The Dead Man's Symphony | Terminée

Ensorcelante...

Atypique... Dérangeante... Un physique contradictoire, fusion imparfaite de deux mondes s'affrontant constamment. Entre sa beauté acquise avec l'âge et sa brutalité manifeste, elle reste un produit incomplet, incapable de susciter une admiration persistante dans l'œil de l'observateur. Autrefois, on aurait pu la surnommer le pire laideron de cette terre, la faute à une naissance difficile et à un ensemble de gènes ne sachant pas vraiment bien se goupiller ensemble. Cependant, il est devenu évident que ce n'est plus le cas... Bien qu'elle ne semble pas en être consciente.

Dotée d'un visage pétillant, qui, à défaut d'être rassurant, ne manque pas d'expression, elle incarne sa folie bestiale mais aussi son innocence naïve. Une jeune fille qui n'a encore rien vu de la vie et qui s'y abandonne pourtant totalement sans jamais se perdre en prudence excessive. Des yeux rouges injectés d'une pulsion primitive, percés par une croix ne faisant qu'accroître le malaise inspiré par ce tableau de chair. Deux cornes elles aussi rouges, trahissant ses origines impures, et une longue chevelure d'un blond sale, qui a une horrible tendance à se confondre en un champ d'épis impossible à dompter.

Quand on s'attarde sur son apparence globale, elle n'est à première vue pas si différente d'une jeune adulte, entrant enfin dans ses plus belles années. Si on écarte sa posture courbée, loin des standards d'élégance de la haute, on pourrait presque la confondre avec une femme des plus banales... Cependant, il ne suffit que d'un coup d'œil un peu plus approfondi pour s'apercevoir de tout ce qui peut déranger.

Des vêtements déchirés à plusieurs endroits, souvent crasseux, manifestant une pauvreté ou une négligence manifeste. Des cicatrices qui se sont naturellement accumulées à vivre comme un animal toute son existence. D'autant, que ce n'était pas comme si elle s'était préservée une fois la civilisation enfin rejointe... Non... La violence est sa seule arme, et cela se voit à la vue de sa chair meurtrie. Bien souvent, elle a eu le malheur de se casser les dents sur bien plus fort qu'elle et son corps est un témoignage un peu macabre de toutes ses erreurs de jugement. Et elle est loin d'être une lumière même avec un instinct aussi poussé que le sien.

Pas bien musclée pour autant, elle n'est intimidante que grâce à l'aura qui se dégage d'elle. Une aura de forcenée, prête à tout pour vous arracher le bout de viande que vous portez dans votre bouche ! Si on enlève cela, elle semble faire pâle figure, assez petite et maigrichonne. Pas étonnant qu'elle ait toujours la boule au ventre, salive à la bouche, prête à poser ses crocs proéminents sur n'importe quoi tant que cela se mange.

Quant à sa manière de s'exprimer, celle-ci ne trompe pas. Ayant appris à parler assez tard, il n'est pas étonnant qu'elle confonde les mots ou qu'elle doive les répéter à plusieurs reprises pour essayer d'avoir la bonne prononciation. Porteuse d'un accent qui ne ressemble à aucun autre, elle est sans doute l'une des voix les plus difficiles à imiter de ces mers, simplement par son côté des plus exotiques.

En bref... Une boule de nerfs, qui a au moins eu le mérite de s'embellir avec l'âge malgré les embrouilles dans lesquelles elle se jette constamment cornes les premières.

Instinct animal...

Élevée parmi le monde sauvage, par des primates n'ayant pour seule culture que la violence et la compétition, elle développa naturellement tous les traits inhérents à cet environnement. Directe, chaotique, franche, Mozart n'est pas du genre à tergiverser pour atteindre l'objet de ses convoitises du moment. Simple dans son approche, elle ne laisse aucune place à des principes contraignants.

Elle mange lorsqu'elle a faim, dort lorsqu'elle a envie de pioncer, et devient brusque lorsqu'elle a besoin de se défouler. Véritable boule de nerfs, elle ne comprend que la force brute. Il est impossible de parlementer avec elle, de tenter de la raisonner, ou de solliciter son empathie. C'est simple, elle n'en a pas, du moins envers les humains. Elle se fiche éperdument qu'un enfant se soit cassé une jambe devant elle ! Elle serait même capable de lui casser l'autre pour s'en amuser !

