans m’arracher le cœur. Après tout, ma situation personnelle est déjà quelque peu irrégulière, à m’être déplacé seul sans suivre d’ordres en particulier.

    Bon, je vous fais confiance, Lieutenant-colonel… Je marque une courte pause. De toute manière, je n'aurais pas tout lâché pour parcourir la moitié du globe et le rejoindre si ce n'était pas le cas. Quand on verse son sang aux côtés de quelqu'un, ça crée un lien ineffable. Mettez-moi au parfum.


    Dernière édition par Alex Raines le Jeu 8 Sep 2022 - 11:25, édité 1 fois
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    Du rififi à port Nordland Tumblr_oyuh8qz2re1w4ph5zo3_540

    海 軍

    ∆ Zombie War P2 ∆


    La compagnie de Sigurd était absolument exquise. L’homme avait de bonnes manières, savait bien s’exprimer, se démenait pour rendre ses interlocuteurs à l’aise et était attentionné. Un parfait gentleman en somme. À certains égards, il rappelait Althias à la commandante. Après un copieux dîner, tout le monde regagna sa chambre, mais avant ça, la vétérinaire ausculta rapidement l’escargophone de son hôte. Outre un manque cruel d’intelligence de la part de l’animal, elle ne nota pas grand-chose d’intéressant et préféra passer cette information sous silence à son propriétaire. Seule dans sa chambre, la jeune femme profita du fait qu’il y ait un balcon dans ses appartements pour fumer dehors. Une légère bruine vint malheureusement gâcher ce petit moment de détente. Exaspérée, Ambrosias alla donc se coucher pour être en forme le lendemain. Comme il fallait s’y attendre de la part de Sigurd, le petit-déjeuner s’avéra être aussi copieux que délicieux. Cet homme savait recevoir, c’était une évidence.


    Tandis qu’approchait l’heure de la cérémonie, les protagonistes se préparèrent avant de quitter le manoir. Vêtue de son tailleur rouge habituel et de son manteau long en laine angora de Tanuki, la commandante n’avait clairement pas l’air d’une militaire. Malgré tout, elle n’était pas prête à se séparer de son meitou qu’elle gardait donc naturellement à la ceinture. Une fois les trois individus partis, la route ne fut pas longue jusqu’à la place où la statue serait inaugurée. Ambrosias ne savait presque rien de tout cela. Bien qu’originaire de North Blue, ce royaume lui était finalement assez étranger.


    Le moins que l’on puisse dire, c’était que tout cela semblait être un simple prétexte pour faire la fête. Il y avait des ballons, des échoppes distribuant de la nourriture et d’autre proposant divers jeux. Festive, voilà comment il aurait été le plus simple de décrire l’ambiance générale. Un cigare allumé aux lèvres, la jeune femme restait proche d’Althias et Sigurd en avançant. Fort de réputation sur Luvneel, leur hôte avait visiblement droit à une place de choix dont il décida de faire profiter ses invités. Sans trop comprendre comment, Ambrosias se retrouva donc au plus proche des organisateurs. La princesse locale, celle qui organisait l’inauguration, n’était qu’à quelques mètres d’elle. Cette jeune femme ne lui inspirait pas vraiment confiance, quelque chose dans ses manières, sa façon de se tenir droit ou de parler la dérangeait, mais elle n’aurait su dire avec exactitude ce que c’était réellement.



    « Quelle foule. » dit simplement la militaire à ses deux compagnons.


    La population locale semblait en liesse. Pour l’heure, tout allait pour le mieux et en dehors d’un ciel nuageux, rien n’annonçait que les choses allaient bien dégénérer. Expirant un épais nuage de fumée grise, la militaire balayait l’assemblée du regard, cherchant de possible trouble-fête plus par habitude que par réelle intuition.



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    Nox de Beaufroi était un homme qui fonctionnait simplement, il détestait l'injustice comme bon nombre d'autres avant lui. Il voyait pas ce qui justifiait qu'un mec terrorise la moitié du monde connu, sans que lui aussi le défende. Luvneel n'était ni meilleure, ni moins bonne que d'autres îles, et il se refusait à de pareil extrémité. Utiliser les méthodes de ceux que l'on déteste, ça vous salit. Et malgré qu'il ne travaillera plus jamais pour ses enflures du gouvernement, restait que le décorum demandait certains codes, et une certaine éthique. Une éthique dont peu de pirates s'embrassaient encore. Il regrettait une époque lointaine, ou il existait encore des individus sensés, qui combattaient les bon adversaires, sans user d'une violence peu nécessaire. On eut dit que le but de Leonov était de mettre un coup de pied dans la fourmilière, et pour énerver qui au juste ? Soit qu'il soit devenu trop gourmant, ou trop puissant, il trahissait une position confortable, une planque que n'importe quel être doué d'un peu de jugeotte aurait conservé. A moins qu'il en soit autrement, et qu'il veuille changer tout simplement de catégorie, devenir le grand méchant ? Passe encore de devenir le meilleur, et de grandir dans l'ombre du géant au pied d'opale, et au manteau blanc. Il pouvait se targuer d'être malin, ou au moins vraiment très vicieux, et assez bon menteur.

    A moins qu'une opportunité qu'il ne voyait pas de son maigre niveau, qui eut tout changer pour lui ? Ses pensée s'arrêtèrent devant l'infinie de l'océan, et l'île en toile de fond. On ne voyait pas le port de Norland d'ici, si ? Il se tourna de ce fait du paysage, dévoilant ses lunettes à montures d'argent, brillant d'une lueur irréelle au soleil, tandis que pénétrait le fameux Alex Raines dans le navire de son vieux collègue de travées et de galère.

    Il irradiait quelque chose de confiant, mais aussi de très droit. On sentait presque l'odeur de la justice imprégné ses pas. Mais était-il si certains de servir la bonne cause, dans tous les cas ? Peut-être qu'il ne se posait pas de questions, peut être que oui. Nox ne connaissait même pas de nom celui qu'on lui présenta comme 'le lieutenant colonels' Raines.  Un sacré titre pompeux pour le gamin qui lui faisait face, mais apparemment ça marchait sur lui comme cela avait marché sur tous les jeunes marins. Soit on meurt, soit on devient assez vieux pour se poser des questions sur son propre camp.  Il savait que Macallan tenait particulièrement à Luvneel, en parlait-il régulièrement dans leurs rares correspondances à propos d'une vieille affaire non élucidée.

    Il savait le gars droit dans ses basques, et même, combattre avec quelqu'un forge des liens qui sont difficile à trancher, quand on a un sens de l'honneur si aiguisé.

    - Je peux me répéter, ça ne me pose aucun problème. Il s'éclaircit la voix de manière bruyante, ses cheveux grisonnant avant l'heure, et son manteau comme seul signe d'une nostalgique profonde pour ses erreurs, comme pour ses réussites passées. Il représentait plus qu'un simple outil, mais un véritable symbole qui mettait mal à l'aise autant les pirates, que les marines les plus communs. On ne connaissait pas trop Nox de Beaufroi, de toute manière, il n'était pas forcément le plus remarquable des soldats, peut être. En tout les cas, aujourd'hui, on devrait le croire. Sur parole. J'ai eu un tuyau, un type qui s'appelle Gaston, pas la peine de chercher son nom dans un registre, le bouge est né dans un coin sans papier, ni plume. En tout cas, il est fiable. Et même si l'on ne sait pas la nature de la menace, je ne comptais appeler personne d'autre qu'un de mes vieil ami aussi concerné que moi par ce genre d'annonces. Il y'a des signes qui ne trompe pas. Même s'il est un requin, et qu'il peut nager sous l'eau, respirer sous l'eau, ne peut il pas empêcher la mer de bouger sur son passage, et la faune locale peut nous donner des indicateurs assez sûr de la présence de notre gros poissons. Donc pas la peine de s'inquiéter, et faut-il attendre que la ligne morde. Peut être qu'on pourra aider quelques citoyens à ne pas finir sous les feux des deux camps interposés, parce que je ne pense pas que Luvneel ne prendra pas les armes.] Bref, je préfère éviter un charnier, et suis pour opter pour des frappes chirurgicales. Il leva un index en reprenant son souffle, un index ganté de blanc.

    - J'aimerai aussi faire de la reconnaissance sur place avant que les combats commencent, si tout le monde est ok avec ça, personnellement, je ne dois rendre de compte à personne d'autre, que ma conscience.
    Il tourna le regard vers l'île dans le soleil naissant. Ils avaient assez attendus, ils avaient du pain sur la planche, à trois, pour arrêter quelque chose de cette ampleur.

    Il fallait bien qu'il accepte de travailler avec un inconnu, et comme il était un ami d'un ami, voulait-il croire à sa bienveillance envers lui. Macallan opina du chef, et tout les gars qui étaient à portée de voix levèrent la tête dans leur direction, les hommes de son vieux collègue, il les espérait triés sur le volet.

    Nox bouillonnait d'impatience, affronté quelqu'un d'aussi fort que le vieux Léonov, voilà, le sens de cette hérésie pour un pirate, que d'en attaquer un autre, était la seule raison de son passage chez les flibustiers. Pas de règles, pas d'égo superflus, juste une fondamentale liberté d'agir en son nom propre. Il avait la liberté de choisir ses combats, et il devait bien ça à son vieux camarade.

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    Raines.. non. Lieutenant Colonel Raines. Pourquoi est ce que cette promotion fulgurante ne me surprend pas. Un peu désemparé de le voir débarquer en solo je dois l’admettre, mais on fera avec. D’autant qu’je sais ce bougre capable de grandes choses en solitaire. Petite mise au point avec Nox, ce dernier quitte la pièce pour une reconnaissance avant la bataille. Faut croire qu’on est arrivé à temps, pas de trace des hommes de Leonov.. pas encore du moins. Un silence s’installe et je fixe mon homologue fraîchement embarqué dans cette galère. J’ai conscience que la pilule est dure à avaler, pour un gus comme Raines, bosser « avec » un repris de justice, ce ne devrait pas être envisageable. Et pourtant va bien falloir composer avec ceux ce qu’on a.


    Je connais Nox, ne vous fiez pas aux apparences, il est là pour aider. J’ai demandé du renfort… On verra ce que ça donne hein.


    Je lève mon cul de mon fauteuil pour faire quelques pas vers lui, j’dois avouer que je suis plutôt content de le voir. La bataille qui se profile ne sera certainement pas une promenade de santé oh ça non… J’ai entendu des rumeurs sur les différents fronts que ce gros porc de Kutroshinsky a attaqué récemment et ça ne m’a pas fait rêver. Des marées gigantesques de zombis… Je ne peux pas laisser le Royaume de Luvneel être ravagé sans lever le petit doigt. Pour aller plus loin, je serais même capable de crever pour défendre cette île.


    Écoutez.. je ne peux pas laisser Kutroshinsky ravager le pays. Je ferai mon devoir et je ferai tout pour arrêter ces sauvages.. quoiqu’il m’en coûte.


    Raines hoche la tête, il comprend que ça me tienne à cœur, peut être a-t-il épluché mon dossier ? Ça m’surprendrait pas vraiment. Nous retournons tous deux sur le pont, toujours rien à l’horizon. Ce qui nous laisse encore un peu de temps pour organiser les défenses de l’île. D’un côté on n’peut pas se permettre de lambiner, mais d’un autre côté on peut pas s’pointer au port de Norland et demander à la population d’aller se mettre à l’abris. On a vu ce que ça a donné quand j’suis allé « épauler » Dicross pour fumer ce connard de Bambana. Oh et puis merde.


    Bowmore. Je veux que vous positionnez Le Couperet entre le port Norland et l’horizon, que toute la puissance de feu soit dirigée à l’opposé de l’île.

    Reçu !

    Lorsque ces connards arriveront, tirez à vue, pas de pitié.

    Ce sera fait ! Mais je doute que notre puissance de feu soit suffisante…

    Ne les laissez pas vous aborder. Lorsqu’ils arriveront à votre portée, filez en direction de ces récifs là bas. Faudra être extrêmement prudent pour éviter les hauts-fonds pigé ?

    Très bien boss.


    Je me retourne de nouveau vers le port et une idée me vient alors. Dans l’hypothèse où les renforts finissent par arriver, il nous faudra gagner un maximum de temps et je sais exactement où je peux trouver de quoi faire. Et ça ne va probablement pas plaire à Raines…


    Kyara, j’ai la sensation que l’équipage aura besoin de toi ici. James, avec moi !

    Ou allons-nous ? me demande alors Raines en m’emboîtant le pas.

