L'aube d'un nouveau départ

▬ Je n'arrive pas à croire que ton « vœu » ait eu une réponse.
▬ Moi aussi, mais écoute, on va pas s'en plaindre.
▬ Encore faut-il s'assurer que ce n'était pas totalement des paroles en l'air.

Kaito hocha la tête, plus excité que jamais. Après avoir profité joyeusement du festival proposée par l'impératrice Kiyori, les Intrépides Libres s'était tranquillement préparés à laisser leur barque les relancer sur la dérive des vents marins, dirigés d'après les dires du capitaine pirate vers leurs prochaines aventures merveilleuses. Cependant, plus ils y pensaient, plus l'équipage ne pouvait que reconnaître que ce simple bateau ne tarderait pas à ne plus le suffire s'ils souhaitaient poursuivre leur traversée du monde. C'était même à peine s'ils pouvaient traverser les Blues en toute tranquillité.

En venant sur Kanokuni, quelque part, les Intrépides Libres espéraient mettre la main sur une solution à leur petit problème de transport, même si malheureusement leurs maigres finances n'étaient pas là pour les aider. Quelque part, une mission impossible les attendaient sur place, avec une finalité fort probable où ils devraient commettre un larcin de plus pour repartir comme ils l'espéraient.

C'était là que l'urne à vœux de l'impératrice était apparu, comme par miracle, devant les yeux de Kaito, se disant avec amusement – et un peu par dépit – qu'il pouvait au moins espérer que son « ami avec bénéfices » pourrait venir en aide à ce pirate sans navire à commander. Une tentative qu'il savait pourtant inutile, sinon pour donner de l'espoir aux jeunes citoyens innocents et naïves dans leur futur à venir.

Pourtant … La réalité était là. Au petit matin de leur départ, devant sa chambre, ce simple petit papier l'attendait, patiemment, pour lui annoncer cette nouvelle qu'il n'attendait pas mais qu'il espérait un peu au fond de lui. Quelques simples petits mots, mais qui signifiaient grandement pour le jeune homme, tout comme pour ses camarades qui s'étaient empressés de le motiver à aller voir ce qu'il en était réellement.

▬ Ce doit être celui-ci.
▬ Il est … petit.
▬ C'est toujours mieux que l'Aventurier.

Fixant la belle caravelle à tête de tigre, les Intrépides Libres restèrent perplexe face à cette dernière, se demandant s'ils voyaient flou ou bien s'ils ne s'étaient pas trompés sur la marchandise. Kaito lui-même accorda une relecture aux informations qui lui avaient fourni en marge de la lettre afin de reconnaître son nouveau bateau, et ne put que constater que cela correspondait bel et bien à celui qu'ils avaient en face d'eux, tranquillement amarré comme tant d'autres navires le long du port.

D'ailleurs, bien que mesurant plusieurs dizaines de mètres, il était difficile de ne pas se dire qu'il pouvait faire pâle figure à côté des galions et des navires de guerre du pays qui se trouvaient tout autour. C'en était presque à se demander pourquoi il avait été mis là … Le capitaine pirate finit très vite par se dire qu'il s'agissait simplement d'un moyen de les aider à repérer plus vite l'embarcation, et se contenta ainsi de passer à autre chose, invitant ses amis à le suivre pour monter à bord.

En arrivant au niveau de la planche pour grimper sur le pont, le sabreur ne tarda pas à remarquer que quelques regards des marins à terre – en train de visiblement monter les dernières provisions – se tournèrent instinctivement vers eux, le regard plein de défiance et de curiosité. Le pirate ne s'en occupa cependant guère et continua sa progression calmement, parvenant jusqu'au pont inférieur où, en sautant à bord, il attira cette fois l'intérêt d'une bonne vingtaine de matelots à l'air mauvais, qui commencèrent aussitôt à l'entourer, certains s'emparant de bâtons et de cordes qui leur passaient sous la main, signe évident de leur hostilité. L'un d'eux, un peu plus mastoc que les autres, s'écarta du groupe, faisant alors face aux Intrépides Libres – les autres ayant rejoint le kanokunien peu de temps après – avec un air patibulaire.

