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[1629] L'Anguille

On l’appelait l’Anguille ; ou du moins se faisait-il passer pour tel. Il n’y avait pourtant rien de foncièrement d’électrisant chez lui. Relativement petit, un brin enveloppé, il avait la peau grasse, la tignasse collante et l’œil morne. Plutôt léthargique même, toujours à traîner des pieds ; il était lent, Guy.
Guy Lantier ; c’était son nom. Le vrai cette fois. Car si on lui avait collé comme sobriquet un surnom pareil, c’était jadis pour se gausser de son nom puis, plus tard, car on le tînt pour insaisissable. C’était à croire, à chaque coup de filet qui s’approcha de lui, qu’il glissa sans cesse des mains qui cherchèrent à s’en saisir. De tous les équipages pirates auxquels il avait pu appartenir,  il avait réchappé de la moindre intervention de la Marine. Et quand bien même l’apercevait-on en solitaire, à badiner à l’air libre, qu’il faussa toujours compagnie à la volée de Mouettes avant même qu’on eut le temps de trop hasarder le regard sur lui.

L’Anguille, bien que réputée poisseuse, eut cependant la poisse de se faire poisser par un chasseur de primes de passage. Lui ne pêchait pas la gueusaille au filet, mais au pinceau. Technique déroutante s’il en fut.
Ledit pinceau, long de près d’un mètre cinquante, fut ainsi mis à juste contribution afin de le piéger comme il se devait. Resta à Alegsis – son acquéreur – de s’en aller rafler les cinq millions que l’Anguille traîna sur sa trogne.

Aux préposés qu’il trouva à la garnison de Shell Town, Alegs leur jeta presque le bougre sur le comptoir après qu’il l’eut traîné jusqu’ici, non sans peine.

- Cinq-cent millions ! Exigeait-il en préambule, braillant bien haut à peine eut-il balancé sa prise dans « l’aquarium ». Pour le mal que j’ai eu à le tirer jusqu’ici, je veux cinq-cent millions.

Chaque garnison des Blues avait la hantise de voir un jour débarquer Alegsis Jubtion. Expansif, bavard et surtout, arriéré au dernier degré, subir ses outrances s’acceptait chaque fois comme une torture indicible.

- Les primes sont non-négociables. Souffla laconiquement le matelot à l’accueil tandis qu’il effeuilla le registre des primes afin de déterminer ce qu’on lui avait bazardé au pied du comptoir. Nous y voilà…, soupirait-il, apparemment blasé qu’on le dérangea dans son travail pour une bête affaire de prime, Guy Lantier dit L’Anguille, cinq millions de berries. Je vous prépare ça

- Non, non. Insista candidement Alegsis alors qu’il reposa son avant bras sur le comptoir, se grattant sous son chapeau avec l’envers de son pinceau de combat. Vous avez forcément oublié un ou deux zéros. Moi je dis, il disait beaucoup de choses cet homme-là, jamais des qui vaillent la peine d’être entendues, il en vaut cinq-cent millions. Le capturer, encore, ça allait… mais le mal que j’ai eu à le traîner jusqu’ici, je vous dis pas.

- Ne nous dites pas dans ce cas.

Mais à moins qu’on l’attaqua à la mâchoire, malaisée fut la tâche consistant à le faire taire.

- Il a la peau et les cheveux poisseux, vous avez pas idée. J’avais les mains qui glissaient rien que pour l’attraper au poignet ; j’ai jamais vu ça. Et puis... y'a le reste... tenez, par exemple...

- Hum, hum. Commenta occasionnellement un interlocuteur qui, le plus manifestement du monde, tandis qu’il remplissait la paperasserie inhérente au transfert de prisonnier, se désintéressait de ce qui put bien lui parvenir à l’oreille en cet instant.

Là fut cependant sa plus regrettable erreur. Car si Alegsis parlait à tort et à travers, il arrivait parfois, au beau milieu de la jacasserie, que quelques informations intéressantes y volèrent par inadvertance. C’était cependant une épreuve insoutenable que de devoir lui tenir le crachoir. D’autant qu’il persista à bavarder dans le vide, occasionnant un monologue perdu dans les airs sans qu’un seul des tympans aux alentours ne s’y risqua.
Du long de son incessant verbiage, on avait eu le temps de passer les menottes à l’Anguille pour s’en aller la faire mariner à l’ombre. Quand, enfin, après qu’il eut régularisé la capture du criminel par un chasseur de primes, le matelot préposé à l’accueil tendit la somme due à Alegsis, un collègue fit subitement irruption.

- Le type que l’autre buse vient d’amener ! Je… je sais pas comment, il a réussi à glisser entre les barreaux pendant qu’on regardait pas.

Tous ses collègues, aux alentours, affairés qu’ils étaient à des tâches bassement administratives pour la plupart, levèrent le nez de leur plan de travail. Qu’on s’évada à l’intérieur même d’une garnison, à eux tous, put leur être préjudiciable dès lors où ils en seraient solidairement tenus pour responsables.

- Ah ça. Ricana presque Alegsis tant il ne fut pas étonné de la nouvelle. Je vous avais prévenus qu’il étai…. attends, c’est qui « l’autre buse » ?!