    On va aller secouer un vieil ami.


    —————————


    Notre barque touche le rebord mousseux d’un quai à l’abandon depuis bien trop longtemps et voilà déjà le comité d’accueil qui s’pointe. Quelques gros bras des profondeurs, l’allure patibulaire qui nous barrent le chemin. James dégaine ses flingues et les pointe directement dans leur direction et je sens que Raines est prêt à bondir.


    Du calme les gars, on est pas là pour la bagarre. On vient voir Darleen.


    Vous vous demandez sûrement qui est Darleen. C’est vrai quoi, tout le monde se le demande bordel. C’est juste une amie à moi. Et accessoirement c’était la petite pouliche favorite de Tibbon. Qui est Tibbon ? Putain vous le faites exprès. C’est le dernier chef en date du fameux gang Soshark qui sévissait dans le secteur. Il a été arrêté et a fini sur l’un des convois qui auront servit à Kutroshinsky de grossir ses rangs. Est-ce que Tibbon fait désormais parti de l’armée de l’ex-corsaire ? J’en sais foutrement rien, paraîtrait qu’il serait « réapparu » sur Zaun récemment, j’sais qu’il est mort lors de l’attaque du Pascal O Billot et que sa dépouille a été récupérée comme les autres.

    Une petite nana recouverte d’écaille se pointe alors. Elle a pas changé d’un poil en cinq ans. Pour l’anecdote, j’ai fermé les yeux sur un meurtre. J’en suis pas fier, mais disons que la victime l’avait mérité. Ce jour-là, si j’avais fait mon travail disons de manière consciencieuse, Tibbon et Darleen auraient finit au bout d’une corde. Et c’est sur ça que je compte m’appuyer. Prions pour que ça fonctionne.


    Darleen ! T’as bonne mine.

    Et toi t’as toujours l’air d’une épave.

    Outch. On fait ce qu’on peut hein.

    Que me vaut le plaisir ?

    Je manque de temps, donc je vais la faire courte. Ça va pas tarder à être la merde ici, et j’aurais besoin de votre aide à toi et tes gars.

    T’es gonflé. Si par « mes gars » tu parles de Soshark, t’es bien placé pour savoir que le gang est tombé. Ils ont convoyé à bord d’un de vos cuirassés il y a quelques mois.

    Ouais. J’ai appris pour Tibbon d’ailleurs et c’est ce qui m’a fait penser à toi… T’as peut être su que Leonov Kutroshinsky avait rendu sa carte de Schibukai récemment ?

    Le Corsaire ? Qu’est ce que ça peut me foutre ?

    J’y viens… Durant la dernière année, il aurait récupéré tous les prisonniers de ces convois, morts ou vifs… Et disons qu’il les a transformé en.. arme vivante. C’est lui qui est à l’origine de son.. « retour » sur Zaun. Lui qui est à l’origine de sa seconde mort.


    J’vois bien que ça la touche, même si elle essaie de rester impassible, je sais que ça commence à bouillonner au creux de ses entrailles. Je connais Darleen, si Tibbon n’avait pas reprit les reines de Soshark après Jericho, c’est pt’être elle qui serait devenu le Big boss. Elle s’approcha sans piper mot, je sens que j’ai fait mouche putain ! Je le vois dans son regard, je peux sentir un soupçon de colère d’où je suis… C’est dire ! Bien joué Wayne, la prendre par les sentiments était finalement une option tout à fait viable. Et j’espère que..


    SPLASHH



    Bordel de bordel. Mais c’est qu’elle vient de me gifler ! Si j’avais pas aussitôt levé la main, James l’aurait déjà changé en passoire. Mais j’dois admettre que mon approche fut un tantinet abrupte. Mais de là à imaginer qu’elle allait me frapper. Quel connard je fais parfois… Maladroit plutôt. Non en définitive t’es qu’un sombre connard Wayne. Je troque alors mon sourire de connard contre un air plus sérieux.


    J’y suis pas allé de la manière la plus subtile mais comme je disais je manque de temps. Le fait est que ce connard de Kutroshinsky à envoyé des troupes un peu partout et Luvneel est leur prochaine destination.

    J’vois toujours pas en quoi ce me concerne.

    Je te parle de milliers de zombis qui vont se pointer et tout saccager ici.

    Et qu’est ce que tu veux que j’y fasse ? Vous m’avez tout prit… sanglote la femme poisson.

    Ce que je veux que tu y fasses ? Non seulement ce gros porc de Kutroshinsky a sûrement récupéré le cadavre de Tibbon.. mais en plus tu vas le laisser pisser sur son héritage ? Me prends pas pour un con Darleen, je sais très bien que Soshark ou pas, y’a un paquet de gaillard qui se planque dans ces ruines.

    T’es en train.. de suggérer que je mette la vie de mes amis en jeu.. pour ceux qui nous ont cantonné ici…

    Je suis en train de te demander de défendre une île qui est aussi votre patrie. Puis j’imaginais que t’aurais les crocs et que t’aurais envie de te venger de ce connard…


    Faut que ce soit théâtrale, je tourne les talons et je remonte sur la barque. James range ses flingues et le silence s’installe. Je finis par le rompre en donnant l’ordre aux deux soldats qui nous accompagne de ramer pour nous ramener au port de Norland. Mais avant d’être trop éloigné, je lance quand même un petit pic à Darleen.


    Vous m’en déviez une Tibbon et toi… J’ai aussi pensé que ce serait donnant-donnant.


    Puis sans me retourner, je la laisse à sa réflexion en espérant que les graines que j’viens de lancer puissent germer. J’sais bien que Soshark c’est du passé, mais si je pouvais compter sur ses hommes de main pour nous aider en mer à ralentir les navires de l’ex-corsaire, alors probablement qu’on aurait une chance de tenir jusqu’à l’arrivée des renforts hypothétiques. Si Darleen daigne se joindre au combat… Plus le temps passe et plus je me dis que c’est la merde. Reste à voir ce que Nox a pu trouver de son côté, et justement après quelques vingtaines de minutes, voilà que le port de Norland est en vue.
      -Bonjour !
      -Ca n’est pas comme ça qu’on s’adresse à une princesse, Sig’.
      -Je sais je sais, mais j’ai pas vraiment envie ou besoin de me former au protocole. J’ai pas vraiment le cerveau pour ça, aussi.

      Pour l’instant, le blondinet était plus occupé à scruter la foule en se contorsionnant qu’à regarder devant lui. Il cherchait çà et là à reconnaître des visages familiers à qui il adressait, selon, de grands sourires en gesticulant le bras ou un bref mouvement de tête pour ceux qu’il n’appréciait guère. Comme ce charmant trentenaire, au moins aussi bien vêtu que lui et sensiblement plus digne et élégant, accompagné d’une magnifique jeune femme qui siégeaient non loin du trio. Loin de s’en offusquer, l’autre lui renvoya un sourire narquois, visiblement de bonne humeur, avant de s’engoncer confortablement dans sa chaise d’invité d’honneur. La même que celles qui avaient été réservées pour Sigurd et ses convives.

      -Qui est-ce ?
      -Un type bien que j’arrive pas à blairer sans raison valable, il paraît. Nan mais laisse tomber, je cherchais un bonhomme avec qui t’aurais pu bien t’entendre mais il doit pas être là, c’est pas grave. Vous voulez de quoi manger ? Ils font d’excellentes noisettes grillées dans le coin, spécialité locale. Comme tous les dérivés de noisettes. Sinon je peux me faire livrer des trucs de la maison par pélican. Me ferai bien un sandwich. Chais pas si gravlax ou foie gras et confiture. Ca peut être aux lentilles ou au seitan si vous préférez, adressa-t-il à Ambrosias. Il prépare ça avec des épices façon mini boudins ça passe ultra bien. D’ailleurs j’vais ptêtre prendre ça.
      -Ca ira, merci.
      -Ok, juste pour moi alors.

      Pas entre les repas en ce qui la concernait. Mais elle se contenta de répondre sans tourner la tête. S’il avait été un peu plus attentif, Sigurd aurait remarqué qu’elle était plongée dans une certaine rêverie, son regard errant de la foule aux bâtiments anciens qui encadraient la place, certains se distinguant par leur charme, d’autres par leur envergure. Pendant un long moment, les yeux de la commandante se fixèrent sur un étrange groupe d’individus vêtus de capes blanches ornés de grandes capuches, tous surplombés d’une plante qui surplombait leur uniforme en partant de leur crâne. Puis à nouveau sur Elastasia, la fille du roi Dayo Flemingo.

      -Elle est resplendissante, commenta Althias en suivant son regard. Et pleine de grâce, tant dans son port que dans chacun de ses gestes. Comme on l’attendrait d’une princesse.

      Des mots qui déclenchèrent sûrement une réaction quelque part entre les oreilles d’Ambrosias. Mais si c’était le cas, elle resta imperceptible pour ses deux compères :

      -Elle est dans les canons on va dire, éluda Sigurd. Et ça aide d’avoir des millions à consacrer en cosmétiques, compléta l’autre en songeant aux quarante-douze flacons de sa chère et tendre qui trônaient dans les salles de bain de leur manoir. Ou d’avoir été formée à la prestance et la diction depuis le berceau.
      -Je sens du scepticisme ascendant médisance. Pour changer. D’accord, je te le concède, ça m’a manqué. Hooo ho oho oho. Eclaire nos lanternes ?
      -Bah pour une fois nan, j’ai rien à dire. Elle a une excellente réputation, elle consacre beaucoup de son temps et de son influence pour plaider et agir en faveur des plus pauvres, les gens s’accordent à dire qu’elle a une tête bien faîte et s’en sert parfaitement, et elle est très populaire dans la plupart des milieux. Je crois que certains la trouvent un peu trop… énergique pour ce qu’on attendrait d’une princesse, mais si c’est le pire que les coincés trouvent à jaser à son sujet ça m’a l’air propre.
      -Vous avez de la chance. Quand un royaume peut se permettre d’avoir de grands espoirs dans l’héritier, ou ici l’héritière du trône, c’est un signe de stabilité pour la génération à venir.
      -Boah. Oui.
      -C’est bon pour les affaires, appuya Althias pour obtenir une réaction.

      Sigurd acquiesça en grognant, ses neurones ayant complètement décroché du sujet. A son tour, il observa les environs. La princesse, au centre de la place, qui conversait en messe basse avec les officiels et de la ville en amont de la cérémonie. Quelques figures qui les pointaient du doigt en s’attardant tout particulièrement sur l’amie d’Althias, sans qu’il ne sache si c’était elle-même, son meitou ou ses cruelles marques de brûlure qui était désignées : dans le doute, ne pas attirer l’attention d’Ambrosias sur ceux-là. Alors qu’à l’opposé, il y avait…

      -Et qui sont ces hommes ?, questionna la commandante qui s’était elle aussi recentrée sur les personnes en blanc.
      -Des membres du culte du Bulbe Fertile apparemment, fit Sigurd. L’une des tractopelletés de religions d’Inari qui aurait pris suffisamment d’ampleur pour commencer à exporter son culte. J’m’y connais pas vraiment, mais j’ai posé la question à gars bien en arrivant, je les trouvais rigolos.

      Cette fois, ce fut Ambrosias qui haussa les épaules sans vraiment y prêter attention. Elle ne s’était jamais rendue sur cette île peuplée d’excentriques, et était dépourvue d’intérêt pour ces choses. Ce qui changea du tout au tout lorsqu’Althias poursuivit sur le sujet :

      -Et pourtant, j’ai plusieurs objets d’art très intéressants liés à notre île et qui ont été façonnés sur Inari. Les moutons sont une figure récurrente dans la symbolique des religions qui y naissent. Il parait qu’un jour, un berger de Tanuki s’est rendu sur Inari accompagné d’un Angora et que plusieurs cultes se sont créées tout autour. Le cercle de la Toison d’Or, la confrérie de l’Agneau Unique…
      -Ah, je crois avoir entendu parler de celle-ci, se souvint Ambrosias. L’agneau avait la réputation d’avoir développé un haki ? Non, tous les hakis ?
      -C’est ce que dit la légende. Malheureusement, c’était il y a cinq ou six cent ans, donc… il est impossible de le vérifier. J’ai un tableau qui le dépeint dans mon salon.

      La jeune femme se souvenait bien d’une figure triomphante qui surplombait de nombreux hommes dans des étendues verdoyantes comme s’il en était le seigneur, mais n’avait jamais compris qu’il s’agissait d’un agneau. Pour elle, c’était un ancêtre d’Althias qui était représenté. Est-ce qu’elle avait la berlue ? Elle y ferait plus attention, la prochaine fois.

