« Vous avez tout compris, Rosier ? » répétait la voix de l’agent Dew depuis l’escargophone qui trônait, seul, sur une table de sa cabine.
- Oui, Dew darling, répondit l’intéressé d’un ton sarcastique, j’avais même compris quand on m’a donné l’ordre de mission à Mariejoie. Avouez que vous avez juste appelé pour entendre ma voix. Je vous manque depuis notre interrogatoire hm ?
La bouche à grosses lèvres du Den Den Mushi tremblota légèrement, laissant échapper plusieurs balbutiements à peine audibles. L’agent Dew était manifestement gêné, toujours pas habitué aux avances de la nouvelle recrue du Cipher Pol. Rosier émit un petit ricanement cristallin en pensant à son collègue, à l’autre bout du fil, en train de se décomposer. Le jeune homme se servit de l’eau d’une carafe dans laquelle baignaient des morceaux de concombres ainsi que des feuilles de menthe. Depuis l’escargophone, Devin Dew s’éclaircissait la gorge et reprit tandis que Rosier but une première gorgée désaltérante.
« Vous avez les plans ? » demanda Dew sans répondre à la taquinerie de son homologue.
- Qu’est-ce que ça peut faire ? soupira Rosier en posant ses deux pieds sur une chaise adjacente. C’est pas moi qui vais construire ce foutu truc.
« C’est vous qui devez superviser la construction, c’est votre rôle, pas les matelots ! »
- Alors il sert à quoi le vice-amiral ? C’est ptet’ pas un peu beaucoup d’ailleurs de me l’avoir collé dans les pattes ?
« Du tout. Il est là pour vous surveiller, Milady. Et… »
- Vous devenez impertinent, Dew darling. Vous savez pertinemment que Milady n’a rien à voler ni à humilier sur cet endroit vide, coupa subitement Rosier en se redressant sur son fauteuil, posant brutalement son verre à côté de l’escargophone qui ne manqua pas de sursauter.
« … et s’assurer de la bonne tenue de la mission. L’île est, comme vous l’avez bien souligné, inoccupée par une quelconque faction, ce qui en fait un point de convergence pour tous. Nous devons nous assurer de notre bonne implantation sans que personne ne soit au courant. Ce qui veut dire que- »
- Ok Dew, je raccroche, byyyye ! ♪
Katcha !
L’agent Del’Mar reposa promptement le combiné du denden sur son socle, mettant alors fin à l’appel. La conversation l’avait quelque peu ennuyée, il savait ce qu’il devait faire et ne faisait que s’amuser avec son collègue. Le Gouvernement Mondial tenait absolument à ce que la mission qu’on lui avait confiée soit la plus réussie possible ; et cela se ressentait quand on voyait qu’ils avaient dépêchés le vice-amiral Fenyang pour l’accomplir. Les voiles du navire, habituellement floquées aux armoiries de la Marine, avaient été troquées pour de simples voiles blanches. Les uniformes des soldats et matelots avaient été remplacés par des tenues sobres de boucaniers explorateurs. Et le drapeau qui flottait en haut du haut mât représentait, étrangement, un grand visage rond et jaune avec des yeux enjoués ainsi qu’un sourire allègre. Tout devait être fait dans la plus parfaite discrétion pour que personne ne soit au courant que le plan émanait des instances du Cipher Pol. L’idée était simple ; Longring Longland était depuis toujours une zone de non droit qui n’appartenait à personne. Le Gouvernement Mondial voulait que cela reste le cas, mais les services secrets tenaient à y implanter une antenne d’espionnage pour glaner toutes les informations possibles sur les voyageurs de passage, qu’ils soient pirates, révolutionnaires ou simples civils.