Finalement trop dissipé qu’il fut par la besace remplie de liasses qu’on lui adressa, le giboyeur itinérant ne s’attarda finalement pas sur l’anathème. Cependant, le fruit de son labeur lui fut aussitôt soutiré par celui-là même qui lui avait remis un instant plus tôt.

- Mais.. qu…

- Tant qu’il n’est pas en geôle, il n’est pas officiellement capturé. Ou vous le retrouvez, ou vous repartez.

Bien que ce première classe ne l’admettrait jamais, contrarier ainsi Alegsis en lui ôtant le pain de la bouche lui procura un infini sentiment de jouissance. Qu’il était bon, en effet, de se venger si mesquinement de toutes les indélicatesses de l’énergumène.

- Fariboles ! Tempêta un chasseur de primes courroucé au point d'abattre son poing sur le comptoir.

- Doucement, ça vient d’être rénové.

- Oups, pardon, je savais pas. S’excusa platement l’imbécile avant qu’il se revînt à la charge en une éruption de colère infantile. Mais qu’est-ce que je raconte moi… j’en ai rien à faire de votre comptoir ! Même s’il est très joli, je dois bien l’admettre, mes compliments à l’artisan. Je vous ai ramené le gugusse, vous me donnez mes sous. C’est… c’est la loi. Oui voilà, c’est ça, c’est la loi. Se crut-il malin de conclure.

Le plus calmement du monde, tandis qu’en arrière-plan, ses confrères s’agitaient afin que l’Anguille ne se fit pas la belle, le matelot sortit un recueil de loi pour le poser délicatement sous le nez du chasseur de primes.

- Quel article je vous prie ?

Et Alegsis, sans qu’il ne fut besoin d’en rajouter, blêmit après avoir essuyé un léger mouvement de recul. De lourdes gouttelettes de sueur qui perlèrent bien vite de tous les pores du visage et sa bouche se tordit avant qu’il n’essuya une copieuse déglutition. Cela était de notoriété publique – en tout cas au sein de la Marine d’East Blue – Alegsis Jubtion était analphabète au point de ne pas même savoir écrire son nom.

- Je… que… c’est-à-dire… je sais lire, hein, mais…, il tremblait presque ainsi qu’on eut présenté un crucifix à un vampire puis, galvanisé pour cinq millions, se ressaisît le temps de s’écrier, appelez-moi un de vos supérieurs ! Nom de nom, je vais me laisser enfler de cinq millions.

Tandis qu’on s’écharpa pour des broutilles chiffrées en berries, les effectifs mariniers de Shell Town, partout autour, se mirent en branle afin de retrouver Lantier. Qu’une telle évasion advint sous leur garde put en effet leur valoir à tous quelques sévères réprimandes gouvernementales. Ce n’était alors pas tant pour la Justice qu’on employa le moindre effort pour le retrouver, mais afin que leur carrière n’en pâtit pas.

Y avait-il un Marine consciencieux à bord ?


Dernière édition par Alegsis Jubtion le Lun 26 Juin 2023 - 21:22, édité 1 fois
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Les cantines de la marine avaient souvent la regrettable qualité de servir des plats pour le moins originaux. Bien entendu on les qualifiait ainsi simplement par soucis de délicatesse. Pour ajouter insulte à l’injure, tous étant affectés à Shell Town venaient souvent au port pour voir les bâtiments flottants sur le grand bleu partir, avec pour seule ambition de pouvoir renifler moindrement la graille des véritables popotiers de professions.
La récompense n’était peut-être à première vue, qu’une margoulette dégoulinante de bave, mais même le cavalier fou, réputé pour son caractère hautement bas en couleur et avec une retenue disciplinaire sans pareille, se prêtait au jeu volontiers.

C’était pour lui une motivation de plus pour s’entrainer durement, et ainsi pouvoir quitter à nouveau l’île trop tranquille à son goût, à bord d’une des flottes. Dans le meilleur des mondes, elle serait sous ses ordres ou à peu près. Après tout Auster se le répétait souvent, que l’ambition ne peut se maintenir qu’avec des efforts qui peuvent excéder celle-ci et pour qu’un homme mette de gros efforts, il doit être un rêveur et souffrir à souhait. Il souffrait ici d’un entrainement imposé à lui-même plus rude que ses camarades. Quand la garnison courrait dix kilomètres, le Crest en courrait trente. Quand il y avait deux heures d’entrainement le matin, on pouvait le voir continuer jusqu’au coucher du soleil. Il n’avait pas le choix, sinon il se laisserait dévoré par l’ennui et reprendrait goût à un style de vie sans souffrance.

C’est à cette pensée précise que l’odeur nauséabonde du steak d’anguille dans son assiette ramena le Crest à la réalité. À la voir, ce n’était pas une anguille attrapée fraichement du matin, car non il n’y avait plus aucune fraîcheur ou d’amour dans ce morceau de viande jaunisse. Dieu avait abandonné officiellement la marine de Shell Town pour aller en vacances ailleurs, même les prisonniers n’avait pas de la nourriture aussi mauvaise dans les premiers enfers d’Impel Down, du moins c’est ce que l’écarlate avait pu entendre entre les branches et les rumeurs.

