Alors que nous entendions la respiration de notre seconde s’apaiser, s’unir au rythme particulier des rêveurs, nous continuâmes à nous repasser ses dernières paroles en tête. D’abord en contemplant le mur de bois, puis en nous allongeant sur le dos, observant distraitement les étoiles.
Construire une famille. Nous n’y avions jamais songé. Serait-ce pour nous ? Pourrions-nous devenir une bonne mère ? Bien que notre maître eût servi de visage maternel, nous avions manqué d’un référent en la matière. Sur qui pourrions-nous prendre exemple ?
Encore fallait-il trouver une femme qui souhaitait en former une avec une autre dame. Nous nous redressâmes, considérant les braises se consumant inlassablement. D’un doigt léger, nous écartâmes une mèche de cheveux blond-platine de la joue de Lucy. Elle dormait paisiblement. Nos lèvres s’arquèrent de plaisir.
Bien, nous sortîmes de cette cabane improvisée en faisant attention de ne pas la réveiller. Dehors, nous inspirâmes une grande bouffée d’air frais. Nous avions besoin de faire quelques pas pour que le sommeil nous plonge dans sa douce léthargie.
La forêt ne bruissait pas, aucun animal n’émettait de son. Seul le ressac des vagues dans le lointain rompait le silence ambiant. Nous sourîmes à nouveau quand une réflexion s’invita. Elle prétendait se moquer du genre de la personne à son bras, mais ses envies se trouvaient fortement orientées.
Comment pouvait-on être aussi convaincu de vouloir enfanter ? Enfin, en théorie, nous le savions, mais le ressenti le plus profond, qu’en était-il ? Alors que nous effectuions quelques pas dans la clairière, une désagréable sensation nous envahit.
Nous n’étions pas seule ici. Une paire d’yeux nous observait, tapis entre les branches des arbres, nous en restions persuadée. Nous tournâmes sur nous-même lentement, cherchant avec minutie l’origine de ce sentiment lancinant.
Pourtant, nous ne trouvâmes aucune trace de cet animal caché dans l’ombre. Une certitude patente demeurait. Nous en parlerons demain à notre seconde. Pour l’heure, il valait mieux retourner sous la tente près d’elle et essayer de laisser le sommeil nous envahir.
Une fois sous les branchages rudimentairement assemblés, nous regardâmes la blonde, le soulèvement régulier de sa poitrine. Un indéniable réconfort se dégageait de la scène. Et dans la candeur du moment, nous nous entendîmes, dos à elle.
Alors qu’un frisson dû à la fraîcheur de la nuit nous parcourut, nous nous collâmes à elle. Et malgré la froideur de son métal, une chaleur rassérénante irradiait d’elle. Ce contact nous ancrait dans cette réalité. Et ainsi, cela nous rappelait que présentement nous n’étions pas seule.
Dans un sursaut, notre instinct agissant à notre place, nous nous redressâmes. Ouvrant difficilement les paupières, nous constatâmes que des singes nous faisaient face et nous chevauchaient comme si de rien n’était. En tournant la tête, nous remarquâmes que notre seconde aussi se faisait encombrer. Il nous fallut quelques instants pour réellement prendre conscience de la situation.
Cela allait constituer notre quotidien pendant un temps, il faudra s’en contenter. Alors que nous marchâmes un moment, voulant rassembler nos affaires, un des singes se rapprocha de nos gants. Bien qu’il s’en trouvait peu probable qu’il arrive à les soulever, nous ne demeurions pas à l’abri d’une casse.
Nous le devançâmes d’un instant et les récurâmes. Pas question de leur laisser. Une fois assurée de leur sécurité, nous pensâmes aux prochains objectifs à suivre. Les troncs s’étendaient vers le nord-est, envisager de longer la lisière de la forêt vers le nord nous paraissait être une bonne idée.
Nous venions du sud, perdre le cimetière de bateaux n’était pas une option. Alors, nous marquâmes plusieurs arbres de croix pour nous souvenir de notre position actuelle à l’aide d’une arrête de nos doigts de métal.
Alors que nous réfléchissions, notre bouche se fit sèche. Mission du jour : trouvé un abri plus convenable que ce fagot de bois, de l’eau et de la nourriture plus viable que des noix de coco. Derrière nous, un bruissement attira notre attention. Lucy sortit à son tour de notre cabane.
Dernière édition par Ashlinn Widdershins le Sam 11 Mar 2023 - 22:04, édité 1 fois