OPA hostile - partie 2

Le chef du clan Suisou se leva aux aurores, comme à son habitude. Néanmoins, ce matin là, des cernes inhabituels noircissaient ses yeux. Il avait dormi dans une chambre spacieuse, gracieusement allouée par Johnny Blue. La confiance ne régnait toujours pas entre les clan Wave et Suisou, pourtant ses hommes et lui avaient accepté l'hospitalité de leurs hôtes. Quant à relâcher leur garde, c'était une toute autre affaire ! Mais la raison de son manque de sommeil n'incombait pas à une quelconque paranoïa qui l'aurait tenu éveillé toute la nuit. Non. Quelqu'un s'était introduit dans ses quartiers et l'avait entretenu de sujets importants concernant le clan Darkness. Une femme doté de trois yeux, qui représentait les intérêts de la famille Valthane : Davinia.

Matsuri lui avait été d'une grande aide, encore une fois, non seulement grâce aux informations qu'elle lui avait apportées, mais également grâce à son soutien. L'épisode avec le clan Wave leur avait confirmé que les autochtones de Carcinomia n'étaient pas des enfants de cœur. Aussi, malgré la discussion cordiale et constructive avec la jeune femme, Hayato restait prudent. Si sa famille pouvait bel et bien lui assurer un entretien avec les Énigmatiques, le clan d'assassins le plus redouté de l'île, leur conquête n'en serait que plus simple et rapide ! Pour autant, rien n'assurait que cette branche du clan Darkness accepte de trahir X-Bronze, malgré les rumeurs de dissension qui secouait leurs rangs, selon Matsuri. Pour l'heure, l'épéiste descendit des escaliers en colimaçon, afin de rejoindre le reste de sa famille dans le grand salon du clan Wave.

Ce dernier occupait tout le rez de chaussé d'un grand bâtiment en bois, situé sur les docks. Si l'extérieur semblait brinquebalant, l'intérieur s’avérait en réalité doublé de pierres brutes solides. La décoration jouissait d'une richesse comparable à celle de la barge de Johnny. On reconnaissait bien là les goûts luxueux du raideur ! Des tableaux volés aux quatre coins de la mer, des fauteuils et canapés aux tissus soyeux et au confort indéniable s'étalaient partout dans la grande pièce rectangulaire. En plein milieu trônait une massive table en bois, aux pieds taillés dans des formes artistiques, sur laquelle reposait des assiettes en porcelaine finement travaillées et de l'argenterie qui avait dû appartenir à un noble. Une farandole de pains, pâtisseries fumantes, charcuterie, fruits exotiques et de confitures diverses n'attendaient qu'à être dévorées. D'ailleurs, certains ne s'était pas fait prier...


- Oi ! Faudra me donner la recette de votre pain, il est sensas' !
- La confiture de fraises est excellente. Nous n'en avons pas de similaires, dans les îles célestes.
- Nan mais ce jambon ! Quelle tuerie ! s'exclama Adonis, secondé par Zack.
- C'est bien vrai ! Il vient d'une cargaison qu'on a interceptée, en provenance de Hat Island ! leur expliqua un larbin du clan Wave.
- Bande de sauvages... vous pourriez un peu mieux vous tenir ! les sermona Medusa.
- Dixit celle qui en est à sa troisième tartelette à la cerise ? releva Kong.
- Vous voulez une quatrième tasse de thé, m'sieur Kong ? lui proposa un vieux loup de mer. On l'a volé à une délégation de Kanokuni qui s'était perdue sur North Blue.
- Volontier, il est fameux ! déclara le moine en tendant sa tasse pailleté d'or.


Avec un soupir amusé, Hayato retrouva son clan plein de vie en train de tailler la bavette avec les soudards du clan Wave, comme si de rien n'était. Lamia semblait bien plus digne, par rapport aux énergumènes des deux clans qui s'agitaient ! Il aurait été presque impossible de deviner qu'ils étaient prêts à se jeter à la gorge les uns des autres, pas plus tard que la veille. Affalé dans un gigantesque fauteuil, semblable à un trône de velours, Johnny Blue grignotait des pâtisseries. Il croisa le regard d'Hayato et le salua d'un geste de la tête, ce à quoi le sabreur répondit en s'inclinant.


- Je ne m'attendais pas à ce que vous soyez tous déjà levés, glissa ce dernier.
- Bah... c'est qu'on a pas eu le temps de bouffer hier soir, expliqua Rougui. Alors quand on a senti le petit dej'...
- On est venus aider à tout faire disparaître ! s'exclaffa Adonis.
- Trop aimable, ironisa Johnny.


Lorsque le guitariste l'y invita, Hayato s'assit et commença à lorgner du coté d'une tarte au citron. Alors qu'il se versait une tasse du fameux thé de kanokuni, il eut une pensée pour Feng, en se demandant ce que devenait son vieil ami. Il revint bien vite à la situation présente. Tout en savourant le coté acidulé de la tarte, le bretteur lança :


- Dites moi, Johnny, que pouvez vous me dire sur la famille Valthane ?
- Ah ouais, t'attaques comme ça dès le matin ?
- Contrairement à ce que mon clan peut laisser penser, nous ne sommes pas ici en villégiature. S'il est préférable de savoir relâcher la pression, je n'en oublie pas nos objectifs.
- Ouais... Bref. C'est une famille qui est proche du clan Darkness, mais qui s'entend pas vraiment avec X-Bronze. Ils sont plutôt versés dans le commerce d'armes, en particulier grace à leur vieux, Talkan. Le gars est pas à sous-estimer.
- Je vois.