Pour convaincre tout le monde de manger, le colonel Véhachez Pal se tenait debout près des tables avec son visage toujours aussi banal et oubliable qu’à l’habitude, à l’image de sa personnalité médiocre sans être dérangeante pour autant. Il avait simplement la tendance incessante de ne faire et dire absolument jamais rien de notoire, ce qui lui valait la rumeur d’être un colonel sans colonne.

- Je ne vais pas vous forcer à manger, mais sachez quand même que pêcher de l’anguille géante n’est pas une tâche simple et que c’est une poiscaille qui est remplie de vitamine D, c’est aussi riche en acides gras essentiels et en phosphore ! Montrez que vous êtes digne de la marine en faisant preuve de gratitude !

Ce manque d’autorité et de leadership eut pour effet d’extirper un long soupir désolé du lieutenant. Son supérieur aurait pu au moins menacer de priver les hommes de repas pendant une journée entière s’ils ne mangeaient pas sans se plaindre… Mais rien, sauf de grandes lignes criant des sous-entendus de fausses menaces, enfin à peine.
En soldat d’exception, Auster déposa quand même ses couverts sur le plat de la peste avec une expression la plus sombre et stoïque qu’il avait eu du mois et ça en disait beaucoup venant de lui. Au moment de couper un morceau, il eut la fâcheuse découverte qu’il était bien difficile de trancher proprement une peau aussi visqueuse. Le gluant faisait glisser le coupant du couteau et ne laissait pas le derme de poisson se sectionner avec aise.

Le colonel crieur s’assit alors devant lui avec son plateau et se mis à manger, le visage blêmit par des teintes de vert. Il arrivait à couper le mets sans avoir le problème d’Auster avec ses couverts, il s’y prenait en plantant fermement sa fourchette dans le grand congre alors que lui n’avait qu’accoté la sienne sur son poisson. En utilisant la même technique il put aisément déguster et déglutir sans dégueuler son repas, même s’il eut plusieurs fois un spasme remonte-cœur. C’est seulement quand les assiettes furent à moitié vides que Pal ouvrit sa bouche pour faire autre chose que d’y enfoncer de la nourriture.

- Vous savez lieutenant, vous devez être l’un des marines qui travaille le plus fort que j’ai vu passer à Shell Town. Vous effectuez un travail remarquable et vous avez une éthique professionnelle d’exception…

Rien ne sortit de la bouche d’Auster, c’était un homme qui n’aimait pas parler si ce n’était pas une nécessité, il sentait aussi que le locuteur verdâtre n’avait pas terminé de parler donc il n’était pas encore le temps d’accepter son compliment avec grâce.

- J’ai mes connexions dans East Blue et je vous ai recommandé auprès du colonel Kong à Logue Town. Il n’y a pas mieux que lui et il choisit ses recrues avec énormément d’attention. Il est d’un honneur de la plus grande catégorie que de pouvoir être sous son aile. Il a accepté de vous prendre pour un essai… à condition que vous acceptiez de vous mesurer à lui en combat singulier. Je pense qu’il ne veut que confirmer votre niveau d’entrainement jusqu’à présent mais ne vous en faites pas trop avec ça.

C’était bien rare pour le rouge, mais il avait le souffle coupé par la déclaration du sans colonne, tout le monde connaissait la réputation de Kong dans East Blue. Tout le monde le connaissait dans la marine en fait et son nom perçait même dans les routes de Grand Line. Bien sûr qu’Auster acceptait l’opportunité en or massif qui se tenait à sa portée. Travailler pour Kong ferait de lui quelqu’un de plus puissant que jamais et pourrait sans aucun doute propulser sa carrière.

- Colonel Pal… Merci infiniment, je travaillerais corps et âme pour défendre votre réputation et votre crédibilité. Je serais la meilleure recrue que le colonel Kong ait rencontrée.

C’est alors qu’un groupe de trois soldats entrèrent dans la cafétéria à bout de souffle.

- C’-c’est – un cri-criminel- s’est échappé-
- Prime ?
- 5 millions--de--Berries
- Auster occupez-vous-en, considérez cela comme un échauffement avant votre départ pour Logue Town ce soir, votre première prise en solo.
- Entendu, colonel !

Déjà debout, Auster saluait son supérieur avec un respect tout nouveau, jusque-là inexploré. Certes il avait la nette impression que Pal avait derrière la tête certains motifs personnels mais il appréciait plus-que-tout la confiance qu’il avait placée en lui.
Puis le lieutenant partit avec une vitesse fulgurante vers le poste de remise des primes, guidés par les trois soldats avec lui.

Arrivés sur place, il tomba face à face avec un homme habillé d’un drôle de façon, on aurait dit un ninja mais il était affublé d’un pinceau géant, il avait deux grosses palettes de devant avec un espace énorme entre elles ce qu’il le faisait ressembler drôlement à un hippo. Malgré lui, Auster eut aussitôt sa version personnelle d’un fou rire incontrôlé : un léger sourire accompagné d’un bruit ressemblant presque un début d’un ricanement.


