Récemment promu marin d’élite dans la classe 1626 du BAN, le soldat Grinko avait reçu son premier ordre d’affectation auprès de la garnison du Q.G de West Blue, placée sous l'égide du commandant d'élite Jaak Haas, pour y effectuer ses premières classes. Trois mois à peine le séparait de son incorporation dans les rangs de l’élite, trois mois où le jeune sang n’avait fait qu’ébaucher la teneur des missions confiées à ce corps d'armée. Les prérogatives de la marine d’élite étaient vastes et variées même si le combat en demeurait la colonne vertébrale, la pierre angulaire de son action. Sauvetage, contre-terrorisme, prise d’otages, sabotage d’une flotte ennemie, escorte de personnalités éminentes dans des lieux à hauts risques et tout un assortiment d’interventions excessivement périlleuses dans des situations de crise nécessitant la mobilisation d’une force de frappe prodigieuse pour anéantir l’ennemi et garantir les intérêts du gouvernement. S’il espérait vivement pouvoir un jour participer à ces missions d’envergure, le soldat Tetsuya devait pour l’heure prendre son mal en patience pour faire ses preuves sur le terrain et acquérir l’expérience ainsi que la maturité nécessaire pour se voir attribuer de plus grandes responsabilités. La dernière mission en date du marin d’élite, l’interpellation de "Calico Joe" et de son équipage qui croupissait dorénavant dans la cale de l’Espada avait mobilisé pendant 3 semaines pleines le groupe de combat d’une dizaine d’hommes du caporal Jenkins. La traque les avait mené aux confins des eaux australes de West Blue et s’était soldé par une bataille navale qui avait vu la perte de 2 caravelles et la disparition d’une soixantaine d’hommes dans les rangs ennemis. Le patrouilleur Espada avait sérieusement morflé dans l’altercation, obligeant l’équipage à mouiller pendant une dizaine de jours au large de Lone Town, le temps de procéder aux réparations de fortune avant de reprendre sa route vers le Q.G.
Lorsqu’une semaine plus tard, L’Espada pénétra dans les eaux territoriales de Whiperia et capta un S.O.S sur les ondes du transpondeur provenant d’un détachement de la marine à proximité, la section de combat se mis aussitôt en branle pour aller porter assistance au Galopant. Des missions d’appui et de soutien ponctuel de la régulière sur des théâtres d’affrontements relevait naturellement de la compétence de la marine d’Élite. D’après les informations transmises par l’officier de liaison du Galopant, un galion battant le pavillon noir des renards argentés les avaient pris en chasse pour libérer les forbans mis aux fers dans les geôles du vaisseau. Une première estimation hasardeuse de 3 à 400 cents hommes avait été dressée par le lieutenant Spears à la tête du Galopant. Trois sections autonomes de l’élite comprenant chacun une trentaine d’hommes avaient d’ores et déjà levé l’ancre vers les coordonnées du vaisseau en perdition. De par sa proximité, l’unité du caporal Jenkins aurait à ouvrir le voie, effectuer une reconnaissance du terrain et sécuriser les marines tentant tant que bien que mal de défendre leurs positions contre l’hostilité de forces de 3 à 4 fois leur nombre.
Allez me chercher Ormaud, j’ai besoin que l’on m’estime le temps nécessaire pour croiser le Galion des renards argentés. La transmission date déjà d’une dizaine d’heures, la situation est critique, leurs probabilités d’en ressortir est faible si on ne peut les rallier sous une douzaine d’heures maximum.
Le navigateur à pied d’œuvre sur les cartes marines à sa disposition détermine l’itinéraire le plus rapide et le cap le plus propice pour récupérer le Galopant.
On devrait pouvoir y arriver au petit matin Caporal en suivant un cap sud-sud est si la météo ne se gâte pas. Le problème c’est que les balises du navire ont arrêté d’émettre il y a quelques heures ...
Il aurait coulé à pic ? Une avarie d’ampleur aurait très bien pu arrêter le guidage, Ormaud. Vous le savez aussi bien que moi. Pas de défaitisme prématuré ici bas.
Cap Sud sud-est les gars ! Fissa !