▬ Qu'est-ce que vous v'nez foutre par ici, les touristes ? On fait pas la visite guidée, ici.
▬ Pas plus qu'on fait boutique itinérante ! R'partez sinon ça va mal tourner pour vous !

Kaito ne put se retenir d'un large sourire comblé. Ce qu'il avait en face de lui, c'était très certainement l'équipage qui détenait jusqu'alors le bateau. Et maintenant que l'impératrice Kiyori lui en avait donné la charge, cela en faisait légitiment … Son nouvel équipage. Rien qu'en y pensant, lui qui avait espéré pouvoir changer les Intrépides Libres en un véritable équipage pirate, voilà qu'il tenait là l'opportunité pour y parvenir ! Intérieurement, il jubila, mais se retint de le montrer, se contentant de maintenir son sourire en paraissant le plus amical possible.

▬ Cela vous surprendra peut-être, mais je suis le nouveau capitaine sur ce navire.

A cet instant, tous les marins se turent, affichant un air époustouflé mêlée à de l'incompréhension. Puis après quelques instants, ils se mirent tous à rire aux éclats, voyant alors la réponse du pirate comme une blague de mauvais goût, si ce n'était pire. Restant ainsi à se moquer d'eux pendant un long moment, Sarah et les autres commencèrent à se sentir légèrement gênés par la situation, se demandant alors s'ils ne s'étaient pas finalement trompé d'embarcation.

Une réaction loin d'être celle de leur capitaine, qui se contenta de lancer un regard tout autour de lui avant d'observer la vigie et de sourire de plus belle, amusé mais affichant un regard plein d'assurance. Pile au moment où il fit cela, une ombre jaunâtre sembla émerger du haut du mât principal, descendant rapidement jusqu'au pont où tout le monde se trouvait, faisant aussitôt stopper les rires des matelots qui se tournèrent vers ce nouvel arrivant.

▬ Cap'taine ???
▬ Ce n'est plus mon titre.

Le matelot s'écarta en se confondant rapidement en excuse, laissant comme ses camarades la place à ce qui se révélait être le véritable chef à bord, à la grande surprise des Intrépides Libres un homme au physique très atypique, rappelant celui d'un léopard pour les rares qui en auraient déjà vu dans les livres. Kaito, à cet vision, tendit instinctivement le bras par politesse, attendant que ce nouvel arrivant vienne à lui rendre la pareille. Ce qu'il fit, affichant à son tour un air amusé.

Leonidas

▬ Je m'appelle Leonidas. Je suis un mink. On m'a fait savoir votre venue il y a peu. Bienvenue sur votre nouveau navire.
▬ C'est bon à savoir ! Je suis Kaito Yamamoto, et voici mes amis Sarah Clayton, Peter Scott et Lucius. Nous formons ensemble les Intrépides Libres.

Les deux hommes se lancèrent un regard mutuel avant de lâcher la poignée de main que le capitaine pirate et l'homme-bête maintenaient depuis quelques secondes, ce dernier ne tardant pas à inviter le quatuor à le suivre vers le pont supérieur et ce qui semblait être une grande cabine extérieure.

▬ Mais … Cap'- … Chef, qu'est-ce qu'il se passe ?

Le marin, resté légèrement en retrait, ne manqua de s'offusquer – bien vite imité par ses camarades – et surtout de chercher à comprendre pourquoi leur capitaine agissait aussi bizarrement face à ces inconnus. Leur bateau ? Des foutaises, selon eux !

▬ Je passe la main, comme on me l'a demandé.

Sans plus de mots, le mink reprit sa marche, espérant fuir l'interrogation de son homme, mais celui-ci ne put que se montrer insistant à ce propos. En voyant cela, Kaito soupira et se tourna vers Sarah.

▬ Je crois qu'il va falloir leur expliquer la situation très clairement. Je peux te faire confiance avec les autres pour faire ça ?
▬ Tu sais bien que c'est une question rhétorique.

