Sous les Écailles du Serpent
Présent
✘ Solo
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Le soleil amorçait sa chute inexorable à l’horizon, étendant ses derniers rayons sur le pont immensément long, et encore j’étais loin du compte. Nous avancions dans les rues de ce quartier de Karantane aux allures de bidonville, encore plus depuis le passage de la Confrérie du serpent à plumes qui avait laissé son lot de ruines et débris gisant ci et là en donnant une impression de zone de guerre. Et nous n’en étions pas loin, les fanatiques cannibales ayant clairement tentés d’assujettir, sacrifier et dévorer tout ce quartier pour étendre leur territoire. Par chance, je m’étais trouvé là, aux côtés d’une partie réduite de mon équipage, mais non des moindres, ainsi qu’une partie des habitants du coin afin de tuer leur plan dans l’œuf, ou avant la fin de l’omelette tout du moins.
« Il s’est passé des trucs en mon absence ? » demandais-je à mes compagnons qui étaient restés sur le pont depuis ma chute à la mer.
« Pas mal de trucs à vrai dire, y a une réunion de prévue au Hell’s Kitchen, c’est là qu’on va.» répondit Norbert en grimpant jusqu’à mon épaule pour s’y percher. « On accuse quelques pertes et les blessés sont nombreux. Ce type, le rouquin aux gros bras et au tablier de cuisine, il a été enlevé par le guerrier-jaguar et la femme-serpent, ils prévoient sûrement de le sacrifier à leur dieu.»
«Ils ont enlevés Hao ? Ces bâtards vont nous le payer.» grognais-je de façon menaçante. Je n'avais passé qu'une soirée avec ce cuistot et son pote médecin, mais leur personalité ouverte et marrante avait facilité le rapprochement. Si Karantane était peuplé de personnes de ce genre, je ne pouvais pas décemment les laisser affronter ce péril seul.
L’ambiance était tendue, j’avais rarement vu mes camarades tirer de telles tronches. Graves, en rogne, ces guerriers de tous bords avaient dû en voir des vertes et des pas mûres suite à ma disparition temporaire. Toutefois, pour me faire pardonner, j’avais ramené des renforts. Nina la femme-poisson sans domicile fixe mais qui, contre toute attente, était parvenue à mener les blugoris au doigt et à la baguette en l’espace de quelques rues. Une cinquantaine de gorilles-taureaux des mers munis d’armes lourdes qui semblaient décidés à me suivre et à faire leur preuve auprès de leur nouveau mâle alpha. C’était un peu gênant, mais pas désagréable, tant que ces créatures aux relents de poisson pourri se tenaient à quelques mètres de moi au minimum. Toutefois, c’était là une aide inespérée qui saurait sûrement faire pencher la balance des forces en présence entre nous et la confrérie du serpent à plumes. Leur attaque nous l’avait prouvée : ils avaient beaucoup d’adeptes prêts à risquer leur vie pour le culte.
« Yo Ren, impressionnant ce combat. » s’exclama le charpentier minks.
« Ouais, par contre il faisait mal le gorille. » grommelais-je en faisant jouer mes épaules pour délier les tensions musculaires. « T’as eus des nouvelles de l’équipage ? »
« Ouais j’ai reçu un coup de bigo de la part des Sweet Carpenters, ils ont trouvés le pont et devraient plus tarder. De plus, le capitaine Azerios est rentré de marineford et a rejoint sa flotte, ils sont également en route. »
« Parfait, j’espère qu’ils arriveront à temps. » répondis-je pensif.
Nos adversaires étaient nombreux, et comme me l’avait prouvé mon affrontement contre le guerrier jaguar et la femme serpent, ils possédaient des soldats puis’sants. Ainsi, plus nombreux nous serions, mieux ce serait. Et, si le sablonneux arrivait à temps pour se joindre à la fête, notre victoire était assurée. Ce dernier revenait de son adoubement au titre de corsaire, ce qui saurait nous faciliter la tâche à l’avenir. Plus besoin de taper sur les mouettes, bien que cela me manquerait bien vite. Toutefois, cela nous offrait un répit et une immunité pour nous en mettre plein les poches.
Trêves de pérégrinations, tant physiques que mentales, nous arrivions déjà dans la ruelle dévastée qui précédait le Hell’s Kitchen. L’attaque de la secte avait laissée ses marques, des traces d’armes tranchantes aux tâches de sang qui peinturluraient les murs. L’escalier en bois s’était à moitié effondré, soumit aux nombreux incendies qui avaient émergés lors et suite à l’attaque. Les murs des maisons et boutiques adjacentes étaient éventrés ou ouverts de nouvelles entrées improvisées par la bataille. De tous côtés, les habitants œuvraient à déblayer les débris et réparer les dégâts quand cela était possible, même maladroitement. Nous arrivions finalement devant les portes battantes de la taverne d’où s’élevaient de nombreuses voix agitées.
« C’est n’importe quoi ! Attendre ? Autant sauter des hauteurs du pont, moi je dis qu’il faut attaquer dès ce soir ! » s’écria une voix masculine, grave et rocailleuse.