- Alors… c’est vous qui avez ramené le criminel qui vient de s’enfuir ? Il ressemblait à quoi ?
    Il avait des galons là où ça importait. La mouette-ci, parce que son uniforme jurait de peu avec celui de ses petits camarades, était comme auréolée par le Seigneur. Le temps de l’enquête ; que s’accomplît la pantalonnade jusqu’à ce que la traque connut un terme, c’est à ce saint qu’il faudrait à présent se fier.

    - Euh… rétorqua Alegsis, vraisemblablement intimidé par le bel uniforme bien repassé qui lui faisait face, il ressemblait à un criminel et… euh… il avait l’air vachement en fuite et euh…  Il eut soudain dans l’idée de brandir la prime incombant à l’Anguille, décision judicieuse s’il en était. Sinon y’a ça aussi. Même que c’est vachement ressemblant en fait.

    Les marins aux alentours détournèrent le regard, les lèvres comprimées dans un rictus qu’ils n’étouffèrent que bien sommairement. Il riaient sous cape ces vilains bougres et ils avaient de quoi. Qu’un supérieur, tenu de pister un criminel primé, ne songea pas même à constater l’avis de recherche le concernant, fut une fenêtre de tir toute ouverte pour que commencèrent à suinter les commérages. À voix basses cependant, car pour incompétent qu’était leur lieutenant, il restait leur supérieur hiérarchique.

    - Ah, on file vraiment ses galons à n’importe qui. Grognait-on peu ou prou ici et là, à mots couverts, ou même les lèvres closes.

    La candeur avec laquelle Alegsis avait proposé qu’on consulta l’avis de recherche, en sus, n’appuya que mieux là où cela faisait mal. C’était une disgrâce que de fauter bêtement devant ses hommes, mais une infinie vexation que d’être corrigé par un abruti notoire.

    Afin qu’il rattrapa le coup, car il n’y avait pas lieu de se laisser déstabiliser pour si peu, le responsable désigné de la chasse qui se joua alors commanda plus impérieusement. L’organisation des groupes de traque et l’instauration d’un périmètre autour de la garnison, en peu de temps, rattrapa la forfaiture. Jusqu’à toutefois être interrompu dans l’énoncé de ses directives par l’origine même de la présente cohue. L’effronté – car il n’y pas lieu de le désigner autrement – avait été jusqu'à tirer le lieutenant par l’épaule afin qu’il lui soutira  une entrevue.

    - Pourquoi que tu parles bizarrement comme ça ?

    Sans tact et sans manière, le « tu » fut ainsi adressé sans considération du grade ou de l'uniforme.

    - T’es débile, c’est ça ? Osa l’impudent avec une ingénuité telle qu’on devina que sa question, pour impertinente qu’elle fut, se voulait néanmoins sincère.

    Pour seul réponse, il essuya un regard glacial. Ce n’était en effet pas le fruit du hasard si les chasseurs de primes n’étaient que trop peu appréciés de la Marine régulière. Alegsis Jubtion, par ailleurs, fut sans doute le pire ambassadeur de la profession, semant le mépris et la consternation partout où il passait.
    Ce qu’il tenait pour une exhibition de débilité flagrante se rapportait en réalité au seul accent du lieutenant. N’étant pas mondain pour un sou, ni d’ailleurs très au fait de quoi que ce soit tant il était inculte, Alegsis ignorait en effet jusqu’à l’accent de Nebelreich.

    - Après, ça me dérange pas, chercha-t-il à ménager son acolyte de circonstance après l’avoir si bêtement insulté. Même que c’est bien que tu sois à la Marine dans ce cas. C’est un métier pour toi. La fracture, entre chasseurs de primes et Marine, dès lors n’en finissait alors pas de se craqueler. Par contre, me lâche pas la main, sinon tu vas te perdr… aïe !

    Bien que le lieutenant eut la présence d’esprit de l’ignorer le temps qu’il expliqua à ses hommes la marche à suivre – suivant ainsi à la lettre les instructions du manuel – il fut contraint d’adresser une gifle sur la pogne du chasseur de primes qui, dans la plus parfaite outrecuidance, avait réellement cherché à se saisir de lui par la main.

    Franchement indésirable, flânant sans but le temps que les ordres furent adressés à chaque groupe, Alegsis avait investi une des chaises aux alentours, puis, les mains derrière la tête, ses bottes sur le bureau, annonça à tout hasard :

    - On devrait aller voir sur le toit.

    Suffisamment avisé pour ignorer ce qui méritait de l’être et surtout, pour tenir compte ce qui valut la peine d’être entendu, le pisteur en chef daigna lui accorder son attention. Peut-être, après tout, ce rebutant personnage bénéficiait-il de quelques informations sur l’homme dont il avait assuré la capture.

    - Pourquoi le toit ?

    - Prrrt, jeta Alegsis en haussant les épaules, je sais pas. Il fait beau, y’a du soleil... Et puis personne penserait à aller sur le toit.