      -La légende raconte aussi que l’agneau doit se réincarner tous les demi siècles.
      -Mais du coup c’était pour le siècle dernier ou pour cette année ?
      -Eh bien… je ne suis plus très…


      *
      * *
      *


      -Mino ! Navire de la marine repéré à hauteur du port. Ils campent. En bon état, pas d’avaries apparentes. Ils n’ont pas cherché à communiquer.
      -D’accord. On les contacte pour leur demander ce qu’ils font là.

      Sous-officier adjoint au poste des communications navales du port de Norland, Mino Magnus. Qui, contrairement à son nom, était un poids plume surplombé par la totalité de ses interlocuteurs masculins. Fort de trente-cinq ans d’expérience parmi les forces des gardes côte du royaume, l’homme achevait maintenant sa carrière en supervisant les communications Denden des protecteurs du port.

      Et l’arrivée d’un navire du gouvernement mondial en bon état était généralement mauvais signe. S’ils étaient amochés, ça ne posait pas de problème : cela signifiait qu’ils avaient besoin d’aide, tout simplement.

      Si ce n’était pas le cas, tout pouvait arriver.

      Contrairement à bien d’autres, il n’avait rien contre les marines, lui : ils faisaient le même métier. Mais les deux dernières fois que des officiers de la mouette avaient mis le pied sur Luvneel, ça n’avait pas marché. Le plus notable était Jared, qui s’était dignement illustré en causant autant de ravages sur les quais du port que le pirate qu’il était venu arrêter. Sans même y parvenir. Le plus détestable était Morneplume, qui n’avait rien trouvé de mieux à faire que de se servir de la coupole d’un théâtre comme freezbee géant pour décapiter plusieurs immeubles de la capitale. Avant de faire un plongeon dans le reste du pâté de maisons. Tout ça pour la tête de révolutionnaires qui ne dérangeaient rien ni personne dans le pays. Fruit du géant, fruit du démon… mais le diable, c’était lui, pas celui qui lui avait conféré ses pouvoirs.

      Une série de blup segmentés plus tard, le sergent qui l’avait appelé traduisit :

      -Bon. Ils veulent nous informer qu’ils sont présents pour empêcher l’enlèvement de la princesse par des hommes de Gluttony qui vont attaquer le port aujourd’hui.

      Tout pouvait arriver. Ce serait donc un jour de ce genre, aujourd’hui. Après avoir lui-même échangé avec les marines, Mino comprit qu’ils n’étaient pas là pour plaisanter. Et dans le doute, la prudence était de mise. Même s’ils n’avaient relevé aucun signe annonciateur de quoi que ce soit…

      -On va faire ça calmement, en prenant cette menace au sérieux et sans paniquer. Prévenez la milice, les soldats qui protègent la princesse, ordonnez aux gardes côtes de resserrer le cordon sur le port et de mettre deux navires en préparation, et informez miss Haylor que…

      Ah. Premier signe repéré, en fait. Deuxième, en comptant l’arrivée des marines.

      Un enlèvement de la princesse sur Norland apparaissait plus facile avec la proximité de l’océan, mais c’était une opération rendue beaucoup plus dangereuse par la présence de leur furieuse locale. En son absence, par contre…

      -C’est pas grave, on peut faire. Il va falloir que l’on coopère, je sens.

      Ca n’était pas que ça ne l’enchantait pas. Juste que c’était des alliés qu’il ne maîtrisait pas, et qui avaient trop tendance à arriver en terrain conquis où ils aillent. Même dans les pays où la loi et l’organisation du GM n’avaient pas cour.


      *
      * *
      *

      -Ca ne va pas tarder, indiqua Mars à ses hommes. Tenez-vous prêts.

      A six cent mètres d’eux, Tsmakuni Matsuya, ancien pirate, ancien corsaire, fraichement sauvé de l’échafaud par Gluttony et qui comptait bien s’acquitter de sa dette au plus vite pour s’en retourner à ses propres aventures.

      Et vite, c’était précisément son mot-clé. L’homme qui se prétendait le plus rapide du monde se tenait perché sur le toit d’une des plus grandes banques de la ville. Pas pour la braquer, et l’ironie l’amusait encore. Il s’agissait tout simplement pour lui d’un excellent point de vue et d’un bon point de départ pour la course endiablée qu’il s’apprêtait à effectuer. En ligne droite vers la princesse, puis au travers du dispositif de la milice qui verrouillait la place, avant de fuser au travers de la ville jusqu’à en sortir. Son point de chute ultime était une petite crique dans les abords de Norland où il retrouverait son requin-tigre-géant-volant pour s’enfuir en compagnie de son otage. Et pour se faciliter la tâche, il bénéficierait de l’appui de deux diversions déjà prêtes.

      En mer, leurs navires feraient mine de vouloir fricoter avec les défenses du port pour mobiliser l’attention de la flotte des gardes côtes et des défenseurs de la ville. Ils n’auraient même pas à débarquer, à moins d’avoir un avantage évident dans la bataille.

      La seconde était déjà présente dans l’assemblée qu’il surplombait. A leur arrivée, tous les spectateurs avaient été fouillés sommairement en passant les miliciens postés aux différents accès de la place, sécurisée pour l’occasion quitte à dévier la circulation et entraver les passants. Quelques exceptions, comme Dogaku et ses invités, avaient été autorisées à garder leurs armes : lui aussi faisait partie des personnes que la milice cherchait à protéger en permanence, même s’il ne facilitait le travail de personne à refuser de s’adjoindre des gardes du corps.

      Et puis, il y avait évidemment les prétendus adeptes du culte du Bulbe Fertile, une religion qui existait réellement sur North Blue, et dont les adeptes arboraient effectivement des plantes incrustées dans leurs tenues. La nuance principale étant que leurs robes rituelles étaient d’une autre teinte de blanc doublée de vert de de dorures pour les plus aisés, et que rares étaient ceux à porter une pousse sur le crâne : le torse, la ceinture ou les épaules étaient privilégiées pour plus de praticité.

      Et sa petite bande qui faisait office de troupes de chocs avait trouvé moyen de graisser les pattes à quelques membres de la milice pour de profiter d’une faille dans le filet qui cadenassait la place. Histoire de pouvoir y amener quelques armes dissimulées et se simplifier la vie.

      Du haut de son promontoire, l’ancien corsaire sentit le vent tourner, manqua de perdre l’équilibre, et décida que l’occasion était tout aussi bonne pour commencer l’opération. Alors il s’élança, et fusa si vite que les rares à avoir aperçu quelque chose peinèrent à s’en rendre compte. Même lorsqu’il se matérialisa subitement, tout sourire devant la princesse, il fallait avoir cette dernière dans son champ de vision pour réaliser que quelque chose venait de se passer.

      Et à la seconde où Matsuya entra au contact d’Elastasia, Mars Hatak, son bras droit d’un jour qui dirigeait le groupe des cultistes, se révéla lui aussi à l’assemblée en envoyant voler sa robe pour révéler sa prodigieuse carrure – une montagne de muscles exposés torse à l’air libre. Armé d’une large épée cachée on ne savait comment, il dégagea tout un pan de foule à grands coups de lames d’air. Non létales, pas tranchantes, en ayant pris soin de ne pas s’en prendre à des personnes fragiles, mais bien assez puissantes pour souffler un homme sur plus de cinq mètres. Ce qui n’était qu’un coup de semonce visant à disperser la foule. Mars, ancien révolutionnaire, même converti de force au service de Gluttony, restait quelqu’un de tendre qui faisait tout son possible pour limiter les effusions de sang. A part le sien qui avait la fâcheuse tendance à couler abondamment tandis qu’il prolongeait ses opérations au-delà du raisonnable pour veiller à blesser le moins de monde possible. Mais ça, il avait l’habitude et savait ce qu’il faisait, ça n’était pas dangereux.

      D’autant plus qu’il surclassait de très loin tout ce qui se trouvait dans cette ville, d’autant plus que la cador du coin s’en était absentée sur un coup de hasard bienheureux.

      Ses abords dégagés, Mars projeta une nouvelle lame d’air tout en s’élançant en direction de Lucius Flydenburg, le principal garde du corps d’Elastasia qui la suivait partout. Il ne craignait même pas de blesser leur otage en devenir en lançant son attaque.

      Cette dernière se trouvait déjà coincée dans les bras de Matsuya qui l’avait soulevée comme un brindille avant de débuter sa fuite, une course folle dans les rues de la ville.
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      C'est le jour J. La grande parade pour l'inauguration de la statue vient de commencer. Le port de Norland, la cité rendue célèbre par les pérégrinations du fameux explorateur qui lui a donné son nom, grouille de monde… Je ne suis pas très à l'aise. La mémoire de Koneashima est encore fraîche, et son spectre me hante. Les hommes de Kutroshinsky étaient sortis du volcan dans lequel ils avaient creusé une galerie à coups d'explosifs… Je les sais donc capables de surgir de n'importe où, à n'importe quel moment… Et de n'importe quelle manière. Ils surgiraient de sous l'eau ou seraient parachutés depuis le ciel que ça ne m'étonnerait qu'à moitié. Alors il faut être ultra vigilant.

      C'est une statue de quoi, déjà ?
      De Cachalion, soldat. Je réponds sèchement au Viandard, concentré à l'extrême.
      C'est quoi ?
      Sans doute un animal marin. Un croisement entre un cachalot et un lion ?
      C'est ça qu'on appelle les lions des mers ?
      Non, ça c'était pas un équipage de vieux pirates ? Ou de pirates qui étaient tous très vieux ?
      Les fromages ?
      Non, non, je crois bien que c'était les lions…
      J'en sais rien. Vous savez, je viens de Kage Berg, moi… Dès qu'on sort du bétail… Et puis les poissons et les rois des mers se ressemblent tous un peu.
      Peu importe, soldats. Restez concentrés et soyez à l'affût. Le danger peut venir de n'importe où. Je tourne la tête à droite et à gauche, cherchant du regard les mines patibulaires des sbires de l'ex-Corsaire.

      Nous avons pu débarquer dans une tranquillité relative grâce aux "contacts" du Lieutenant-colonel Macallan… Qui lui rendent service en surveillant les eaux du port avec un peu plus de discrétion que l'imposant croiseur de mon collègue. Je hausse de plus en plus le sourcil quant à ses manœuvres… Et surtout son répertoire : il semble avoir le bras plus long du mauvais côté de la loi que du bon… Mais bon, cette opération n'a rien de protocolaire depuis le départ alors… Contentons nous de nous assurer que rien ne se produise. Je scrute la foule avec attention, tentant de discerner la moindre silhouette menaçante. Et puis, mes yeux se posent sur eux. Ils sont discrets comme le nez au milieu de la figure. Tout de blanc vêtus, ne cherchant même pas à cacher la petite pousse qui dépasse de leur tête, et passe au travers de leurs amples capuches. Comble de l’ironie, un petit blason vert orne même leur poitrail. Après avoir effectué une attaque surprise à Koneashima… Il tentent de passer en force, en se disant que plus c’est gros plus ça passe ? Non, pas en ma présence ! Je commence à écarter la foule et serpente entre les épaules des badauds pour me rapprocher du prétendu culte Inarien. Je parviens finalement à en attraper un par la manche.

      Eh. Je suis le Lieutenant-colonel Raines, j’aimerais effectuer un contrôle d’identité parfaitement aléat… Je m’interromps et ne termine même pas ma phrase alors que l’encapuchonné juste à côté semble décupler sa taille en se redressant. Tout se passe ensuite extrêmement vite. Il jette ses habits sur le côté et dévoile son imposante musculature ainsi qu’une énorme claymore. Il fait ensuite mouliner sa lame et je me retrouve propulsé à plusieurs mètres de hauteur simplement à cause de l’onde de choc dans l’air. Je me réceptionne au sol et me relève. Le coup que j’ai reçu était certainement puissant, mais mis à part me couper un peu le souffle et m’envoyer voler, il n’a pas eu beaucoup d’effet. C’est la cohue. Des corps sont projetés dans le décor dans tous les sens. La garde s’affole. Du côté de l’estrade où se trouve la princesse, c’est encore pire.

      C’est Gluttony, ils attaquent ! Macallan ! La princesse ! Mettez-la à l’abri ! Je hurle et m’époumone en espérant que mon collègue m’entende. Une nouvelle série de lames d’air fuse dans toutes les directions.

