On réussit à ranger notre navire dans le port comme des professionnels. C'est faux. On est maladroit, lent, pas précis et on hésite. On doit s'y reprendre plusieurs fois, créant un petit bouchon derrière nous. Oui, on vient à peine de commencer notre navigation, on doit encore apprendre plein de choses et se mettre au point. On nous accueille non pas comme des rois, mais comme de petitt-bourgeois. C'est sûrement en rapport avec les sommes que je dépense chaque mois. J'ai une mission sur cette île, alors je me dépêche d'aller l'accomplir. Je me mets à chercher soit un local vide intéressant, soit une agence immobilière pour m'aider à trouver un endroit me convenant. Et je finit par en trouver une après plusieurs minutes.
« Bonjour.
Bonjour monsieur. Que puis-je pour vous ?
Je suis à la recherche d'un local à vendre pour établir ma boutique. L'endroit m'importe peu. Je veux une vitre en devanture, ou alors un mur qui peut se couper pour créer une devanture. En termes de surface, 5 mètres de large sur maximum une dizaine. Une construction en pierre serait un plus. Pour l'investissement, disons soixante millions.
Ma foi, ce sont des critères bien précis.
Je sais ce que je veux.
Première boutique ?
Première chaîne de boutique.
Ah, je comprends. On se souvient toujours de ses premières fois. Je vous laisse vous asseoir ici pendant que je recherche.
Inutile. Je vais aller voir d'autres agences en attendant si j'en trouve, et me balader en ville faire des achats pendant ce temps. Je vais rester en ville quelques jours. Je vous laisse mon numéro, je compte sur votre appel rapidement.
Bien entendu. Bonne journée monsieur.
Vous également. »
Je quitte l'endroit sans délai avant de me mettre à chercher d'autres agences. Toutes celles que je trouve, je leur demande la même chose. Je passe le reste de l'après-midi dans la ville. L'odeur de poisson s'atténue dans certains quartiers, par chance. Souvent, je croise des personnes sans toit au-dessus de la tête. Ça me rappelle moi il y a quelques années. Je n'aime pas les gens dans le besoin comme ça. On devrait leur venir en aide au lieu de les laisser aux caprices de la vie. Je vois les gens passer devant eux sans rien faire, sans rien dire. Une petite veine apparaît sur mon front tandis que je serre les poings. Je n'ai pas trop de matériel sur moi, mais je m'en fiche. Qui suis-je pour refuser de l'aide à quelqu'un dans le besoin ? Je m'approche d'un sans-abri, doucement, et vient me poser à ses côtés.
« Bonjour.
Bo … Bonjour. » Il semble surpris. Oui, les gens n'ont vraiment pas l'habitude de ne serait-ce que leur parler. Comment est gérée cette île ? Comment peut-on permettre ce genre de chose ?! Ça me révolte en mon for intérieur.
« Je m'appelle Rio, et je suis médecin. Vous permettez que je vous examine ? »
Il a un mouvement de recul. Les gens dans les rues sont habitués à être ignorés dans le meilleur des cas, méprisés dans une situation ordinaire, voire attaqué et volés, ou pire. Voir quelqu'un s'approcher de lui, même quelqu'un de mon âge ne le rassure pas. Voilà pourquoi je parle doucement, sans geste brusque, à une petite distance de lui quand même. Ces gens n'ont rien à part quelques vêtements. Mais ils ont encore leur espace, on ne doit pas leur voler. Ceci dit, avec mon ton doux, mes yeux sincères et mon attitude, il comprend que je ne lui veux pas de mal. Il abaisse ses défenses naturelles, son mécanisme de survie, à savoir ses mains. Je m'approche un peu plus de lui, toujours doucement. Je lui explique ce que je vais lui faire, avant de lui faire, et lui précise qu'il peut arrêter l'examen à tout moment, sans avoir à me donner d'explication. Les sdf n'ont aucun contrôle sur leur vie, alors je lui montre qu'il en a malgré tout. Je veux qu'il se sente en sécurité avec moi. Ils n'ont pas à me craindre, je ne suis pas un ennemi qui leur veut du mal. Je lui fait suivre mon doigt avec ses yeux, je vérifie la dilatation de ses pupilles.