    Alegsis Jubtion pistait au doigt mouillé. Sans doute cela expliquait-il que jamais il ne fit fortune.
    Las, on lui expliqua qu’il n’y avait de toute manière aucun accès conduisant sur les sommets de la garnison. Soucieux de mieux étinceler devant ses hommes, le lieutenant renchérit en adressant à ce grossier chasseur d’hommes que son plan, si c’en fut un, était de toute manière bancal et inepte, ne se fondant sur aucun élément concret ; qu’on ne traquait pas au gré d’une lubie d’un instant donné.
    Il avait alors été professionnel et méthodique dans son exposé, impressionnant ses hommes autant qu’il indifféra son interlocuteur. Celui-ci, en effet, s’était assoupi sur son siège tandis qu’on le vilipenda. On ne l’extirpa de son sommeil que lorsqu’un matelot, survenu d’un des groupes de traque constitués dans l’instant, retourna au centre d’opération afin de témoigner des récentes avancées.

    - Lieutenant Crest ! On a aperçu quelqu’un sur le toit du bâtiment C !

    L’assistance demeura figée par la nouvelle, comme frappée par une stupeur indue. Pas un regard, alors, ne fut pas tourné en direction du crétin de service. Alegsis, sans prendre garde aux œillades insistantes posées sur son chapeau, s’empara de son pinceau de combat, quittant son siège après s’être reposé.

    - Bon allez, bâilla-t-il tout en s’étirant ostensiblement, on a de l’Anguille à pêcher. On est d’accord que sa prime compte double maintenant qu’il a cherché à s’évader, hein ?

    Son pinceau insolite en appui sur une épaule, il entama ensuite une démarche nettement trop détendue pour avoir véritablement l’air concerné et ce, jusqu’à ce qu’on lui signala qu’il n’était possible d’accéder au toit que par une échelle. Celle-ci finalement dressée, le chemin lui étant fléché en conséquence, Alegs avait, en compagnie du lieutenant et d’une poignée de matelots, débuté l’ascension jusqu’à ce qu’il se trouva nez à nez avec l’individu posté sur le toit.

    - Mince, c’est juste un pingouin. Au temps pour moi.

    Sur ce commentaire jeté aussi laconiquement qu’imperturbablement, Alegsis retourna à l’échelle. Il n’avait manifestement pas été impressionné par l’invraisemblance de la scène, s'en retournant au centre des opérations.

    - Mais qu’est-ce qu’un pingouin fait ici ?

    - Peut-être que lui aussi il cherche l’Anguille. Proposa Alegsis tandis qu’il faussa compagnie aux hommes qui, eux, étaient restés estomaqués par cette découverte outrepassant apparemment les canons de la logique la plus élémentaire.

    Un pingouin s’était trouvé sur un toit. De cet état de fait curieux, Alegs fut le seul à ne pas en relever l’étrangeté. Les choses étaient parce qu’elles étaient ; ainsi façonnait-il sa philosophie. Une philosophie qui s’avéra plutôt reposante pour la cervelle dès lors où le « Pourquoi » et le « Comment » furent résolument absents du moindre de ses tourments.

    - Lieutenant, qu’est-ce qu’on en fait ?

    - … Redescendez-le à la garnison, on verra ça plus tard. Un mystère à la fois.

    L’Anguille, elle, n’en finissait pas de leur glisser entre les doigts et ce, sans même qu’ils eurent au moins l'occasion de s’en être saisie à un quelconque instant. La traque, entamée sur ces bizarreries, promettait d’être laborieuse, mais le lieutenant Crest ne faiblirait pas. Il en allait de sa crédibilité en tant qu’officier et surtout, de sa future affectation à Logue Town.
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    Quelle idiotie avait commise le justicier maladroit, il se sentait bien embarrassé de ne pas avoir demander à voir l’avis de recherche en premier, après tout c’était bien la première fois qu’il se retrouvait en charge d’une telle situation, le stress avait eu raison de son jugement. Apparemment les hommes sous ses ordres eux aussi manquaient de jugement, se moquer d’un officier au-dessus d’eux n’était pas très bien avisé, même si ce n’était qu’un lieutenant. Auster se fit une note mentale de les réprimander plus tard.
    Après tout l’heure n’était pas aux gamineries, il y avait un homme en fuite et il se cachait quelque part dans les environs, il fallait donc agir rapidement et intelligemment.

    L’énergumène demande pourquoi le marine parle bizarrement, Crest devient légèrement rouge pivoine, un mix entre la gêne et une colère infernale qui bouillonne alors en lui, il a bien envie de crier sur le chasseur mais il ne veut pas avoir encore plus se couvrir d’indignation qu’il ne vient de la faire.

    - Je viens d’une île où tout le monde parle ainsi, est-ce vraiment important ?

    Le rouge se demandait, avait-il un crétin absolu devant lui ? Ce genre de question ne pouvait que les ralentir dans la traque du fugitif et ce n’était clairement pas trop le moment de faire connaissance si bien que se qu’il commenta par la suite fut volontairement et aisément ignoré par son locuteur qui pensait plutôt que le débile était bien présent, mais pas en lui-même, plutôt chez l’autre.