      J’esquive d’un Soru en me propulsant dans les airs, afin de prendre un peu d’altitude et d’avoir une vision plus globale de la situation. Les troupes de Kutroshinsky semblent être massées au milieu de la foule, se faisant effectivement passer pour une délégation religieuse. L’avantage, c’est qu’entre les robes blanches et les plantes qui leur sortent du crâne, ils sont faciles à discerner… Je suis toutefois surpris qu’ils soient si peu nombreux. Lors de l’attaque de Koneashima, on était plutôt dans l’ordre du quadruple ou du quintuple d’hommes… Et j’ai du mal à croire que l’ex-Corsaire, qui a la réputation d’être un génie - du mal certes mais un génie quand même - ne se décide à attaquer une île comme Luvneel sans y mettre la totale. Alors, la question à un million de berries se pose : où se trouve le reste de leurs troupes ? Ma première pensée est que nous avons eu le nez fin, et qu’ils viennent par la mer. Mais ça n’est pas vraiment logique. Ils viennent pour la princesse. Donc quelque chose m’échappe.

      En parlant de princesse… Je tourne la tête vers elle et… Où est elle passée ? Il y a à peine un instant elle était juste là et maintenant… Ses gardes du corps l’auraient déjà évacuée ? Peu probable. Les Dévoreurs sont déjà en train d’accabler les soldats. Je tourne la tête de l’autre côté… Et je finis par poser le regard sur elle. Difficile de la manquer, avec ses longs cheveux châtains et toutes les parures de sa tenue de cérémonie. Et puis… Elle dénote clairement avec celui qui la tient entre ses bras, et que je soupçonne de ne pas être un prétendant amoureux… De toute manière, j’identifie l’individu sans problème, avec ses dreadlocks, sa musculature impressionnante et son style de biker. Tsmakuni Matsuya. L’ex-Corsaire qui a troqué un nombre réglementaire de voyelles dans son nom à la naissance contre une vitesse surhumaine. Je peste intérieurement à l’idée qu’il ait rejoint son ancien collègue. A croire que le fameux corps des capitaines corsaires est un pire gruyère que la marine… Et qu’il constitue une nouvelle institution remplie de traîtres et pervertie de sa noble fonction.

      La princesse ! Là-bas ! J’ai le temps de m’écrier et d’essayer d’aiguiller qui peut m’entendre avant de retomber au sol. Matsuya est réputé pour être si rapide qu’il peut marcher sur l’eau mais je maîtrise le Soru, un déplacement si rapide qu’il laisse une image rémanente sur la rétine. Je m’apprête alors à frapper le sol avec ma jambe, et… Je n’ai pas l’opportunité de décoller, alors que quatre serviteurs plantifiés de Gluttony se jettent sur moi.

      Dégagez ! Je lance en esquivant leurs coups d’épées. En temps normal, je me serais interrompu pour me présenter en bonne et due forme… Ainsi que pour leur spécifier qu’ils violent quelques lois sur la culture de plantes génétiquement altérées ou sur la profanation. Mais je n’ai pas le temps. Je raidis mes index et mes majeurs et me prépare à leurs exploser la caboche avec une salve de Shigans. Les rapports de la scientifique sur l’étude des trois zombies capturés à Koneashima confirment le fait que la seule solution pour s’en débarrasser est la crémation… Mais même s’ils se régénèrent, les dommages devraient être suffisants pour nous faire gagner le temps de sauver son altesse Flemingo.

      Mes doigts entrent en contact avec la chair… Et sont stoppés net. Avec une vitesse surhumaine, celui qui semble être leur commandant, avec l’imposante épée, s’interpose en encaisse mon attaque… En plein dans la seule partie non protégée de son corps. J’esquisse un demi-sourire satisfait. Je ne sais pas quel intérêt il y a à porter une épaisse armure métallique sur tout son corps pour laisser ensuite à nu la zone du corps humain dans laquelle la plupart des organes vitaux sont situés… Mais ça m’arrange. Du moins, c’est ce que je me dis avant que mes doigts né s’écrasent et craquent en entrant en contact avec les abdominaux de mon adversaire. Ses muscles sont durs comme l’acier. Non, bien plus encore. En plus de leur dureté surnaturelle qui rivalise sans conteste avec celle que les maîtres du Tekkai peuvent atteindre, je sens mes doigts comme empêtrés dans un liquide visqueux à proximité de sa peau. Comme si nous étions deux aimants aux polarités inversées. Et c’est douloureux. Terriblement douloureux. J’effectue un mouvement de recul en affichant une grimace, et me fais balayer par un coup de claymore. J’ai à peine le temps de contracter mes muscles et d’utiliser mon Tekkai pour partir en arrière et déraper au sol sans me faire éventrer.

      Je marque une pause et fais bouger mes doigts meurtris. Maintenant, ça me revient. Un berserker qui porte une armure incomplète, bras droit du révolutionnaire Mandrake, et qui même dans sa nouvelle vie zombifiée ne peut s’empêcher de ne pas tuer ses adversaires. Mars Hatak, le Héraut de la Guerre. Un As de la révolution, rien que ça, et réputé de son vivant pour être une véritable éponge à coups et un bouclier impénétrable. Alors en rajoutant en plus des capacités de régénération à cause de la profanation de Kutroshinsky… Autrement dit, je ne vais pas m’en débarrasser facilement… Si j’arrive à m’en débarrasser. Ce premier coup que je lui ai asséné m’a clairement fait comprendre qu’il me surclasse physiquement. Sans aide, ce sera donc impossible de triompher. Mais puis-je vraiment m’attendre à de l’aide en sachant que le révolutionnaire n’est probablement qu’une diversion ? La cible de Gluttony, c’est la princesse Elastasia Flemingo. Son véritable atout, c’est Envy. Alors toutes nos forces devraient se concentrer sur ce dernier. Normalement, De Beaufroi doit avoir été témoin de toute la scène à distance, au travers de la lunette de visée de son fusil de précision. Il est donc plus à même d’intercepter l’ex-Corsaire et de nous apporter un soutien bien nécessaire. Quant à Macallan… Je l’ai perdu de vue.

      Une nouvelle salve de lames d’air envoyées par Hatak me force à parer une fois de plus sous Tekkai. Les coups ont beau ne pas être envoyés pour tuer… Ils sont vraiment appuyés. Je ne vais pas tenir longtemps, à ce rythme là…


      Dernière édition par Alex Raines le Jeu 8 Sep 2022 - 11:26, édité 1 fois
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      Du rififi à port Nordland Tumblr_oyuh8qz2re1w4ph5zo3_540

      海 軍

      ∆ Zombie War P2 ∆


      Un instant tout allait bien et Ambrosias assistait à un simple festival donné en l'honneur d'une princesse qu'elle ne connaissait pas. Celui d'après, tout dégénérait si vite qu'elle ne comprit pas réellement ce qui se passait. Un homme solidement bâti fit irruption auprès de la notable d'une manière si spectaculaire qu'il sembla se téléporter. Sa vitesse et son apparence étaient celles d'une personne bien connue de la Marine, mais tout allait trop vite pour que la vétérinaire comprenne de qui il s'agissait réellement. Sans savoir ce dont il retournait, elle réagit pas réflexe. Tendant les bras vers l'illustre inconnu, elle envoya deux cordes saisir ses jambes pour l'empêcher de fuir avec la princesse. Quelle grossière erreur... Avant même qu'elle n'ait le temps de comprendre quoi que ce soit ou de prononcer un mot, Matsuya s'élança. Sa force et sa vitesse étaient telles qu'il projeta Ambrosias au loin à la manière d'un trébuchet. La pauvre militaire décolla dans les airs pour aller s'écraser avec fracas contre le mur d'un immeuble à plus de vingt mètres de distance. Le choc lui coupa le souffle et elle se cogna sévèrement la tête en retombant finalement au sol. Perdant presque connaissance, la jeune femme resta étendue au sol quelques longues secondes.


      « B... Bor... Bordel... »


      Jamais la jeune femme n'avait été malmenée de cette manière, jamais aussi vite et sans qu'elle ne puisse à ce point rien faire. Qui était donc ce rustre à la puissance herculéenne ? Incapable d'y réfléchir réellement, elle était cependant convaincue qu'il devait s'agir d'une personne réellement redoutable. Gémissant de douleur, la commandante se releva difficilement. Du sang coulait sur son visage depuis le haut de son crâne et sa vision était trouble. Même si elle pensait être victime d'une commotion cérébrale, elle tenta au mieux de faire taire la douleur pour aller aider les locaux. Parlant de ces derniers, pendant qu'Ambrosias était face contre terre, ils avaient décidé de faire irruption pour sauver la princesse et protéger les civils. Perchés sur d'étranges machines volantes qui faisaient penser à des tapis sortis tout droit de contes pour enfants, les gardes du royaume étaient plus déterminés que jamais.


      Dégainant lentement son meitou, Ambrosias vit qu'un homme seul faisait face à plusieurs individus. Il ne lui fallut qu'un instant pour comprendre qu'il s'agissait des mêmes zombis que sur Tequila. S'ils étaient ici, cela voulait dire que l'infâme Glutonny était derrière tout ça. Remplaçant sa douleur par la haine que lui inspirait cet homme, la vétérinaire se rua vers celui qui était son collègue sans qu'elle le sache. Pendant que son allié se protégeait tant bien que mal de lames d'air, la brûlée décida d'attaquer celui qui semblait contrôler les humains végétaux. Terriblement impressionnant, le pugiliste torse nu dégageait une aura de puissance qui manqua de faire douter Ambrosias. Se ruant néanmoins vers lui, elle trouva une faille et envoya un coup d'estoc droit vers son dos. Malheureusement, l'homme l'ayant senti approcher se contentant de pivoter légèrement sur lui-même pour attraper son poignet. Bloquée à son contact, la militaire ne s'avoua pas vaincue. Hurlant de rage, elle se servit du shigan pour planter son index dans sa chair. Quel ne fut pas la surprise de la jeune femme en sentant que son doigt ne pénétrait que très légèrement le corps de l'ennemi. Manquant subitement de confiance, elle croisa le regard vitreux de son adversaire. Ce dernier ne semblait exprimer aucune émotion, comme s'il était lui-même devenu l'une de ces choses plus tout à fait vivantes. D'un geste ample mais puissant, il envoya sa victime au loin. Décollant une fois de plus dans les airs, Ambrosias se servit d'une corde pour tourner autour d'un lampadaire et se débrouilla pour finir debout sur celui-ci. Pointant Coeur d'Acier vers l'ennemi, elle tira à plusieurs reprises. S'il était évident qu'elle n'avait aucune chance de le toucher, elle savait laisser ainsi une chance à l'homme qu'elle venait d'aider.




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      -Est-ce que vous pouvez nous aider ?
      -Ah ouais mais non mais… chais pas. Est-ce que j’ai l’air d’une folle furieuse qui lance des boules de feu et des éclairs et vomit des marées de chaînes carnivores depuis ses jupes ?
      -JE SAIS QUE VOUS N'ETES PAS HAYLOR, MAIS LA PRINCESSE EST EN TRAIN DE SE FAIRE ENLEVER JE N’AI PAS DE TEMPS A PERDRE, ALORS EST-CE QUE VOUS NOUS AIDEZ, OUI OU NON ?
      -Woooouh. Tout doux, pardon. Ui ui. Mais y’a plein de marines qui sont en train de sortir de nulle part pour taper les pirates alors qu’ils ont pas le droit d’être là et du coup je sais pas si je suis nécessaire vu qu’ils ont l’air de charbonner contre la diversion des pirates en ignorant totalement la princesse qui va du coup pas être sauvée par eux eeeeet…
      -...
      -... ouais bon d'accord j'ai compris.
      -Parfait! Montez!

      Dans un élan de précipitation empreint de maladresse, Sigurd se laissa tirer par le milicien qui venait de l’alpaguer pour grimper à bord de son tapis volant. Le pilote s’était arrêté en plein milieu de la place pour récupérer Lucius Flydenburg, le principal garde du corps de la princesse, encore sonné par l’assaut de Mars mais trop tenace pour s’effondrer sur cette seule attaque. Pour lui, hors de question de laisser sa protégée disparaître comme ça. Il ne lui avait fallu qu’une seconde pour reprendre contenance et monter sur le véhicule improbable, prêt à poursuivre Matsuya même s'il savait parfaitement à quel genre de monstre il allait s'attaquer.

      Mais en apercevant Sigurd toujours assis au premier rang, le milicien avait fait progresser sa monture jusqu’à lui pour essayer de l’enrôler également. Car même si le statut de protecteur de la ville revenait à sa compagne, il était connu pour l’aider très avantageusement avec ses armes à feu. Le meilleur tireur de North Blue, qu’on disait. Même s'il n'avait quasiment aucun fait d'arme à son actif, ça ne se refusait pas.