Il sirota son thé aux notes de jasmin, qui le ramena des années en arrière, lors d'une entrevue avec Feng dans un temple de West Blue. Il sourit pour lui, nostalgique, avant de tendre l'oreille :


- Pourquoi tu demandes ?
- Leur fille est venue me voir, hier soir.
- Sacré Aniki ! À peine arrivé que t'as déjà une conquête ! clama Adonis en le frappant dans le dos.


Non sans secouer la tête, avec un petit sourire en direction de son navigateur, il reprit :


- Nous avons parlé affaires, et notamment sédition. Davinia joue l'intermédiaire entre son père, son grand père et moi, pour négocier les conditions de ralliement de la famille Valthane.
- Bordel... laissa échapper Buck, le second de Johnny.


Le colosse à la peau d'ébène releva ses lunettes de soleil et lâcha :


- En une nuit, t'as déjà commencé à foutre le zbeul chez les Darkness ?
- Comme je vous l'ai dit, je suis un homme d'affaires, pas un bleu inexpérimenté. Qui plus est, Davina m'a également parlé d'une autre branche du clan qui pourrait accepter de se tenir à l'écart des combats. Je dois juste me montrer convaincant. Puisque ce sont des assassins, cela nous arrangerait énormément. Je dois les rencontrer dans les jours à venir.
- Oi oi... me dis pas... T'as démarché les Enigmatiques ?
- Davinia s'en occupe pour moi, je vous demanderai de rester sur vos gardes, néanmoins. Nous n'en sommes qu'au début des négociations.


On entendit soudain les mouches voler dans la salle, tandis que les yeux des hommes du clan Wave s'écarquillaient. Certains signèrent, lancèrent une prière silencieuse à leur Dieu, d'autres lancèrent des regards inquiets vers leur chef. Ce dernier lampa une gorgée de café, avant de grincer :


- J'espère que tu sais ce que tu fais. Ces mecs là... ils sont pas humains. Si y'a du grabuge, ça peut vite tourner au bain de sang.
- « L'art de la guerre, c'est de soumettre l'ennemi sans combat », cita Hayato. J'apporte quelque chose qu'ils recherchent, ils représentent une force de frappe conséquente du clan Darkness. Si nous arrivons à nous entendre, les combats seront bien plus limités. La chute d'X-Bronze sera alors précipitée, pour le plus grand bien de tous.


L'épéiste se tourna alors vers Lamia, pour chercher son soutien :


- N'êtes vous pas d'accord, Lamia ? J'imagine que le capitaine Red a dû recourir à ce genre de stratagèmes, pour accéder à la place de Yonkou ?

Hayato écoutait d'une oreille attentive les propos de Lamia. Effectivement, ses paroles faisaient sens. Non seulement son initiative de prendre contact avec un mouchard local s'avérait précieuse, mais ses demandes d'éclaircissement semblaient opportune. Combien de fois un criminel ambitieux s'était il vu planter un poignard dans le dos, par des alliés qui avaient fini par sentir le vent tourner ? Telles des girouettes, certains hors la loi avaient le chic pour flairer la moindre occasion de changer d'allégeance, en fonction de leurs besoins. Tout le monde ne souhaitait pas forcément suivre un code d'honneur strict et louable. Il était parfois bon de le rappeler. D'ailleurs, le sous-entendu placé par Lamia, voire même la mise en garde face à leurs alliés de circonstances, ne tomba pas dans l'oreille d'un sourd. Le chef du clan Suisou lui fit comprendre d'un regard et d'un hochement de tête entendu. Hayato répondit ensuite d'une voix calme :


- J'en prends bonne note, et je ferai en sorte de m'enquérir de garantie auprès d'eux. Quant à définir les Énigmatiques...
- Je pense que je suis mieux placée pour répondre à cette question, intervint Matsuri.


La kunoichi s'avança et salua Lamia d'un signe de tête, avant de reprendre la parole :


- Les Énigmatiques ne sont pas une bande d'assassins de bas étage. Ils ont un code de conduite strict, n'acceptent les contrats qu'en fonction de leur sens de la justice et de l'intérêt de leur clan. Leurs membres sont d'une efficacité redoutables : rapides, discrets et surtout efficaces.
- Ils sont dangereux, j'ferai gaffe à ta place, résuma Johnny.
- Dangereux, oui, reprit Hayato. Mais également ambivalents dans leur relation avec X-Bronze. Ils n'aiment pas sa façon de gouverner et ne s'en cachent pas. Nous allons leur offrir ce que la structure actuelle du clan Darkness ne leur permet pas d'obtenir : un chef avec la tête sur les épaules.
- Ça va, les chevilles ? se moqua le raideur. Remarque, par rapport à X-Bronze, on peut difficilement faire pire...


Un sourire étira le visage du bretteur, face à l'humour cinglant du chef du clan Wave. Ce dernier avait sans doute du mal à digérer la situation actuelle. Pourtant, il n'était pas au bout de ses surprises. L'épéiste se racla la gorge, avant de continuer sereinement :


- Je pense qu'il est temps d'expliquer la suite du programme et de nous répartir les rôles décisifs. Nous avons fort à faire, avec une marge de manœuvre limitée afin d'éviter tout bain de sang inutile.