Je constate son état, faible, affamé, un flagrant manque de nourriture. Les conditions dans lesquelles il vit ne lui permettent pas de manger ni à sa faim, ni les produits nécessaire pour rester en forme, ne pas développer de carence ou de sur-absorption. Je le regarde, la peau sur les os, maigre, clairement en sous-poids. Je sais qu'avec l'insuffisance pondérale risque de se greffer des problèmes de santé comme du cholestérol, du diabète ou des troubles cardiovasculaires, choses qui, bien évidemment, sont très difficiles, voire impossibles à guérir. Je me revois il y a quelques années, lorsque je commençais à déambuler sur la terre ferme, sans le sou, sans maison, sans protection, sans famille. Mon état physique était déplorable, j'avais perdu du poids, j'étais en situation de dénutrition critique puisque je ne voulais pas retourner dans l'océan attraper du poisson pour me nourrir. Ma masse corporelle était beaucoup faible. Je peinais à rester debout, bouger devenait difficile, je passais mes journées à rester assis et espérer que quelqu'un me vienne en aide. J'attendais, jour après jour. Dès que quelqu'un passait près de moi, je levais la tête. Mais aucune aide n'est venu. Je ne prenais même plus la peine de lever la tête au fil du temps.
Une fois que j'ai su marcher correctement, je pensais que ma situation allait changer. Que neni. Les gens étaient toujours aussi cruels, peu importe où j'allais. J'ai fait plusieurs îles, et à chaque fois, j'ai dû me nourrir de créatures marines que j'attrapais entre les îles pour survivre un peu et retrouver un état semi-normal. Puis j'ai finis par comprendre que personne ne viendrait m'aider. Alors j'ai décidé de m'aider moi-même. Là, j'ai l'occasion d'inverser la tendance. Il suffit d'une personne pour lancer un engrenage, qu'il soit positif ou non. Si j'aide ce sdf, qui me dit que plus tard, il n'aidera pas une autre sdf, qui lui-même aidera quelqu'un qui aidera quelqu'un … On ne peut qu'imaginer les répercutions de nos actes, orienter les directions, anticiper ce qui va arriver, mais on ne peut jamais être certain. Il y a quelques semaines, qui pouvait dire que l'existence même d'un Canard allait changer le monde ? Mais j'ai la Foi et je sais que mes bonnes actions en entraîneront d'autres, par effet papillon. Je suis persuadé de ça, et je refuse de croire qu'il en sera autrement. Bien sûr, le sdf que je vais aider peut retrouver confiance en lui, trouver un travail, devenir quelqu'un qui va aider les autres. Mais il peut aussi être dégouté de la situation, virer criminel et tuer des gens. Je n'ai aucun moyen de prévoir ce qui peut éventuellement arriver, et je ne vais même pas essayer, sinon j'en deviendrais fou.
« Bonjour.
Bonjour monsieur. Que puis-je pour vous ?
Je suis à la recherche d'un local à vendre pour établir ma boutique. L'endroit m'importe peu. Je veux une vitre en devanture, ou alors un mur qui peut se couper pour créer une devanture. En termes de surface, 5 mètres de large sur maximum une dizaine. Une construction en pierre serait un plus. Pour l'investissement, disons soixante millions.
Ma foi, ce sont des critères bien précis.
Je sais ce que je veux.
Première boutique ?
Première chaîne de boutique.
Ah, je comprends. On se souvient toujours de ses premières fois. Je vous laisse vous asseoir ici pendant que je recherche.
Inutile. Je vais aller voir d'autres agences en attendant si j'en trouve, et me balader en ville faire des achats pendant ce temps. Je vais rester en ville quelques jours. Je vous laisse mon numéro, je compte sur votre appel rapidement.
Bien entendu. Bonne journée monsieur.
Vous également. »
Je quitte l'endroit sans délai avant de me mettre à chercher d'autres agences. Toutes celles que je trouve, je leur demande la même chose. Je passe le reste de l'après-midi dans la ville. L'odeur de poisson s'atténue dans certains quartiers, par chance. Souvent, je croise des personnes sans toit au-dessus de la tête. Ça me rappelle moi il y a quelques années. Je n'aime pas les gens dans le besoin comme ça. On devrait leur venir en aide au lieu de les laisser aux caprices de la vie. Je vois les gens passer devant eux sans rien faire, sans rien dire. Une petite veine apparaît sur mon front tandis que je serre les poings. Je n'ai pas trop de matériel sur moi, mais je m'en fiche. Qui suis-je pour refuser de l'aide à quelqu'un dans le besoin ? Je m'approche d'un sans-abri, doucement, et vient me poser à ses côtés.
« Bonjour.