Définie par le chaos et l'absurde, elle ne se plie à aucune culture, à aucune règle. Non pas par malveillance, simplement parce qu'elle n'a pas été élevée ainsi. Elle comprend peu le sens même de la loi et ne se fait pas prier pour la mépriser constamment par ses agissements. En conséquence, elle est continuellement poursuivie par les problèmes, que ce soit la police de ce monde ou même d'autres criminels cherchant à se faire justice eux-mêmes.

Véritable rapace, elle a une propension à vouloir voler tout ce qui brille pour constituer un trésor fait de bricoles sans sens. Malgré son côté primaire basé uniquement sur son instinct, elle a vite compris que l'argent fait tourner le monde des hommes ! Et que l'argent est souvent associé à tout ce qui est joli ! Ainsi, pierres précieuses, statues... Rien n'est hors de portée pour elle, qu'elle range dans sa besace pour le revendre à d'autres contre un repas copieux, ou qu'elle ne vole pas directement.

Mais ce n'est pas tout... Son absence d'empathie et sa propension naturelle à faire parler ses poings plutôt que sa langue lui confèrent un goût prononcé pour la brutalité et la cruauté. Elle prend plaisir à faire mal, à se faire justice elle-même, condamnant ceux qui sont différents d'elle pour les malheurs qui frappent son île !

Ne lui tendez jamais la main... Elle finirait par vous dévorer le bras, au sens propre comme au figuré, et ce ne serait pas pour votre bien...

On pourrait la qualifier d'idiot vis-à-vis des standards du monde civilisé. Cependant, ce n'est pas totalement vrai... Elle est simplement différente. Ce qu'elle perd en raisonnement, elle le gagne en instinct. Il n'est d'ailleurs pas rare qu'elle trouve seule des solutions à des problèmes qui, en apparence, n'en possèdent aucune. Certes, ses plans sont souvent l'opposé de l'élégance, mais ils fonctionnent bien souvent ! Cependant, elle ne prévoit jamais très loin ses actes et se fait souvent rattraper par le cours des choses.

En bref, elle agit davantage comme un animal sauvage que comme un véritable être humain doté d'une conscience. Et pourtant, c'est ce qui fait son charme !

Pas vrai ?

Horreur de la nature...

Un enfant à la naissance si moche qu'il aurait pu faire regretter tous les efforts déployés pour le mettre au monde. Un bébé pourvu de cornes et aux yeux percés d'une croix, symbole de l'adultère de la mère, au visage si répugnant pour le mari trompé qu'il préféra fauter en l'envoyant s'abandonner à l'écume, aux flots de l'océan.

Déposé dans une barque et jeté malgré les protestations des médecins sur place, le bébé fut emporté dans l'horizon avant même que les secours n'aient l'opportunité de remettre la main dessus. Un enfant qui avait eu la chance de ne pas subir la violente colère de son géniteur, mais qui allait simplement disparaître. S'effacer de l'existence pour échouer dans les profondeurs de mère nature... Peut-être qu'elle voudrait de l'enfant ?

Deux jours particulièrement violents. Une embarcation uniquement guidée par les ravages du vent et les courants maritimes, qui finit par s'échouer sur une île lugubre, bien loin de sa terre natale qui ne l'avait été que pour quelques heures. Un petit être, si laid qu'il n'avait suscité aucune pitié de la part des humains. Si difforme avec ses protubérances au sommet de son crâne qu'il valait mieux faire comme s'il n'avait jamais existé, et même échoué, il n'avait aucune chance de survivre par lui-même...

Sauf que si dans le royaume des humains, cet enfant faisait office de mouton noir, ce n'était pas le cas dans le royaume des primates... Dans un monde rempli d'aveugles, le borgne était roi, et c'est ce qu'allait vivre Mozart, recueillie par l'une des tribus de Mandrill peuplant cette île isolée.