Lorsqu'il fut certain d'avoir accaparé l'attention de tout le monde, il poursuivit :


- Nous avons besoin de plusieurs équipes. La première s'occupera de filtrer les ressources, de voler et dissimuler des marchandises. Le but est d'isoler les clans Burn et Darkness, de les affaiblir peu à peu et de les forcer à commettre un impair.
- Ça tombe bien, c'est notre spécialité ! s'exclama Buck.
- La seconde nécessite du doigté et de la discrétion. Matsuri et Zack doivent disséminer de fausses preuves, faire porter le chapeau à X-Bronze et à Foster Red pour le blocus et les disparitions de marchandises.
- Mis à part si vous êtes formés, j'veux pas de vous dans nos pattes ! Graou !


La remarque du Mink en crispa quelques uns, aussi Hayato enchaîna :


- La troisième équipe va s'occuper d'éclaircir les rangs de nos ennemis, dans l'ombre. Pas de bagarre, pas de bataille rangée. Simplement des disparitions aléatoires, sans laisser de trace. Plus que de les affaiblir, il s'agit d'éxercer une pression psychique et d'attiser la suspicion entre chaque faction, afin de faciliter ce qui suivra.
-  C'est à dire ? relança Johnny.
- Ce sera le travail de la quatrième équipe, qui va devoir attendre quelques jours, patiemment. Avant que les clans Avast et Omega ne sortent de leur gonds, mais après les avoir mis dans de bonnes prédispositions, il faudra s'occuper des négociations avec eux pour les rallier à notre cause. Le tout, le plus discrètement possible. C'est une mission capitale, car ils possèrent des infrastructures, des connaissances et des technologies extrêmement intéressantes. Cette tache ne doit pas échouer.


Après un instant de flottement, le chef de clan termina enfin :


- La cinquième et dernière équipe s'occupera de la coordination des différentes équipes. Elle devra aussi gérer la récolte d'informations et surtout le contre espionnage, afin que nous restions cachés le plus longtemps possible. De même, elle devra maintenir le lien avec notre blocus, à l'extérieur de l'île, pour anticiper tout problème.


Alors qu'il allait demander s'il y avait des questions, Buck s'écria soudain :


- Oi, Oi ! T'oublies pas deux trois trucs, là ? Genre, les fameux Énigmatiques ? La famille Valthane... Puis, je sais pas... le bottage de cul en règle des clans Darkness et Burn ?
- Comme je l'ai dit, je m'occuperai personnellement des négociations avec ces deux groupes. Pour ce qui est du "bottage de cul en règle", chaque chose en son temps. Si nous effectuons cette phase correctement, ce seront eux qui viendront à nous, affaiblis et aux abois. Vous n'aurez pas besoin de vous battre, comme je vous l'ai déjà dit, si c'était la question sous-jacente.
- Hmm... je demande à voir, grommela Johnny.


Faisant fi de sa mauvaise humeur, l'épéiste se tourna vers Lamia avant de lui demander :


- Une préférence, ou des points à rajouter, Lamia ?

Le chef de clan tendit une oreille attentive aux propos de Lamia. Un fin sourire s'étira sur son visage, lorsqu'elle fit la remarque que l'empereur Red et lui-même s'entendraient sans doute à merveille. Après tous les enseignements de feu son père adoptif, ainsi que des années de pérégrination sur les Blues, c'était là un compliment qu'il ne prit pas à la légère. Il remercia donc la jeune femme en s'inclinant diligemment. De même, il comprit parfaitement les raisons sous jacentes au choix de Lamia. Il s'agissait de forcer le clan Wave à mettre la main à la patte, les garder sous surveillances, les disperser pour éviter les coups de poignard dans le dos et s'assurer de leur pleine intégration, dès le début des hostilités. Après un court instant, Hayato se racla la gorge avant de reprendre la parole :


- J'en prends bonne note, Lamia. Dans ce cas, nous allons tout de suite répartir les équipes et nous mettre au travail.


De son doigt pointé, l'épéiste désigna quatre personnes :


- Buck, Johnny, Lamia et Adonis, je pense effectivement que vous êtes les plus à même de filter, voler, détourner et dissimuler les marchandises des différents clans.
- Compte sur moi, Aniki !
- Comme dit précédemment, Zack et Matsuri s'occuperont des missions d'infiltration et de planter de fausses preuves un peu partout sur l'île.
- Graou ! Evidemment !


Avec un simple hochement de tête, Matsuri accusa la bonne réception de l'ordre. Hayato continua sur sa lancée en désignant deux autres personnes :


- Rougui, il est inutile de te dire ce que j'attends de toi ?
- Ouais ! J'vais casser quelques dents pour passer le temps !
- Tartys ?
- J'éviterai qu'elle ne se laisse emporter et ne nous fasse repérer.
- Même pas drôle....


Le bretteur laissa échapper un sourire avant de se tourner vers l'ex chasseuse de primes :


- Dash, tu viendras avec moi pour rencontrer les clans Omega et Avast. Tu as toujours été fine négociatrice.
- « Intraitable », tu veux dire ?
- C'est un synonyme, te concernant, lui concéda son chef de clan d'un ton taquin. Si vous êtes libre à ce moment, je pense que vous seriez également un plus dans les tractations, Lamia.


L'ancien vagabond laissa le temps à la flibustière de lui répondre, avant de terminer par l'équipe socle :


- Johnny, vous connaissez mieux que nous tous votre territoire et l'île. Médusa et Kong vous assisteront pour la logistique, la coordination et le contre espionnage.
- Hmmm... j'te l'accorde celle là, même si j'aime pas trop recevoir des ordres.
- Un choix judicieux, abonda Kong.
- Ça veut dire que je peux donner des ordres à tout le monde ? Hinhinhin... ricana la femme-serpent.