Bo … Bonjour. » Il semble surpris. Oui, les gens n'ont vraiment pas l'habitude de ne serait-ce que leur parler. Comment est gérée cette île ? Comment peut-on permettre ce genre de chose ?! Ça me révolte en mon for intérieur.
« Je m'appelle Rio, et je suis médecin. Vous permettez que je vous examine ? »
Il a un mouvement de recul. Les gens dans les rues sont habitués à être ignorés dans le meilleur des cas, méprisés dans une situation ordinaire, voire attaqué et volés, ou pire. Voir quelqu'un s'approcher de lui, même quelqu'un de mon âge ne le rassure pas. Voilà pourquoi je parle doucement, sans geste brusque, à une petite distance de lui quand même. Ces gens n'ont rien à part quelques vêtements. Mais ils ont encore leur espace, on ne doit pas leur voler. Ceci dit, avec mon ton doux, mes yeux sincères et mon attitude, il comprend que je ne lui veux pas de mal. Il abaisse ses défenses naturelles, son mécanisme de survie, à savoir ses mains. Je m'approche un peu plus de lui, toujours doucement. Je lui explique ce que je vais lui faire, avant de lui faire, et lui précise qu'il peut arrêter l'examen à tout moment, sans avoir à me donner d'explication. Les sdf n'ont aucun contrôle sur leur vie, alors je lui montre qu'il en a malgré tout. Je veux qu'il se sente en sécurité avec moi. Ils n'ont pas à me craindre, je ne suis pas un ennemi qui leur veut du mal. Je lui fait suivre mon doigt avec ses yeux, je vérifie la dilatation de ses pupilles.
Je constate son état, faible, affamé, un flagrant manque de nourriture. Les conditions dans lesquelles il vit ne lui permettent pas de manger ni à sa faim, ni les produits nécessaire pour rester en forme, ne pas développer de carence ou de sur-absorption. Je le regarde, la peau sur les os, maigre, clairement en sous-poids. Je sais qu'avec l'insuffisance pondérale risque de se greffer des problèmes de santé comme du cholestérol, du diabète ou des troubles cardiovasculaires, choses qui, bien évidemment, sont très difficiles, voire impossibles à guérir. Je me revois il y a quelques années, lorsque je commençais à déambuler sur la terre ferme, sans le sou, sans maison, sans protection, sans famille. Mon état physique était déplorable, j'avais perdu du poids, j'étais en situation de dénutrition critique puisque je ne voulais pas retourner dans l'océan attraper du poisson pour me nourrir. Ma masse corporelle était beaucoup faible. Je peinais à rester debout, bouger devenait difficile, je passais mes journées à rester assis et espérer que quelqu'un me vienne en aide. J'attendais, jour après jour. Dès que quelqu'un passait près de moi, je levais la tête. Mais aucune aide n'est venu. Je ne prenais même plus la peine de lever la tête au fil du temps.
Une fois que j'ai su marcher correctement, je pensais que ma situation allait changer. Que neni. Les gens étaient toujours aussi cruels, peu importe où j'allais. J'ai fait plusieurs îles, et à chaque fois, j'ai dû me nourrir de créatures marines que j'attrapais entre les îles pour survivre un peu et retrouver un état semi-normal. Puis j'ai finis par comprendre que personne ne viendrait m'aider. Alors j'ai décidé de m'aider moi-même. Là, j'ai l'occasion d'inverser la tendance. Il suffit d'une personne pour lancer un engrenage, qu'il soit positif ou non. Si j'aide ce sdf, qui me dit que plus tard, il n'aidera pas une autre sdf, qui lui-même aidera quelqu'un qui aidera quelqu'un … On ne peut qu'imaginer les répercutions de nos actes, orienter les directions, anticiper ce qui va arriver, mais on ne peut jamais être certain. Il y a quelques semaines, qui pouvait dire que l'existence même d'un Canard allait changer le monde ? Mais j'ai la Foi et je sais que mes bonnes actions en entraîneront d'autres, par effet papillon. Je suis persuadé de ça, et je refuse de croire qu'il en sera autrement. Bien sûr, le sdf que je vais aider peut retrouver confiance en lui, trouver un travail, devenir quelqu'un qui va aider les autres. Mais il peut aussi être dégouté de la situation, virer criminel et tuer des gens. Je n'ai aucun moyen de prévoir ce qui peut éventuellement arriver, et je ne vais même pas essayer, sinon j'en deviendrais fou.
Toutes mes plantes et effets sont réels, sauf précisions contraire. Alors lis, et instruits toi, petit brin d'herbe.