« Attaquer de front ? T’as envie de te faire bouffer le cul par le guerrier-jaguar, Orvil ? » répondit une femme qui semblait particulièrement énervée. « On devrait faire nos bagages, redescendre à quai et traverser le gouffre pour gagner l’autre moitié du pont. On aura qu’à demander l’asile aux Conservateurs. »
« Et vivre dans le passé et le déni ?! Très peu pour moi Lorna ! »
L’entrée de notre groupe dans l’établissement fit retomber le silence, les regards se posant sur nous avec dédain. La tension était palpable, les esprits étaient à vifs. La nuit et la journée avaient été longues et les habitants du quartier avaient tout perdu. Nombre des personnes présentes au Hell’s Kitchen affichaient des bandages et stigmates du combat de la nuit passée. Certains semblaient désespérés, d’autres résignés, tandis qu’à l’opposé il y avait ceux qui bouillonnaient de rage et souhaitaient prendre leur revanche.
« Bordel, t’es qui l’albinos ? Un espion de ces putains de fanatiques ?! » commença à s’échauffer un type imposant en me voyant, rapidement calmé par une main qui se posa sur son bras.
« Du calme York, c’est grâce à ce type et ses copains si t’es toujours en vie, alors respecte son autorité, mec. » déclara Jin en apparaissant de derrière le colosse, les bras chargés de pintes de bière.
« Aaaah je préfère ça, toi tu sais accueillir tes invités ! » m’exclamais-je enjoué en délaissant le tenancier de quelques-unes de ses boissons que je distribuais à mes camarades. « Et oui, mesdames et messieurs, je suis le putain d’enfoiré de fils d’albinos qui vous a aidé la nuit dernière alors que j’avais débarqué le jour même. Pourquoi me demanderez-vous ? » demandais-je en appuyant le suspens, me rapprochant de Jin. « Parce que, à peine arrivé, ces deux joyeux rouquins m’ont accueillis à bras ouverts à grand renfort de pintes de bière. Et, je ne laisserai jamais quelqu’un qui me paye à boire dans la panade ! » terminais-je ma tirade devant l’air dépité de la foule. « Bah quoi ? »
« En parlant de ça, c’était pas gratuit mon pote... »
« Euh...donc vous parliez de vengeance, c’est bien ça ? » changeais-je alors de sujet en retournant mon attention vers la salle, prenant bien soin d’éviter le regard du médecin.
La cacophonie reprit ses droits, chacun y allant de son argument ou sa solution miracle pour régler le problème qu’était la confrérie. Un croc venimeux planté dans Karantane depuis trop longtemps, qui avait gangrené la vie de ses habitants. Enlèvements, cannibalisme et sacrifices humains, la réputation de la confrérie du serpent à plumes la précédait et, une chose était sûre, elle n’était appréciée de personne ici.
« Tous les buter, jusqu’au dernier, voilà la solution ! » reprit Orvil, un marchand opulent et ventripotent qui, malgré ses atours dorés et clinquants ne semblait pas être déprécié des habitants qui opinaient du chef à sa proposition.
« Et c’est ton seul plan ? » ricanait la dénommée Lorna, une femme de trois mètres aux bras musclés qui fumait sa pipe accoudée au comptoir.
« En parlant de plan, vous en avez un de leur quartier ? »
« Rien qui ressemble à une carte, seulement des bribes d’information. » répondit le médecin fou qui remplaçait son camarade absent derrière le bar pour servir ses invités. « Ils sont pas du genre à laisser vagabonder les gens dans leur territoire, enfin ils les laissent s’enfoncer suffisamment sur leurs terres pour les encercler et les capturer pour leurs sacrifices à leur dieu stupide. »
Les nombreuses personnes présentes dans la taverne y allaient de leur anecdote, des informations invérifiables et qui tenaient plus de brèves de comptoir que de réelle information utile. Une chose était sûre, c’est que le territoire de la confrérie était bien protégé et qu’ils possédaient des troupes en nombre. Toutefois, il en fallait plus pour m’effrayer. Des cannibales adorateurs d’un dieu caché dans la structure d’un pont ? Un simple amuse-gueule pour nous. La bataille récente sur Alabasta m’avait gonflé d’orgueil quant à la puissance des Sandstorm Pirates. Nous étions capables d’affronter n’importe quel péril et ces cultistes n’étaient pas prêts pour la tempête qui allait leur tomber dessus. Alors que la cacophonie régnait en maître dans l’établissement, je me mis à tousser dans mon poing, ne réglant pas le problème pour autant. Tout du moins, avant que je ne décide à m’imposer de manière plus concrète, ma main luisant déjà de son aura violine, Norbert se décida à le faire à ma place.
« Fermez donc vos gueules ! Mon capitaine a un truc à dire ! » s’écria le tontatta, accroché à un lustre au-dessus de la salle et des convives.
Malgré sa petite taille, l’homme-miniature avait de la voix, et l’attention des habitants se tourna vers lui avant de redescendre sur moi. À présent assis à une table, je faisais lentement couler une boisson dans mon verre pour faire monter la tension avant de reposer la bouteille et lever mon regard vers les habitants qui attendaient une parole emplie de sagesse.
« Bon, trêve de tergiversation, je crois qu’on est tous d’accord ici sur le fait qu’il faut se débarrasser de cette secte de fanatiques débiles, hum ? » commençais-je en notant les moues d’approbation de mon auditoire. « Et libérer nos potes qui se sont fait capturer hier.» continuais-je en balayant l'assemblée du regard, m'attardant sur celui de Jin qui semblait bien déterminé à buter quiconque se mettrait sur son chemin pour libérer son ami. « Okay, c’est donc décidé, cette nuit le serpent va se mordre la queue. » ricanais-je en croisant mes doigts devant moi.
Fiche par Ethylen sur Libre Graph'
Dernière édition par Ren Aoncan le Lun 24 Oct 2022 - 23:00, édité 1 fois