Le guerrier laissa les petits groupes se former et commencer à discuter stratégie, coopération ou, tout simplement, quel type de confiture ils souhaitaient étaler sur leur tartines. Hayato les laissa commencer à faire connaissances quelques instants, pendant que lui même faisait taire la petite fringale qui faisait gémir son estomac. Lorsqu'il fut rassasié, il se racla la gorge. Une tasse de thé fumante à la main, il déclara :


- Il est inutile de tracer des plans sur la comète ou de tenter de donner un planning précis. Nous aurons sans doute besoin de nous adapter et de réagir aux réponses des autres clans, afin de toujours garder un temps d'avance sur eux. Rester figé dans nos réactions nous rendrait prévisible, et donc nous mettrait en danger. J'ai pleine confiance en vos capacités, je sais que vous agirez au mieux.


Il fit un tour de table, plantant son regard d'airain dans ceux de ses camarades. D'une main, il leva son verre à sa bouche et sirota une gorgée de temps, avant de reprendre la parole :


- Nous allons commencer dès aujourd'hui la première partie du plan : commencer à détourner les ravitaillements. En parallèle, les équipes deux et trois pourront commencer à prendre leurs marques. Durant ce laps de temps, je m'arrangerai pour rencontrer les Enigmatiques, sans me faire repérer. Lorsque nous jugerons le timing opportun, nous débarquerons « officiellement », afin de lancer la phase deux du plan. À ce moment là, nous pourrons prendre audience auprès des clans Avast et Omega. À partir de ce moment, la bataille inévitable avec les clans Burn et Darkness ne sera qu'une question de temps.


Après une autre gorgée de thé, le chef de clan lança à la cantonade :


- Si vous avez des questions, ou des demandes de précisions, c'est le moment. Dans le cas contraire, je vous invite à débuter le plan de conquète dès que vous aurez terminé de déjeuner.

Johnny avait, bon gré mal gré, installé une salle spéciale pour la petite équipe. Le chef du clan Wave, Kong et Medusa étaient donc installés autour d'une table ovale sur laquelle trônaient une ribambelle d'escargophones appartenant au clan Wave. La plupart permettaient de passer des appels, mais d'autres aux tons plus sombres étaient censés brouiller les communications. Devant eux, s'étalaient des petits calepins et des crayons, des tasses de thé et quelques gâteaux de riz. L'équipe de logistique s'occupait de coordonner toutes les parties du plan de conquête depuis cette petite salle rectangulaire, à peine plus grande qu'une chambre à coucher. Pourtant, le travail était minutieusement orchestré !


- Equipe une, une cargaison arrive depuis l'extérieur avec notre aval, relaya Kong d'une voix monocorde. Les caisses sont estampillées pour les clans Avast et Burn. Laissez la cargaison arriver au clan Burn, mais saisissez celle du clan Avast.
- Reçu ! Héhé !
- Equipe deux, nous avons la confirmation qu'un petit groupe de soudards du clan Burn se dirige vers vous, lança Médusa.Ils sont sensés récupérer des dettes de jeu auprès de mauvais payeur.
- Enfin un peu d'action ! s'exclama Rougui.


Le Den Den Mushi prit des airs patibulaires, tandis que la rouquine à l'autre bout du combiné devait brandir un poing serré. La médecin chef soupira, avant de reprendre :


- Tartys, vérifie que la cuistot ne fasse pas bruler tout le quartier, tu veux ?
- Je m'en occupe.
- Oi, Tartys ! Fais pas la pince et... katcha.


Le gastéropode retomba dans une morne apathie, tandis que la femme serpent se réservait une petite douceur.


- Equipe quatre, j'ai la confirmation que Barnaby White est de sortie, nous n'avons pas encore pu le localiser avec précision, mais il serait en train de se balader dans le secteur Jungle. Quant à Anthony Green, il est comme toujours enfermé dans sa chambre forte, à Virus.


De son coté, Johnny participait moins aux appels, et plus à la coordination de son propre clan pour couvrir les activités de ses nouveaux alliés. Vraisemblablement à contre cœur, il avait accepté de leur prêter main forte en envoyant Buck filtrer les marchandises, ainsi que plusieurs de ses sbires dans les différentes équipes. Il avait fait appel à Louli, la colporteuse, l'informatrice par excellence de l'île, afin de chercher à débusquer des gars qui pourraient les aider. Ainsi, la petite rouquine l'avait mis en contact avec quelques gars qui en avaient marre de la brutalité de Foster Red, ou bien de la sauvagerie de X-Bronze. Autant de taupes qu'ils allaient placer dans les rangs ennemis !

Il espérait seulement qu'il n'allait pas le regréter.



Adonis et Buck taillaient le bout de gras.

Les deux colosses parlaient affaire, filles, rhum et, surtout, chevrotine. Buck semblait intarissable sur le sujet. De son coté, Adonis était déjà à moitié saoul, et le relançait donc spontanément, entretenant le moulin à parole. Il avait beau avoir un abord assez rustre, le mastodonte chauve avait fini par s'adoucir en discutant avec le navigateur déjanté. Après avoir reçu le coup de fil de l'équipe de logistique, ils avaient fini par se lancer sur des paris concernant le quai où le sous marin accosterait. De fil en aiguille, ils en était venu à parler de tout et de rien...


- Port numéro 3, Buck, lui confia un soudard.


Le rire tonitruant du bras droit de Johnny retentit dans le ponton, bientôt suivi par Adonis. Ce dernier lança :


- La prochaine fois, j'aurais bon, tu verras !
- Impossible ! Tas pas assez d'expérience, mon gars ! J'ai de la bouteille, tu sais ?
- Bah moi aussi, regarde !
- Roooh... non, trop facile celle là !


