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Aux nouvelles du Titan

Les voiles étaient percées de trous, et certaines voies d’eaux s’étaient déclarées. On entendait même du port le son des pompes qui éjectaient le surplus, ainsi que la puissante voix du Lieutenant-colonel William Saint-Cuthbert qui hurlait des ordres à ses subalternes leur intimant de se dépêcher à colmater tout cela. L’ancre s’écrasa dans l’eau avec un bruit mat et les cris résonnaient en rythme dans une mécanique parfaitement huilée. La passerelle bascula soudain et rencontra durement le pont d’amarrage. Une troupe d’une dizaine d’hommes sortit alors du navire et s’empressa d’aller quérir des matériaux pour réparer leur navire, tandis qu’une silhouette massive se profilait derrière eux. Un bras en écharpe, le Colonel Aegirson posa le pied sur la planche en bois et soupira longuement. Son bandage était maculé de sang, mais un sourire amical s’épanchait sur ses traits alors qu’il dévalait la passerelle. Son Lieutenant-colonel était toujours à vociférer ses commandements, en haut, mais il lui laisser volontiers la charge de remuer ses hommes. Une violente escarmouche avait éclaté un peu plus tôt en mer, alors que l’U.G.S. Purgatory effectuait une simple mission de reconnaissance au milieu d’East Blue. Ils étaient tombés sur un vaisseau pirate qui, au lieu de fuir devant les pavillons joints de la Marine et du Colonel Aegirson, avaient préféré tenter le tout pour le tout et avaient ouvert le feu. La bataille avait été de courte durée, vu que le navire d’Alexander était principalement conçu pour ce genre d’échauffourée. Les triples canons avaient ouvert le bateau pirate en deux, et les échanges de tirs avaient résolu l’affaire en moins de temps qu’il n’en fallait pour le dire. Cependant, comme toujours, l’U.G.S. ne s’en sortait pas indemne. Alexander s’était interposé entre un tir ennemi et un de ses hommes et en récoltait une sale blessure au bras, mais l’âme soulagée de n’avoir perdu aucun de ses hommes. Un bruit sourd retentit soudain. Les soldats de l’U.G.S. venaient de mettre les voiles à terre, et entreprenaient déjà de les rapiécer. Un bon Marin était polyvalent sur un navire, et c’était ainsi que Jon Snow, le navigateur, les avait habitués. Si jamais un de leurs camarade devait tomber au combat, il devait être immédiatement remplacé, et avec efficacité. Mais peu importait en cet instant. Alexander était venu sur Shell Town pour une tout autre raison. Il était seulement arrivé en plus piteux état qu’il ne l’aurait voulu. Quittant le navire, il adressa un léger signe de tête à William, puis se dirigea vers la timide bourgade qui lui faisait face.

Il ressemblait presque à un vétéran, avec sa cicatrice au visage et son bras recouvert de bandages. Sa veste de Marine était posée sur ses épaules et laissait bien voir sa bure et son col blanc. Une légère croix en argent trônait sur sa poitrine, et on devinait une multitude de chapelets pendus à sa ceinture. Comme toujours, sa veste était alourdie par le poids de sa Bible, renforcée d’argent. Cependant, il avait laissé toute arme à l’intérieur de son navire, il n’avait rien à craindre ici, ni même à corriger. Il faisait parfaitement confiance à ce Colonel si réputé à travers les blues pour ce travail. Evidemment, tout n’apparaissait pas comme à son goût, mais c’était déjà bien mieux que la plupart des endroits en ce monde. Il rendit le salut militaire à quelques uns des soldats qui le reconnurent et se fit rapidement guider vers le Quartier Général, où le Colonel Fenyang était sensé être. Ce fut ainsi, qu’escorté par deux Marines de Shell Town, il se présenta aux casernements de la Marine.

« Nom et motif de la visite, je vous prie. » questionna une voix impérieuse de l’autre côté de la porte massive.

« Colonel Alexander Aegirson. Je désire m’entretenir avec ton supérieur, le Colonel Fenyang. » répondit-il, avec un sourire amusé.

Le silence se fit pendant quelques secondes, puis la porte s’ouvrit précipitamment tandis qu’un Marine en uniforme se précipitait vers Alexander. Il s’exécuta d’un salut militaire et s’excusa en bafouillant de ne pas l’avoir reconnu. Comme à son habitude, le prêtre lui ébouriffa le crâne et entra dans la caserne.

« Pas grave mon gars. » lui fit-il, sur un ton paternel.

Le soldat eut un temps d’arrêt, certainement choqué par la réaction du Colonel, puis se retourna et ouvrit plusieurs fois la bouche, comme s’il essayait de se rappeler ce qu’il avait à dire.

« Ah … et … heu … Le Colonel Fenyang est actuellement sur le chantier, mon Colonel. » lâcha le soldat avant de s’exécuter d’un nouveau salut.

« Ah. Bien. Va falloir me montrer où c’est dans ce cas. » répondit Alexander, le plus naturellement du monde.

« Bien, mon colonel. » répliquèrent les deux Marines qui le guidaient depuis son arrivée au port.

~~~

« Ah ouais. Ça c’est du chantier. »
marmonna Alexander en arrivant en vue des diverses plateformes de construction.

À nouveau, on lui demanda encore une fois son identité, mais il ne s’en formalisa pas. Il ébouriffa le crâne du soldat qui ne l’avait pas reconnu, et s’en excusait puis s’avança vers ce qu’il pensait être la tente du maître d’œuvre. Il remercia les deux Marines qui l’avaient conduit ici, puis entama la longue marche vers la colline qui surplombait tout ça. D’ici on pouvait le bois d’Adam qui était acheminé jusqu’ici et les ouvriers qui le mettaient en forme. C’était un travail colossal, mais il était nécessaire que quelqu’un le reprenne en main. De nombreux hommes se mirent au garde à vous en le croisant, murmurant quant à sa blessure apparente, ou encore son prétendu fanatisme. Il en aperçut même un ou deux arborant le symbole d’une croix argenté. Ah, les âmes pieuses se reconnaissaient entre milles. Ce fut après une bonne quinzaine de minutes de marche, que le prêtre arriva finalement tout en haut de la pente, lui offrant une magnifique vue sur les ateliers de montage et les diverses équipes qui s’affairaient là en un mécanisme parfaitement huilé. C’était agréable d’observer une cohésion aussi parfaite, de voir que les hommes pouvaient s’accorder en une communauté si efficace qu’ils venaient à bout de la moindre montagne qui se dressait face à eux. Après quelques minutes à contempler ce spectacle revigorant, Alexander alpaga un des soldats qui passait par là et lui demanda de l’annoncer à son supérieur.

« Va dire au Colonel Fenyang que Alexander Aegirson est là, et aimerait l’entretenir de l’avancée de son projet. Merci, gamin. »
lui demanda-t-il, en lui ébouriffant les cheveux.