    Plutôt, l’homme de justice se tourna vers ses hommes pour leur parler, laissant les grandes dents s’exciter tout seul de sa propre maladresse.

    - Nous devons poster une unité de vingt hommes au port et une patrouille de vingt autres qui va faire le tour de l’île à répétition jusqu’à ce que le criminel ait été appréhendé. Toi- Auster pointa l’un des six hommes présents. - Va communiquer mes demandes au colonel, maintenant. Les autres, suivez-nous.

    L’homme nous jeta alors l’idée d’aller sur le toit, sa raison me semblait bien ridicule mais à la surprise de tous, une marin vint rapidement lui offrir le bénéfice du doute avec une information clé. Auster se décrispa alors un peu, après tout il avait bien réussi à attraper et emmené à la base le fugitif une fois, il en serait donc certainement encore capable, il avait peut-être plus pour lui qu’il n’en laissait paraitre.

    Malheureusement, au grand dam de l’escouade d’infortune, la théorie eut tôt fait de se révéler comme une fausse piste. Un pingouin en plein milieu de Shell Town, on aura tout vu se dit l’écarlate, complètement renversé par la découverte pour la moins saugrenue. Il ne s’y attarda pas plus, jugeant le choc aussi fort qu’inutile à la situation.

    Là se trouvait le centre du problème, on dirait que le monde avait choisi de fournir le plus de distractions superflues au de Crest que possible, afin de véritablement mettre à l’épreuve sa patience mais aussi sa capacité à garder son esprit centré sur l’objectifs, tout en triant les véritables pistes des fausses.

    Ce qui l’enrageait le plus dans tout cela, c’était la désinvolture de son compagnon chasseur qui criait le manque de professionnalisme haut et fort, il avait tant envie de le remettre droit sur la ligne qu’il en tremblait en le regardant gambader comme si de rien n’était. Évidemment, la carrière de l’hippo n’était surement pas en jeu ici, mais celle d’Auster commençait tout juste, et il n’avait strictement pas l’intention de gâcher une prise aussi pathétique que le fugitif qui leur filait présentement sous les plumes.

    Le ramenant de son indignation, une seconde marin s’osa à demander ce qu’il était sage de faire à présent.

    - Lieutenant, avez-vous une idée de ce que nous devrions faire ?

    Auster se senti comme si une ampoule venait de s’allumer au-dessus de sa tête, une idée venait de le frapper et il choisit de suivre son instinct sans attendre.

    - Suivez-moi, je crois avoir une idée de ce que je ferais si j’étais à la place d’un criminel en fuite.

    Les hommes suivirent leur supérieur, ainsi qu’Alegsis qui n’avait sans doute pas d’autre idée pour le moment ou simplement par curiosité. Idée qui les amena tous dans la salle de lavage des uniformes, là on tenait un inventaire plutôt strict de tous les uniformes qui pouvaient entrer et sortir de la base ainsi que des vestiaires.

    - L’uniforme juste là, il est sorti il y a sept minutes mais il n’y a pas de nom indiqué, ni de numéro d’identification, qui est-ce qui vous l’a pris, le savez-vous ?

    Une femme bien bedonnante et souriante se tenait assise derrière le large comptoir du registre en lisant un journal. Elle tourna la page avant de soupirer calmement alors que son sourire s’effaça tout aussi doucement, visiblement elle n’aimait pas être dérangée par son travail pendant son temps libre. Sans faire diverger son attention sur son locuteur, elle lui répond bêtement.

    - Ce n’était pas votre petit fugueur lieutenant, si vous voulez vraiment savoir, c’était le sous-lieutenant McCormick.
    - À l’avenir tâchez de garder cette information inscrite en tout temps je vous prie, il en est d’une importance primordiale. Après tout la dernière chose que l’on veut c’est de voir des uniformes disparaitre et tomber sous la main de pirates.

    La femme ne fit que rouler ses yeux dans leurs orbites en guise de réponse, sans quitter son journal encore une fois.
    Auster sentit son visage fondre d’une expression teintée de fierté à celle d’une légère déception. Heureusement qu’il avait une aura de meute pratiquée sinon ses hommes se seraient tous encore mis à rire, il fallait le dire aussi, la situation devenait de moins en moins amusante et de plus en plus alarmante pour la réputation de la base entière. Comme une lueur d’espoir, une autre idée lui vint, il choisit de l’avancer avec prudence.

    - Il est quand même logique qu’il voudrait au moins changer son apparence le plus possible, allons voir au marché public et peut-être quelques coiffeurs sur le chemin, peut-être qu’ils le reconnaitront de son avis de recherche…
    - Hey mais c'est pas débile cette idée, je pourrais me faire un relooking rapide en même temps. Surtout que vous me devez 500 000 000 000 000 de berries bientôt, vous avez vu comme il est compliqué à attraper...