Les deux hommes à la peau d'ébène éclatèrent de rire, bientôt ramenés au plus grand sérieux par les sbires qui les accompagnaient. D'un soupir, Adonis emboita le pas de Buck vers le port adjacent au secteur du « Roc », le domaine du clan Darkness. Profitant des infrastructures de bric et de broc, aussi denses qu'une jungle tropicale, le petit groupe avança vite et sans se faire repérer. Une fois au bon ponton, ils attendirent tranquillement que la marchandise soit déchargée et stockée dans un immense entrepôt. Une fois certain que l'équipage de transport soit parti, ils pénétrèrent dans la bâtisse. S'ils laissèrent tranquille les caisses du clan Burn, ils se saisirent sans hésiter du contenu des colis destinés au clan Avast. Il s'agissait principalement de matières premières pour confectionner leurs commandes technologiques...


- On ramène ça à tes potes, et on va se jeter un godet ?
- Pourquoi pas les deux en même temps ? Héhé !
- Jamais au boulot, mon gars !
- Broaf... j'suis plus efficace avec, tu sais ? C'est qu'une question de volonté, tu sais ? Du genre, Bonjour, moi c'est Adonis, et ça fait sept ans que j'ai réussi à commencer à boire au boulot.


Sous les moqueries et les rires gras, le petit groupe continua son office.




- Rien à droite.
- À gauche non plus.


Deux ombres furtives traversèrent la rue à toute allure. On aurait dit que le vent avait soulevé les quelques papiers épars qui trainaient dans les rues sales de la Favela. Si Matsuri et Zack ne se connaissaient pas, quelques jours auparavant, ils avaient tout de suite su apprécier leur professionnalisme et leurs techniques similaires. Le style différait, mais l'efficacité était au rendez vous ! La kunoichi préférait les milieux urbains, où ses capacités pouvaient utiliser son environnement plus facilement. Zack s'épanouissait en pleine nature... où ses instincts grégaires en faisait un véritable prédateur furtif ! Pour l'heure, le duo silencieux remontait une ruelle déserte en direction d'un perchoir. Arrivé face au mur, au fond de l'allée, Zack fit la courte échelle à Matsuri. Cette dernière sauta d'un bond gracieux, puis sembla marcher sur le mur un instant ! Elle arriva jusqu'au niveau du toit et, après un bref coup d'œil aux alentours, confirma qu'il s'agissait du plus haut bâtiment du quartier.

Ils ne risquaient donc pas de se faire surprendre.

D'un bond gigantesque, Zack la rejoignit et atterrit sans bruit. Immédiatement, ils se mirent à couvert et attendirent un instant, parfaitement immobiles et les sens aux aguets. Ils avaient reçu plusieurs informations qui les enjoignaient à commencer par le secteur du clan Burn. Pour commencer, l'ange et la rouquine avaient réussi à tabasser à mort une demi douzaine de bras cassés, sensés récupérer des dettes de jeu. Zack et Matsuri les avaient rejoins afin de maquiller la scène en un règlement de compte entre clans. Pour ce faire, ils avaient laissé trainer un morceau de ferraille appartenant au clan Avast, précédemment récupéré par Adonis et Buck. Ainsi, la perte de la cargaison du clan Avast et la mort des sbires du clan Burn trouvaient une explication parfaitement plausible... et tout à leur avantage.

À présent, ils se cachaient, surveillaient les environs, et attendaient d'autres directives.




- Roooh ! ALLER ! Juste un petit dernier ?
- Non, trancha Tartys, inflexible. Nous avons déjà réussi notre job, il serait stupide de se faire remarquer.
- Même pas un mec isolé ?
- Non, n'y pense même pas.
- Bande de radins... Tch ! pesta Rougui en croisant les bras.


La mine boudeuse, la cuisinière au tempérament sanguin fit mine d'ignorer son collègue. De son coté, l'ingénieur communiqua rapidement la réussite de l'opération à l'équipe logistique. Ils se trouvaient dans un coin désert de la Favela, au sein d'une maison à moitié en ruine, abandonnée depuis bien longtemps. Si Rougui grommelait et râlait en continu, sa mauvaise humeur ne poserait pas de problème : il n'y avait personne pour l'entendre.


- Bon travail. Je suis surprise de voir que la casserole de lait sur le feu s'est retenue !
- Je l'ai retenue, rectifia Tartys.
- Ouais bon, pas la peine d'en faire tout un plat... qui est ce qu'on tape, ensuite ?
- Pour l'instant personne, on a pas de quoi organiser un autre coup aussi vite. Va falloir être patient, p'tite patate !
- Purée...

De manière fort théâtrale, la jeune femme se tapa la tête contre le mur à plusieurs reprises, plus pour manifester son mécontentement que pour se blesser. L'ange soupira, avant de remercier Médusa. Il raccrocha et lança, plein d'espoir :


- Est ce que tu as vu la magnifique qualité de l'alliage du clan Avast ? J'espère qu'ils me laisseront l'examiner de plus prêt...
- Au secours...




De leur côté, Dash et Hayato patientaient dans les étages du quartier général du clan Wave. Plutôt que de prendre le risque de se faire bêtement repérer, en restant dans le hall d'entrée, ils avaient investi une salle de réunion au premier, afin de s'entrainer, eux aussi. Ainsi, puisqu'ils avaient la lourde tache de mener à bien les négociations avec les clans Avast et Omega, le duo bachotait. Ils avaient récupéré, compilé et analysé toutes les informations à leur disposition concernant les clans, leurs infrastructures, leurs organisations internes, leurs points forts et leurs faiblesses. De même, ils avaient recueilli des informations plus personnelles concernant les figures de proue des deux factions, afin de mieux les cerner et, donc, les amener à embrasser leur vision.