      -‘Crrochez vous.
      -Uh uh. Par contre j’préviens j’vais m’écraser à plat ventre en me cramponnant comme un méga déchet parce que j’aime vraiment vraiment pas ces trucs et que ça me donne un vertige et…

      Comme si on allait le laisser débiter ses âneries. Le tapis décolla aussitôt, arrachant un grand hoquet de peur au blondinet qui se cramponna aux jambes du chevalier royal, visage collé contre sa cuisse, recroquevillé de manière à se tenir au plus près du tapis et surtout, à ne surtout surtout surtout pas regarder en bas.

      -Vous pouvez le rattraper ?, aboya malgré lui Lucius en essayant d’ignorer la sangsue qui se collait à lui.
      -C’est chaud j’ai jamais vu personne aller aussi vite, répliqua le pilote. Mais apparemment, il a du mal à négocier les virages et il évite la foule. Et les grandes artères sont blindées. Les autres arrivent à le suivre, à vol d’oiseau on pourrait le rattraper. S’il fait assez de zig-zag.
      -Alors accélérez !
      -Si je vais vraiment à fond vous allez pleurer comme lui. Vous voulez ?
      -N’IMPORTE QUOI POUR LA PRINCESSE, FONCEZ !
      -Ok alors accrochez-vous à cette sangle et gardez en tête que même si vous allez avoir l’impression de mourir, vous êtes bien attaché. Tant que moi je tiens en tout cas.
      -D’accOOOOoooooooooooooooooooooooooooooAAAAAAAAAAAARHHHHHHHHHHHHHHH !!!!!!!!!!

      Lucius ne put s’empêcher de hurler tandis que le milicien accéléra subitement : il venait de se soulever. Ses jambes, son corps avaient quitté le tapis et il se trouvait maintenant comme suspendu dans le vide tandis qu’ils se propulsaient à une vitesse décuplée par rapport à tout ce qu’il avait pu connaître dans sa vie. Un cheval lancé à triple galop ne représentait rien à côté de ça.

      Et le milicien avait l’air de très bien le vivre, lui. Soit c’était un monstre, soit l’entraînement permettait des merveilles.

      Le bouffon local, par contre, ne faisait plus un bruit, comme s’il était mort mentalement. Mais il s’accrochait bien. En témoignait la bave qui coulait sur les bottes de Flydenburg.


      *
      * *
      *

      Et à un kilomètre de là se trouvait… Pépé Nestrelle. Un sympathique vieux bonhomme rabougri, au timbre noble et érudit, qui était une petite figure locale. Pas du genre dont on parlait pour alimenter la machine à ragots, mais de celles qu’on apercevait régulièrement pour les saluer volontiers à chaque fois. Ce qui, dans une ville qui brassait quotidiennement cinq cent milliers d’âmes, n’était pas sans mérite. C’est qu’il en connaissait, des choses, et partageait volontiers ses anecdotes pas toujours véridiques, mais si bien narrées qu’on ne lui en voulait pas. Même à son âge fort avancé, il avait encore un certain charme tel qu’on aimait juste l’entendre.

      Un talent qu’il exploitait encore à diverses occasions pour arrondir ses fins de mois en se livrant à quelques petits boulots d’appoint qui avaient également l’avantage de le distraire de son morne quotidien. Et aujourd’hui, il promenait les chiens, comme bien souvent. C’était quelque chose qu’il aimait. L’occasion de sortir pour croiser du monde, s’arrêter pour discuter avec certains, recruter quelques amis qui partageaient son âge pour passer le temps ensemble…

      … se promener naturellement dans la ville pour glaner des informations par pelletés, fureter à gauche à droite pour étayer ces rumeurs, et finalement passer quelques messages et tuyaux aux sbires du Cipher Pol avec qui il échangeait moyennant contrepartie.

      En son temps, il avait été agent au sein du second bureau, sans dépasser le grade de catégorie III. Ce qui lui convenait parfaitement : il pouvait faire son petit espionnage industriel pour le compte de Marijoa et vivre confortablement, tout en veillant à ne pas remonter de secrets qui seraient trop dommageables pour son pays natal. Le meilleur des deux mondes. Et maintenant, il poursuivait son office en servant d’appui à l’équipe qui avait remplacé la sienne. Pépé Nestrelle les connaissait bien, pour avoir lui-même recruté la majorité de ses successeurs parmi des gens de confiance, dont l’une de ses filles, ainsi que quelques crétins trop incompétents pour être dangereux. Dont l’une de ses filles.

      Et en cet instant, toute l’attention de ce fin limier et de ses cinq compagnons canins se tourna naturellement vers le grand fracas retentissant qui éclata au coin de la rue, là où se tenait maintenant un grand nuage de poussière, haut de cinq mètres et large du double, dont plusieurs personnes s’extirpaient précipitamment en criant de surprise.

      -RHAA PUTAIN MAIS ELLES ME GONFLENT CES RUES DE MERDE !
      -REPOSEZ MOI IMMEDIATEMENT, PIRATE ! JE VAIS VOMIR !
      -Teh. Eh bien excusez-moi, princesse. Ca n’est pas confortable ?
      -BIEN SUR, QUE CA N’EST PAS CONFORTABLE ! JE ME FAIS TRIMBALLER COMME UN TAS DE GRAVATS EN AYANT L’IMPRESSION D’ETRE SUR LE TOIT D’UN TRAIN.
      -Hééééé, vous êtes pas gentille avec moi là. Je suis beaucoup plus rapide qu’un train d’abord, se vexa Matsuya avant de fanfaronner. J’ai même déjà fait le test à l’occasion d’un braquage, et j’ai gagné la course en explosant le record de vitesse Sekan - Hand Island! C’était le train des mers.
      -… vantard et matamore. Je suis déjà montée à bord de plusieurs trains, vous n’êtes pas plus rapide.
      -Ecoute, enfin, écoutez, là je peux pas être à fond, me faudrait plus d’espace pour faire une belle ligne droite et casser le mur du son. Mais j’vous montrerai plus tard d’accord. Ca fait un méga bang à Mach 1 c’est toujours grave la classe.
      -… je crois que je vais mourir broyée par les lois de la physique si vous faîtes vraiment ça. Rien que maintenant, j’ai déjà l’impression que je vais… rendre mon ventre déjà…
      -Ouais bah je peux pas faire mieux pour le confort de votre petit séant, déso’ princesse. Et entre nous, arrêtez d’essayer de me frapper les grelots, ça me fait très bizarre que vous… que vous me tapiez les fesses, non pas que je sois contre à un autre moment parce que vous êtes absolument canon, mais je pense pas que ça serait vraiment ce que vous... AAAAAAAH ! PUTAIN CA FAIT MAL !

      Jusque-là portée par-dessus l’épaule les fesses à hauteur du visage de son ravisseur, Elastasia se retrouva brusquement balancée à terre, chutant tête la première en se couvrant des mains pour se vautrer lamentablement.

      Malgré sa chute, elle ne lâcha pas la petite dague avec laquelle elle venait de frapper l’ex-corsaire en le prenant par surprise d’un grand coup dans le creux du dos. Il avait vu bien pire, ça ne le gênerait même pas. Mais putain que ça piquait... et il pissait le sang, à en croire son doigt maculé.

      -Eeeeeet évidemment la princesse a un pique couilles sur elle et j’ai pas vérifié. Crétin.

      Au moins, son appareil à Matsuya juniors était resté indemne, lui. Non pas qu’avoir une descendance fasse partie de ses objectifs de court terme, mais il y tenait quand même.

      -Ok mamzelle, t’as d’autres jouets que je dois te faire cracher ou tu vas te laisser faire ?
      -GARDES ! A L’AIDE, ON ENLEVE LA PRINCESSE, ON EST EN TRAIN DE M’ENELEVER ! GAAAARDES !
      -Ouais ouais ouais je connais la chanson.

      Elle eut beau se débattre de toutes ses forces, Elastasia se retrouva soulevée comme une brindille dont les coups s’écrasaient sur Envy sans lui faire quoi que ce soit. Et bien vite, elle s’arrêta, à force de se fracasser les poings contre sa peau de pierre. Par précaution, le pirate s’était recouvert d’une fine couche de haki pour ne pas répéter son erreur.

      -Maintenant si tu pouvais éviter de me beugler dans les…
      -GAAAAAAAAARDES !!!
      -Rhaaaaaa fait chier mais ta gueule…
      -Monsieur, si je peux me permettre ?

      Cette dernière phrase avait été prononcée par le timbre digne et succulent de Pépé Nestrelle, qui venait de se matérialiser sous les yeux de l’ex-corsaire d’un vif pas de soru. C’est qu’il avait des restes, le vieux. Matsuya le considéra un bref instant, lui et son costume impeccable, sa moustache gigantesque et sa maigre carrure. Même s’il avait des talents, il n’était rien du tout, jugea-t-il.

      -Pitié le vieux. Je suis infiniment trop fort pour qui que ce soit ici et j’ai pas envie de tabasser des papys alors j’ai pas besoin que quelqu’un s’improvise en héros.
      -Je voulais juste vous prévenir.
      -Et j’ai pas de temps à perdre, ciao bye.
      -Des ninjas, derrière vous.
      -Ouais, je sais. Allez, tchouss.

      L’ex-Envy s’élança à nouveau, disparaissant au loin. Il le savait d’entrée de jeu, que les révolutionnaires du coin étaient du style à agir au grand jour pour aider les locaux. Des ninjas, apparemment. Dans le genre pyjama bruns, cagoules, kunai et kusarigamas, à bondir de toit en toit comme des écureuils de la ville. C’était dans le plan. Ils pouvaient courir autant qu’ils voulaient, ils ne feraient que se fatiguer. En fait, ça l’amusait beaucoup de les voir essayer de le poursuivre. Pareil pour les tapis volants qui flottaient au-dessus d’eux. Comme la topographie des lieux l’empêchait de taper au maximum de la vitesse qu’il pouvait atteindre, ça lui faisait du défi. Et il adorait ça.

      La vitesse, c’était toujours relatif. Et beaucoup plus marrant quand on laissait les autres loin, loooiiiin derrière.

      *
      * *
      *

      « On y est, vous le voyez ? »

      C’est du moins la phrase que Lucius aurait voulu prononcer. Mais à la vitesse à laquelle ils étaient propulsés, avec tout l’air qui lui frappait le visage, il n’avait même pas été capable de comprendre ses propres paroles. Au lieu de ça, l’afflux d’air dans sa gorge lui souleva les entrailles, déjà bien malmenées. Non, mieux valait ne pas parler.

      -Il est juste en bas, s’exclama sans difficulté le pilote.

      Talonné par deux autres tapis qui se contentaient de le suivre sans attaquer. Parce que bon, tout le monde l’avait reconnu. Et personne n’avait la prétention de pouvoir s’en prendre à un ancien corsaire. A part-peut être un chevalier de la couronne, élite parmi l’élite du royaume, dont le vœu suprême était de protéger et servir la princesse Flemingo. Au péril de sa vie, si besoin.

      Lucius tendit un bras en direction de Matusya, déjà en décélération devant un virage en fourche qui lui faisait angle droit. Le moment idéal pour frapper.

      Un avis partagé par la bande de ninjas environnants : ils apparurent subitement de toutes parts, tant des toits que de plusieurs tonneaux et étals environnants – trois figures cagoulées émergèrent même du dessous d’une charrette. Et pour la seconde fois, Matsuya se retrouva en plein cœur d’un énorme nuage de fumée. Artificiel, cette fois. Par pur réflexe, il s’en dégagea aussitôt en fusant sur dix mètres à sa gauche, avant même d’avoir été affecté par les gaz de combat, en posture martiale, prêt à tataner quelques visages pour convaincre l’ensemble de ses poursuivants que leurs idées puaient. S'ils avaient besoin de ça, il pouvait distribuer.

      Mais personne n’osa s’approcher de lui, maintenant. Tous se contentaient de le toiser en restant sur la défensive, resserrant légèrement les rangs comme s’ils s’attendaient à ce qu’il charge dans le tas comme un crétin au lieu de continuer sa fuite.

      Le pirate voyait le genre, mais ne tomberait pas dans le piège. Son objectif était avant tout de fuir avec la princesse entre ses bras, et tant qu’il l’avait en sa possession, il n’avait aucune raison de…

      -ILS ONT SAUVE LA PRINCESSE ! FELICITATIONS, GUERRIERS DE L’OMBRE ! LA COURONNE DE LUVNEEL VOUS RECOMPENSERA AMPLEMENT POUR VOTRE LOYAUTE!