    Ça y est, Auster avait compris définitivement qu'il valait mieux pour sa propre santé mentale d'ignoré la plupart des mots d'un chasseur de prime, il n'aimait pas se fier aux apparences, mais dans cette instance particulière, il aurait dû le faire dès le départ.
    Si un homme comme Alegsis l'avait attrapé, il n'était peut-être qu'un simplet incapable de réfléchir à un détail comme son apparence alors qu'il voulait éviter sa capture. Ou alors avait il simplement jugé trop risqué de subtiliser un habit de la marine. Quoi qu'il en était, les hommes de l'épéiste semblaient croire plus à son idée que lui-même et c’est avec empressement qu’ils partirent tous en direction de différents stylistes et magasins généraux.


    Dernière édition par Auster Crest le Jeu 17 Aoû 2023 - 16:44, édité 1 fois
      À défaut d’autre piste véritable, Auster, accompagné de son encombrant acolyte, avait chapeauté personnellement la piste des « stylistes » et autres « coiffeurs ».
      L’information, avant qu’elle parvînt jusqu’au néocortex du sieur Jubtion, s’était égarée en route. Son système nerveux l’avait d’abord perdue non loin de l’omoplate pour complètement la paumer dans son gros orteil droit. Après une série de loopings divers et variés, enfin, les informations précédemment énoncées par son lieutenant de tutelle illuminèrent les méandres vaporeux et méphitiques condensés dans sa boîte crânienne.

      - Mais attends voir… réagit-il trop à rebours pour qu’on devina de quoi il chercha à les entretenir, mais vous êtes trop mauvais en fait.

      La remarque constructive, Alegsis, ça n’était pas son fort.

      - Si on le cherche dans les commerces, l'autre poisseux, ça veut dire qu’il a pu se carapater de la garnison même pas dix minutes après s’être évadé.

      Cela le fit alors bien rire. Mais pas d’un rire communicatif puisque, partout autour, en silence quoi qu’en ruminant leur bile au fond de la gorge, le lieutenant ses matelots lui adressèrent un regard grave. Un regard qui, si on lisait de plus près les caractères écrits dans les prunelles, exprimait « Oui, on sait qu’on a merdé, ferme-là maintenant, chasseur de primes à la manque ». Hélas, que ce fut écrit sur un manuscrit ou même entre les lignes, Alegsis ne savait décidément pas lire.

      - Jeri-hi-hi-hi-hi-hi ! S’esclaffait-il ainsi d’un rire des plus jovial tandis qu’il les accompagnait sans trop qu’on sache pour quelle raison. Oh la la, ce que vous êtes nuls ma parole. Quand je vais raconter ça à Kant, ça va nous faire la journée. Oh les nazes, jeri-hi-hi-hi-hi.

      Ça n’était pas un de ces rires factice et moqueur qui lui remuait la gueule comme la poitrine, mais une esclaffade franche qui lui fit même monter les larmes aux yeux. Dans la rue, le Shelltowniens – quel drôle de nom – constatèrent alors un petit contingent de marines marchant en rangs serrés avec, à côté, comme un poisson pilote s’agitant frénétiquement autour d’un grand squale, se rire d’eux en les pointant du doigt.

      - Ça suffit Jubtion. Le recadra sèchement le lieutenant.

      Son accent, hélas, ne contribua qu’à mieux alimenter l’hilarité irréfragable qui n’en finissait plus de faire se marrer le chasseur de primes. Puis, d’un coup d’un seul, au beau milieu de la marrade, interrompant subitement sa joie, Alegs demanda, à tout hasard, un auriculaire désormais logé dans son nez.

      - On va où au fait ?

      Il n’avait pas écouté un traître mot de ce qui avait pu se dire plus tôt.

      - Parce que je veux dire…, il voulait toujours dire quelque chose, et cela justifia qu’on puisse tant le haïr, s’il est encore planqué à la garnison et qu’on fait sortir autant d’effectifs pour le chercher bah… là pour le coup, il va vraiment se tirer.

      Quelques regards inquiets s’échangèrent alors discrètement sous la visière des casquettes environnantes. On ne sut d’ailleurs trop s’il fallut se préoccuper de cette hypothèse, ou bien du fait qu’un pareil abruti, au beau milieu de la traque, avait potentiellement pu se montrer plus sagace que leur supérieur hiérarchique.
      Et déjà, Alegsis s’en retournait à ses rires aussi sincères qu’ostensibles.

      - Jeeeeeeeeri-hi-hi-hi-hi-hi ! Se tenait-il alors les côtes d’une main tandis que l’autre ne lâcha pas son pinceau de combat. Imaginez ! Hi-hi-hi. Il se fait la malle sans même comprendre pourquoi ceux chargés de le traquer à la garnison sont tous sortis ! Oh non… c’est trop ! Jeri-hi-hi-hiiiiii.

      Il lui fallut en effet poser une main en appui sur un mur le temps qu’il exorcisa jusqu’au dernier rire en lui. Malgré sa nonchalance aussi proverbiale qu’elle était agaçante, Alegs avait planté les graines du doute dans l’esprit de chaque matelot qui se trouva alors en vadrouille autour de lui. Des graines qui furent néanmoins salées par le lieutenant afin que rien de mauvais ne germa dans la tête de ses hommes.

      - Il y a suffisamment de matelots à la garnison pour ratisser tout le bâtiment. Je m'en suis assuré. Ce n’est pas quelques effectifs en moins qui feront la différence.