Accompagnant ses paroles, la jeune femme sortit sans hésitation sa rapière, faisant alors face aux marins qui gloussèrent tous à l'unisson en sentant le regard sérieux et implacable d'une Sarah prête à leur faire comprendre qui ils étaient par tous les moyens. Certains hésitèrent à répondre à cette pression par une attaque, mais se ravisèrent, sentant que Lucius et Peter, ayant bien compris ce qu'il en retournait, se tenaient prêts eux aussi à les remettre en place un à un.

Rassuré de voir que sa seconde avait les choses en main, le capitaine pirate rejoignit rapidement Leonidas dans la grande cabine, qui se révélait être presque une petite maison, avec diverses pièces dont des chambres, mais surtout un grand salon qui faisait certainement office de salle de réunion, avec sa table ronde centrale et surtout son grand canapé où le mink vint à s'installer calmement, fixant alors le sabreur avec un regard sérieux et curieux.

▬ Alors, que comptes-tu faire de nous ?
▬ Comment ça ?
▬ Malheureusement, nous sommes à la merci de l'impératrice. Et si elle vous a confié ce bateau, c'est qu'elle souhaitait se débarrasser de nous.

Kaito haussa un sourcil.

▬ Je ne vois pas pourquoi je ferai une telle chose.
▬ Vous m'en voyez ravi.

Plutôt calme, le mink se surprit à cet instant à un long rire, comme soulagé d'un poids. Il retrouva cependant bien vite sérieux.

▬ Mais qu'est-ce que vous allez faire de nous, réellement ?
▬ Hmm …

Le capitaine pirate commença à réfléchir, laissant clairement apparaître son intense réflexion. Un geste qui amusa de nouveau Leonidas, d'autant plus lorsque vint sa réponse.

▬ Déjà, qui êtes-vous ?
▬ Des pirates.
▬ Et vous l'avez toujours été ?
▬ Oui.
▬ Et … C'est la vie dont vous rêvez ?
▬ Pas vraiment, mais on ne connaît que ça.

Kaito laissa apparaître son grand air satisfait.

▬ Dans ce cas c'est tout vu pour moi ! Je vous prends dans mon équipage !
▬ ...

Le mink resta muet face à cette annonce, fixant simplement le kanokunien qui se demanda un instant s'il avait bien fait de se montrer enthousiaste aussi vite. Fort heureusement pour lui, son interlocuteur ne tarda pas à se lever pour venir poser une main amicale sur son épaule.

▬ Dans ce cas, je te fais confiance, capitaine.

Sans plus de cérémonie, Leonidas vint alors à se retirer, laissant Kaito seul dans la grande pièce pour aller s'occuper d'autres affaires, probablement sur le bateau. Ce dernier, content mais un peu perturbé par les répliques du mink, revint ainsi sur le pont inférieur, trouvant ses trois amis face à un groupe posé en tailleurs face à eux, silencieux.

▬ Je vois que vous avez fait plus ample connaissance.
▬ C'était plutôt amusant.

A cet instant, le capitaine pirate vint infliger une petite pichenette amical sur le front de sa seconde, prenant alors la charge de la situation.

▬ Relevez-vous, matelots. La situation est-elle plus claire pour vous maintenant ?
▬ ...

Le groupe de pirates ne répondit pas, se contentant de se relever comme demandé, tantôt lançant un regard apeuré en direction de Sarah, tantôt cherchant Leonidas qui ne tarda pas à se montrer sur le pont supérieur, se posant en tant que simple spectateur de la situation.

▬ La madame nous as juste forcé à nous asseoir et à écouter ses présentations de votre équipage.
▬ Dans ce cas, je n'ai nul besoin de refaire les politesses. Bienvenue dans les Intrépides Libres !
▬ ... Hein ??
▬ ... Cap'taine ?

A l'annonce de Kaito, l'ensemble du groupe se tourna vers leur chef, qui ne réagit pas plus qu'un simple mouvement d'approbation.

▬ Le capitaine c'est moi maintenant ! Le mot d'ordre avec moi, c'est liberté ! Nous allons partir à l'aventure et vivre nos rêves, est-ce que c'est bien compris ?