      Sous la paperasse qui s’accumulait sur mon bureau, je baillais grossièrement et bruyamment. Comment que j’avais la flemme là… Des larmes me montèrent aux yeux après mon bâillement et je dû les essuyer du revers de main droite. Soupirant au vu de cette masse de travail considérable qui m’attendait encore et toujours, je finis par m’asseoir correctement et à continuer de consulter les papiers que je devais remplir au plus vite. Toujours à la bourre moi… Ça devenait franchement déplorable. Pour m’aider à en finir avec tous ces dossiers, se trouvait en face de moi, ma lieutenante Ketsuno. Une belle rousse à la grosse poitrine comme je les aimais bien. L’une des belles filles que je n’ai jamais réussi à avoir dans mon lit… C’est drôle hein, surtout quand on sait qu’elle a l’béguin pour moi. Comme quoi, les femmes, ce sont des êtres bizarres que jamais je ne comprendrais comme il faut. Mes yeux se risquèrent à s’noyer dans le décolleté qu’elle arborait joliment. Automatiquement, d’la bave s’écoula aux commissures de mes lèvres et coula sur les papiers que je remplissais précédemment. Sans trop se fatiguer à me donner un quelconque coup véhément pour m’inciter à reprendre le boulot, la jeune femme se redressa tout simplement avant de boutonner avec force le dernier bouton qu’elle avait laissé. La grosse salope ! J’voyais plus rien à part la forme de ses tétons moulés dans sa veste blanche. Pour couronner le tout et malgré la chaleur, elle recouvrit sa grosse poitrine d’une écharpe, et j’eus l’impression que même un coup de poing de sa part aurait été mieux que c’qu’elle me faisait là. Penchant ma tête vers mes papiers, je soupirais de dépit avant de reprendre mon boulot ennuyant et complètement harassant. Il y’a des jours comme ça où j’manquais vraiment de bol quoi. De quoi me dégouter d’la vie…

      Après quelques heures de dur labeur, j’avais réussi à remplir toute la paperasse administrative et ce, grâce à l’aide formidable de ma lieutenante qui faisait office de secrétaire. Pour me consoler, elle ouvrit une nouvelle fois son décolleté que je matais quelques secondes seulement, l’temps qu’elle me fasse un bisou sur le front et qu’elle déguerpisse avec les dossiers. Seul, sur mon bureau, je soupirais une énième fois, pensant à c’que je pourrais bien faire de ma journée. Glander ? P’être bien… Mais malheureusement pour moi, cette heure précise était celle à laquelle les ménagères nettoyaient ma chambre. Donc, j’pouvais pas la rejoindre. J’pouvais bien m’endormir ici, dans mon bureau mais avec le tintamarre qui régnait dehors, jamais j’ne pourrais fermer l’œil. Et puis, c’pas comme si j’avais vraiment sommeil. J’pourrais p’être squatter la maisonnée d’une de mes nombreuses maitresses dans les quartiers à proximité… Mais après… L’idée et je ne sais trop pas pourquoi, ne m’emballait pas des masses. C’est pas comme si je cherchais à tremper mon biscuit non plus. Pis ça devenait bien monotone tout ça, surtout qu’elles allaient m’demander une belle somme d’argent, moi qui était plus ou moins dans la dèche actuellement. Rhalala… Ma journée s’annonçait-elle aussi ennuyeuse que cela ? P’être bien… Et p’être bien que je devrais attendre qu’on finisse de récurer ma chambre pour aller dormir. Mais c’est alors que j’eus la folle idée d’aller voir le fameux chantier. Que je n’avais pas visité depuis quoi… Deux trois semaines, non ? Mwouais. Ça remonte à l’arrivée d’la Cipher pol qui m’en aura fait baver dans tous les sens du terme. Donc après mure réflexion, j’me décidais de m’habiller en conséquence –Chemise blanche à manches courtes et simple jean délavé-, sans oublier ma veste de colonel, avant de prendre le chemin donnant sur le fameux chantier du Léviathan…

      Du temps passa et j’arrivais enfin sur le gigantesque chantier du Léviathan. Ici, je n’avais aucun ordre de pouvoir. Aucun vu que la division scientifique était dorénavant en charge de l’affaire. Nonobstant, j’étais tellement respecté qu’on ne pouvait presque rien me refuser sur ce chantier bourré de monde. Plus de 750 personnes, c’est dire alors toutes les forces mobilisées pour mener à bien la reconstruction de ce navire. La forte odeur du bois d’Adam et les rouages qui grincèrent ici et là prouvèrent que la construction avançait drôlement bien et 24 heures sur 24. C’est vous dire un peu tout le boulot abattu par ces braves gens en harmonie totale et leurs fortes déterminations à œuvrer pour la paix. Alors que je m’entretenais avec le lieutenant colonel en charge du coin, lieutenant ma foi, très aimable, l’un de mes soldats arriva en trombe avant de m’annoncer une nouvelle assez… Étonnante. L’colonel Alexander ici ?! Un truc de dingue quoi ! Je ne le connaissais pas personnellement, je ne l’avais jamais vu même ; mais sa renommée au sein de notre faction n’tombait jamais dans l’oreille d’un sourd. Aussi m’étais-je dépêché de rejoindre l’endroit où il se trouvait, soit au sommet d’une petite colline que je gravissais au pas d’un diarrhéique. Lorsque je faisais mon apparition progressive, mes yeux se plantèrent automatiquement sur une sorte de gringalet affublé d’une veste d’officier, tout comme moi… « Colonel Alexander ! C’est un honneur de vous voir fouler mes Terres et de vous rencon… » Ma voix s’évanouit rapidement à mesure que je m’avançais vers lui. En effet, j’avais affaire non pas à une montagne de muscles comme je l’aurais pensé, mais à un homme assez maigre, au faciès un peu vieillot et à la chevelure blonde. Son crucifix et ses chapelets me rappelèrent un peu le fanatisme trop poussé dont il était accusé, m’enfin, pour l’moment, il y avait plus urgent…

      • « Votre bras… Que vous est-il arrivé… ? » Demandais-je d’un ton emprunt d’inquiétude une fois en face de lui et le surplombant de toute ma corpulence plus imposante que la sienne. « Vous ! » Me retournais-je immédiatement vers certains soldats à proximité, « Ramenez nous un toubib, vite ! » Je n’avais même pas fini d’parler qu’ils avaient déjà compris et se ruèrent vers une tente à la recherche d’un docteur qui pourrait mieux soigner ça. Me retournant vers l’autre colonel, je me grattais la tête de gêne étant donné sa visite complètement inattendue, avant d’lui tendre la min en guise de salutations respectueuses : « Vous m’en voyez désolé de vous accueillir en ces lieux… Je n’ai pas été prévenu de votre arrivée… Le voyage n’aura pas trop été mouvementé j’espère ? » D’une voix plus tranquille, je me risquais de le lui demander, même si son bras touché en disait long sur l’affaire. Et il faut dire que mine de rien, sa présence était une vraie surprise pour moi… L’avait-on envoyé ? Était-ce une visite de courtoisie ? Tant de questions qui s’bousculèrent dans ma boite crânienne alors que je l’observais toujours en attente de réponses concrètes, précises et exactes. C’pas pour dire mais c’bien la première fois que je reçois un collègue sur l’île. Et des éclaircissements, il devait y en avoir…
      Le Colonel leva un sourcil lorsque Alehïri s’avança vers lui. Il le dévisagea derrière ses lunettes et fut presque étonné de voir que cet homme le surplombait. Lui qui dépassait en général des masses et surplombait toute sa paroisse, il se trouvait là face à un colosse, un véritable. Il devait bien faire une tête de plus que lui, et malgré sa stature nonchalante, on percevait sa musculature qui tendait ses vêtements. Il avait la façon de se déplacer de ceux qui sortaient du lot, des grands combattants. Mais ce ne fut pas cela qui marqua le plus le prêtre. La lueur que le Colonel arborait au fond du regard était empreinte d’une compassion sincère et profonde. Cet homme avait un bon fond, et tout ce qui se disait sur lui ne pouvait qu’être vrai. On le disait laxiste, mais il était néanmoins respecté et prouvait une fois de plus qu’on pouvait mener ses hommes par le cœur et non pas par le fer. Il lui répondit donc par un large sourire et lui fit un léger signe de tête. Alexander n’était pas trop versé dans les formalités hiérarchique et on lui pardonnait parce qu’il était un des hauts gradés. À vrai dire, il croisait rarement ses supérieurs autrement que par escargophone ou lors de réunions officielles. Fort heureusement, habitué à voguer sans cesse à la poursuite de pirates lui épargnait bien souvent ces désagréments. Mais, pour une fois, il avait voulu établir un contact avec un homme de sa trempe, un homme qui serait en passe de faire changer les choses dans le bon sens et de mettre un terme à la menace pirate de ce monde. À la menace tout court, en fait. L’éradication pure et simple de toute forme de mal. Et celle-ci serait jugulée par la foi. Enfin, tous n’étaient pas prêts à entendre cela n’y même à se plier à sa Croisade. Il respectait l’avis de ceux qui œuvraient pour le bien commun et réfutait ceux qui répandaient le mal. Ainsi, le profil du Colonel Fenyang l’avait plutôt interloqué. Il était issu d’East Blue, tout comme lui, et ainsi sa réputation revenait souvent aux oreilles d’Alexander lors de ses escales à Orange. Mais la raison sous-jacente qui avait aussi guidé son choix était le fait qu’il œuvre à la reconstruction du Léviathan, le colosse de la Marine mis à bas par une bande de pirates sans foi ni loi. C’était une chose qu’il fallait surveiller de près, et comme toujours, Alexander n’en faisait qu’à sa tête et avait jugé important de venir s’en rendre compte par lui-même.

