Un visage familier te toisait dans le lointain et tu te rapprochais indéniablement, inexorablement. Et qu’importe la distance que tu parcourais, elle continuait de te prendre de haut. Bientôt, tu aperçus ta silhouette se refléter dans ses iris violacés. Elle arborait une expression provocatrice sur sa figure.
Tu restas muette, presque docile face à elle. C’était une femme intimidante, même pour toi. Son carré noir de jais plongeant, sa taille fine soulignée par un corset, ses longues jambes élancées parachevées par des escarpins ahurissants. Tout chez elle renvoyait donc une aura de puissance.
Soudainement, le roulis du navire te fit cogner violemment la tête contre la paroi derrière toi et t’arracha à ce rêve pour le moi dérangeant et désagréable. Voilà des mois que tu n’avais pas croisé la route de ta mentore. Mais son influence était encore grande sur toi, Ma protéger. Tu pestas de te sentir aussi pitoyable après ce songe et cet échec cuisant.
Tu voulus te relever, mais des fers à tes poignets reliés à une barre de métal t’empêchèrent de bouger. Deuxième raison de râler. Ainsi tu regardas autour de toi. Jaina dormait toujours, assis en face de toi. Un peu plus loin, Wanda était également inconsciente. Mais vous n’étiez pas seules dans la pièce. D’autres prisonniers végétaient entre ces murs.
Certains semblaient croupir ici depuis des mois, aussi émaciés qu’ils fussent. D’autres avaient l’air d’avoir été gavés pour le plaisir de manger de la chair grasse. Une vague de dégoût s’empara de toi en cet instant en réalisant toutes les implications que cela sous-entendait.
Tu écoutas les sons ambiants, une fois cette sensation désagréable refoulée. Outre le bruissement de la houles qui te parvenait depuis le hublot, le cliquetis métallique des chaînes et menottes et les ronflements, tu arrivais à distinguer à travers l’écoutille le murmure de la ripaille des hommes-poissons, ainsi que l’écho étouffé des bottes martelant le parquet au-dessus de vos têtes.
Tu te contorsionnas sur place en soupirant, prenant une position des plus grotesque, affalée à demi sur une fesse, les mains bien au-dessus de ton crâne, presque comme si tu suppliais qu’on te violente, pour chercher à attirer l’attention de ta capitaine. Dans cette position improbable, tu remuas le pied, essayant de buter dans celui de ta supérieure.
Après quelques efforts infructueux, où les fers s’enfoncèrent plus profondément dans ta chair à chaque tentative, tu parvins à toucher plusieurs fois la jeune femme. Elle sortit de sa torpeur tandis que tu te redressais convenablement, ce que tes poignets remercièrent.
Tu plaças un index sur tes lèvres pour l’intimer de se taire lorsqu'elle tourna les yeux dans ta direction. Tu lui tendis tes mains pour lui témoigner votre état d’emprisonnement et pointas également en direction de Wanda pour la rassurer au mieux. Sa fille était dans la même pièce que vous. Et enfin, en mimant des pas avec des doigts et en montrant le plafond, tu désirais lui faire comprendre que vos ravisseurs se trouvaient juste au-dessus de vous. Vous étiez dans de beaux draps.
Le narrateur est la faucheuse, elle fait partie intégrante à l'histoire, quand elle intervient, le texte est en italique (sauf dans les dialogues)
- Moissonneuse et Désespoir/poussière:
Désespoir et Poussière
La Moissonneuse
Dernière édition par Jessica Hellhound le Ven 23 Fév 2024 - 16:15, édité 5 fois