Une nouvelle fois, le groupe de larbins resta muet, mais cette fois, Leonidas réagit, levant le bras en l'air en se laissant porter par l'enthousiasme du sabreur. Ce geste, après quelques instants, finit par motiver d'abord une petite partie du groupe, puis l'ensemble des hommes, qui ne comprenaient pas totalement ce qu'il se passait, mais qui faisaient très vraisemblablement confiance à leur chef. Une attitude facile à décrypter pour le jeune homme.

▬ Si cela peut vous rassurer, votre « cap'taine » restera votre supérieur direct. Je ne suis que celui qui indiquera la direction globale à suivre.
▬ Et je serai là pour aider à ce qu'il soit entendu.
▬ Arrête, tu vas les faire complètement flipper.
▬ Ce n'était pas le but ?

Nouvelle pichenette. La jeune femme avait beau être d'une grande perspicacité et d'une grande intelligence, il n'en restait pas moins qu'elle pouvait parfois se montrer très rude dans ses agissements. Quelque part, ce n'était pas une mauvaise chose, surtout en tant que seconde de son équipage, mais dans le cas présent …

▬ Je ne tiens pas à faire peur à nos nouveaux amis. Tu te rappelles ? Tous les Intrépides Libres sont égaux en amitié.
▬ ... Oui, c'est vrai.
▬ C'est une étrange façon de voir les choses.
▬ Tu t'y feras bien vite, Lucius.
▬ Si tu le dis.
▬ En attendant, je suis votre nouveau capitaine, et mes commandants dont fait désormais parti votre « cap'taine » sont mes amis, et les amis de mes amis sont aussi mes amis !

Face à cette affirmation, les matelots furent stupéfaits, lançant de nouveaux des regards d'incompréhension vers leur chef qui choisit cette fois de sauter jusqu'au pont inférieur pour faire face à ses hommes, un air dominant se dégageant très clairement de lui.

▬ Je lui fais confiance, comme le capitaine nous as fait confiance.

Soudain, les pirates qui s'agitaient à mesure que les secondes passaient, ne sachant exactement quoi penser de ce qui leur arrivait, se turent, leurs gloussements face à la réplique de Leonidas se faisant entendre de tous. Kaito, s'il ne pouvait en deviner toute l'histoire, comprit à cet instant que le mink venait très probablement de leur rappeler un passé qui les avaient profondément touché.

▬ Croyons en lui, ça sera toujours mieux que notre situation actuelle, vous ne pensez pas ?
▬ Et puis je n'oblige personne à rester. Libre à vous de refuser de nous suivre dans nos aventures, sachez seulement que nous ne repartirons pas sans ce bateau.

Les deux pirates se fixèrent un court instant avant de serrer respectueusement la main.

▬ Tu peux compter sur moi.

Une parole qui n'était clairement pas lancée en l'air. Le kanokunien sentit que Leonidas parlait avec sincèrement, comme s'il comprenait le jeune homme, comme s'il avait su percé à travers ses pensées. Sur ce point, il lui paraissait même encore plus perspicace que Sarah, qui d'ailleurs observait leur poignée de main avec une certaine appréhension, comme si elle se disait qu'elle se ferait prendre son poste de seconde – un instinct qu'elle-même ne percevait pas. Kaito s'en amusa, mais porta bien plus sa concentration sur la réaction des matelots qui se regardèrent tous en cherchant à savoir ce qu'ils allaient faire, puis fixèrent une dernière fois leur chef avant de sourire.

▬ Nous suivrons le cap'- le chef jusqu'au bout !
▬ Dans ce cas, bienvenue dans l'équipage, les gars !
▬ Ouais !!

D'un seul coup, l'ambiance plutôt pesante installé par la peur et l'incrédulité des marins se changèrent en un enthousiasme percutant, tous les hommes s'en repartant aussitôt à leurs activités comme si de rien n'était.

▬ ... Qu'est-ce qu'il vient de se passer à l'instant ?
▬ Ils sont repartis bosser.
▬ Oui, merci monsieur évident.

Peter sourit, amusé de sa remarque, avant de demander à Kaito ce qu'ils devaient faire. Celui-ci leur indiqua d'essayer de récupérer quelques-uns de leurs nouveaux camarades pour aller ramener l'Aventurier et embarquer leurs affaires, ce qu'ils firent. Pendant ce temps, le capitaine pirate s’intéressa à Leonidas qui observait ses hommes avec une fierté non dissimulé.