      « Non, non. Pas de médecin, c’est déjà presque guéri. Merci de votre sollicitude, Alheïri. » fit-il à l’attention du Marine qui partait, mais un peu trop tard.

      Alexander haussa les épaules puis se tourna vers Alheïri avec un sourire amical. Il se frotta le menton, nonchalant.

      « C’est un honneur pour moi aussi Colonel Fenyang. J’ai beaucoup entendu parler de vous, à travers les océans. Et il faut dire que votre travail est grandement apprécié en haut lieu. » répondit-il, éludant pour le moment la question du voyage.

      Il sentait son interlocuteur étrangement tendu. Peut être n’était-il pas à l’aise avec les statuts hiérarchiques ou autres, ou tout simplement était-il étonné de cette visite impromptue. Alexander avait par le passé enquêté de nombreuses fois sur des défaillances internes à la Marine et participé à appréhender de nombreux criminels de guerre issus de la Marine même. Peut-être que ces histoires étaient parvenues aux oreilles du Colonel. Et connaissant le passé impulsif du prêtre, il était possible de penser qu’il pouvait agir ainsi de son propre chef. On ne le connaissait que par le biais des accusations dont il était victime. Fanatique sur les bords, violent et entêté. Bien peu parmi la Marine voyaient qu’il avait autrefois participé à reconstruire des villages, venir en aide aux populations défavorisées et autres. Il n’était pas qu’un homme de guerre, il restait avant tout un homme de foi. Il avait certes la mission d’éradiquer les forces du Malin, mais là s’arrêtait sa mission vindicative.

      « Mais je ne suis pas là pour faire vos éloges. Trop de monde, ces temps-ci, prend la Marine pour une girouette inconstante et se targue d’être en mesure de la narguer en toutes circonstances. Je suis au moins heureux de voir que ce n’est plus le cas ici. »
      continua-t-il, toujours en arborant ce calme sourire.

      Le prêtre redressa ses lunettes sur son nez puis se tourna vers le chantier. Le spectacle du navire renaissant de ses cendres le laissait toujours empli d’une satisfaction rassurante. Des hommes se mettaient en marche et cherchaient à changer les choses. Et c’était idéal en de telles circonstances.

      « J’ai essuyé de nombreuses escarmouches aux abords de îles d’East Blue ces derniers temps. De plus en plus de pirates prennent la mer et tentent de nous mettre à mal. Les actes qui se sont perpétrés à bord du Léviathan leur ont redonné courage et encore une fois, l’ère de la piraterie s’annonce prospère. » lâcha-t-il, sur un ton de dédain.

      Il leva son bras pour illustrer ses propos. Il était vrai qu’il intervenait de plus en plus souvent ces temps-ci, et bien que ce ne fût pas pour le déplaire, c’était inquiétant aux yeux du monde. Vivre les mêmes événements que ceux du dernier siècle, de nouvelles grandes guerres. C’était hors de question. Il fallait à tout prix juguler tout cela et mettre la Marine en branle pour châtier une bonne fois pour tous ces infidèles. Ces adorateurs du Malin sous toutes ses formes. Alexander calma là sa fureur et son désir de purification pour ne pas se laisser une nouvelle fois emporter par un discours enflammé sur ses propres convictions.

      « Vous savez certainement de quoi je veux parler. J’ai eu l’occasion de me confronter à Satoshi Noriyaki à Sirup. J’ai été défait par l’un de ses hommes, un étrange épéiste masqué maniant deux lourdes épées. Et la flotte qui s’est ensuite lancée à leurs trousses a été éradiquée en quelques jours. »
      commença-t-il, glissant sa main valide dans son dos.

      Le vent faisait battre sa veste de Colonel et ébouriffait ses cheveux. La véritable raison de sa venue commençait à poindre, mais il ne faisait qu’informer là Alheïri de détails qu’il devait déjà connaître. Mais les lire sur un rapport et les entendre de vive voix de la personne concernée avait un impact tout à fait différent. Alexander se retourna après quelques secondes de silence.

      « Vous vous doutez que je suis venu ici de mon propre chef. Et je suis désolé de ne pas m’être annoncé, mais les conditions de mon voyage n’étaient pas si paisibles que je l’aurais voulu. Enfin bref, Alheïri, je peux t’appeler Alheïri ? Appelle-moi Alexander, ou Père, comme tu le souhaites. Pas de blabla militaire entre nous.

      Je venais constater l’avancée de ton chantier. Mais aussi te demander ton aide. Je sais que tu es affecté ici, mais il y aura bien un jour où le Léviathan sera remis à flot et un jour où tu n’auras plus obligations. »
      fit-il, toujours sur le même ton détaché.

      « Mais avant ça, j’aimerais bien faire un tour des lieux, voir un peu tout ce pourquoi tout le monde s’agite à Marine Ford. Nous pourrions discuter de la suite des événements sur le chemin ? » proposa-t-il, guettant une quelconque réaction de la part de son interlocuteur.

