- Officiant non loin des lieux de leur sainteté, l’amirale en chef, Kenora Mouten, profita de l’occasion pour convoquer directement le vice-amiral plutôt que de lui passer un appel via escargophone. Leur dernière rencontre date de cet entretien aux côtés de Yamamoto et Jakku. Mauvais souvenir. L’escadre Levi fit donc une pause bien méritée à Marie-Joie. La flotte pouvait profiter de sa paie au occasion ou autres activités dont ils pouvaient jouir. Ethan, sans son bras gauche, décida de se reposer, seul, dans une des chambres qui lui étaient réservées au sein du QG. En effet, un puissant adversaire lui arracha la partie mécanique qui remplaçait son bras. Plus de l’ordre de la psychologie que du physique, une insupportable douleur lui irradiait de manière continue. Il s’enferma dans la chambre jusqu’au lendemain et insista sur le fait de ne pas être dérangé. Dans sa rage contenue, il avait tout de même donné quelques missives pour le lendemain. Une infirmière lui avait donné de quoi soulager sa douleur imaginaire et s’endormir paisiblement. Épuisé, il ne résista absolument et s’endormit dans son lit déjà plein de sueur.
Déjà debout et douché, Ethan put observer le lever du soleil de sa fenêtre. L’aube d’une nouvelle journée permettait souvent d’aborder les événements à venir avec une certaine positivité. On lui servit le petit-déjeuner et qu’il mangea avec cette vue sur la cité et la mer. Une tasse de thé au jasmin, du pain grillé, du beurre, de la confiture fraîche et des œufs brouillés. Rien de mieux pour commencer la journée dans de bonnes dispositions. Il ne se fit pas prier pour engloutir l’ensemble. Ceci étant fait, il acheva sa préparation, puis franchit le seuil de ses quartiers. Devant lui, formellement alignés, se tenait le commodore Mattlefield, la lieutenante Levi et l’ingénieure Widdershins.
« Pile à l’heure. », fit le commodore sans prendre la peine de regarder sa montre. « Vous aussi. », rétorqua Levi en observant chacun de ses accompagnants. Ils purent observer la manche gauche, vide, qui pendait et virevoltait à chaque mouvement de l’amiral. « Allons-y. », fit-il en douceur, sans rage, sans ferveur. « Une idée de ce que te veut la cheffe ?
- Pas la moindre.
- Et pourquoi y aller avec les deux nouvelles ? La cheffe risque de ne pas apprécier.
- Et ce sera regrettable. Ce sera ainsi et pas autrement. J’ai mes raisons et je les exposerai à l’amirale si elle le demande.
- Mesdemoiselles, à la fin de cet entretien, nous serons peut-être sans chef. », conclut le commodore avec le sourire aux lèvres.
Ils atteignirent rapidement la grande porte derrière laquelle attendait l’amirale en chef. Des soldats assurant la garde annoncèrent leur arrivée avant d’ouvrir la porte. Installée sur son trône, un peu plus loin dans la grande salle, Ethan aperçut déjà son regard glacial qui le transperçait de toute part. Elle arqua un sourcil en observant l’assemblée rentrer dans la pièce. Ils s’arrêtèrent tous, un petit mètre après avoir franchi le seuil de la porte, attendant l’autorisation de faire un pas de plus. « Vice-AmiralLevi, vous faisiez preuve de bien moins de tenue la dernière que l’on s’est vus. Approchez. », dit-elle de sa voix rauque, frappant frénétiquement l’accoudoir de son siège avec son doigt. « Amirale Mouten», fit le commodore en guise de salutations, tandis que Levi resta silencieux.
« Et bien, Levi, présentez-moi vos deux nouvelles recrues ! Elles sont ici pour de bonnes raisons, j’imagine ? », ce à quoi le commodore ne put réfréner un sourire taquin. « Excusez mes manières, Amirale. Je vous présence la lieutenante Levi. Elle a fait preuve d’insubordination en me rejoignant, sans autorisation, dans une mission périlleuse avant la fin de sa rééducation. En plus se mettre personnellement en danger, elle aurait pu mettre l’équipage entier dans une situation délicate. » L’amirale resta un moment songeuse. « Lieutenant Levi, hein. C’est certainement un trait de famille de désobéir aux ordres de ses supérieurs. D’après votre rapport, la mission a été un succès et vous avez essuyé moins de pertes que prévu. Enfin, si l’on ignore le premier échec du colonel Kattar… Heureusement, il a su se ressaisir et tout s’est bien terminé. », fit-elle avant de reprendre. « Lieutenante Lydia, bienvenue parmi nous. Vos compétences d’ancienne du cipher pol nous seront très utiles. Je vous souhaite d’avoir une carrière aussi brillante que celle de votre cadet, sans les bévues. Poursuivez, Vice-Amiral. » Ethan se contint et continua la présentation en pilotage automatique. « Ashlinn Winddershins, ingénieure venant de la brigade scientifique, fraîchement membre de ma flotte. Cela ne vous aura pas échappé, mon bras gauche n’a pas tenu et je compte sur elle pour le remettre en place et le perfectionner sur le long terme. Ainsi, comme la lieutenant, elle ne me quitte pas d’une semelle. »
« Vous ne prenez pas soin de votre matériel et frappez avec peu de précision, Vice-Amiral. À l’occasion, je vous montrerai comment faire. », dit-elle pour le plus grand malheur d’Ethan qui ne put dissimuler sa crainte. « Nous verrons cela plus tard. Vous n’êtes ici pour parler d’entraînement. Il s’agit de Jamal. » L’officier sentit le cœur de Lydia se soulever. « En quoi cela nous regarde, Amirale ?
- Une demande d’extraction a été faite par le directeur de son service. Il m’a semblé plus judicieux de vous le demander.
- Demandez à quelqu’un d’autre. Le monde a besoin de moi ailleurs et certainement auprès cet abruti.
- Ah ! Je vous retrouve enfin. Cependant, les autres personnes que je juge qualifiées pour cette mission ne sont pas disponibles. Vous êtes le seul, Levi.
- Qu’il crève. Je m’en moque. »
Une aura menaçante émana subitement de l’Amirale. Ethan eut l’impression qu’elle s’était levée pour le saisir par le col, mais elle ne bougea pas le moindre doigt. « N’oubliez pas quelle est votre place, Levi. Mes ordres sont mes ordres. Si je vous demande de sauver votre pire ennemi, vous y allez. Me suis-je bien fait comprendre ? » Elle était trop forte. Cette faible pression qu’elle maintenait sur lui était déjà trop forte. Il savait maintenant quel fossé les séparait. Il s’inclina respectueusement, subissant cette gravité qui pesait sur ses épaules. « À vos ordres, Amirale. »