▬ Je vois qu'ils te respectent beaucoup.
▬ Ce n'est pas moi qu'ils respectent, juste mon image.
▬ Tu parles de ce fameux capitaine que vous leur avez mentionné ?

En entendant cela, le mink rigola légèrement avant d'attraper un tricorne qu'il avait posé délicatement après l'avoir probablement récupéré dans sa cabine, le montrant alors au jeune homme et à sa seconde.

▬ Notre capitaine était un optimiste. Il nous as tous tiré de la misère, un à un, pour devenir « de bons pirates » comme il disait.
▬ J'ai l'impression d'avoir déjà entendu cela …
▬ ... Et je suppose que tu étais son second ou quelque chose du genre ?
▬ Oui. Mais j'étais avant tout un homme du capitaine. Lui avait pour objectif de protéger et de sauver tous les opprimés de la piraterie, moi je ne faisais que l'y aider pour rembourser ma dette envers lui.

Le mink soupira longuement avant de reprendre, ne laissant par Kaito ou Sarah poursuivre même une seconde.

▬ Cependant, nous appréciions sa détermination. Alors lorsqu'il est mort, nous avons continué de mener son combat sans hésitation, et on m'a forcé à prendre sa place de capitaine.
▬ D'où l'image que tu renvoies.
▬ Exact.
▬ Attends … Ton capitaine est mort ?!

Reposant le tricorne, Leonidas vint à se poser sur un tonneau, traversé par des émotions contraires d'indifférences et de tristesse.

▬ Cela fait un petit moment maintenant. Ne vous inquiétez pas de cela, notre deuil est depuis longtemps passé.
▬ Mais … Tout de même …

La navigatrice ne put se retenir d'aller faire un câlin à l'homme-bête qui la laissa faire, feignant l'indifférence même si Kaito put facilement sentir qu'il appréciait ce geste.

▬ En tout cas, ses rêves continuent de vivre à travers nous, même si notre capture par l'impératrice nous a forcé à les mettre de côté pendant quelques temps.
▬ Ceci explique la méfiance de tes hommes, j'imagine.
▬ On peut dire cela. Mais nous ne faisons surtout pas confiance à n'importe qui.

Le capitaine pirate sourit de plus belle, comprenant que son intuition ne s'était pas trompé.

▬ Pour être tout à fait honnête, ma réelle confiance envers vous reste encore à forger, mais je dois bien avouer qu'en vous voyant, vous me rappeliez le capitaine à l'époque. Optimiste, jovial, du genre à partir à l'aventure sans se soucier du reste sinon que nous soyons tous heureux.
▬ Et c'est peu de le dire !

Sarah, qui sentait que Leonidas complimentait son ami, ne put se retenir de vouloir ajouter à l'encens, comme pour marquer sa position auprès de ce dernier. Une réaction qui eut pour récompense une nouvelle pichenette du sabreur, pour lui rappeler qu'elle n'avait pas besoin de cela pour prouver sa valeur.

▬ Je ferai en sorte que cette confiance ne soit pas en vain … Vous avez des rêves à accomplir ?
▬ On a toujours avancé au feeling de nos explorations sur les Blues, même avec le capitaine.

Kaito commença subitement à interroger le mink, cherchant à savoir ce qu'ils comptaient faire auparavant, s'ils n'étaient pas arrivés pour les prendre dans les Intrépides Libres. Malheureusement, leur situation était évidente, et le capitaine pirate réalisa rapidement qu'ils étaient un peu perdus et sans réel objectif en tête.

▬ C'est regrettable … Mais pas d'inquiétude, vous trouverez bien quelque chose au cours de nos futures aventures, j'en suis certain !
▬ Tu m'en vois ravi.
▬ Puis au pire, on se contentera de vous aider à sauver d'autres personnes pour votre groupe.

Le mink se contenta d'un hochement de tête pour remercier l'intérêt que pouvait porter le jeune homme à leur mission personnelle. Lui qui s'attendait à devenir un pur larbin comme un autre après le passage du messager de l'impératrice Kiyori, voilà qu'on lui proposait de pouvoir de nouveau poursuivre cet objectif qu'il s'était promis d'accomplir au nom de son capitaine. C'était presque un rêve.

