- « Mais c’est quoi cet endroit ? » S’interrogea Meilan, la mine circonspecte devant l'environnement dans lequel nous avancions.
Et à raison. L’aspect de cet archipel ne donnait pas du tout envie de s’y attarder. A première vue, tout donnait envie de se barrer illico : entre les vagues mugissantes, les récifs qui rendaient les tentatives d’accostage difficiles, les îles qui s’élevaient à la verticale le froid polaire qui y régnait ainsi que la brume quasi-perpétuelle, il y avait de quoi vouloir s’en aller. Pourtant, c’était bel et bien dans cet endroit que se trouvait ma cible. Va savoir ce qu’il foutait là. Retraite pour s’entrainer hein ? Bien probable. Ce type avait l’air bien lunaire. A bien des égards, il ressemblait presque à Don Lope, bien que Yamato devait être moins extravagant que le premier. Toujours est-il que je voulais sa peau et que je n’allais pas tarder à l’avoir. Intuition ? Même pas. Foi d’amiral. Et pour ce combat, j’étais bien décidé à utiliser tout ce qui était en mon pouvoir pour le foutre au tapis. L’honneur du sabreur que j’étais ne primait pas cette fois : je voulais venger feu le vice-amiral Eustache, un point c’est tout ! Et pour ça, si je devais même mobiliser mes hommes de mains et Meilan qui était mon bras droit, je n’hésiterais pas. Ne parlons même pas de mes autres techniques dont je m’étais pourtant privées pour faire uniquement danser ma lame face à Don Lope. Dans cette situation bien particulière, il n’y aurait tout simplement pas de demi-mesure…
Alors que mes hommes s’affairaient à maintenir un cap correct sans savoir exactement où accoster vu la multitude d’îles qui parsemaient l’endroit, je fis signe à la plupart d’affaler les voiles, ainsi que des canots. Perdre de la vitesse, jeter l’ancre en dehors d’un courant trop important et utiliser des canots pour inspecter les environs… Voilà la solution qui me venait à l’esprit. Mes hommes de main s’armèrent aussitôt. Hormis Ania et Yulia, tous allaient descendre dans des canots et inspecter les environs. Tout fouiller avec des cuirassés semblaient assez compliqué. Je pouvais moi-même faire l’effort de descendre sur terre et utiliser mon haki de l’observation pour mâcher le travail, mais je savais que mes fiers soldats voulaient se rendre utiles. Après tout, c’était moi qui allais livrer combat dans un premier temps, ce qui était en soit, la partie la plus compliquée de cette opération -si tant est qu’on pouvait appeler cette descente sur Vertbrume, une opération. Assis donc sur une caisse posée contre le mur un bastingage, je dégustais des nouilles trempées dans une soupe chaude et épicée. Le must pour bien se réchauffer, moi qui étais d’un naturel très frileux. Origine Alabastienne oblige, que voulez-vous ! De quoi m’arracher un rire alors qu’avec mes baguettes, je saisis une grosse lamelle de viande que je tendis à mon kung-fu dugong.
- « Est-ce que tu veux qu’on engage le combat si on le voit ? Ou qu’on l’encercle à minima ? » Me demanda Meilan, légèrement anxieuse pour une raison qui m’échappait.
- « Hein ? Non. Pas de combat… Et puis j’pense pas qu’il fuira… Ou qu’il aura l’occasion de le faire. Faudrait qu’il soit un as de la navigation… Ou qu’il ait un équipage surpuissant, ce qui m’étonnerait vraiment… »
Meilan soupira sans se cacher tout en observant mon animal se repaitre des morceaux de viande que je lui passais. Rien ne pouvait le mettre plus en joie que d’avoir de la bonne bouffe. Lorsque j’essayai néanmoins de lui faire avaler les nouilles, la p’tite bestiole tourna sa tête avec dédain, comme si elle me boudait ou m’en voulait pour mon affront. Nan, vraiment lui, il voulait que de la viande. Sa réaction fit redescendre « la pression » pendant quelques secondes puisque ma cousine et moi pouffâmes de rire. Puis, sous un salut militaire, elle s’en alla. C’est donc quelques minutes plus tard que plusieurs canots se dispersèrent dans l’archipel pendant que toute la flotte était à l’arrêt, au sud de toute la région. Meilan, Bryan, Melvis et Mereleona dirigeait pas moins d’une dizaine de canots. Ania, Koko, Yulia et Glen étaient restés sur place, au cas où. De toute façon, j’interdisais toujours aux deux premières de se battre même si je savais qu’elles étaient assez puissantes pour se démerder sur un champ de bataille. C’est d’ailleurs Koko qui s’approcha de moi pour récupérer le bol de nouilles que j’avais fini de vider cinq minutes après le départ de mes hommes de main. Clope au bec, cette dernière, debout à côté de moi, laissa son regard se perdre un moment à l’horizon peu visible du fait de la brume. Puis, elle prit parole au bout d’une minute de silence :
- « C’est vraiment une opération nécessaire ? »
- « Vous parlez comme si on s’attaquait à un empereur là. C’est rien qu’un supernova de rien du tout. »
- « Un supernova qui a buté un vice-amiral quand même. Et puis, vu dans quel état tu as fini la dernière fois face à Don Lope… »
- « Certes. Mais autant venger un vice-amiral qui n'avait rien demandé, non ? Je suis payé pour ça, moi. On m’a pas promu pour la beauté du geste. »
- « Je n’en disconviens pas, même si contrairement à la dernière fois, je ne le sens pas… »
J’aurai pu répliquer, mais je préférai ne rien répondre pour le coup. Dans un certain sens, je pouvais comprendre l’inquiétude des miens. D’après les ragots, Yamato était bien plus fort que Don Lope. Autant dire que le buter ou l’emprisonner ne serait pas une sinécure. Cela dit, en plus d’avoir été promu amiral récemment, j’avais également progressé. Ne bute pas un membre du dragon de la révolution qui veut. Mais qu’importe. L’essentiel était ailleurs. En voyant que j’étais bien décidé à ne pas changer d’avis, Koko haussa ses épaules et s’en alla silencieusement, suivi par Jo, mon Kung-fu dugong qui n’était visiblement pas rassasié. Je les laissai s’éloigner avant d’avaler une bonne lampée de vin directement au goulot d’une bouteille déjà dévissé. Puis, je me fouillai pour chercher une clope. Manque de pot, je ne trouvai aucune cartouche sur moi. C’était bien ma veine. C’est ainsi que je me levai de mon siège de fortune, avant de fourrer mes mains dans les poches de mon pantalon pour me rendre tranquillement vers ma cabine, quelques ponts plus bas. Mais à peine avais-je effectué quelques pas que mon den-den-mushi portatif sonna. Rapide ! Très rapide, même. La gueule qu’affichait d’ailleurs mon gastéropode était celui de Mereleona. Etait-ce la première à l’avoir trouvé ? Plus qu’un seul moyen de le savoir : décrocher l’appel.
Dernière édition par Alheïri S. Fenyang le Dim 4 Fév 2024 - 12:45, édité 1 fois