D’un soupir lascif, Rosier se leva tout en repoussant ses bésicles noirs sur son nez pointu. Il passa une main gantée de noir dans ses cheveux en bataille avant d’attraper un grand manteau en plumes de corbeau. Le jeune homme n’enfila pas le vêtement et se contenta de le poser sur ses épaules, le laissant flotter derrière lui comme une cape. Ses manches se balançaient de chaque côté de ses épaules. Il réajusta quelque peu sa cravate au nœud piqué d’une broche en forme d’œil, l’iris en aquamarine d’un azur intense perçant quiconque la regardait un peu trop longtemps. Elle appartenait, d’après Rosier, à une Nefertari d’Alabasta qui s’était déplacée pour un voyage de plaisance sur les Blues. La vérité, c’est qu’elle était en réalité la propriété d’une aristocrate alabastienne dont tout le monde se fiche du nom, distante cousine des Nefertari, et que la broche avait été prêtée à une des princesses qui n’en avait pas tenu soin. Malheureusement pour la noble, les doigts de velours de Milady étaient passés par là, au plus grand bonheur de Rosier. Son manteau enfilé, le bel éphèbe attrapa une mallette posée à côté du denden et l’ouvrit. Il posa l’escargophone à l’intérieur, juste à côté du gastéropode de communication, plusieurs plans architecturaux soigneusement pliés. Rosier referma la mallette avant de serrer les lacets de ses bottines à hauts talons puis sortit de sa cabine.
L’air marin le frappa au visage, de même que l’effervescence qui régnait sur le pont. Longring Longland était en vue, tout le monde s’activait en prévision de la descente. Glissant ses yeux sur les matelots en plein travail, Rosier reconnaissait les quelques sbires du Cipher Pol qui, incognito, allaient rester sur l’île pour gérer l’antenne qu’ils s’apprêtaient à bâtir. La construction était audacieuse et allait tirer partie de l’anneau de Longring et de ses fréquentes marées. Le bâtiment promettait d’être un charmant mélange entre l’auberge de voyage et la boutique de ravitaillement. Le tout serait posé sur des fondations qui tenaient plus du navire qu’autre chose, afin que le tout ne se fasse pas emporter par les marées et circule régulièrement entre les différents points de l’anneau. L’antenne serait ambulante, lui conférant un certain cachet qui attirerait n’importe quel navigateur. L’idée de l’auberge espionne était venue à un administrateur qui, parcourant de vieilles archives, était retombé sur les travaux de Baroque Works, ancienne organisation criminelle d’un corsaire renégat, qui possédait un établissement du genre. Le Spider Café, qui subsiste toujours dans le désert alabastien, ayant perdu son éclat d’antan, réunissait les membres de l’organisation pour des réunions secrètes. Le Cipher Pol voulait faire de même, non pas pour s’en servir de base, mais comme vitrine attrayante. Pirates et révolutionnaires y seraient les bienvenues, bien traités et accueillis ; des agneaux dans une bergerie tenue par des loups.
-Ooooh, et voilà le meilleur bonbon de la boîte ! s’écria Rosier en apercevant le vice-amiral Fenyang, étirant sur son visage un sourire inquiétant. Hihihihi… !
Ricanant en laissant apparaître toutes ses dents, Rosier descendit l’escalier séparant sa cabine du pont, tournoyant élégamment pour éviter de bousculer un mousse en train d’attacher une corde autour d’un taquet. Achevant sa pirouette, l’agent gouvernemental porta deux doigts à sa bouche pour souffler un baiser mutin mais, au lieu de le diriger vers le vice-amiral, le laissa partir vers la mer. Une onde de choc souffla un groupe de goélands en plein vol qui, percutés de plein fouet par le baiser, disparurent sous les vagues.
- Bien reposé, deary ? Si non, je suis un excellent masseur, sachez le, huhuhu. Hmm… j’espère que, s’il y a du monde sur l’île, personne ne vous reconnaîtra. Autrement, il va falloir vous grimer un peu.
Rosier marqua une pause, son sourire se faisant plus carnassier cette fois.
- Finalement, j’espère que ça arrivera… ça justifierait que je vous maquille… ! dit-il en riant aux éclats avant d’éclater à voix haute. Allons-y, du nerf, nous avons un château ambulant à construire !