      Le prêtre avait soulevé bien des interrogations, mais il n’y allait pas par quatre chemins et parlait tout de go de ce qu’il pensait entreprendre. Il n’avait aucune arrière pensée et cherchait simplement à voir si le Colonel Fenyang était tenté. Après tout, il se basait seulement sur sa réputation et rien d’autre. Et lui qui se chargeait de reconstruire le titan, il devait bien savoir ce qu’il en coutait de sous-estimer la piraterie. Ainsi, il avait le champ libre pour écouter Alexander ou pour refuser d’en savoir plus et donc d’aller plus loin. Le prêtre avait compris depuis longtemps que s’il voulait changer la face du monde, il devait avoir des ambitions plus grandes que celle d’un Colonel et gagner les hautes sphères du pouvoir pour que sa foi puisse être mieux considérée et suivie par la majorité. Mais ce n’était pas une question de foi, plus de purification. Il possédait déjà sa petite armada mais ce n’était pas assez pour lutter face à un monde corrompu jusqu’à la moelle par le vice. Il aurait besoin d’alliés implacables et loyaux. Pas une bande de criards qui se demandait encore par quel bout tenir une épée.
          J’ai pas de raisons de stresser vous croyez ? Hé bah si ! J’en avais des tonnes. Ce mec en face de moi, c’est du tout pas n’importe qui, j’vous jure. Son passé était connu de tous les marines qui officiaient sur la mer d’East Blue. Ses nombreuses et brillantes prestations sur le terrain également. Un curé en apparence et en cœur, mais un guerrier sanguinaire au plus profond de son âme. Le genre de type qui ressemblait à Arashibourei Toji sur le champ de bataille, bien que son comportement vis-à-vis de ses pairs et de la société devait être celui d’un ecclésiastique, et donc politiquement correct. Un brave officier qui n’avait usurpé son titre actuel de colonel donc. Brave type ! Son refus d’voir un médecin m’étonna au plus haut point. Il est vrai que j’avais une très grande endurance pendant les combats, mais pas au point d’me négliger de la sorte. Enfin… Ce fait prouvait concrètement une chose : Il était coriace et il en avait très certainement dans le ventre. Franchement, j’aurais été pirate, il m’aurait effrayé quand bien même que là maintenant, pendant ses dires, il n’avait de cesse d’me sourire chaleureusement. Dires élogieux d’ailleurs. Qui me venait droit au cœur, je dois l’avouer. Mais en bon zig, je gardais la tête sur les épaules étant habitué à de telles paroles. Et puis, j’me doutais bien qu’il n’était pas seulement venu pour me raconter tout ça. Aussi me gardais-je de l’interrompre en me contentant de sourire sincèrement et en lui prêtant une oreille plus qu’attentive. Au fur et à mesure que le temps passait, son discours devenait plus objectif, plus vivace et divulgué d’un ton emprunt d’une ferveur inébranlable. Alexander semblait prophétiser et la bonne parole qu’il prêchait captivait, forçait un certain respect à son égard. Il était l’homme tel que je le pensais et les ragots à son propos n’étaient pas forcement faux…

          • Pour en revenir à ce que tu as précédemment dit, je ne peux qu’être d’accord à 100 %. Il est vrai que chacun y part de sa définition de la justice, mais je t’accorde, effectivement, que la recrudescence de la piraterie m’alarme tout autant que toi…

          Tout ce qu’il avait dit m’apparaissait comme une évidence étant donné l’ampleur et l’impact de la piraterie sur notre monde. Comme lui, j’avais le souci d’éliminer la mauvaise graine. Mais à ma manière. Car j’avais soulevé un point qui mettait en relief les différentes conceptions de la justice que nous avions. Il est clair que nous tous ne procédions pas de la même façon. Que ce soit le colonel Gharr, lui, moi ou bien d’autres, il y avait énormément de différences. Et de ce fait, je voulais freiner un peu de manière implicite, les projets qu’il avait me concernant. La dernière fois que j’avais créé une équipe, celle-ci s’était dissoute avec la disparition de ma femme et d’une de mes collègues les plus chères. Autant dire que ces événements m’avaient complètement bouleversé. Si j’avais remonté la pente, c’était un peu à cause de mes hommes actuels qui m’avaient soutenu comme le ferait une vraie famille. Depuis, je n’avais plus eu la prétention de me construire une flotte. L’idée ne m’avait plus du tout frôlé l’esprit. Seule celle de la base me suffisait amplement pour mener à bien mes missions et à établir la justice comme il se le devait. Tout ça pour dire que je n’étais pas prêt à les abandonner. Pas pour le moment. Même si le Léviathan venait à être totalement opérationnel, il n’était pas sur que je quitte Shell. Le pourquoi de ces réflexions ? Simple : Je le soupçonnais tout comme l’avait fait Ghar il y’a quelques temps, de vouloir me recruter au sein de son équipage pour une remontée sur les eaux de Grand Line. L’approche était louable mais seulement, je ne me sentais pas encore prêt pour ça. Par contre, il se pourrait que je me trompe lourdement quand aux objectifs du père Alexander. Ce pourquoi je n’avais pas, d’emblée, refuser d’écouter ce qu’il avait à me dire :

          • … Ce pourquoi je te suis toute ouïe Alexander. Le sujet que tu veux aborder doit être d’une extrême importance si tu as daigné te déplacer ici, jusqu’à mon humble personne.

          Je voulus ajouter autre chose, mais une très belle infirmière accourait vers nous. Faut dire qu’elle était drôlement sexy. J’allais même commenter son accoutrement un poil provoquant au vu de sa grosse poitrine serrée dans sa robe de service, mais je me rappelais bien vite qu’Alexander était un homme de foi et donc loin d’être lubrique comme moi. Halala… L’ennui. Encore heureux que j’avais gardé ma bouche bien fermée, sans quoi j’entachais mon image à ses yeux. S’arrêtant à nos côtés tout en nous saluant respectueusement, l’infirmière commença rapidement à retirer les bandages du colonel qui ne pouvait décemment plus s’échapper de son emprise. Pour éviter de trop la mater, je me retournais alors vers deux hommes que j’hélais. Signe qui devait m’trahir auprès du prête, mais on s’en fout un peu. Chaque humain à ses vices et je suis bien loin d’être saint. Alors qu’on lui prodiguait de petits soins, je demandais à ceux que j’avais interpelés d’aller nous chercher deux chevaux. Il n’était pas question que je le fasse marcher jusqu’à ma base qui était quand même assez éloigné du chantier du Léviathan. Une fois la commission prise par ces braves gens, je fourrais alors mes mains dans les poches de mon jean et contemplait le ciel d’un air rêveur : « C’est une belle journée que nous avons là non… ? Ah ! J’oubliais. Ton équipage et ton navire ont-ils besoin d’assistance ? Si oui, n’hésites pas à demander et je mobiliserais des équipes pour vous aider au mieux. » Le temps que je lui propose mon aide et l’infirmière était déjà repartie, ayant fait le strict minimum soit un petit nettoyage et un bandage tout neuf. Avec les blessés du chantier, elle devait avoir certainement mieux à faire, surtout que le colonel tenait bien la douleur. Une énième fois donc, je me retournais alors vers lui, avant de croiser les bras et de lui proposer ceci :

          • Je fais parvenir des chevaux qui nous ramèneront à la base. Mais bien avant et comme tu le souhaites, nous pouvons faire un tour sur le Léviathan. Tu en profiteras pour me faire part de ton message. Au fait, combien de temps feras-tu parmi nous ?