Par la suite, ils s'étaient lancé dans différents scenarii et jeux de rôles, afin de passer en revue les arguments, les contres et d'articuler leur plaidoirie. Le but était non seulement de s'entrainer à l'art de la rhétorique mais, aussi, de pouvoir assimiler les informations récoltées et de les intégrer naturellement dans leur débat à venir... qui serait sans aucun doute houleux. S'ils prenaient pour référence le ralliement, in extremis, du clan Wave, ils allaient devoir jouer serré !


- Je pense qu'Anthony sera bien plus réceptif à la notion de sécurité et de paix, puisqu'il reste en permanence cloitré à l'intérieur à inventer de nouveaux prototypes.
- C'est sans doute une option à creuser, ouais. Pareil, je pense qu'offrir des ressources et du matériel à Barnaby sera plus efficace.
- J'ai juste un problème éthique, face à ses expérimentations sur cobaye...
- Ça sera sans doute plus simple d'en parler après coup, non ?
- Je trouve un peu tendancieux de passer sous silence cette condition.
- J'aurais plutôt dit « stratégique »...


Katrina n'avait en rien perdu de son mordant. Après quelques minutes de débat, le chef de clan dût se rendre à l'évidence : mentir à un de ses partenaires n'était pas une option, pour lui. Pour autant, perdre le soutien du clan Omega s'avérerait non seulement risqué, mais particulièrement stupide dans leur condition actuelle. Ainsi, ils convinrent de ne pas aborder le sujet spontanément mais, si le parti adverse mettait l'éthique sur le tapis, de jouer la carte de la sincérité. Ils s'exposaient évidemment au risque de devoir concéder autre chose pour obtenir gain de cause... ce sur quoi dériva la conversation.

Ainsi continua leur briefing, jusqu'à ce que finalement la porte s'ouvre sur une tête connue.

La question rhétorique de Lamia fit sourire le duo de négociateurs. C'était un euphémisme ! Néanmoins, puisqu'ils s'échinaient à la tache depuis plusieurs heures déjà, une pause s'imposait afin de non seulement mettre au repos leurs cerveaux, mais également accueillir la nouvelle venue. Hayato écouta la flibustière lui rapporter les talents martiaux du chef du clan Burn qui, en un mot comme en cent, semblaient conséquents. Un fin sourire fendit le visage du bretteur, avant qu'il ne réplique :


- Un combat n'est jamais décidé à l'avance : son rythme, sa finalité et ses répercussions sont déterminées jusqu'à la dernière seconde. Cependant, toute préparation est bonne à prendre. S'il mise sur sa vitesse et son agilité, c'est déjà une bonne information que vous m'avez rapporter. Je vous remercie, Lamia.


Il tendit l'oreille, lorsque la jeune femme en armure lui présenta le fonctionnement des « élections » du chef du clan Burn. Là aussi, la manière simple et brutale de Foster Red lui amena quelques indices supplémentaires. Il n'était pas du genre à mettre son titre en péril, compte tenu des rumeurs courant sur lui. Aussi, le brigand devait estimer être le combattant le plus féroce de l'île ! Tout du moins, devait il avoir confiance en ses capacités au point de ne pas redouter le premier combattant des Blues venu.


- Quant à l'affronter sur son propre terrain, nous pourrions avoir recours à ce genre de procédé, afin d'asseoir une certaine domination physique. Je vais y penser... De notre coté nous avons bien avancé également.


Le guerrier résuma en quelques instants le premier coup de filet coordonné réalisé par leur petite équipe. Si le rodage était toujours en cours, force était de constater que l'efficacité était déjà au rendez vous ! Le clan Wave avait été forcé de mettre la main à la pate, les différentes équipes s'étaient bien coordonnées et leur mission avait été un succès. Pour autant, il s'agissait tout au plus d'un Fuseki – ou d'une ouverture au jeu de Go – qu'il faudrait transformer en une véritable stratégie gagnante.


- Pour l'instant, nous maitrisons pleinement la situation. Mais puisque nos ennemis n'ont pas encore bougé, il convient de rester sur nos gardes et d'être prêt à toute réaction.


En revanche, la dernière question fit arquer un sourcil au chef de clan. D'un regard en biais vers Dash, Hayato l'interrogea silencieusement sur la signification de ce « Haki ». Comme cette dernière haussait les épaules, les mains vers le ciel, le bretteur reconcentra son attention vers Lamia :


- Malheureusement, non. Mais puisque vous faites la transition après m'avoir parlé de la puissance de Foster Red, j'imagine que ce « Haki » est lié, de près ou de loin, au combat ?


En se creusant les méninges, l'épéiste se remémora peut être quelques messes-basses, des rumeurs, des on-dit tout au plus... mais personne ne lui avait parlé de ce « Haki » de manière aussi directe. Se pourrait-il que Lamia détienne un atout non négligeable dans sa manche ?


- Vous avez toute mon attention, Lamia. Qu'est ce donc que ce « Haki » ?