Le château ne serait qu’une auberge mais, dans son imaginaire, il la voulait royale…
- Oui, Dew darling, répondit l’intéressé d’un ton sarcastique, j’avais même compris quand on m’a donné l’ordre de mission à Mariejoie. Avouez que vous avez juste appelé pour entendre ma voix. Je vous manque depuis notre interrogatoire hm ?
La bouche à grosses lèvres du Den Den Mushi tremblota légèrement, laissant échapper plusieurs balbutiements à peine audibles. L’agent Dew était manifestement gêné, toujours pas habitué aux avances de la nouvelle recrue du Cipher Pol. Rosier émit un petit ricanement cristallin en pensant à son collègue, à l’autre bout du fil, en train de se décomposer. Le jeune homme se servit de l’eau d’une carafe dans laquelle baignaient des morceaux de concombres ainsi que des feuilles de menthe. Depuis l’escargophone, Devin Dew s’éclaircissait la gorge et reprit tandis que Rosier but une première gorgée désaltérante.
« Vous avez les plans ? » demanda Dew sans répondre à la taquinerie de son homologue.
- Qu’est-ce que ça peut faire ? soupira Rosier en posant ses deux pieds sur une chaise adjacente. C’est pas moi qui vais construire ce foutu truc.
« C’est vous qui devez superviser la construction, c’est votre rôle, pas les matelots ! »
- Alors il sert à quoi le vice-amiral ? C’est ptet’ pas un peu beaucoup d’ailleurs de me l’avoir collé dans les pattes ?
« Du tout. Il est là pour vous surveiller, Milady. Et… »
- Vous devenez impertinent, Dew darling. Vous savez pertinemment que Milady n’a rien à voler ni à humilier sur cet endroit vide, coupa subitement Rosier en se redressant sur son fauteuil, posant brutalement son verre à côté de l’escargophone qui ne manqua pas de sursauter.
« … et s’assurer de la bonne tenue de la mission. L’île est, comme vous l’avez bien souligné, inoccupée par une quelconque faction, ce qui en fait un point de convergence pour tous. Nous devons nous assurer de notre bonne implantation sans que personne ne soit au courant. Ce qui veut dire que- »
- Ok Dew, je raccroche, byyyye ! ♪
Katcha !
L’agent Del’Mar reposa promptement le combiné du denden sur son socle, mettant alors fin à l’appel. La conversation l’avait quelque peu ennuyée, il savait ce qu’il devait faire et ne faisait que s’amuser avec son collègue. Le Gouvernement Mondial tenait absolument à ce que la mission qu’on lui avait confiée soit la plus réussie possible ; et cela se ressentait quand on voyait qu’ils avaient dépêchés le vice-amiral Fenyang pour l’accomplir. Les voiles du navire, habituellement floquées aux armoiries de la Marine, avaient été troquées pour de simples voiles blanches. Les uniformes des soldats et matelots avaient été remplacés par des tenues sobres de boucaniers explorateurs. Et le drapeau qui flottait en haut du haut mât représentait, étrangement, un grand visage rond et jaune avec des yeux enjoués ainsi qu’un sourire allègre. Tout devait être fait dans la plus parfaite discrétion pour que personne ne soit au courant que le plan émanait des instances du Cipher Pol. L’idée était simple ; Longring Longland était depuis toujours une zone de non droit qui n’appartenait à personne. Le Gouvernement Mondial voulait que cela reste le cas, mais les services secrets tenaient à y implanter une antenne d’espionnage pour glaner toutes les informations possibles sur les voyageurs de passage, qu’ils soient pirates, révolutionnaires ou simples civils.