          Lui avais-je subitement demandé tout en m’approchant de lui et en passant une main amicale vers son dos pour l’inciter à me suivre. Une fois sur qu’il allait m’emboiter le pas, je me dirigeais alors vers le joyau de la marine, soit le bateau volant qui faisait toute la renommée de l’île ces temps-ci. J’peux même dire que c’est grâce à ces incidents que je m’étais fait un nom et une place notable au sein des officiers de la marine. Certainement qu’Alexander ne serait pas venu me voir s’il n’y avait pas eu cette longue histoire. Ironiquement donc, je devais ma popularité aux déboires qu’a connu l’île de Shell. Comment que le constat est drôle. Sous toute la ferveur qui animait le coin, nous marchions tranquillement vers le gigantesque bateau et le tout, entouré d’une multitude de soldats qui nous suivaient comme une escorte. J’avais rien demandé, mais bon, je n’allais pas non plus me plaindre de l’attention qu’on nous portait. Lorsqu’on signala que le groupuscule qu’on formait s’avançait vers la frégate, les ingénieurs activèrent automatiquement la gigantesque échelle de coupée qui s’étendit du pont jusqu’à toucher le sol dans un bruit sourd dans un automatisme fort impressionnant. J’escaladais ce bijou de la technologie en premier, suivi par les autres hommes et sans aucun doute du curé. Une fois sur le pont, je tapais alors dans mes paumes en regardant mes hommes : « Veuillez nous laissez messieurs. Moi et le Colonel Alexander, devons nous entretenir ». Sous leur salut militaire, je fis signe à mon collègue de me suivre. Nous dépassâmes plusieurs personnes qui travaillaient sur le pont endommagé, avant de nous engouffrer dans l’immense timonerie heureusement déserte. Je fermais alors la porte derrière nous, avant de m’accouder à un mur, prenant le soin de ne pas m’approcher des commandes de bords. Oui j’étais navigateur, mais non je ne voulais pas céder à la tentation de me mettre à tout tripoter…

          • Alors… De quoi veux-tu réellement me parler ?

          Spoiler:
          Quoi que pouvaient en dire les apparences, l’homme était intelligent. Il était taillé dans le roc et était de ce fait intimidant, mais il avait tout d’abord pris les propos du prêtre avec crainte. C’était là la preuve qu’il ne s’en était pas tiré jusqu’ici qu’avec la force de ses poings. Il pouvait se pavaner sous ses airs laxistes ou détachés, mais il était admiré et aimé de tous ici. Il fallait se méfier de l’eau qui dormait. Alexander n’en était-il pas un parfait exemple lui aussi ? On ne pouvait demander à la première brute venue de diriger une troupe d’hommes et de la mener au combat contre des hordes incessantes de pirates, ou autres formes d’hérétiques. Il fallait posséder l’âme et la sagesse d’un leader. Et malgré toutes les différences qui animaient les deux hommes, en ce point ils étaient de véritables Colonels. Il était certain qu’on aurait pu leur reprocher à tout deux quelques points, mais il était de temps en temps plus sage de fermer les yeux. Le pater laissa l’infirmière s’occuper de lui, après quelques grognements de réticence, puis il lui accorda un sourire contrit. Elle défit le bandage et révéla une blessure longue d’une dizaine de centimètres zébrant son bras. Le bandage était maculé de sang, mais la blessure était déjà presque cicatrisée. Alexander était lui-même médecin, et l’énergie pieuse qui l’animait faisait des miracles entre ses mains. Bientôt l’estafilade laissée par la balle ne se verrait même plus sur son bras et ne serait plus qu’un mauvais souvenir. On l’aurait crue vieille de plusieurs jours mais il n’en était rien. Le Paladin se garda bien de révéler ce détail qui aurait pu troubler un peu plus son interlocuteur. Il verrait en temps et en heure ce dont il était capable. Et puis il n’était pas bon de répéter les mêmes erreurs que Saint Thomas : l’homme se devait d’être pieu avant d’envisager le miracle. Et si Alexander se montra particulièrement résistant à la douleur, c’était tout simplement parce qu’il ne sentait presque plus rien à présent. Il avait gardé son membre immobilisé pendant un peu plus d’une douzaine d’heures, dont la moitié à faire son office et prier pour rendre grâce à son seul et unique Seigneur. Il était le bras armé du Vengeur, du Justicier Immaculé, comment pouvait-il se permettre de se laisser rattraper par sa condition humaine alors que le Diable déployait des armes de vice et d’opprobre sur le monde entier ? Sa quête était nécessaire, et son sacrifice indispensable. C’était peut être pour cela qu’il avait encore le teint cireux, comme d'un homme qui n’avait pas dormi depuis trois jours. Alexander avait simplement puisé dans les réserves de son corps pour se reconstituer de l’intérieur, comme à chaque fois. Mais l’heure n’était pas au repos. Il se retint de secouer la tête lorsqu’il aperçut Alheïri contempler allègrement le corps de la jeune femme et s’abstint aussi de tout commentaire. Chaque homme était libre de ses choix. Et il serait malvenu d’insister sur les aspects lubriques de la personnalité de l’homme qu’il était venu visiter.

          « Mes hommes se chargent déjà de combler les brèches et de recoudre les voiles. Ce n’est pas la première fois que nous faisons face à ce genre de situation. Je ne suis pas un navigateur hors pair, plus un médecin et un homme de guerre à vrai dire, ainsi je laisse le champ libre à mon second pour gérer tout cela. Mais je te remercie de ton hospitalité. Je n’abuserais pas de celle-ci, nous devrons de toute manière bien vite nous remettre en chasse. Les pirates ne nous attendent pas, malheureusement. Pas plus que toute cette fange idiosyncratique. » répondit-il, tout en s’efforçant de garder un ton égal.

          Alexander sentit son dos se tendre alors qu’Alheïri le touchait amicalement. Ce n’était pas qu’il était méfiant, mais il était rare qu’un homme qui le dépasse d’au moins une tête soit aussi amical envers lui. D’ailleurs, ils dépassaient la majorité des soldats ici, ce qui renforçait cette impression désagréable de rivalité ou de tension. Les hommes accouraient ici pour voir les deux Colonels, et certainement pas un ne s’imaginait qu’ils pouvaient tout simplement discuter entre eux. D’ailleurs voir ainsi affluer les simples soldats commençait à agacer Alexander. Être un gradé de la Marine ne pouvait certainement mener qu’à une certaine renommée, mais il aurait préféré parler seul à seul avec Alheïri. Il le suivit ainsi le long du chantier, offrant sourires et saluts parfois forcés. Il n’était nullement impressionné par l’étendue des travaux et admirait plus la fraternité qui liait chaque travailleur ici. C’était un navire de grande ampleur, certainement inédit même, mais ce n’était qu’une arme à grand potentiel de destruction pour le Paladin. Un outil entre les mains des hommes, rien de plus. Ce serait, certes, un chef d’œuvre mais ce qu’il accomplirait alors serait bien plus grand que toute construction humaine. Il prit néanmoins le temps de l’étudier, sans pour autant s’attarder sur les détails, n’ayant aucune connaissance solide en charpenterie. Mais il était évident qu’ils avaient tous travaillé dur. Par curiosité, il caressa le grain du bois d’Adam et fut surpris de voir à quel point son contact était différent de la barre de son propre navire. C’était beaucoup plus doux et chaud en même temps. Un bois véritablement extraordinaire. Mais il n’avait pas le temps de s’y attarder. Il suivit le Colonel dans la timonerie et fut soulagé de voir qu’il congédiait ses hommes. Le prêtre rendit leur salut aux soldats puis disparu dans les méandres du nouveau Léviathan.