Un calme surnaturel retomba sur la petite salle en un instant. La phrase de Lamia avait fait mouche ! Dire qu'un tel pouvoir était capable d'assurer leur survie sur Grand Line, alors qu'il n'en avait jamais entendu parler sérieusement jusqu'ici, arracha une sueur froide au chef de clan. S'il était passé à coté d'un fait aussi décisif, après plusieurs années de pérégrination sur les Blues... qu'avait il manqué d'autre ? Une phrase de son père lui revint bien vite : « Qu'importe la préparation, la vie n'épargne personne. ». Peu importait ses précautions ou toute sa détermination, au final, il restait une poussière dans un engrenage dantesque.

Mais ne restait poussière seuls ceux qui le souhaitaient.

L'épéiste serra le poing devant la démonstration de la flibustière. Ce Haki de l'armement était terriblement efficace ! Qui sait quand il aurait l'occasion de croiser une autre personne qui le maitrisait ? Et, lorsqu'il la rencontrerait, serait-ce la fleur au fusil... ou les armes à la main ?  La jeune femme avait beau affirmer ne pas être une professeur douée, il ne pouvait pas laisser passer cette occasion. Après un instant où il resta éberlué, le chef de clan reprit ses esprits et se racla la gorge. De sa main droite, il se gratta d'un air songeur sa barbe de trois jours, tout en fixant Lamia. Enfin, il reprit la parole d'une voix calme :


- Je n'ai toujours pas de nouvelle des Enigmatiques ou de Davinia. Cependant, compte tenu de leur modus operanti, je ne m'affole pas pour le moment. Je compte les relancer ce soir, afin de déterminer un endroit neutre où nous rencontrer. Si vous le souhaitez, vous pourrez évidemment m'accompagner ?


Après s'être enquis de la réponse de la pirate, le bretteur planta ses yeux dans les prunelles de la dame du lac. Sans se départir de sa sérénité, il rebondit sur la démonstration de force de la jeune femme :


- Ce pouvoir... ce « Haki », m'a l'air à la fois puissant et versatile. Je n'ai jamais vu pareille démonstration, en sept années à parcourir les Blues. Serait-ce impoli de ma part, de vous demander de m'apprendre, Lamia ?


La tournure n'était pas anodine. La plupart des personnes recherchaient de manière inconsidérée, presque frénétique, à arracher un « oui » lors de leurs discussions. De son coté, des années d'expérience en négociation avaient fini par apprendre à Hayato un tout autre secret : il était bien plus facile de faire dire « non » à ses interlocuteurs. Or, ce « non » pouvait avoir la même valeur qu'un « oui », en fonction de la tournure choisie. Le « non » était le signe que l'on souhaitait garder le contrôle, qu'on imposait son rythme et ses limites. Ainsi, le biais psychologique marquant de cette approche était le suivant : la personne en face de soi suivait la voie de la moindre résistance. Qui avait envie de traiter son vis-à-vis d'impoli ? Bien loin d'être infaillible, cette technique de communication avait pourtant souvent porté ses fruits pour le vagabond, et ce pour des demandes bien moins anodines que celle-ci. Néanmoins, il le sentait, ce « Haki » n'était pas à prendre à la légère. Compte tenu de ses ambitions, il ne pouvait pas se permettre de se voir débouter.

Il s'en remettait à présent à Lamia.

L'épéiste s'inclina humblement, avant de remercier la pirate. Elle avait accepté sa demande, apparemment à moitié embarrassée par la nouvelle, néanmoins Hayato n'y voyait qu'une occasion saisie au vol. Il ne comprit pas vraiment les limitations dont faisait état la jeune femme, mais la suivit malgré tout. Une fois dans la vaste salle qui leur servirait de dojo improvisé, le bretteur croisa les bras et tendit une oreille attentive. C'était la première fois qu'on lui expliquait en termes aussi simples et direct ce fameux « Haki », qui en réalité se divisait en trois compétences distinctes. Si la théorie semblait simpliste, il se doutait bien que la pratique ne serait pas aussi simple ! D'ailleurs, le simple fait que la dame du Lac se mette en garde, avant de parer ses poings d'une couche noirâtre, lui confirma ce qu'il avait supposé : le Haki s'apprenait en croisant le fer.

D'un geste souple, il retira Kashuu de sa ceinture, avant de le poser délicatement à terre. Par réflexe, il salua Lamia avant de s'approcher d'elle, sur ses gardes. Il n'eut pas le temps de faire des plans sur la comète, que son adversaire attaquait déjà ! D'un coup de poing télescopé, la pirate s'était élancé à l'assaut immédiatement. Par réflexe, le bretteur para de son mieux... avant de sentir ce qui n'allait pas. Il recula d'un bond, avant de jeter un coup d'oeil à sa main. Elle n'avait fait qu'effleurer l'attaque qui, normalement, aurait dû être ainsi déviée, mais une ecchymose ornait déjà sa peau. Un coup direct allait certainement laisser des marques ! Contre toute attente, le jeune homme sourit.

Il avait encore tant à apprendre !

Le guerrier se concentra de nouveau, et retourna au combat en un instant. Il laissa la jeune femme l'attaquer de nouveau, esquivant et parant de son mieux les attaques. Lentement, les bleus s'accumulèrent sur le corps de l'ex vagabond. À mesure que les échanges se multipliaient, il sentait le poids des coups prélever leur dû sur son corps, peu à peu meurtri. La flibustière n'était pas habituée au combat à main nue. Pourtant, même sans Haki, elle aurait sans doute tenu la dragée haute au chef du clan Suisou. Rapide, précise et dotée d'une force de frappe conséquente, elle ne montrait aucune pitié dans l'entrainement impromptu de son camarade. La scène lui rappela le randori effectué avec Feng Han, des années auparavant, sur West Blue.

