Vol au-dessus d’un Nid de Blublu
Présent
✘ Solo
✘ Solo
Une lueur, intense et déchirant mon inconscience pour me tirer vers le réveil, traversant mes paupières pour les baigner d’une couleur orangée tendant sur le rouge. Je ne savais ni où ni quand j’étais, et que s’était-il passé déjà ? Mes paupières s’ouvrirent finalement, vision floue tout d’abord avant que mes yeux ne fassent le point et la faire revenir à une vue normale. Tournant la tête de tous côtés, je me rendis compte que j’étais dans une cabane, pas bien grande et assez sommaire. Les planches mouillées qui habillaient les murs étaient recouvertes de coquillages et de mousses, s’effritant par endroits. Quelques trous et espaces entre les planches des murs laissaient passer la lumière, celle qui m’obligeait à placer ma main devant mes yeux.
Quelques douleurs me tirèrent une grimace alors que je me relevais en position assise. Je me mis à examiner mon corps sous toutes les coutures visibles. Mes vêtements m’avaient été retirés, posés dans un coin de la pièce même si je ne voyais ni mon sweat-shirt ni ma très chère casquette. Le reste semblait être en lambeaux, déchirés en de multiples endroits et teint de rouge à tel point qu’on ne discernait plus les couleurs originales. Mon corps était couvert de bandages sanglants et, en soulevant l’un d’entre eux, j’aperçus même des points de suture quelques peu grossiers qui refermaient mes plaies les plus sérieuses.
« Bordel, c’est pas passé loin. » grommelais-je en me tournant sur le bord du lit de fortune, consistant plus en un matelas sale posé sur des vieilles palettes moisies.
Le mobilier dans la cabane était réduit et vieux, et une forte odeur de poisson régnait en maître. Il ne semblait y avoir personne d’autres dans la pièce. Je me servis d’une carafe d’eau pour me servir un verre qui rafraîchit ma gorge sèche, me levant en marchant lentement tant je sentais les sutures se tendre à chaque pas, menaçant de rouvrir mes plaies. L’affrontement de la veille avait été violent, et je ne savais pas comment cela avait pu finir. Mon équipage s’en était-il sortit sain et sauf ? Et quel avait été le destin du quartier suite à ma chute. De nombreuses personnes étaient mortes et j’espérais qu’il n’y en avait pas eut plus. En y repensant, la femme-serpent n’avait pas paru encline à continuer le carnage, ce qui me rassurait quelques peu à présent.
À l’extérieur, j’entendais les vagues s’écraser non loin de la cabane, pourtant Karantane n’avait pas de plage. Je sortais alors de la cabane en repoussant l’épaisse fourrure qui en barrait l’entrée. Tout d’abord assaillis par une lumière trop vive, je plaçais ma main en visière en faisant le point. La petite bicoque se tenait sur une large plateforme issue d’un bout brisé du pont, datant probablement du jour où Karantane avait été séparé en deux parties de pont distinctes. Le trou en question se trouvant à plusieurs dizaines de mètres au-dessus de ma tête.
« Alors comme ça t’es réveillé. » fit alors une voix féminine qui m’interrompit dans mon repérage des lieux.
Une femme-poisson venait d’apparaître au bout de la plateforme, sortant de l’eau en essorant ses cheveux noirs aux teintes bleutées. Elle était plutôt jolie, une peau gris claire, des iris d’un bleu très clair sur fond noir surplombant trois paires de branchies, ses vêtements mouillés épousaient son corps svelte et musclé.
« Euh..salut belle habitante des mers. » la saluais-je dans un sourire un peu gêné. « J’imagine que c’est à toi que je dois ma survie ? »
« C’est ça, t’imagines bien. Et ça a pas été facile, les monstres marins et les bulgoris étaient en plein festin quand t’es tombé dans l’eau couvert de sang, autant dire que pour eux t’étais le dessert. » ricana-t-elle légèrement avant d’afficher un air de fierté.
« Merci beaucoup, sans toi je me serais fais déchiqueter sans aucune pitié. » la remerciais-je en m’approchant, tendant une main faible pour une ‘présentation formelle’. « Enchanté, moi c’est Ren. »
« Nina. » répondit-elle en me serrant la main. « Retournons à l’intérieur, j’ai pêché quelques poissons ça t’aidera à reprendre des forces. » déclara-t-elle en exhibant un filet dans lequel cinq gros poissons se débattaient.