          « Ce sera une force de frappe monumentale. Maître des eaux, de la terre et du ciel. Le Léviathan … » extrapola-t-il, en contemplant l’habitacle.

          « Oui. Tu as du t’en douter, et je ne pense pas être si dur à anticiper que cela. Je viens te demander ton aide, Alheïri. Nous ne sommes plus assez pour lutter sur les océans, et nous manquons cruellement de forces contre les nouveaux pirates qui émergent. J’ai besoin d’hommes de confiance, de personne qui œuvrent pour le bien de tous et pas dans l’optique de leur propre avancement. Ta réputation te précède, et je pense être capable de juger quelqu’un avec assez d’objectivité. » commença-t-il.

          Nonchalamment, Alexander caressa le cuir relié de sa Bible et effleura sa croix. Il s’était redressé et le ton de sa voix s’était éclairci allant crescendo, animé d’un feu intérieur implacable.

          « Tout comme tu as du entendre parler de moi. Ainsi je ne te parlerai ni de Croisade ou de Purification, car tous ici savent ce que je fais et en quel nom je le fais. Or mon dogme m’enjoint au bien et à la charité, car c’est ainsi que le Seigneur nous désire. Et pour cela, nous devons lutter contre le mal, cette nouvelle ère qui s’annonce est une épreuve pour nous tous. Ainsi, comme je te le disais, je ne cherche pas un équipage ou une flotte, sinon ce serait chercher à te rallier à ma cause. Non, je cherche une force de frappe suffisamment destructrice pour annihiler toute cette cohue de maraudeurs et détenteurs de l’esprit félon du Malin. » s’emporta-t-il, peu à peu.

          Ricanant légèrement, Alexander se passa une main fatiguée sur le visage et se recoiffa les cheveux en arrière. La bleu de ses prunelles était presque iridescent lorsqu’il reprit la parole. Dès qu’il faisait mention de son idéologie, une ferveur sans faille s’emparait de lui et tournait chacun de ses propos en une sorte d’éloge à la volonté de Dieu.

          « Désolé, je m’emporte mais l’essentiel est là. Je cherche des hommes capable de regarder le mal droit dans les yeux étant capables de le défier impunément. Je cherche des hommes qui peuvent descendre dans la bouche des Enfers et en revenir indemne. Je cherche des hommes comme toi, Alheïri. Je te pense capable de batailler à mes côtés, de chasser tous ces hommes qui massacrent et pillent sans foi ni loi et leur apporter notre lumière. La vérité de la justice et de l’équité. Alors, je te le demande, te battras-tu à mes côtés lorsque sonnera l’heure ? »
          lui demanda-t-il, d’un ton solennel.

          La demande restait un peu floue dans l’objectif, mais ainsi, le prêtre espérait que son alter ego lui pose les questions qui lui venaient à l’esprit et il serait ainsi en mesure de lui expliquer tout ce qu’impliquait sa demande, et sa volonté de former ce nouvel ordre, cette nouvelle force de frappe comme il le disait.
              Je soupirais longuement. Plus je l’entendais et plus mes idées se confirmèrent concernant le recrutement qu’il voulait faire. Pourquoi me parlait-il dans un langage aussi flou ? Essayait-il de me rassurer ? De me berner pour mieux m’utiliser ? Moins improbable que la première idée que je me faisais de ses intentions, je décidais cependant de ne pas négliger la deuxième qui pouvait s’expliquer. Et j’avais la fâcheuse envie de me mettre sur mes gardes… Mais pourquoi me repliais-je dans mes retranchements… ? Par peur. Certainement. Bien que je ne l’osais pas me l’avouer à moi-même, j’avais un peu peur. De la vie. De la piraterie. De mes incompétences. Du fait qu’il pouvait aussi crever comme les deux autres femmes qui me tenaient à cœur si nous venions à conclure une alliance solide. Et de ce fait, je me sentais trop flatté… Placé sur un piédestal… Perdu par cette offre qu’il me faisait, là, maintenant, sans vraiment me connaitre du tout au tout... Sa confiance était-elle aussi élevée pour venir me voir en personne et me dire toutes ces choses ? Pourquoi ne l’avait-il pas fait avec le Colonel Toji étant donné qu’il était considéré comme le meilleur officier des blues… ? Ou même Gharr qui était une gloire montante parmi les officiers de la marine… ? Pourquoi moi bordel ?! Oh Dieu ! Pourquoi ? Était-ce là une manière de me tester peut être ? Un envoyé de mon père, vice-amiral respecté de notre faction ? Tout était tellement plausible… Tout, vraiment… A un tel point que je me sentais légèrement tremblant. Ghar n’avait pas été aussi formel dans sa demande. Mais peut être parce que je le connaissais mieux…

              • Hé ben je… Balbutiais-je en me tenant la tête comme embarrassé par tous ces propos… Je ne sais pas… Tes propos sont assez troublants… Si l’on tient pourtant compte de nos postes et du fait que tu ne veux pas vraiment me recruter dans ton équipage, disons que je me bats déjà à tes côtés… Nos fonctions au sein de la marine suffissent à le prouver non ?

              Parce oui, tous les marines étaient forcés de collaborer ensemble même s’ils n’avaient pas envie. Et d’une manière où d’une autre, je me battais déjà à ses côtés. C’était sur, là. Sa dernière phrase était celle qui m’avait le plus frappé… Le plus tourmenté. Ses dires trouvaient presque leur source dans la bible ce qui avait l’art de me décontenancer. Il avait beau dire qu’il ne parlerait pas de croisade et de purification, ce qu’il faisait fort bien, mais force était d’avouer que son habitude religieuse devenait une seconde naturelle, ce qui avait le don d’en rajouter une couche sur mes appréhensions. Mes parents, fervents croyants, m’avaient inculqués leurs craintes du Divin même si sur cette Terre, il y avait déjà des choses extraordinaires qui dépassaient l’entendement. Quand tu croises un géant, une sirène ou un possesseur de fruit de démon, tu te demandes bien alors ce que Dieu pourrait encore faire pour t’impressionner. Toujours est-il que cette crainte là et malgré les deux péchés capitaux dans lesquels je me complaisais -Paresse, Luxure- je l’avais. De ce fait donc, je le prenais presqu’au mot, la peur au ventre. Était-ce ma providence de le suivre ? Ne pouvais-je simplement pas me cantonner à ma place de colonel ou à celle d’un petit vice-amiral pour faire ma modeste part des choses dans cette lutte perpétuelle contre la piraterie ? P’tain quoi… Faut que je me calme, faut que je me calme… Pour ce faire, j’me dégotais rapidement une cigarette que j’allumais fébrilement avant d’en tirer une taffe… magique.