      Matusya leva les yeux. Un chevalier sur un tapis volant, qui venait de beugler ça. Ce qui était débile, puisque la princesse se trouvait toujours coincée sous son bras dr…

      Nan.

      Elle avait été remplacée par un épouvantail, fait de bois et de paille, affublé d’une longue robe bleue et d’un large sourire crayonné par ce qui devait être un enfant de quatre ans. Elastasia se trouvait maintenant sur un balcon à l’autre bout du carrefour, escortée par deux ninjas qui l’aidaient à escalader l’immeuble.

      Pendant qu’il était sous le nuage ? Aussi vite, sans qu’il ne sente rien ?

      -Nan mais… vous vous foutez de ma gu… ATTENDEZ QUE JE VOUS ATTRAPE VOUS ALLEZ VOIR SI JE PEUX PAS VOUS SUIVRE A GRIMPER MAINTENANT QUE J’AI LES MAINS LIBRES !

      D’un bond, Envy sauta sur une caisse, puis le toit d’un étal, puis attrapa un balcon, se hissa de cinq mètres d’une simple traction de bras, pour enfin se projeter vingt mètres plus loin en plein vers ses victimes. Quatre ninjas essayèrent de le bloquer lors de son ascension. Et tous rebondirent contre lui pour s’écraser en contrebas sans qu’il n’affiche le moindre effort conscient pour les écarter de lui.

      Il était maintenant sur les hauteurs, à cinq mètres de sa captive. Les ninjas brandirent leurs armes, et...

      -POUR LA COUROOOOOONNE, TAYAUUUUUT ! CHARGEZ LE FELON ! MORT AUX PIRATES, VIVE LE ROI !

      Avec la délicatesse d’un boulet de canon, l’équipage fort restreint de Lucius Flydenbourg se fracassa de toutes ses forces contre le kidnappeur, dans un fracas prodigieux où tout le poids du véhicule, en tête duquel se trouvait maintenant le chevalier cuirassé lancé à pleine puissance, se confrontèrent au tout puissant haki combatif du pirate.

      Qui s’en tira indemne, quoique surpris et extrêmement contrarié. Aux portes du pétage de câble, pour être plus précis. Il avait eu le temps d’ériger une armure intégrale, mais pas de camper sur ses appuis pour attraper le missile. Le tapis l’avait fauché net et poursuivi sa course en ligne droite avant de redresser la barre pour prendre de la hauteur, et continuer à mettre autant de distance que possible entre le pirate et la princesse. Verticale, tant qu’à faire, dans l’espoir qu’il prenne extrêmement cher au cas où il chuterait. Et coincé comme il l’était, le tapis coincé en plein torse, les jambes battant dans le vide, avec un chevalier qui faisait de son mieux pour lui coincer les bras (ça n’allait pas durer), Matusya enrageait de plus en plus.

      -Lucius !, s’exclama Elastasia en contrebas. LUCIUS!

      Des mots qui eurent l’effet d’un rayon de soleil dans le cœur du preux chevalier, qui redoubla d’ardeur face à son adversaire infiniment plus fort que lui. C’était un bras de fer qu’il ne pouvait pas gagner, mais chaque seconde qu’il tenait correspondait à plusieurs mètres qu’il espérait mortels pour le pirate.

      -JE TIENDRAI, POUR LUVNEEL ! SUR MON HONNEUR DE FLYDENBURG !
      -JE VAIS TE CREVER COMME UNE MERDE ET TU FERAS PLUS LE MALIN !
      -SILENCE, MARAUD ! POUR CITER LA DEVISE DE MON MAÎTRE D'ESCRIME : JAMAIS LE MAL NE TRIOMPHERA!
      -RHAAA MAIS TA GUEULE POMPEUX DE MERDE !

      Et très loin de cette lutte désespérée… Sigurd. Qui avait chuté du tapis lors de sa collision avec l’ex-corsaire, avait été rattrapé de justesse par un des acrobates de l’ombre, mais maintenait toujours une position fœtale de sécurité à côté d'Elastasia et de son escorte d’espions-saboteurs. L’un d’eux, le voyant vraiment vraiment mal suite à sa mauvaise chute, se pencha à sa hauteur pour prendre sa mesure.

      -Monsieur ? Dogaku ? Pouvez aider ? On aurait besoin de vous ?
      -OooooOoOoooOooooh…
      -Allo ? Vous allez bien ?
      -Eeeeeeeeeeeeeeerrbbbbbb…
      -Z’êtes vivant ?
      -Oh putain… plus jamais… p’tôt mourir… je déteste ces tapis… oh putain…

      Il roula pour se mettre à plat ventre, les yeux toujours fermés, tâtant longuement et presque amoureusement le sol de ses doigts pour en apprécier la formidable consistance et la paisible immobilité qui ne lui avaient jamais apparues aussi sûres et accueillantes qu’aujourd’hui. Plus jamais, se répéta-t-il. Que ce soit les tapis, les balais ou la prochaine farfeluerie volante qu'ils créeraient juste pour rire, jamais à cette vitesse.

      -Il va bien ?, demanda une autre en le voyant se mettre à bécoter la toiture.
      -Je crois qu’on peut le laisser, à part se noyer dans son vomi il ne risque pas grand chose. On se concentre. L’objectif.
      -Essayez de rattraper Lucius s’il venait à tomber, commanda Elastasia. Je vous en conjure.
      -D’accord. Mais vous, suivez-nous, nous allons vous cacher. Le temps que ça se calme.
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      Depuis que les forces de Kutroshinsky se sont révélées, c’est la cohue. La foule, préalablement amassée pour témoigner d’un événement joyeux et léger, est frappée par le contraste avec la scène qui se déroule sous leurs yeux : oui, ce sont bien des zombies qui viennent d’apparaître sous leurs yeux, et qui les attaquent. Alors forcément, la panique et le chaos règnent en maître. Les badauds s’entrechoquent, se piétinent, causent des commotions en essayant de faire demi-tour lorsqu’ils se rendent compte que le danger se trouve en face d’eux. Au milieu de tout ça, les miliciens Luvneelois tentent tant bien que mal de gérer les flux d’hommes, de femmes et d’enfants pour limiter les dégâts… Tout en moulinant à grands coups de sabre dans les morts-vivants comme s’ils fauchaient un blé qui repousserait à une vitesse surnaturelle. A Koneashima, TNT m’avait suffisamment préoccupé pour que j’en ai simplement eu vent par les rapports du Commandant Popov… Mais c’est bien plus impressionnant en chair, en plante et en os. A chacune de leurs morts, les végétaux qui semblent les posséder reconstituent les corps et en refermant les plaies, et ils repartent à l’assaut, encore plus déterminés. Ça fait même froid dans le dos.

      Je me disperse, quelques instants à peine. Le regard attiré par cette cohue qui m’entoure. Ce n’est pas que je suis distrait. J’essaie simplement de me renseigner sur mon environnement. Juste un bref instant. Juste le temps de graver la scène dans mon esprit. Comprendre où sont les gens, les obstacles, les potentielles menaces, afin de pouvoir combattre sans effet tunnel. C’est la base du style de combat que j’ai appris au BAN. Pourtant, cette habitude d’ordinaire salvatrice va me coûter cher. Car en un instant, Mars Hatak est sur moi, et s'apprête à me frapper de plein fouet. Pas avec une lame d’air, mais bien avec son épée. Je serre les dents, et tente de me raidir à nouveau avec le Tekkai pour encaisser, mais… Est-ce que j’aurai le temps ? Est-ce qu’il va passer à travers comme un couteau chauffé qui tranche du beurre ? Sa frappe est interrompue par un tir de fusil. Une série de coups de feu retentit alors, et bien que mon adversaire ne semble pas plus importuné que s’il s’agissait de piqûres de moustiques, ces quelques instants de relâchement me suffisent pour me mettre hors de portée.

      Bordel. Concentre-toi, Raines. Ton plus gros problème est en face de toi. Même si ce qui cause la plus grande commotion est sans doute la présence d’Envy et le fait que la princesse soit ciblée… Je dois faire confiance à la milice Luvneeloise, à Macallan et à tous ceux qui vont se battre pour elle. Je tourne la tête vers la gauche, dans la direction d’où sont venus les tirs, pour rapidement identifier ce nouvel allié. Cette nouvelle alliée, en l’occurence, puisqu’il s’agit d’une femme, dont les longs cheveux blonds virevoltent au gré du vent qui commence à se lever et à forcir. A mesure que le jour se lève, des nuages sombres sont poussés depuis l’horizon. Il semblerait que le temps, comme la situation dans laquelle nous nous trouvons, tourne à l’orage…

      La jeune femme tire à nouveau, avec ce qui semble être… Un putain de sabre-pistolet. Et puis, elle s’élance dans les airs, projette de son corps une sorte de corde ou de chaîne qui s’enroule autour d’une structure en pierre surélevée, et traverse le champ de bataille à toute allure comme si elle volait au-dessus du sol en continuant de cribler Mars Hatak de plombs. La grande classe.

      Mais hors de question de la laisser briller toute seule. Je n’ai peut-être pas de pistolame – ou quelque soit le nom de cette arme – mais je suis tout de même un combattant aguerri. Je me recoiffe sommairement, défroisse mon costume en vitesse, et bondis à nouveau au corps à corps du colosse réanimé pour en découdre.

      Sa lourde épée à deux mains, qu’il ne tient pourtant que dans une seule, décolle du sol en raclant la pierre sous son poids. Grâce à mon Kami-E, je me contorsionne et passe de justesse sous sa lame alors qu’il effectue un moulinet de grande envergure avec son poignet en la faisant passer au-dessus de sa tête. Son bras tendu se trouvant par-dessus de ma tête, emporté par l’inertie de son estramaçon, j’en profite pour contre-attaquer. J’attrape son poignet immense d’une main, et son épaule de l’autre, je contracte mes jambes et… D’une série de coups de pieds au sol, je décolle d’un Soru à toute vitesse pour lui envoyer un coup de genou fulgurant dans son coude. Ma jambe, propulsée comme un boulet de canon, vient fracasser la coudière de son armure et contacte de plein fouet son articulation. Comme lorsque j’essayais de viser son ventre, sa peau est toujours anormalement résiliente : à la fois visqueuse et dure… Si bien que je commence à me demander s’il ne possède pas un pouvoir démoniaque. Je me remets en position après mon attaque et esquive le retour de son bras. J’assène quelques frappes au niveau de son ventre et de son torse, n’ayant que faire de si certaines parties de son corps sont protégées d’une armure ou non, puis me désengage pour remettre à nouveau de la distance entre nous. Au vu de sa résistance, c’est à se demander pourquoi il porte une armure d’acier qui ne doit que le pénaliser dans sa mobilité alors qu’il a un corps plus solide que quand je suis sous Tekkai…

      Mais peut-être qu’on peut s’en servir à notre avantage. La femme-araignée au flingue-épée arrive à mon contact alors quema jambe droite tremble au contact du sol, qui est tellement douloureux. A tous les coups, je me suis explosé le genou en essayant de lui prendre le bras. En espérant que ce ne soit pas grave… Je n’aimerais pas que ma carrière s’achève brutalement sur une blessure bête. Raines en vieux fonctionnaire claudiquant et boitillant recalé à l’administratif dans un bureau miteux et qui “aurait pu devenir Amiral mais bon les croisés tu connais”, ce n’est pas vraiment ce à quoi j’aspire. Je lève le regard vers celle que je discerne désormais un peu plus clairement. Outre ses prouesses physiques, gymnastiques, et son arme qui semble sortie tout droit des laboratoires de la brigade scientifique, elle en a en plus un air sacrément badass avec ses cicatrices et son gros cigare dans la bouche. Elle, c’est une vraie bagarreuse, c’est sûr… Et j’aime ça. Elle dégage, de manière générale, une aura altière qui me laisse penser qu’elle doit être haut placée dans les rangs de la milice Luvneeloise.

      Votre mitraille ne lui fait pas plus d’effet que mes coups… Et ce n’est pas faute de les appuyer. Je commence en ramenant et en serrant ma jambe endolorie contre moi pour l’apaiser, me tenant en équilibre sur ma jambe gauche. Vous pensez qu’avec vos hommes on peut le rabattre vers la rade ? Je lui demande en assumant sa position de commandement, marque une légère pause puis reprends. Je ne vois pas comment on peut passer au travers des défenses de ce type. Je le soupçonne d’avoir un pouvoir démoniaque qui le renforce. Je pense que notre meilleure chance est de l’envoyer dans la mer.