Je la suivis à l’intérieur, reposant mes jambes fatiguées en m’asseyant sur une chaise qui grinça sous mon poids. Nina se mit à préparer les poissons, les évidant et retirant les écailles et arrêtes avec minutie avant d’allumer un feu et les planter sur des bâtons pour les faire cuire. Les flammes vinrent pourlécher la viande humide qui se mit à frétiller et crépiter en emplissant l’habitat d’une douce odeur de poisson grillé. Sans que je m’en rende compte tout de suite, un filet de bave se mit à couler de ma bouche tant l’odeur était alléchante, rapidement rejoint par mon ventre qui se mit à grogner.
Une fois cuits, la femme-poisson me tendit un des poissons que j’entrepris de dévorer à pleines dents. La chair était tendre et fondait dans ma bouche, sentant quelques forces revenir alors que je finissais le premier, attaquant aussitôt un second puis un troisième.
« Eh bien, t’avais la dalle dis-moi ! s’exclama l’amphibienne, visiblement contente que sa cuisine somme toute basique plaise.
« Avec ça, je vais être requinqué en un instant. »
Et, en effet, mes forces ne tardèrent pas à revenir, me sentant comme renaître. La douleur était toujours présente bien entendu, mais au moins je pouvais de nouveau bouger un peu plus librement. Nina me servit un pichet de bière et nous passâmes une bonne heure à discuter. Malheureusement, la femme-poisson ne s’était pas enquit de la situation en haut du pont, dans le quartier attaqué quelques heures plus tôt. Toutefois, il n’y avait plus de cris, ni de fumées noires en provenant, et nous en avions déduits que la situation là-bas s’était calmée, pour le moment en tout cas.
Alors que je me requinquais allègrement à la bière, l’amphibienne me raconta un peu sa vie et je fis de même. Elle avait été navigatrice pendant de longues années, avide de découvertes et d’aventures. Toutefois, une fois sur Karantane, quelques entourloupes et arnaques avaient eues raisons de son bateau et ses richesses. Pour ne pas tomber dans la haine caricaturale envers les humains, elle préféra s’isoler dans son habitat naturel, y rencontrant quelques adversaires contre lesquels elle parvint à se faire respecter. Et, à mon tour, je lui décrivis mon parcours, du petit orphelin sans envergure de Saint-Uréa à second d’un corsaire sur Grand-Line.
Le courant passait bien entre Nina et moi et, pour une fois avec une jolie fille que je venais de rencontrer, je n’essayais pas de la draguer lourdement. En l’espace de quelques minutes, j’eus l’impression de parler à une amie d’enfance à qui je pouvais tout raconter de manière honnête. Et ainsi, nous passions une bonne partie de la journée à parler en picolant ces vieux alcools en bocaux que la femme-poisson possédait dans sa cabane.
« Et tu t’ennuies jamais ici ? »
« Parfois...enfin, souvent, mais il y a beaucoup de trucs à faire dans les parages quand on respire sous l’eau. » soupira-t-elle en observant son reflet dans son verre.
« Vraiment ? Tu m’dira, pour ce qui est des fonds marins, je peux me gratter pour les explorer. » soufflais-je en observant ma main, la serrant puis desserrant pour tester mon état, songeant à ma condition de maudit. « J’ai mangé un de ces fruits du démon qui m’empêchent de nager à vie, enfin j’ai pas à me plaindre je peux faire des trucs sympas. »
Un doigt pointé vers un coin de la pièce, il s’éclaira d’une lueur violette alors qu’un fauteuil et une commode s’élevaient doucement. Nina poussa un cri de surprise avant de faire rapidement le lien entre mon doigt enveloppé de son aura et les meubles en lévitation. J’abaissais alors le doigt et les objets se reposèrent au sol.
« Ah ouais quand même, impressionnant. » souffla-t-elle d’admiration. « J’ai déjà eus l’occasion de voir des maudits en action lors de mes voyages, mais le tien sort clairement du lot, ça fonctionne comment ? »
« On l’appelle le Zushi Zushi no mi, ou fruit de la gravité. En gros, je peux contrôler la gravité dans une zone prédéfinie. »
« Ça c’est balèze mec. Ça m’aurait bien aidé quand je me suis installée ici. »
« Des soucis avec le voisinage ? »
« Tu verrais leurs gueules, je sais pas si on peut appeler ça des voisins. »
« On parle de quel genre de... »
BOOOOMM
La cabane trembla tandis qu’un bruit tonitruant m’interrompait dans ma question, venant de l’extérieur.
« Quand on parle du bulgoris, il pointe le bout de sa trogne. » souffla Nina, visiblement agacée d’être de nouveau dérangée par ces ‘voisins problématiques’.
Fiche par Ethylen sur Libre Graph'