              • Et puis, parlons terre à terre, avais-je fini par dire, la voix identique à celle que j’avais auparavant… Tu veux remonter Grand Line avec moi, n’est-ce-pas ? Parce que je ne pense pas que tu sois simplement venu me parler de nos fondamentaux en tant que marine. Et même si c’était le cas, je me dis que tu aurais pu le faire par escargophone. Néanmoins, si ton objectif était vraiment de venir confirmer une probable alliance entre nous, je puis t’assurer que mes armes seront toujours les tiennes et mon domaine, un refuge pour ta personne. Je puis te l’assurer !

              Ah la nicotine… Rien de mieux que deux ou trois taffes pour me calmer les nerfs comme il faut. J’avais comme par miracle, retrouvé mon calme de tous les jours. Genre, le mec détendu qui a fini par dire ce qu’il avait dire et ce quelque soit ce qui allait arriver. Pour ponctuer mes dires et mon attitude on ne peut plus sure, je posais alors ma main une fois encore sur la première épaule que je pouvais facilement atteindre en lui offrant un de mes sourires les plus sincères malgré le rideau que formait les volutes de fumées de ma cigarette. Mais à peine avais-je voulu lui proposer de sortir d’ici et de continuer notre discussion à ma base vu que nos chevaux devaient être affrétés, qu’un gros bruit semblable à une grosse explosion assourdissante se fit soudainement entendre. A en déchirer les tympans. Ici pourtant, ce fut plutôt mon âme qui se déchira pendant que mon cœur ne fit qu’un bond avant de battre à la chamade. J’avais imperceptiblement serrée ma paume contre l’épaule du colonel qui m’faisait face, avant de sortir au pas de course de la timonerie, sans trop m’poser de questions. J’avais cru ici, qu’il s’agissait d’une attaque ennemie. Pirate ou révolutionnaire… Peu importe. C’est vrai qu’on m’aura beaucoup attaqué ces dernières semaines, mais je pense bien que je commençais à m’habituer. Cependant, il fallait faire vite et anéantir la menace le plus rapidement possible. Lorsque je foulais le pont, je vis pourtant des ingénieurs rire aux éclats. Un truc qui me stoppa net…

              • Hein… ?!

              Ma mine était sceptique. Pourquoi riaient-ils ainsi ? Étaient-ce des renégats satisfaits de l’arrivée de leurs compagnons ? Non… C’était pas possible… Et pourtant, ce fut la première idée qui germa dans mon esprit alors que je les regardais d’un air interdit, étonné. L’un d’eux qui m’aperçut, me pointa une direction, avant que je ne me tourne vers l’horizon. C’est alors que je vis plusieurs rondins de bois éparpillés sur une étendue, avant d’voir un des gars que j’avais envoyé, s’faire lamentablement trainer par un des chevaux que j’avais demandé. Sans doute l’avait-il chevauché puisque son pied semblait fermement accroché à l’étrier. Putain… Fausse alerte ! Je m’étais rué comme un beau diable pour rien, croyant à une attaque ennemie, alors qu’il ne s’agissait tout simplement que d’un simple accident de chantier. J’devenais vraiment paranoïaque quoi. Fallait vraiment que je me ressaisisse. D’autant plus que je venais d’me donner en spectacle devant un autre colonel. Et que je venais de douter des ingénieurs de la division scientifique qui m’avaient maintes fois prouvés que je pouvais leur accorder ma confiance. Pffffff ! Que je suis con ! Pour me donner une certaine contenance, je sortis mon paquet de cigarette et en tirait ma deuxième de la journée, l’autre étant tombé lorsque que je courais voir ce qui se passe. Je l’allumais, la coinçait entre mes lèvres, avant d’aller m’accouder à l’un des bastingages du vaste pont du Léviathan. Je passais une main lasse dans ma chevelure alors que je tirais une énième latte. Peut être étais-je complètement fatigué… Dans tous les cas…

              • Fait chier…

              Il était tourmenté, du moins c’était ainsi qu’il apparaissait aux yeux d’Alexander. C’était d’autant plus évident à voir pour celui-ci qu’il était un prêcheur convaincu et n’existait que dans un seul réel but. Il ne savait que penser des indécis, mais il savait encore ce qu’un homme au cœur profondément bon pouvait avoir en tête. Et puis sa venue incongrue n’était pas pour plaire au Colonel Fenyang. Il était vrai que le Pater aurait pu se contenter d’un simple contact escargophonique, mais cela était tout aussi impersonnel qu’un message laissé au bout d’une plume … et tout aussi possible à intercepter. Non pas qu’il se méfiât de ses pairs, mais il préférait que ses mots retentissent tel qu’il les avait prononcés, et pas déformé par un quelconque intermédiaire ou pris dans le mauvais sens. Il voyait le doute s’immiscer dans l’esprit d’Alheïri et il comprit que celui-ci était déjà, quelque part, de son côté. Mais ce n’était pas de ce genre d’implication que le prêtre parlait. Il voyait plus cela comme un groupe d’intervention, une sorte de faction plus solide encore au milieu de la Marine. Tel le Messie autrefois accompagné de ses apôtres, il cherchait des hommes capables de répandre sa juste croisade à travers le monde. Des hommes capables de ne pas se laisser pervertir par le pouvoir et la puissance. De ce fait, il ne savait que penser de Toji Arashibourei, qui trainait derrière lui une réputation peu élogieuse, et il ne savait presque rien du Capitaine Hadoc. Ce n’étaient pas des choix faits à l’aveuglette, il s’agissait d’une décision murement réfléchie. Alexander laissa Alheïri allumer sa cigarette sans murmurer de réponse. Il attendait que les paroles cheminent dans son esprit et que ses idées s’éclaircissent. Il était intéressant de voir quels mécanismes s’assemblaient dans l’esprit du Colonel et de voir à quoi il était prêt pour aider ses semblables. Aussi impromptue que surprenante, la réponse résonna longuement dans le chantier, ébranlant le corps du Paladin. Il sentit la main fugace de son allié lui appuyer sur l’épaule avant de se ruer dehors. Alexander pesta contre le sort, n’ayant pas pris d’armes puis se rua à sa suite. Le chantier était-il toujours aussi souvent la cible d’attaques ? Il avait bien vu le regard paniqué d’Alheïri avant que celui-ci ne traverse la moitié du navire en courant. Le prêtre ne se posa pas la question de savoir qui pouvait bien être l’auteur de ce forfait, il glissa ses mains dans ses poches et en tira ses poings américains, oubliés là depuis trop longtemps. Il arriva quelques secondes après le responsable des lieux et devant son air perplexe compris que la situation n’était pas aussi simple. Il se plaça à ses côtés et sentit de nouveau l’odeur piquante de la cigarette lui agresser les narines. Tous les grands hommes avaient leurs usages pour supporter la pression.

              « Je ne vois pas de blessés, heureusement. C’est chose courante ici. Je veux dire … les attentats ? » demanda-t-il à Alheïri.

              Bien entendu, il avait compris qu’il ne s’agissait là que d’un accident de chantier, mais si la réaction du Colonel était excessive ce n’était pas pour rien. Il avait volé en un éclair au secours de ses hommes et ce, sans même se poser de question. Ils auraient été des centaines contre lui, aurait-il agi de même ? Très certainement. Il était visiblement soulagé de voir que personne n’était blessé. Il tenait donc à ses hommes, chose malheureusement trop rare ces derniers temps. Alexander rangea ses armes dans un cliquetis bruyant et remarqua alors que l’écharpe de son bras blessé avait disparu. Il l’avait arrachée sans véritablement y prendre garde et malgré tous ses efforts pour la soigner, la blessure s’était remise à saigner, comme le témoigner la couleur rosée de son bandage. Désireux de ne pas inquiéter son hôte plus que ce n’était nécessaire, il fit glisser sa manche jusqu’à son poignet et fourra sa main dans sa poche. Il s’occuperait de cela plus tard. Dieu que c’était pathétique d’être aussi fragile. Et encore plus de jurer en proférant le nom du Très Saint.