Un combat à sens unique.

Pourtant, il s'était depuis belle lurette habitué à l'ancien adage : « Il n'existe aucun raccourcis, sur le chemin de la réussite. ». Alors que son corps encaissait de plus en plus de coups, pas une seule fois l'épéiste n'émit la moindre plainte. Aucun grognement, aucun soupir, ni juron ou supplique. Comme Lamia l'avait si bien dit : c'était là sa demande. Malgré la douleur et la sensation de combat totalement déséquilibré, Hayato s'accrocha. Sa concentration et sa volonté prenaient le pas sur sa raison, laissant son corps payer le prix de sa détermination farouche. D'instinct, il l'avait compris : le Haki représenterait une arme salutaire, dans le chemin vers le sommet.

Lentement, une sensation émergea. Un simple picotement, une intuition plutôt qu'une certitude, à force de s'y voir confronter. Le corps du guerrier semblait refuser de céder. Sa volonté le forçait à se relever et à combattre de nouveau, face à cette menace indomptable. Le réflexe archaïque, logé dans les tréfonds de son âme, prit le dessus. Il refusait de fuir. Il lui était impossible de mourir ! Il ne lui restait plus qu'une seule solution : s'élever. Alors que Lamia lançait un direct du droit, le corps d'Hayato réagit instinctivement. Son bras fusa dans la même direction. Les paresthésies grandirent, grandirent jusqu'à...


- MAIS C'EST PAS BIENTÔT FINI, C'BORDEL ?!


La voix stoppa net le combat.

Haletant, en sueur et le corps tuméfié, Hayato lança un regard étonné vers la porte d'entrée. Johnny se tenait dans l'encradement de la porte, les mains au ciel et le regard mi-courroucé mi-décontenancé. Il reprit la parole, virulent :


- On vous entend de l'autre bout du batiment, bande de crétins ! Grand un, allez pas détruire ma baraque ! Grand deux, si vous vous faites repérer avec le ramdam que vous foutez, qu'est ce qu'on fera ?


Un instant, les deux combattants restèrent hagard, tandis qu'Hayato reprenait son souffle. Enfin, il reprit une posture neutre, avant de saluer sa partenaire.


- Je vous remercie pour votre leçon, Lamia. J'espère que je trouverai le temps de pratiquer, dans les jours à venir. Vous avez sans doute raison, Johnny. Nous allons en rester là pour aujourd'hui.
- Même pour demain, non ? ironisa le chef du clan Wave.
- Certainement, concéda Hayato avec un sourire.


Lentement, il se dirigea vers Kashuu qu'il ramassa, avant de le ceindre à sa ceinture. Puisqu'elle n'avait pas perdu une miette du spectacle, Dash lança un regard interrogateur à son chef qui, bien vite, secoua la tête en signe de dénégation. Il avait cru, un instant, toucher du doigt... commencer à entrevoir la solution... mais ils avaient été interrompus. Dommage. Pour autant, la séance n'avait pas été vaine. Il le sentait, il n'avait pas écopé que d'un corps parsemé de bosses et d'hématomes ! Tout au plus, c'était un maigre prix à payer pour être mis dans la bonne voie. Le petit groupe se sépara et continua de vaquer à ses taches.

Dans les jours qui suivirent, l'épéiste continua de s'entrainer seul. Sans un partenaire d'entrainement, il lui sembla presque impossible de reproduire les bonnes conditions pour éveiller ce Haki ou, tout du moins, les sensations qu'ils prenaient pour un début d'éveil. Selon Lamia, il était courant sur Grand Line, alors qu'il n'en avait jamais entendu parlé sur les Blues. Ce pouvoir avait-il donc besoin d'un affrontement, d'une confrontation ou, tout simplement, d'une difficulté à surmonter pour se manifester ? Il en aurait bientôt le cœur net ! Pour autant, avant de s'aventurer sur la voie de tous les périls, il avait fort à faire sur Carcinomia.

En parallèle de son exploration du Haki, Hayato réussit à joindre son contact et à organiser un rendez-vous en terrain neutre avec les Enigmatiques. Alors que leur chef s'entrainait physiquement, le reste du clan Suisou accomplissaient leurs taches diligemment. Grâce à leurs efforts coordonnés, la petite alliance réussit d'autres coups de filets. Tant et si bien que, à l'aube du troisième jour, des rumeurs intéressantes arrivèrent aux oreilles de la coalition. Les chefs des clans Avast et Omega commençaient à grogner ! Il était donc temps de passer à l'étape suivante.

Ainsi, le jour même, Hayato et Lamia simulèrent leur arrivée « officielle » sur les terres de Carcinomia. Différents envoyés de tous les clans s'étaient rassemblés sur les docks, afin de grogner concernant les disparition de marchandise. Lamia et Hayato furent donc facilement repérés par tous les membres présents, lorsqu'ils firent mine de sortir d'un sous marin qui venait d'arriver à quai. Le soir même, Hayato organisa une réunion dans le quartier général du clan Wave. Au milieu du salon richement aménagé, le bretteur lança :


- La phase une est terminée. Nous allons continuer à mettre sous pressions les différents clans. Demain, le blocus total commencera. Dash, Lamia et moi-même partirons à la rencontre des clans Avast et Omega. Dès que nous les aurons ralliés, nous pourrons élaborer un plan de bataille afin de nous occuper manu militari de Foster Red et de X-Bronze. Ensuite, et bien... nous aurons tout le temps de discuter de nos projets en communs pour l'île. Reposez-vous bien, cette nuit. Demain, nous partons en guerre.