      S’il a bien mangé un de ces fameux fruits du démon, ce sera une manière efficace et définitive de se débarrasser de lui… Et au pire, être immergé dans son imposante armure le fatiguera jusqu’à ce que ses forces le quittent. Bien que ce ne soit pas la manière dont je fais habituellement les choses, je saurais fermer les yeux cette fois-ci. Pas besoin de me retenir. Ce n’est pas vraiment Mars Hatak qui me fait face, et les quelques onces de bonté qui lui restent ne sont que des vestiges de sa personnalité d’avant. Ils ne doivent pas me faire douter. Les agents de la scientifique ont analysé le produit utilisé par ce monstre de Gluttony : ceux sur qui il a été utilisé ne reviennent pas. Il s’agit donc même de lui faire une faveur en abrégeant ses souffrances et en l’empêchant de sombrer dans les limbes d’une mémoire qui ne cessera de s’estomper.

      Je vous ai vu utiliser vos cordes toute à l’heure… Vous pensez qu’on peut le piéger jusqu’à l’eau ?
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      En voyant le plancher des vaches s’éloigner à toute vitesse, Tsmakuni commença à sérieusement paniquer. Les deux bouffons qui pensaient se sacrifier en l’emportant avec eux étaient beaucoup trop barges pour se soucier de survivre à ce qu’ils faisaient, pourvu qu’ils l’éloignent autant que possible de leur princesse. Et à ce stade, ils allaient bien y arriver. Haki ou pas, s’ils continuaient à avaler la distance aussi vite, il ne se voyait pas du tout survivre à à la dégringolade.

      Et en ce sens, il avait tort.

      Dans les grandes lignes, un corps en chute libre atteignait sa vitesse terminale après cinq cent mètres passés à être happé par la gravité. En théorie. Ce qui signifiait que l’impact subi lors de sa collision avec le sol serait le même peu importe qu’il chute de cinq cent mètres ou de trois kilomètres. A 180 kilomètres-heure en posture à plat ventre, ou 56 mètres par seconde, le choc devenait prodigieux, mais pas forcément exceptionnel pour qui avait l’habitude d’évoluer dans des strates de surhommes accros à la violence. Et en ce qui le concernait, il avait déjà survécu à pire. Il courait bien plus vite que ça, aussi. Il frappait bien plus fort, quand il mettait la charge.

      Mais ça, aucun des trois n’en était ni conscient, ni en l’état de se le mettre en tête.

      Furieux, pris d’un sursaut de frisson, l’ex-corsaire balança finalement le chevalier dans le vide d’un violent coup de bras, s’arrachant à sa prise mais aussi à la sécurité très relative qu’il avait au contact du tapis. Et c’est le plus naturellement du monde qu’il se mit à beugler comme un damné en basculant dans le vide, canalisant autant de haki que possible -avec une intensité décuplée par la panique- sous la forme d’une armure insufflée dans la moindre des fibres de son être, avec pour seul objectif d’assurer sa survie.

      Et dans toute la province, il n’y eut que Sigurd et une poignée d’autres pour avoir une idée relativement précise, en la jaugeant à l’oeil, de la distance que le corsaire parcourut comme un missile avant de percuter le sol dans un fracas abominable, se crashant contre un immeuble qu’il traversa jusqu’à son sous-sol en faisant ployer ses fondations.

      Un kilomètre deux, à peu de choses près.

      A l’inverse, c’est plusieurs milliers de personnes qui assistèrent au sauvetage miraculeux de Lucius Flydenburg, rattrapé en pleine chute par son transporteur dans une cabriole suicidaire, un plongeon en piqué dans le vide pour le récupérer. Nombreux furent ceux à applaudir et acclamer l’exploit dans toute la ville, tandis que le tapis redressait sa trajectoire en décélérant. Et ceci alors même que la milice avait fait retentir les tocsins dans chacun des quartiers de Norland, signifiant aux habitants qu’ils étaient attaqués. Le problème étant qu’ils étaient coutumiers de ces situations, et qu’ils ignoraient que leur sorcière attitrée ne serait pas présente aujourd’hui pour réceptionner leurs visiteurs. Ni que ceux-ci avaient fait leurs armes sur la route de tous les périls, même si là encore, ça n’était pas une première.

      Et avec ça…

      -C’est fini?, demanda un Sigurd maintenant assis en tailleur à scruter l’horizon dans la direction générale de la chute de Matsuya.
      -Ma main au feu qu’il va se relever et surgir en mode supervénère, répliqua un ninja. Et vouloir nous buter.
      -Ouais ils font toujours ça, surenchérit un autre. Dès qu’ils ont le haki de l’armement ils deviennent aussi increvables que des sangliers.
      -C’est pas parce que c’est des teigneux de base qu’ils développent justement ce haki en particulier?
      -Si ça se trouve il est sous le choc à cause de l’impact. On peut pas aller lui passer un petit coup dans la gorge tant qu’il est dans les vapes? Plutôt que de perdre du temps à rien faire en disant des conneries?
      -Je pense que morse et bouvreuil sont déjà dessus, à priori.
      -Qui et qui?, demanda le Dogaku en reconnaissant des noms d’animaux.
      -Deux autres équipes. Nous, nous sommes les renards. La princesse est avec carpe et tamia.
      -Ah…
      -Mais on ferait mieux de se rapprocher, objecta une autre. Vous voulez que je vous porte?
      -...

      Guère enchanté à l’idée de se faire trimballer comme un sac de patates sur des bonds de dix mètres, Sigurd accepta néanmoins la main qui lui était tendue. Ne serait-ce que parce qu’il était sur le toit d’un immeuble de quatre étages et qu’il ne se voyait pas en descendre sans aide. Alors, serrant les yeux et fermant les dents, porté à bout de bras en se recroquevillant, il s’efforça de penser à complètement autre chose -et heureusement, la dernière liste des doléances remontée par les syndicats de marins travaillant à son compte lui vint immédiatement en tête- pour oublier le doux souffle de la gravité qui murmurait des chatouilles à ses tripes.

      Et pour sa part, à plusieurs centaines de mètres de là, Tsmakuni était en train de les cracher, ses tripes. Il avait réussi. À atterrir en s’amortissant autant que possible, à préserver ses jambes et son crâne au détriment de ses bras, à ne pas perdre connaissance sous la pression des traumatismes conjugués de la douleur et du vertige qui lui vissaient encore les os et les entrailles. Il s’était relevé, mais se tenait aux trois quarts avachis contre ce qui restait d’un meuble entraîné dans sa chute au travers des étages, incapable de retrouver l’équilibre. Mais pas faute d’essayer, parce qu’au-delà de la souffrance, c’était sa hargne qui ne connaissait pas de limite.

      Il allait y arriver, ragea-t-il en fracassant un mur pour y caler son poing et se hisser de plus belle. Et s’il pouvait péter quelques mâchoires pour les leur faire bouffer au passage, il ne se gênerait plus. Ca n’était certainement pas face aux chiards d’une putain de mer bleue qu’il allait se vautrer sur un truc aussi con.

      -J’l’ai entendu gueuler, il est encore ici!, fit une voix à l’étage.
      -S’il est en état de faire du bruit il est encore dangereux, alors fais gaffe.
      -Je sais, Raoh, pas besoin de…

      Trop tard. Galvanisé à l’idée d’une menace approchante, l’ex-corsaire se retrouva parcouru de torrents d’adrénaline qui achevèrent de le revigorer. Il se redressa en un sursaut, éventrant le mur qui lui faisait face en relevant les bras, et regarda le plafond. Des gens visiblement à sa recherche qui échangeaient à voix haute en évoluant dans les décombres, des habitants terrorisés par la comète qui s’était écroulée sur eux…

      Il s’élança d’un bond, pulvérisant les plafonds sur deux étages en cueillant un ninja au passage, et recommençant à deux autres reprises jusqu’à revenir sur le toit. En haut, il balança sa victime maintenant inconsciente et désarticulée comme un sac de patates, et observa les alentours pour se resituer dans la ville.

      Moins de cinq minutes plus tôt, il était encore à courir dans les rues avec la princesse coincée sous le bras. Et sans savoir s’il avait encore un espoir de la retrouver avant qu’elle ne se cache, il aurait au moins l’impression de progresser dans sa tâche s’il parvenait à retrouver là où il l’avait vue pour la dernière fois.

      Heureusement, sa brève altercation avec les ninjas et le chevalier avait laissé quelques traces sur un certain toit qu’il reconnut très rapidement. Là, sur sa gauche.

      Alors il fonça. Et cette fois, sans se soucier de contourner les obstacles sur son chemin. Pas le moindre obstacle. Qu’il s’agisse d’arbres, de passants, de charrettes, d’omnibus, de stands ou bien des bâtiments eux-mêmes, il fusa en ligne droite comme une météorite qui broyait tout sur son chemin, si vite qu’on peinait à en distinguer sa silhouette. Mais avec les empreintes que ses pas imprimaient profondément dans les allées terreuses et les chemins pavés, avec les nuages de poussière qu’il défrichait à chaque foulée, on pouvait tout de même suivre ses mouvements. Avec trois secondes de retard.

      Cinq pâtés de maisons plus loin, il percuta le plus nonchalamment du monde la petite bande des ninjas de l’équipe renard, comme une boule de bowling défoncerait un jeu de quilles. Dans le lot, une femme se le prit de plein fouet et perdit instantanément conscience sous la violence du traumatisme, avec vingt-sept fractures à la clé. Deux autres eurent la chance de ne se faire broyer qu’un seul bras à son contact, et le reste fut envoyé bouler sans en tirer d’autre séquelle autre qu’une chute violente et diverses contusions.

      Et dans ce dernier groupe, on retrouvait un certain blondinet endimanché vêtu d’une redingote suintant l’opulence, au visage aisément reconnaissable pour avoir tenu le monde en haleine pendant deux jours, à assurer la couverture et la résolution d’une crise militaire en direct à la Dendenvision. Ou fait grand bruit dans les journaux une à deux fois par an, par divers coups d’éclat. Tout ça avant qu’on ne se penche sur le cas de ses activités professionnelles, elles aussi largement reconnues et réputées. Le Sigurd Dogaku, rien que ça. Un milliardaire saugrenu mais largement apprécié, notamment dans les strates populaires. En particulier ici, où même ses détracteurs reconnaissaient volontiers que, s’ils continuaient à aligner autant d’exploits et de services rendus à la communauté, lui et sa compagne avaient de fortes chances de rentrer dans la mémoire nationale.

      Sigurd, donc, qui venait de faire un vol plané de quatre mètres, avait tourbillonné huit fois sur lui-même avant de mordre la poussière, ne devant qu’à la chance de ne pas s’être fracassé le crâne lors de l'atterrissage. Complètement sonné, sifflant de douleur dans une large grimace, avec du sang qui s’écoulait mollement de son menton et de sa lèvre explosée. Son premier réflexe fut de vérifier que toutes ses incisives étaient encore en place tant sa mâchoire lui brûlait les nerfs. A priori présentes, même s’il avait trop mal pour être vraiment sûr. En fait, mieux valait ne pas toucher.

      Toujours à terre, il se retourna laborieusement en roulant sur le côté, pour tourner la tête en direction du corsaire dont il avait croisé le regard juste avant qu’il ne les dépasse. Sauf qu’au lieu de voir son dos, il découvrit avec horreur que Matsuya Tsmakuni se tenait maintenant à l’arrêt, face à lui, à une centaine de mètres. L’espace qui les séparait se résumait à une rue modestement fréquentée, et complètement dégagée : tous ceux qui n’avaient pas eu le malheur d’être présents sur la trajectoire de l’ex-corsaire s’étaient précipités sur les trottoirs dans un terrible mouvement de panique.

      Au large sillon de gravas qui les séparait, Sigurd comprenait que le pirate avait freiné des deux fers dans un grand dérapage abrasif pour mettre fin à sa course, malgré son inertie insensée.

      Et le corsaire le dévisageait maintenant, lui très spécifiquement, avec grand intérêt. Un immense intérêt.