▬ Au fait, votre petit groupe doit avoir un nom d'équipage non ?
▬ Ahem …

A cette question, le Leonidas tout euphorique se montra d'un seul coup assez gêné, mais après quelques instants, il se décida à répondre.

▬ Le capitane nous appelait « Les porteurs d'espoir ».
▬ C'est stylé ça ! Les Intrépides Libres ont donc désormais sous leur bannière les Porteurs d'Espoir !
▬ Je trouve que ça va bien ensemble.
▬ Tu m'ôtes les mots de la bouche, Sarah !

En voyant la réaction des deux jeunes humains, le mink chassa rapidement le peu de gêne qu'il avait en lui et se montra même particulièrement amusé par la situation.

▬ Dans ce cas, je pense que vous allez apprécier le nom de ce bateau.
▬ Qui est ?
▬ l'Espoir.
▬ Je le savais.

[...]

Les formalités passés, Leonidas proposa au duo d'aller visiter leur nouvel demeure des mers, commençant alors par ce qu'il nommait le « centre de contrôle » du bateau, avec sa grande pièce servant visiblement de salle de réunion, dont le vigie ne s'était malheureusement jamais servi, officiant seul en tant que supérieur sur le bateau. En arrivant dans la pièce, Sarah poussa instantanément un cri de joie avant de sauter sur la grande table pour attraper l'étrange babiole posée en son centre.

▬ Vous avez un Log Pose ?! C'est trop bien ça !
▬ Tu sais l'utiliser ?
▬ Bien sûr ! Je ne suis peut-être pas une experte, mais en terme de navigation, vous pourrez compter sur moi !
▬ On devrait la laisser un peu seul, Leonidas. On cherchait ça depuis un certain temps justement, mieux vaut lui laisser apprécier d'en avoir enfin entre les mains.
▬ ... Vous comptez vous rendre sur Grand Line ?

Kaito sourit, amusé de constater que le mink avait instantanément compris qu'il venait de s'embarquer dans quelque chose de bien plus gros qu'il ne l'imaginait, espérant tout de même que la réponse du jeune homme lui fasse se tromper à ce sujet.

▬ C'est notre prochaine destination.
▬ Oh bordel …

Croyez-le ou non, mais c'était sans aucun doute la seule et unique fois que le sabreur aurait l'occasion de voir son désormais vigie se décomposer face à la nouvelle. Ils avaient trouvé quelqu'un pour leur offrir la liberté qu'ils recherchaient inconsciemment, mais il réalisait à présent que cela n'était pas sans conséquences … Ah adieu le confort des mers bleues …

[...]

Sur l'île de Boréa, la vie était paisible. Et plus encore, dans la Gambetta Corporation, l'atmosphère y était au beau fixe. Ces derniers mois avaient été quelque peu prolifique pour l'entreprise, les pirates se faisant plus rares que jamais et la nouvelle de la chute d'un des empereurs, le plus effrayant de tous, avait offert un répit appréciable pour le commerce. Wallace Gambetta, installé confortablement devant sa grande baie vitrée donnant vue sur les chantiers de revêtements, où l'activité y était plus que visible, ne se lassait guère de voir son business gagner en prospérité. Profitant ainsi de cette vision plus que plaisante, il ne vit pas sa secrétaire entrer dans la pièce, escargophone en main.

Wallace Gambetta, directeur de la Gambetta Corporation & ancien employeur de Kaito

▬ Monsieur, un appel pour vous.
▬ Vous ne voyez pas que je profite du moment ? Dites à cette personne de me rappeler plus tard.
▬ Dois-je donc renvoyer monsieur Yamamoto ?
▬ ...???

En entendant ce nom être prononcé, Wallace se planta sur place, avant de se retourner pour sauter sur le combiné du pauvre escargot communicateur.

▬ Bonjour, patron !

Dès qu'il fit savoir qu'il était au bout du fil, le quarantenaire soupira longuement, comprenant qu'il s'agissait bien de ce qu'il pensait.