D’un soupir lascif, Rosier se leva tout en repoussant ses bésicles noirs sur son nez pointu. Il passa une main gantée de noir dans ses cheveux en bataille avant d’attraper un grand manteau en plumes de corbeau. Le jeune homme n’enfila pas le vêtement et se contenta de le poser sur ses épaules, le laissant flotter derrière lui comme une cape. Ses manches se balançaient de chaque côté de ses épaules. Il réajusta quelque peu sa cravate au nœud piqué d’une broche en forme d’œil, l’iris en aquamarine d’un azur intense perçant quiconque la regardait un peu trop longtemps. Elle appartenait, d’après Rosier, à une Nefertari d’Alabasta qui s’était déplacée pour un voyage de plaisance sur les Blues. La vérité, c’est qu’elle était en réalité la propriété d’une aristocrate alabastienne dont tout le monde se fiche du nom, distante cousine des Nefertari, et que la broche avait été prêtée à une des princesses qui n’en avait pas tenu soin. Malheureusement pour la noble, les doigts de velours de Milady étaient passés par là, au plus grand bonheur de Rosier. Son manteau enfilé, le bel éphèbe attrapa une mallette posée à côté du denden et l’ouvrit. Il posa l’escargophone à l’intérieur, juste à côté du gastéropode de communication, plusieurs plans architecturaux soigneusement pliés. Rosier referma la mallette avant de serrer les lacets de ses bottines à hauts talons puis sortit de sa cabine.
L’air marin le frappa au visage, de même que l’effervescence qui régnait sur le pont. Longring Longland était en vue, tout le monde s’activait en prévision de la descente. Glissant ses yeux sur les matelots en plein travail, Rosier reconnaissait les quelques sbires du Cipher Pol qui, incognito, allaient rester sur l’île pour gérer l’antenne qu’ils s’apprêtaient à bâtir. La construction était audacieuse et allait tirer partie de l’anneau de Longring et de ses fréquentes marées. Le bâtiment promettait d’être un charmant mélange entre l’auberge de voyage et la boutique de ravitaillement. Le tout serait posé sur des fondations qui tenaient plus du navire qu’autre chose, afin que le tout ne se fasse pas emporter par les marées et circule régulièrement entre les différents points de l’anneau. L’antenne serait ambulante, lui conférant un certain cachet qui attirerait n’importe quel navigateur. L’idée de l’auberge espionne était venue à un administrateur qui, parcourant de vieilles archives, était retombé sur les travaux de Baroque Works, ancienne organisation criminelle d’un corsaire renégat, qui possédait un établissement du genre. Le Spider Café, qui subsiste toujours dans le désert alabastien, ayant perdu son éclat d’antan, réunissait les membres de l’organisation pour des réunions secrètes. Le Cipher Pol voulait faire de même, non pas pour s’en servir de base, mais comme vitrine attrayante. Pirates et révolutionnaires y seraient les bienvenues, bien traités et accueillis ; des agneaux dans une bergerie tenue par des loups.
-Ooooh, et voilà le meilleur bonbon de la boîte ! s’écria Rosier en apercevant le vice-amiral Fenyang, étirant sur son visage un sourire inquiétant. Hihihihi… !
Ricanant en laissant apparaître toutes ses dents, Rosier descendit l’escalier séparant sa cabine du pont, tournoyant élégamment pour éviter de bousculer un mousse en train d’attacher une corde autour d’un taquet. Achevant sa pirouette, l’agent gouvernemental porta deux doigts à sa bouche pour souffler un baiser mutin mais, au lieu de le diriger vers le vice-amiral, le laissa partir vers la mer. Une onde de choc souffla un groupe de goélands en plein vol qui, percutés de plein fouet par le baiser, disparurent sous les vagues.
- Bien reposé, deary ? Si non, je suis un excellent masseur, sachez le, huhuhu. Hmm… j’espère que, s’il y a du monde sur l’île, personne ne vous reconnaîtra. Autrement, il va falloir vous grimer un peu.
Rosier marqua une pause, son sourire se faisant plus carnassier cette fois.
- Finalement, j’espère que ça arrivera… ça justifierait que je vous maquille… ! dit-il en riant aux éclats avant d’éclater à voix haute. Allons-y, du nerf, nous avons un château ambulant à construire !
Le château ne serait qu’une auberge mais, dans son imaginaire, il la voulait royale…