      L’explication fut assez rassurante pour que la petite bande qui l’accompagnait dans les quartiers commerciaux de Shell Town se ragaillardit. Les effectifs en présence parurent en effet se tenir plus droit que précédemment ; leur regard, dissimulé sous la visière, apparaissant comme soudain moins ombrageux.
      C’était à ce genre de réaction qu’on estimait la trempe des bons officiers capables de galvaniser leurs troupes.

      - Tenez, voilà un coiffeur. Fit savoir Alegsis en pointant un étal de son pinceau. Je vais demander s’ils l’ont vu. Vous allez voir que vous vous plantez complètement.

      D’un pas ferme et décidé, toisé par les regards impavides de la Marine, il entra dans le commerce pour en sortir une minute plus tard. On jura que quelque chose, le temps qu'il s'engouffra en ces lieux, avait tempéré ses moqueries une fois extrait du bâtiment.

      - C’était une boucherie. Conclut magistralement le lieutenant avant même que le chasseur de primes ne lui communiqua son rapport.

      - Ouais. Ça va. Je sais. Mais… se rattrapa promptement Alegsis avec l’adresse d’un pachyderme manchot, il aurait très bien pu s’arrêter en chemin pour acheter de la viande ! Annonça-t-il alors si sûr de lui et avec une outrance telle qu’on préféra ne pas lui répondre.

      Le fait de ne pas savoir lire était quelque peu dommageable quand on ne se trouva pas même foutu de distinguer une enseigne de boucherie de celle d’un styliste. Quand, enfin, tous cette fois firent irruption chez le coiffeur, c’est sa gueule grande ouverte, vociférant le verbe haut à peine fut-il entré, qu’Alegsis fit cette fois montre d’un zèle démesuré pour mener l’enquête.

      - Bonjour madame ! Dit-il après avoir fait si soudainement irruption dans les lieux. Vous auriez pas vu un type suspect, dites ?

      Professionnel jusqu’au bout, il lui avait même présenté l’avis de recherche de l’Anguille. Sans conviction – même certaine de ne jamais avoir vu l’homme présenté sur la photo qu’il lui remit en mains – la tenancière ne leur fut d’aucun secours. Jusqu’à toutefois avoir comme un air de suspicion après qu’elle eut mieux scruté le chasseur de primes venu jusqu’à elle.

      - Mais attendez… vous étiez pas l’hippopotame rachitique bavard qui s’est évadé l’année dernière ? Celui qui a foutu un énorme bordel quand il est parti ?

      Alegsis, à chaque passage sur quelqu'île que ce fut, avait l’art et la manière de savoir se faire remarquer. Jamais positivement cependant. Aussi, gêné aux entournures une fois encore, il arracha l’avis de recherche des mains de la coiffeuse, ses arcades froncées sur ses gros yeux ronds.

      - Non madame. Je vois pas de quoi vous parlez. Vous devez confondre. C’était peut-être mon jumeau maléfique, comme les Minaro, vous savez. Et puis c’est raciste de me comparer à un hippopotame. Et le racisme c’est mal. Sauf avec ces raclures d’hommes-poiscailles.

      Il fallut alors faire semblant de ne pas le trouver suspect, celui-ci, maintenant qu’il tourna si vivement les talons, visiblement pressé de quitter l’établissement.

      - Vous attendez quoi vous autres ?! Pesta-t-il auprès des matelots en leur passant devant. Y’a des tas d’autres endroits où il faut enquêter, là. Au boulot !

      C’est fou ce qu’un homme aussi peu consciencieux dans son travail pouvait soudain se montrer zélé à la tâche et besogneux quand il s’agissait de fuir son passé. Que ce furent ensuite les coiffeurs, les stylistes ; ou même les paysagistes – car on avait ratissé large – personne n’avait trouvé l’Anguille. La piste exploitée, ne resta qu’à retourner à la case départ ; à cette garnison d’où était parti le désastre.

      - Dites, se hasarda encore une fois Alegsis, cette fois en faisant tourner son pinceau de combat entre ses doigts le temps qu’ils s’en retournèrent à la caserne, avant de le traquer comme on fait… on aurait pas mieux fait de d’abord chercher à savoir comment il s’est évadé en inspectant sa cellule ? Je voulais pas le dire plus tôt pour pas vous gêner, m’enfin… vous faites comme vous le sentez.

      Autour de lui, on se retînt du mieux qu’on put pour ne pas l’étrangler. S’il avait eu cette idée depuis le départ, que ne l’avait-il alors pas exprimée au milieu de sa jactance incessante.
      Ils rentraient certes bredouille et contrariés ces hommes de troupe, mais au moins avec une nouvelle piste à exploiter. Il faudrait en effet inspecter la cellule du fugitif si l’on souhaita mieux déterminer comment et vers où celui-ci avait bien pu s’enfuir. Ce qui, du reste, s'avéra en réalité être la base de toute enquête rondement menée.
      • https://www.onepiece-requiem.net/t25733-fiche-technique-de-alegs
      • https://www.onepiece-requiem.net/t25723-alegsis-jubtion