      Il n’en fallut pas moins pour que le blondinet se sente terriblement menacé, pour la première fois depuis des années. Parce qu’à la tronche que tirait le pirate, il n’y avait aucun doute quant au raisonnement qui s’articulait à toute vitesse dans ses méninges. C’était un danger public qui venait tout juste d’échouer à enlever la princesse du royaume. Qui se retrouvait maintenant nez à nez avec un milliardaire renommé, largement adulé, lui aussi parfaitement rançonnable. Vu qu’à ce stade, la princesse avait de bonnes chances d’être cachée dans la ville et pratiquement impossible à retrouver…

      A défaut de remporter une médaille d’or, il ramènerait au moins celle de bronze ou d’argent. Et vu la gueule terrorisée qu’affichait sa nouvelle victime, Matsuya acheva de se convaincre de changer son plan, ou à minima de sacrifier une poignée de minutes pour capturer ce type - il verrait en fonction. Parce que maintenant, il mourrait d’envie de faire en sorte que ce gros bourgeois se pisse dessus à ramper et supplier qu’on ne le tabasse pas. Ca, et la possibilité qu’un otage de ce calibre lui serve de levier pour faire plier les défenses de la ville, s’ils voulaient qu’il reste sauf.

      Le sourire satisfait qu’il esquissa alors acheva de trahir ses intentions à Dogaku, hagard et terrifié, dont l’instinct de survie prit aussitôt le relai sans se poser de question. Son cerveau fonctionnait, et il réfléchissait. En mode automatique, presque instantanément et avec plus de clarté que jamais, dopé par d’énormes doses d’adrénaline charriées par son coeur palpitant pour le mettre en alerte.

      Il suffit que Tsmakuni esquisse un pas dans sa direction pour que sa proie dégaine aussitôt, faisant feu d’une seule balle qui se logea en pleine poitrine du corsaire. Sans traverser sa chair ni même la couche de haki qui le recouvrait intégralement. Mais avec suffisamment de force pour le faire bondir de plusieurs mètres en arrière, lui couper le souffle et donner l’impression à sa cage thoracique qu’elle venait de se faire écraser par un boulet de canon.

      Et là, le lieutenant de Gluttony s’esclaffa de bonne humeur, en souriant à pleines dents. Parce que dans l’adversité, c’était son naturel qui prenait le dessus. Or l’ex-schichibukai était avant tout une créature fière, sauvage et bagarreuse, facilement excitée par l’appel de la violence et du sang. Le bouffon qui lui faisait face venait de lui proposer de se battre, et lui avait bien besoin de se passer les nerfs vu comment tout partait de traviole.

      L’expression médusée que tirait Dogaku en voyant que l’autre avait encaissé une balle - sans broncher, putain - valait déjà son pesant d’or, mais ce n’était pas assez. Maintenant, le ravageur mourrait d’envie de lui péter la gueule.

      Tendant l’ensemble de ses muscles, il s’élança au maximum de ce qu’il pouvait faire, laissant une détonation monstrueuse à son point de départ - le mur du son, qu’il venait d’exploser dans un bang tonitruant. En un tiers de seconde, il se retrouva sur Dogaku et le désarma d’un grand coup de pied dans le bras, avec assez de force pour le soulever de terre et l’envoyer rouler en arrière - dans un cri de satisfaction rageuse qui se mêla au hurlement de douleur de l’autre. Les deux avaient chacun pu réagir à leur manière au craquement horrible qu’avait lâché son avant-bras aux os fendus sous le choc. Et il en allait de même pour l’angle sinistre et improbable qu’adoptait maintenant l’épaule déboitée du futur otage.

      Mais ça n’était que le début, se réjouit Envy en frappant à nouveau dans les flancs de Sigurd, l’amenant à exposer son ventre qu’il fracassa d’un coup de talon. Avant de lui offrir un gros mollard en plein visage.

      Et un autre coup de pied dans la face, moins fort cette fois pour ne pas le décapiter, mais quand même bien lui écorcher la tronche et lui faire regretter d’avoir voulu jouer aux cons.

      Parce que ça piquait sec, putain.

      Histoire de discuter un peu, le corsaire se pencha pour attraper sa victime fraîchement abattue, et la hisser à sa hauteur pour qu’ils puissent échanger d’homme à homme, les yeux dans les yeux. Lui faire comprendre qui dominait, et à quel point c’était une fiotte.

      Mais il n’y parvint pas, parce que ses bras refusèrent de faire le moindre geste. Trop dur. Ca n’était même pas qu’ils lui faisaient mal, parce que Matsuya était bien trop accommodé à la douleur pour se soucier de ça. C’était juste qu’il ne les sentait plus du tout.

      En une fraction de seconde, l’ancien Schichibukai avait avalé une centaine de mètres. Et dans ce même laps de temps, Dogaku lui avait expédié cinq balles dans le torse, deux dans la cuisse, trois à hauteur du foie, une autre au visage et deux dernières, des munitions nihilus vastement plus puissantes que les autres, en plein dans la poitrine.

      Le pirate avait protégé ses points vitaux en tendant les bras devant lui lors de sa course, par anticipation. Parce que le premier tir de Sigurd avait suffit à lui montrer que lui aussi était exceptionnellement rapide pour décocher des balles. Et que vu la vitesse dont ils faisaient tous les deux preuve, jamais il n’aurait eu les réflexes d’esquiver ou de parer quoi que ce soit. A ce stade là, on devinait et on anticipait, rien d’autre.

      Alors, il s’était protégé à la grosse en fonçant dans le tas.

      Et il avait pris cher.

      Connard de merde, ragea-t-il en le frappant à la cuisse.

      Pendant un bref instant, le corsaire envisagea de caler son pied sur le crâne de sa nouvelle petite chienne, et de menacer aux autres de lui exploser la cervelle si on n’obéissait pas à ses ordres : la reddition totale de toute la ville, et qu’on le laisse se barrer avec son otage. Piller toutes les banques et les cales des navires qu’ils voudraient, tant qu’à faire. S’ils échouaient à avoir la princesse, ils se referaient autrement, tant pis pour ça.

      Mais ses organes, dans un cri de douleur unifié, lui ordonnèrent autre chose : s’il ne se barrait pas d’ici au plus vite, il allait y passer, tout de suite. Et pas juste s’évanouir. Parce que le malaise lancinant, la vague de spasmes incontrôlables qui lui remuaient subitement les entrailles en cet instant précis, il ne les avait vécus qu’à de rares occasions. Et jamais de bons souvenirs.

      A observer ses bras et le peu de torse qu’exposait sa tenue du jour, les hématomes en cascade qui donnaient une teinte violacée à sa peau et ses muscles, de nombreuses commotions avaient éclos dans tout son corps, et il saignait abondamment.

      Fin du game, tout de suite. Ca urgeait.

      A ses pieds, l’autre connard, encore conscient mais plus vraiment, à l’image d’une charpie qui venait de se faire sauvagement bastonner. Et là, un doute fluctua brièvement dans l’esprit du corsaire. Il pouvait le tuer. Mais en fait, à quoi bon. D’autant plus que ce bouffon avait une très bonne réputation. Une excellente réputation à vrai dire, quand on considérait qu’il faisait davantage chier le GM qu’autre chose, et pour de bonnes raisons.

      Aussi Matsuya se contenta-t-il de lui adresser un dernier mollard pour la forme, complété d’un bon coup de pied dans la cuisse pour se passer les nerfs. Puis un deuxième. Et un troisième, parce que ça faisait du bien. Avant de faire demi-tour. A toute vitesse, sans se soucier de rien.

      Il fallait qu’il se barre, vite.

      Ce qu’il ignorait, c’est qu’il n’y arriverait pas.

      Il n’eut aucun mal à fendre son chemin au travers de la ville, ni à en faire de même pour dépasser les bourgades et villages de sa périphérie. C’est sensiblement plus loin, au beau milieu d’un champ, que son corps le lâcha, terrassé par ses blessures et l’effort qu’on lui faisait subir.

      Aux abords d’une petite paysannerie de campagne, sur un sillon dégagé qui serpentait entre trois champs. Pas très loin de la côte où attendait sagement son requin, qui aurait dû être son point de sortie pour cette opération. Il s’effondra en présence de huit vaches et d’une douzaine de laboureurs, occupés à paître et s’occuper des cultures avant qu’il ne s’écrase au milieu de tout ce monde.

      A moins que ce ne soit le contraire, il ne voyait plus très bien.

      Le soleil paraissait maintenant insupportable, à lui brûler les yeux, à lui dorer la peau. Et il avait trop mal, il devait se reposer.

      Matsuya fixa d’abord le sol, pendant dix bonnes secondes. Avant de fermer les yeux.

      Puis de les rouvrir pour fixer les quelques poils qui dépassaient de ses avants bras meurtris, en évitant de trop prêter attention à la sinistre couleur bleue qui sublimait ses muscles.

      Il était foutu, en fait. Sa seule chance maintenant, c’était qu’on le capture et qu’on lui prodigue des soins au lieu de l’exécuter. Ou de le laisser crever.

      Ca, ou alors qu’il s’en remette à sa viande et à sa bonne étoile pour qu’ils ne le lâchent pas.

      Heureusement pour lui, les spectateurs de sa déconvenue n’eurent qu’un unique réflexe : aller chercher le médecin du village. Ca, et prévenir la milice.
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      Du rififi à port Nordland Tumblr_oyuh8qz2re1w4ph5zo3_540

      海 軍

      ∆ Zombie War P2 ∆


      Se battant aux côtés du lieutenant-colonel Raines, Ambrosias attaquait ce dernier se repliait, et elle s'écartait quand il avançait. Sans même se connaître, les deux militaires arrivaient plutôt bien à se battre ensemble. Face à eux, le golgoth zombifié n'était malheureusement pas décidé à se laisser faire. Virevoltant dans les airs, la jeune femme bondissait pour esquiver les assauts terribles du pugiliste. Au bout de longues minutes, elle trouva une faille dans la défense de l'adversaire et lui porta un coup fatal. Ce ne fut cependant pas assez pour le terrasser. D'un revers du poing, il envoya Ambrosias voler dans les airs. En retombant, son crâne heurta quelque chose dur et se vue commença à se troubler. Avant de perdre connaissance, elle vit simplement Raines en finir avec l'adversaire.


      Après un temps qui lui sembla durer une éternité, la militaire commença à émerger. Elle avait de violents maux de tête et du mal à comprendre où elle était. Se rendant compte qu'elle était dans un lit, elle ne tarda pas à comprendre qu'elle était de retour chez le fameux Sigurd. Dans la chambre se trouvait assis un homme dont le visage seul émerveillait la jeune femme. Althias se leva et approcha. Le voyant venir vers elle, Ambrosias tenta tant bien que mal de se redresser en grommelant. Elle avait mal partout et l’impression d'entendre un oiseau hurler dans son crâne.




      « On vit vraiment dans un monde de fous. Attaquer la princesse un jour de fête. Quel cruel manque d'éducation.

      - Les pirates ne sont pas connus pour cela.

      - C'est sûr. Au moins elle n'a rien.

      - Rien ?

      - Pas la moindre égratignure. Hum, enfin à vrai dire je n'en sais rien, mais elle est saine et sauve en tout cas.

      - Et les ennemis ?

      - Plus là.

      - Plus là ?

      - Morts, si l'on peut dire ainsi. La milice locale et les marins venus en renfort ont une raison d'eux. Seul leur chef s'est enfui. C'était visiblement un ancien corsaire, on m'a dit son nom mais je ne l'ai mas mémorisé. Tsuma quelque chose il me semble.

      - Tsumakuni Matsuya ?

      - Oui, c'était bien ça. »



      Un ancien corsaire serait donc sous les ordres du terrible Kutroshinsky ? Deux anciens membres de Sept ensemble, ce n'était décidément pas une bonne chose.


      « Nous devons partir, je dois faire mon rapport au plus vite.

      - Du calme, je vous ai dit que vous aviez des collègues sur place, tout a déjà été réglé.

      - Combien de temps ai-je dormi ?

      - Seize heures, à quelques minutes près.

      - Bon sang... Nous devons retourner sur Tanuki.

      - Bientôt, bientôt, mais d'abord avalez quelque chose.

      - Je... Oui, merci. »



      Rester seule en compagnie d'Althias était pour elle une épreuve bien plus difficile encore que d'affronter l'ancien Envy. Fort heureusement, après avoir pris soin d'Ambrosias, le noble de Tanuki prit congé pour aller s'entretenir avec le maître des lieux. Quelques heures plus tard, le navire d'Althias appareilla en direction de leur île natale. Terriblement affaiblie, la militaire passa une bonne partie de son temps au lit à se reposer. Après Tequila Wolf, elle avait donné sur Luvneel. Pour des permissions, on pouvait dire qu'elles n'avaient clairement pas été de tout repos.




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