L'Agent Tarentule

Décrire l’Agent Tarentule ? Elle serait emplie de joie qu’on lui porte autant d’attention. Les moins observateurs la qualifieraient de femme svelte aux jambes athlétiques, de taille moyenne, avec un sourire presque constamment collé à son visage.

En effet, ce sont les aspects les plus marquants de cette grande passionnée d’acrobaties. Cependant, les plus fins d’être nous verront malgré son métier, l'agent Tarentule essaie de se démarquer en toutes circonstances. Lorsqu’elle s’habille, se déguise ou se dissimule, cette femme extravagante tente d’être la plus raffinée dans les bureaux, la mieux camouflée ou la plus invisible possible en mission. On dit souvent qu’elle peut se parer en paysanne, que les paysans eux-mêmes se demandent si elle ne vient pas de leur coin. Certaines fois, lorsque le temps lui permet, elle cout elle-même ses vêtements. La couture constitue souvent son métier de couverture, d’ailleurs.

Son style observe des récurrences discrètes. Le noir est constamment présent sur elle, qu’il soit dominant ou anecdotique. On pourrait croire à une caractéristique de deuil, mais ses rires et son énergie contraste fortement avec cette idée. Souvent, elle porte des gants et des bottes, adapté à son costume évidemment, pour favoriser sa mobilité et l’escalade.

Ce qui reste immuable dans son apparence sont ses yeux bleus et sa blondeur. Malgré tout, il lui arrive de les teindre pour des missions courtes, mais, étant une démarche assez demandante et peu gratifiante selon elle, l’Agent Tarentule préfère les voiles, les châles ou les couvre-chefs pour véritablement camoufler sa chevelure. Jamais les bonnets… elle trouve cela hideux.

Il est vrai que sa psychologie peut créer beaucoup de curiosité. L’agent Tarentule a une jovialité… particulière. Comment le dire en quelques mots… ? La représentation vivante du rire facile. Lorsqu’elle s’ennuie, cette ricaneuse fait des farces à quelques collègues, ce qui peut en exaspérer plus d’un. D’un autre côté, cette femme peut s’avérer être un très bon public. La première à rire aux blagues de comptoir, même les plus maladroites. Certains l’apprécient. Et quoi de plus charmant qu’un sourire qui vous est adressé ?

"La fin justifie les moyens" est une maxime de sa vie. L’Ordre ou de la Paix sont des choses qui la dépasse complètement. C’est une femme de terrain, pas une idéologue barbante, comme elle le dit si bien. Son travail n’est pour elle une façon de vivre pleinement ses inclinaisons et d’acquérir gloire et distinctions. Ainsi, malgré ses sourires, si vous lui êtes utiles ou dérangeants, l’agent Tarentule n’hésitera pas à vous tromper. Ses méthodes témoignent de cette sournoiserie. Usant de pièges, cherchant à avoir un coup d’avance, appuyant sur les faiblesses, elle est fière de triompher, ainsi. La confrontation directe n’a jamais été son point fort.

Poussée par l’ambition, cette blonde a une énergie impressionnante pour accomplir chacune de ses missions, même les plus banales. Elle se challenge fréquemment pour toujours progresser dans ses arts. Malheureusement, l’Agent Tarentule est amené à défier ceux qui la surpasse, comme un concours en parallèle de son boulot. Celle qui la tient encore en échec, l’Agent Amaryllis, est son défi le plus imposant et frustrant à ce jour.

Une qualité ? Il me faut réfléchir… oui. Un trait peu connu de l’Agent Tarentule, elle vit au-dessus de ses moyens. Elle méprise l’argent, sans que beaucoup ne sache ce qu’elle en fait. Mise à part ses dépenses quotidiennes en nourriture, logement, entretien de ses outils et tissus… beaucoup de tissus, le reste de sa paye est réservée à l’aumône des indigents sincères qu’elle croise. Elle décrit elle-même cette générosité comme une tradition, mais on doute que cette tradition nécessite autant de zèle.

Son passé ? Votre intérêt pour l’Agent Tarentule approche la dangerosité. Vous savez, elle n’est pas très bavarde sur son histoire et elle trompe tellement son entourage que l’on se demande si, même, ses propres souvenirs sont vrais. Allez donc lui demander, si vous y tenez tant. Elle est, peut-être, plus à même de vous répondre… mais j'en doute.

« Hihihi ! Vous avez du cran, j’aime ça. Par où commencer… ma naissance bien entendue ! Ce fut en un été, il y a une bonne vingtaine d’années, la seconde de ma fraterie de cinq autres chiards. Dans cette famille de parfumiers banale et ennuyeuse à Saint-Uréa, on m’a donné un nom… roooh ! Tellement ri-di-cule. Ahah !