Son nom lui venait de la gravure laissée sur les morceaux de barques retrouvés. Moz'Art, c'était là le nom d'une petite entreprise chargée de fabriquer des embarcations en tout genre, et bien que celle-ci ait fini par couler suite aux ravages de l'inflation, elle avait, un peu contre son gré, laissé son appellation en héritage à cet enfant par la force des choses. Voilà comment les Mandrills, intelligents mais aussi primitifs, se contentaient d'appeler cet enfant qui ne serait finalement pas si différent d'eux en grandissant.

Certes, il n'avait pas de poil partout, certes, il semblait bien plus bruyant que la moyenne, mais eux voyaient en lui la beauté que personne d'autre n'aurait vue avant eux.

Ainsi, elle fut élevée de la même manière que sa "fratrie", une portée de cinq mandrills nés juste avant elle. Intégrée par la force des choses, ces créatures qui vivaient par mimétisme lui transmirent naturellement cette manière de vivre. Ce qu'elle gagnait en instinct en grandissant, elle le perdait en culture et en intellect. Non pas qu'elle était idiote ou dépourvue de bon sens, mais dans un monde normal, elle ne pouvait pas vraiment se revendiquer comme étant le couteau le plus aiguisé du tiroir.

Bien qu'elle était du genre à le prétendre, simplement par orgueil ou par amusement. Heureusement pour elle, Mozart était devenue davantage un Mandrill sans poil qu'autre chose. Si elle avait été plus âgée, elle aurait sans doute fini comme tous ces malheureux ayant la malchance d'échouer sur l'île, condamnée à travailler jusqu'à épuisement total. Mais pas elle. Elle, elle était de la tribu ! Et à défaut de prendre des coups de fouet, elle s'amusait bien souvent à les donner, n'éprouvant aucune sympathie envers ces gens qui étaient pourtant son peuple légitime.

Mozart avait trouvé sa place, alors pourquoi s'en plaindre ? Certes, elle avait été abandonnée à la naissance, mais elle n'en savait absolument rien. Son monde s'arrêtait aux frontières de ces terres sombres et à ses pairs qui l'appréciaient pour ce qu'elle était ! Débrouillarde, active, amusante, cruelle comme un animal avec sa proie, elle était à leur image.

Ce ne fut que lorsque sa tranquillité vint à être menacée, à l'image de cet homme se mettant à défier et à tuer son peuple avec une force étonnante, qu'elle se demanda ce qu'il pouvait bien y avoir au-delà de ce monde. Non pas par ennui du sien, mais parce qu'elle refusait d'être dominée de la sorte par un étranger ! À l'image de ces bêtes, de ces animaux, elle avait hérité de leur orgueil sans fin, et elle se refusait à voir son île être conquise de force par une pourriture !

Cependant, si elle était similaire de bien des manières à sa famille adoptive, elle n'avait pas leur force, ni leur potentiel unique. Elle était capable d'apprendre, de s'adapter, mais pas aussi bien qu'eux. Ce qu'elle ne possédait pas en capacité de mimétisme, elle le possédait en inventivité. Contrainte de constater que son inventivité ne lui permettrait pas de sortir de sa cachette et de sauver son peuple, elle se contenta de se servir des embarcations laissées derrière par les esclaves échoués sur l'île pour partir sans dire un mot.

Bien sûr, elle n'avait aucune notion de navigation et s'échoua au premier bout de terre rencontré. Heureusement pour elle, celui-ci était civilisé, et ce fut à l'âge de seize ans qu'elle tenta de découvrir le monde au-delà. Celui qui faisait peur, celui qui était habité par les méchants humains ! Incapable de trouver la solution au problème de son peuple par elle-même, elle espérait la trouver dans l'inconnu !

Une naïveté qui faisait sa force et sa faiblesse... Il ne lui fallut que quelques semaines avant de tomber dans des coups foireux, embrigadée dans des ennuis sans nom la forçant à piller boutiques et autres joyeusetés. Après tout, elle n'était pas faite pour la civilisation, simplement le chaos organisé.

Mais ce n'était pas grave ! Elle était débrouillarde la Mozart ! Et elle n'était clairement plus aussi laide qu'à sa naissance ! Elle saurait se débrouiller et faire trembler le monde de ses pas ! Avant de déloger le squatteur ayant souillé son île !