Fendant la houle à vive allure en suivant le cap indiqué, le patrouilleur se mit à son tour à la poursuite de la caravelle. Quelques heures plus tard, les premières lueurs du jour percent l’immensité azurée en dévoilant sous de rais timides la coque en acier trempée de l’Espada mouillant à cinq milles nautiques du Galopant. De sa longue vue, le caporal Jenkins établit un premier état des lieux de la situation, un sourire marbrant ses traits. Échoué sur un banc de sable, la caravelle du Galopant n’est plus que l’ombre d’elle même. Le mât brisé, la coque fissuré par endroits sonnent comme autant de témoins de la férocité des affrontements qui ont dû se tenir lors de l’accostage sur la rive. La quille elle-même a été si abîmée par l’offensive menée par les forbans que le Galopant en est rendu au stade d’épave bonne à être désossée. Toutefois, le naufrage en haute mer a été évité et tout porte à croire que le lieutenant Spears a de son propre chef guidé son navire vers ce monceau de terre recouvert d’une jungle dense et épaisse pour semer ses poursuivants et s’offrir une chance d’en réchapper avant l’intervention de l’Élite.
La longue vue se déporte sur le galion des renards argentés et leur emblème ondulant dans l’aube naissante. S’il ne peut dénombrer précisément les hommes à son bord, le caporal Jenkins comprend que ceux-là ne servent qu’à faire le pied de grue ou à dissuader les éventuels survivants de regagner la plage si l’envie leur en prenait. Une chasse à l’homme s’opère dans la forêt et si les renards argentés n’ont pas encore levé le camp, il y a de fortes chances qu’ils n’ont pas récupéré leurs hommes aux mains des mouettes. Profitant de l’effet de surprise, l’Espada amorce son approche vers le galion ennemi en longeant le littoral côtier avant de se positionner dans son sillage pour mieux le prendre au dépourvu lors de l’abordage imminent. Les hommes fourbissent leurs armes, préparent leur attirail, fixent solidement leur barda avant qu’un calme plat ne gagne le pont du patrouilleur qui n’est plus qu’à plusieurs dizaines de mètres de son vis-à-vis. Le calme caractéristique de celui qui précède la tempête, le calme qui accompagne la tension de soldats parés à en découdre, le calme avant la fin. Les bouche-à-feu des dix canons à bâbord lancent les hostilités en crachant un déluge de feu vers le bâtiment ennemi.
La marine ! Putain, la marine ! Sonnez la cloche, battez le rappel, Vite !
Le branle bas de combat retentit sur les trois ponts que compte le vaisseau ennemi alors que déjà une vingtaine d’hommes escaladent le navire, couteau entre les dents et fusils sur l’épaule pour faire une carnage parmi l’équipage des renards argentés. Sous l’eau, une équipe s’active déjà pour rompre le safran du navire et l’empêcher de prendre le large dans une tentative désespérée. Tetsuya fait partie du contingent qui mène l’assaut sur le pont. Il a survécu à l’Enfer du Ponton à Las Camp pendant une année entière, cette escarmouche n’est qu’une promenade de santé en comparaison. Ses phalanges s’écrasent dans le faciès du premier venu, projeté plusieurs mètres en arrière suite à l’impact tonitruant, avant qu’il ne poursuive sa course vers ceux qui fondent vers lui et ses camarades. Les balles pleuvent, les sabres s’entrechoquent avec fracas dans une rixe d'étincelles avant qu’une valse de boulets en fonte arrachent le bastingage sous l’horreur des boucaniers qui marquent le repli devant la démonstration. L’Espada afflanque le long du galion et une nuée de crochets en fonte l'éventrent pour le maintenir solidement à sa proximité. Ce navire a beau être imposant, c’est bel et bien le seul qu’ils possèdent. S'il venait à chavirer, ce serait la garantie de ne pas pouvoir s’éclipser dés qu’ils auront mis la main sur les alliés et in fine d'avoir la certitude de se faire capturer par la marine lorsqu’elle débarquera en nombre.
On devait pas juste faire une mission de reconnaissance au fait ?
On pourra toujours dire qu'il y avait des marines emprisonnés à fond de cale du galion.
Tu l’aimes comment toi la cuisson du Renard ?
Fumé. Quoi d'autre ?