Mon enfance ? Rien de bien passionnant. Une mère trop coquette, un père niais, des frères insupportables. J’évitais les tâches quotidiennes et je luttais contre l’ennuie par des jeux qui exaspérait les adultes. Oh, un drôle de souvenir m'est revenue, la colère de ma sœur ainée lorsqu’elle a découvert ma responsabilité dans la blessure du chat du quartier. Mon piège avait mal tourné, sa patte a mis quelques temps à s’en remettre. Quand je repense à sa tête ce jour-là. Hihi ! Que de nostalgie !

Oh non, j’évite de tuer les bestioles. C’est salissant et bien trop facile. Erk ! Vous savez, tant que ma vie n'est pas menacé...

Ahah ! Votre curiosité frôle l’indécence, mon cher. La parfumerie familiale me débèquetait, je préférais rendre visite aux apprentis tisserands. Mon imbécile de père s’en moquait. Pff ! Je me demande s’il a remarqué un jour qu’il se faisait allégrement cocufier par sa mégère. Hihi ! Toute la maison me haïssait et me restreignait. C'est ainsi que la liberté m’a appelé. Après une énième dispute avec ma génitrice, j’ai quitté la demeure, dans la nuit, sans regarder en arrière. J’ai quand même laissé quelques surprises à ces idiots pour marquer mon départ. Les imaginer me chercher pour me vilipender, en vain, m'avait été jubilatoire. Gnihahaha !

Après ? Après la renaissance ! Délaissant mon nom, j’ai appris tellement bien à survivre, à me défendre et à racoler dans la basse ville qu’un agent en filature me repère. Quand j'y pense, son nom ne me revient plus... je ne l'ai plus croiser, il y a un bon moment. Zut, alors ! On a dû oublié de me prévenir de son décès. Bref, en échange de bon procédé, je l’ai aidé dans sa mission, il me fait intégrer les classes du Cipher Pol. Un milieu merveilleux où tout me correspond, où j’ai excellé sans concurrence…l'épanouissement totale !

Des amourettes ? Tututu ! Ne soyez pas trop gourmand,  mon cher. Où en étais-je ? Ah oui, la partie la plus tragique de mon histoire. Je me suis prise d’amitié avec une fille de mon âge et dont j’ai accompagné les premiers pas. Que voulez-vous ? Nous faisons tous des erreurs. Cette fille abjecte oublie bien vite la gratitude et ose me faire obstacle. Ce qui la motive est aussi médiocre que naïf.

Hum. A partir de ce moment, elle est devenue ma plus vicieuse et grande rivale. Certaines humiliations ne seront pas oubliées. Quand je repense à ces fleurs, j’en rage encore ! Ce fut une source de grande déception. Une de mes plus belles robes, souillée, et ma promotion court-circuitée, ce sont les stigmates de cette confrontation.

La phase suivante n’est pas la plus joyeuse. Coincée dans des missions du même acabit, je pensais avoir loupé mon unique chance. Au fils des jours, mon sourire s'affaissait, mes rires perdaient en énergie et l'amertume devenait mon quotidien. Au bout d’un énième rapport d’infiltré collecté, je rencontrais un vieux mendiant unijambiste faisant la manche. Je m’en souviens, j’avais un déguisement de boulangère très réussie. Je me sentais si fatiguée de voir toutes mes écharpes s’effilocher. Mais, après le tintement de quelques pièces, ce vieillard me dit la chose la plus drôle que j’ai pu entendre jusque-là :
Quand j’étais jeune, je voulais aussi toucher le soleil. Mais lorsqu’il m’a brulé, je me suis réfugié dans les ténèbres. Enfin de compte, ce qui me survis jusqu’ici sont mes brulures et mes regrets.
Pouahaha ! Hilarant! Vous ne trouvez pas ? Dire que j'ai failli être aussi ennuyante que vous.

Aujourd’hui ? Ah ah ! J’ai décidé de candidater à une instance plus exigeante ! Un peu de renouveau ne fera pas de mal. Hihi ! Peu importe où je vais, je sais ce que je vaux. Et c’est plus que la majorité, les coordinateurs le savent. Cette fois, il faudra plus qu’une Petite Fleur en train de fanée pour me gênait. Je porterais autant de brulures qu’il faut pour briller. Une nouvelle toile se dessine pour la Tarentule ! Plus grande, plus sublime, plus terrifiante ! Gnihahaha ! »

Vous lui avez vraiment demandé ?! Quelle naïveté ! Vous pensez réellement qu’un agent aussi méticuleux vous dévoilera son véritable passé aussi facilement. A un inconnu, qui plus est !

Cela avait l’air vrai, vous dites ? C’est tout le talent de l’Agent Tarentule. Seule elle voit les fils qu’elle vous tend. Un conseil. La prochaine fois, éviter de l’approcher au risque qu’elle veuille un jouet facile pour se divertir.