Carnival Cruise

Costa Cabana ou l'homme-poulet comme l'appellent ses collègues. Toujours masqué la plupart du temps avec un visage de poulet, Costa n'est pas à proprement parler un homme qui détonne dans les foules. Un mètre quarte vingt, soixante-dix kilos et une silhouette bien dessinée quoiqu'un peu fine (nous n'avons pas dit maigre). Habituellement vêtu d'un jean et d'une veste de sport, Cabana a souvent tendance à produire des tics, des clacs et autres bruissements de bouche désagréables. Est-ce du au fait qu'il passe sa vie à écouter de la musique sous son masque? Possible. Pour autant on le voit venir de loin. Un type avec un masque de poulet, une veste tachée de ketchup et une démarche rebondie, cela ne court pas les rues. Surtout qu'il passe sa vie à manger, fumer, sniffer ou faire quelque chose d'étrange sous son masque. A croire que sa tête ne se repose jamais. D'ailleurs, ne dodeline-t-elle pas tout le temps un peu? Toujours vêtu d'habits simples (tee-shirts, blousons, pantalons), il n'hésite cependant pas à se saper plus dignement devant la hiérarchie (lèche oblige). Lors de ses missions, il peut parfois même faire tomber le masque. A noter que c'est rare et que lorsqu'il le fait peu de personnes en témoignent. Sous ce joli masque de latex, on retrouve donc un homme d'une trentaine d'années aux yeux bleus délavés avec une tignasse brune qui laisse jaillir quelques mèches. Sur un visage usé. Mon dieu. A croire qu'il a déjà travaillé vingt ans à la trentaine. Pourtant, son regard laisse percevoir une énergie peu commune et un humour rare, à moins que ce ne soit une trace de folie qui sait?

Droit dans ses bottes, Costa n'a que deux valeurs dans la vie. L'argent et l'ordre. Dans l'ordre que vous voulez d'ailleurs. Complètement obnubilé à l'idée de créer son agence de croisières pour sa retraite, il effectue les moindres tâches du gouvernement avec un détachement étrange et se fend souvent au beau milieu de longs silences de sentences totalement décalées. Est-il fou? A-t-il pris trop de coups dans le casque? Aucune idée mais toujours est-il qu'il est de plutôt bonne compagnie si l'on sait s'y prendre. Fermement déterminé à en finir une bonne fois pour toute avec la piraterie, il voit cependant les soldats de la marine comme des "fonctionnaires mal payés". Après tout, n'est-il pas mieux formé et mieux payé qu'eux? Si. Bon alors. De là à dire qu'il donne un sentiment de suffisance auprès des membres de la Marine, il n'y a qu'un pas. Pourtant soucieux de ne pas "trop" détonner malgré son caractère changeant et loufoque, il est par contre assez rigoureux quand il s'agit de servir ses supérieurs. De la lèche? Il y a de cela oui. C'est un véritable caméléon avec une tête de poulet. Le monde n'est pour lui qu'une immense bande-son dont il est le héros. Enfin c'est ce qu'il croit. Avouez que c'est quand même plus facile de passer 40 ans de sa vie à se croire le personnage principal du film non? Oui. Et bien voilà comment il vit sa vie. Comme un ensemble de scènes de films agencées avec de belles bandes-son. Il déteste donc par dessus tout quand quelqu'un vient couper la scène et peut un petit peu partir en vrille. En résumé, Costa a les fils qui se touchent. Et pas qu'un peu. Pour autant, il est un élément de la fonction publique parfaitement fonctionnel et veillera au grain à bien travailler pour percevoir son salaire. Une sorte de salaryman sur le fil en somme.

Né dans une famille de musiciens originaires de Saint Urea, le jeune Costa avait tout pour s'y amuser. Un grand carnaval annuel, une stabilité politique relativement longue, une famille aimante. C'est exactement ce qui se déroula pendant près d'une quinzaine d'années. Heureux de vivre avec sa mère, son frère, son père et ses soeurs, Costa vécut une vie de musicien, alternant concerts et représentations artistiques dans la ville jusqu'à se faire connaître avec son groupe, les Zoom Bas Cafew. Tout cela aurait pu être une vie relativement simple à vivre comme des hippies modernes dans une petite maison accueillante et surpeuplée. C'était son compter le grand-père de Costa, Grande Cabana, un colonel de la Marine pas franchement réputé pour son humour et son sens de la courtoisie. Dégoûté de voir son fils filer mauvais coton avec une hippie, le vieil homme avait ourdi sa vengeance pendant plusieurs années pour retrouver son fils, déserteur de la Marine et, selon la rumeur, potentiel révolutionnaire. pour lui, il avait été trahi et ce que son fils lui avait pris, il le lui prendrait également. Grâce à une embuscade bien fomenté et, surtout disons-le, grâce à un impressionnant nombre de fusils et de soldats sous ses ordres, Grande Cabana fit capturer tous ses petits-enfants en une nuit en profitant du carnaval et en mettant les voiles. Initialement outré par le comportement de l'homme qui s'avérait être son grand-père, et aussi une sacrée ordure, le jeune Costa, aîné d'un jeune frère et d'une jeune soeur, fut contraint par la menace à suivre la voie que le vieillard avait choisi pour lui. S'il voulait pouvoir un jour revoir son frère et sa soeur, il devait travailler pour le Gouvernement. Qu'à cela ne tienne. Le jeune homme rentra dans les rangs. Avec brio à vrai dire. Avec un tel brio qu'il fut affecté au Cipher Pol Cinq. Quel talent bravo ! Dès lors, il "perdit" le contact avec son grand-père et fut, après un lavage de cerveau digne du GM, affecté à de sombres opérations pendant lesquelles son sens de la cruauté ainsi qu'une certaine folie se développèrent. Son envie de revoir ses frères et soeurs, bien que forte, s'effaça peu à peu à travers les ans. Dix années suffirent à faire d'un jeune homme joyeux et amoureux de la musique une machine détraquée au service d'un gouvernement pourri, coiffée d'un masque de poulet la plupart du temps. Costa était devenu tout ce qu'il détestait le plus, un salaryman capable d'effectuer les basses œuvres du gouvernement. Et le pire dans tout ça? C'est qu'il commençait à curieusement y prendre goût. Pourtant, une part de son âme d'enfant subsistait encore et vivait à travers ses actions. Au lieu de rêver de vacances, il rêvait désormais de retraite. De fonder une agence de vacances et d'organisation de croisières. Un peu de tout ça à la fois. Et pour ça, travailler pour le gouvernement semblait être utile. La paie y était bonne et les conditions respectables. Avec un peu de chance, il pourrait même recroiser son père, sa mère... son frère et sa soeur? Oho ho ho.