Une silhouette qui s'échappe? Une porte qui grince? La guerrière rend le signe du menton de Charlie de la même manière qu'elle, puis, lance un regard furtif en direction de la fenêtre près de l'entrée. Et comme la table juste à côté est occupée, le champ de vision n'est pas très clair. Elle n'aperçoit que des brides de ce qui pourrait être un homme qui veut simplement s'aérer Ou, peut-être, souhaite t-il utiliser son Den Den Local dans un meilleur environnement? En tout cas, il n'y a pas lieu de s'inquiéter, car l'individu semble vouloir rester aux alentours. Il faut dire que la musicienne n'est pas allée avec le dos de la cuillère. À vrai dire, personne ne s'attendait à ce qu'elle conte avec un instrument. Déjà qu'en étant vêtue d'une djellaba ou d'un équipement pour traverser le désert, Akane trouve qu'elle fait particulièrement tache dans le décor avec ses longs cheveux rouges et ses katanas. Mais là, avec une telle prestation de la part du troubadour, elle peut être certaine que les gens vont leur faire des reproches, voire, les juger silencieusement ou de manière ostentatoire. Et qu'importe la façon, ce genre de comportement l'agace rapidement dans son for intérieur. Cependant, elle lutte intérieurement pour ne pas garder rancune et rester humble le plus possible. D'ordinaire, elle n'est pas très sociale, mais elle fait beaucoup d'effort pour prendre sur elle quand quelque chose le dérange, notamment, les autres.
S'approchant de celle qui a attiré l'attention, l'un des gros bras lui fait comprendre qu'elle est là pour consommer et non pour faire son gagne-pain.
— « Navré, Mademoiselle. Mais vous allez devoir ranger cet instrument et ne plus vous livrer en spectacle. »
Le videur dévisage tour à tour la violoniste et ses compagnons. En remarquant les cicatrices de la samouraï et le regard vif qu'elle dégage, il ne peut pas s'empêcher d'ouvrir la bouche.
— « Hé... »
Mêlant surprise et malice, le timbre de sa voix peut déranger plus d'un. Du moins, si une personne à quelque chose à se reprocher, il se sentirait mal à l'aise. D'un air patibulaire, le crâne rasé à blanc, il n'inspire pas la sympathie. Et pourtant, l'individu qui se présente devant le groupe de quatre fait partie d'un mouvement connu dans le monde de la restauration, la
Congrégation des Cafetiers. Il s'agit d'un réseau de gros bras déployé un peu partout sur les Blues et Grand Line. En cas de grabuge et quand la Marine tarde à venir, des gars musclés interviennent rapidement pour mettre fin au désordre et sont réputés pour leur efficacité.
— « Je vous connais. »
Après avoir bien scruté en détail le visage d'Akane, il se retire sans un mot de plus. L'ambiance devient toute de suite moins chaleureuse. La fille aux cheveux roses regard le type avec perplexité et méfiance. Considérant cela intriguant, la rousse ne sait pas quoi penser. Elle essaye de trouver une quelconque réponse dans les yeux de Cait, puis, de Roza, et enfin, de Charlie, mais aucune ne peut lui apporter une satisfaction. Bien qu'elles ignorent toutes les quatre l'appartenance de cet employé, il faut reconnaître que ça n'inspire pas confiance. Après tout, en mettant le nez dans affaires de la pègre, il faut s'attendre à des réactions particulières ou à des non-réactions, d'ailleurs. Toujours est-il que ce n'est que le début. Il faut faire preuve de vigilance et de discernement, puis, il faut savoir agir vite dans certaine circonstance. Bref, la guerrière et ses camarades ne sont clairement pas des espions, mais depuis qu'elle enquête pour les doyens de son île natale pour mettre la main sur un bien dérobé, elle apprend à se faire discrète dans ses actes et à être attentive à son environnement. Ayant le sens de l'observation, elle est capable de remarquer les choses inhabituelles, voire, de déceler dans l'attitude certain profil.
Maintenant qu'ils ne sont plus le centre de l'attention, la troupe peut se replonger dans leur commande. L'herboriste en profite pour complimenter l'artiste. Quant à la rouquine, elle reste pensive. Cet homme la connait? Personnellement? Cela ne se peut pas, sinon, elle se souviendrait. Physionomiste, elle ne voit pas de qui il s'agit. Pour elle, quand cette personne dit « Je vous connais. » cela signifie qu'il ne connaît que les histoires qu'on raconte à son sujet. Et vue l'ambiance de la taverne, ce n'est pas forcément une information plaisante à retenir. Autant, la justice peut mettre en avant ses talents en l'affichant, autant, la mafia peut faire de même en la considérant comme une bête noire à éliminer.
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« Akane? »La concernée ne réalise pas toute de suite que son amie l'appelle. Cette dernière préfère s'assurer que sa camarade soit attentive, car la dernière fois qu'un inconnu s'est approché de trop près lui a planté un couteau dans son torse au niveau du médiastin, et aux dernières nouvelles, cet assassin court toujours. Elle ne doit son salut qu'à son situs inversus. Depuis, la fille aux cheveux roses fait particulièrement gaffe à ce que rien de similaire se reproduise, sachant que cette nuit risque d'être assez éprouvant si des criminels se font légion par ici.
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« Ça va? »La samouraï se contente de faire un mouvement de tête pour lui dire que tout va bien. Alors que le serveur sert la bière de Charlie, l'homme qui s'est absenté tout à l'heure revient reprendre sa place. Et malgré le brouhaha général qui recommence, il n'est pas difficile pour la rousse d'y jeter un œil. Ou plutôt, une oreille. Son ouïe est tellement fine qu'elle peut écouter la conversation depuis sa place comme si elle était à la même table.
— « Bah alors, Rob'?! Quelle mouche t'a piqué? »
— « Désolé, Bob. J'avais une urgence. On parlait de quoi? »
— « M'ouais. »
Si l'intuition du troubadour est bonne, alors il faut croire que cette personne mystérieuse peut être une bonne piste. Maintenant qu'il n'y a rien à craindre du fait qu'il soit à nouveau là, Charlie, Cait, Roza et Akane peuvent pleinement profiter de leur repas. La guerrière ne cache pas qu'elle aimerait manger avant de passer à l'action afin d'y regagner des forces, mais surtout, elle veut encore pouvoir s'abreuver.