▬ Je ne sais même pas si je devrais daigner vous répondre.
▬ Pourtant vous venez de le faire.

Nouveau soupir. Même après plus de sept mois sans aucune nouvelle, Kaito n'avait clairement pas changé. Toujours aussi effronté, mais toujours aussi amical.

▬ ... Certes. Bien, que me vaut un tel appel après un tel silence radio ?
▬ Je voulais vous passer le bonjour, mais je constate que Sarah et Peter ne sont pas revenus vers vous après l'incident d'Orange. Je suppose que je vous dois des excuses.

En entendant cela, Wallace se remémora aussitôt le journal qu'il avait reçu peu de temps après l'attaque d'Orange par des sympathisants du tristement célèbre Malvoulant, parmi lesquels figuraient les Intrépides Libres. Une nouvelle qu'il avait pendant un temps pensé fausse avant de constater que son mercenaire ne répondait plus aux appels, ne donnant même pas signe de vie, présageant malheureusement d'un funeste destin. Ainsi, entendre parler le jeune homme avec le flegme qui le caractérisait si bien faisait qu'un mélange un peu étrange d'émotions se faisait dans sa tête. Il dut prendre un petit temps pour retrouver son calme et sa lucidité.

▬ Je t'aurai pensé plus malin que cela, Kaito.
▬ Moi aussi patron, moi aussi.
▬ En tout cas, je suis content de savoir que tu es en vie. Tes amis vont bien ?

Petit silence.

▬ Les autres vont bien, on a récupéré un nouvel équipage et on fait route vers Grand Line à présent.
▬ Je vois …

Un long soupir se fit entendre de la part du chef d'entreprise. C'était donc cela.

▬ Je ne pourrai donc plus espérer t'empêcher de raccrocher ce drapeau noir, si je comprends bien.
▬ Non, haha !
▬ C'est bien dommage …

Wallace passa sa main contre son front, laissant apparaître un air désespéré face à son échec à remettre le jeune garçon dans le droit chemin.

▬ Mais sachez que j'ai bien retenu vos petites leçons, maintenant. On fera de notre mieux pour éviter les ennuis !
▬ Si tu le dis …

L'homme aux cheveux rouges n'y croyait guère, mais il ne pouvait qu'apprécier l'enthousiasme du jeune homme.

▬ Et du coup, je voulais vous dire aussi que je ne pourrai plus agir en tant que mercenaire pour votre compte, patron ! En revanche, si vous souhaitez que je fasse quelque chose pour vous remercier de votre gentillesse, vous pourrez me faire parvenir une lettre sur Banaro, c'est là-bas que je compte me rendre !
▬ ...

Une pensée traversa un court instant le quarantenaire, avant qu'il ne la chasse, se disant qu'il valait mieux qu'il s'en occupe lui-même …

▬ Contentez-vous de ne pas mourir.
▬ C'est une promesse, patron !
▬ On le surveillera pour vous, monsieur !

Wallace sourit, rassuré face à l'enthousiasme de ces jeunes. Saluant alors le kanokunien, il raccrocha le combiné et revint s'installer dans son fauteuil, faisant face à sa secrétaire, qui affichait un air inquiet.

▬ Monsieur … Pourquoi ne lui avez pas mentionné le départ de Dario ?
▬ Ce n'est plus de son ressort. Et puis …

Il soupira longuement.

▬ Connaissant Kaito et ses amis, ils ne tarderont pas à refaire entendre parler d'eux, et il est certain qu'il partira à leur recherche …
▬ Je comprends monsieur.
▬ Mais ton inquiétude n'est pas infondé. Va donc me chercher de quoi écrire, j'ai une lettre à préparer.
▬ Tout de suite monsieur.

Wallace prit une posture d'intense réflexion en regardant la demoiselle qui s'en alla trouver le nécessaire au chef d'entreprise.

▬ ... J'aurai dû le prévenir, au final.

S'en occuper lui-même … Ah qu'il regrettait d'avoir eu cette pensée égoïste.
Enfin … peut-être qu'au moins les Intrépides Libres auraient un peu de tranquillité avant la tempête à venir.
C'était là tout ce qu'ils pouvaient espérer pour eux …