              « Non, je ne veux pas aller sur Grand Line. Je voulais simplement m’assurer que tu entendes ce que j’avais à te dire. J’ai rarement vu d’hommes aussi célèbres que toi végéter longtemps au poste de Colonel, et crois moi, j’en ai vu du monde. Je veux simplement que la volonté de protéger le peuple avant tout soit là, au fond de toi. Et qu’elle perdure lorsque tu graviras les échelons. Je te remercie d’être autant attentionné, mais ne profère pas de promesses que tu ne pourrais tenir. Peut être qu’un jour, je ne serais plus en accord avec la Marine. Peut-être qu’un jour, la quête de justice et de vérité me mettra sur ton chemin. Mais lorsque viendra le temps des choix, alors j’espère que je pourrais compter sur toi. J’espère que tu protègeras tous les enfants de Dieu. Je m’excuse de te parler de manière aussi énigmatique, mon ami, mais quelque chose me dit que bien trop d’hommes se servent de la Marine pour justifier leurs choix égoïstes et puérils. » lui répondit-il, avant qu’un des soldats n’ait l’audace de les approcher.

              Il avait proféré ces paroles en posant la main sur l’épaule d’Alheïri et avait presque chuchoté la fin. Il n’était pas de bon augure de prédire un tel retournement ni même de clairement afficher ses choix. Si les ordres qu’Alexander recevait étaient estimés mauvais, il se rebellerait contre eux. Il avait mis les formes mais c’était réellement là le sens de son message. Il était de plus en plus obligé à enquêter sur des affaires crapuleuses internes et trop d’hommes avaient tendance à profiter de leur pouvoir pour opprimer les faibles. Il savait que cet homme était une étoile montante de la Marine, mais il espérait aussi qu’il partage sa vision, peut être pas de manière aussi formelle, de la justice. Le prêtre rendit au soldat son salut d’un air distrait puis regarda l’autre Colonel droit dans les yeux.

              « Pourquoi toi ? Car l’Impérium a besoin de toi, Alheïri Fenyang. Lex naturalis non scribitur, sed profluit quodam naturali fonte in singulis exprimititur. Non omne quod licet honestum est. »termina-t-il, en ancien langage.

              Nul doute qu’Alheïri pourrait percer le sens caché de ces mots, mais il était aisé de faire ainsi passer son message au nez et à la barbe du jeune soldat. Et puis de toute manière, Alexander n’était-il pas aux yeux de tous un homme de foi qui prêchait sans cesse ses paroles dans la vieille langue des anciennes écritures ?
                  • Oui, il arrive fréquemment des attaques depuis que la nouvelle d’la construction de ce navire volant circule de bouche à oreille. Tout ça à cause des agissements de mon cousin -Satoshi- Et… Ne pense pas à ces choses s’il te plait…

                  Avais-je dit d’un ton sérieusement agacé. Parce que j’avais enfin compris ses mots. Parce que ses mots recommençaient à me troubler. Encore une fois. Ce mec avait le donc de me mettre facilement mal à l’aise moi qui d’habitude supportait bien la pression et tout ce qui allait avec. Je ne craignais plus qu’il veuille essayer de me recruter vu qu’il avait clairement énoncé que ce n’était pas son objectif, mais bien autre chose. Autre chose comme lui… Comme moi. Tout commençait et partait de son cas. S’il venait à ne plus avoir les mêmes idéaux que la justice de la célébrissime marine, nul doute que celui-ci ne se gênerait plus pour déserter le camp. J’le voyais venir. Et ça me perturbait qu’il puisse envisager une telle chose, lui qui avait la foi, lui qui était un prêtre de grande renommée sur ces blues. Si le cas arrivait, j’ne sais pas de quoi je serais vraiment capable. Et là, on arrivait au deuxième problème. L’jour où j’avais appris que Bara Emi, ex-agent du CP9 avec qui j’avais effectué maintes missions dans ma vie, avait quitté le gouvernement pour rejoindre la révolution, j’étais rentré dans une colère noire si bien que j’étais devenu une plaie pour mes hommes ce jour là. S’il advenait un jour où j’apprendrais que ce colonel, devant moi avait déserté les rangs comme Bara, certainement que je le rechercherais… Jusqu’au bout du monde s’il le faut. Non pas pour lui en demander les raison non… Mais certainement pour appliquer la justice en bonne en due forme. Car l’une des choses qui me tenait en horreur était tout simplement la traitrise. J’allais me confronter à lui et adviendra que pourra vu que nous nous battrons jusqu’à ce que la mort emporte l’un de nous d’eux…

                  • Ne me répète plus ça…

                  Sans doute l’avait-il senti. Sans doute l’avait-il deviné. Puisque lui-même m’avait conseillé de ne pas faire des promesses en l’air. Dire que je ne l’avais pas compris. J’avais pensé à une collaboration dans un cadre purement professionnel, mais il semblait que ses intentions étaient de toucher, non pas le colonel que j’étais mais l’homme. L’ami. Le frère. Le cousin même. Malheureusement pour lui et quand bien même je ne voulais pas me contredire du tout au tout, je n’adhèrerais pas à sa requête d’autant plus que nous n’étions pas encore intimes pour que je puisse lui accorder cette grâce. Je comprenais mieux à présent pourquoi il s’était déplacé. Au moins, pas de fausses idées et de faux espoirs entre nous. Ma renommée me précédait mais il avait aussi pu voir la ferveur qui m’animait vu le thème de la justice était au centre de nos discutions. De ce fait, il lui était dorénavant clair de par mes hésitations flagrantes que je ne tournerais pas le dos à la marine pour lui. Même proportionnellement. Ce n’était pas possible. Et l’optique que je puisse un jour me confronter à un frère d’arme m’effrayait. Je passais une main tremblante dans ma chevelure avant de tirer une nouvelle fois une latte de ma clope. La nicotine se remit instinctivement à faire effet, un peu comme la poitrine d’une femme avec laquelle je m’épanouirais tranquillement… Bref, bref, je m’égarais malheureusement. Alors que je regardais l’horizon, le soldat qui s’approcha de nous vint nous annoncer que les chevaux étaient prêts à servir. En voilà, une bonne nouvelle. Moi et ce colonel discuterions tranquillement une fois là bas, sans compter que je serais certainement à l’aise dans mon bureau. Après que le soldat se soit poliment retiré, j’me retournais vers Alexander pour lui dire…

                  • Viens Alexander, il est temps de part…

                  Gros « BOUUM ». Lointain certes, mais assez tonitruant pour que je m’affole une seconde fois. Cette fois j’étais sur, il s’agissait bel et bien d’une explosion. Et si mon ouïe était bonne, le bruit venait du sud, soit du port qui donnait facilement sur la ville. Putain de bordel de merde ! Et nous qui étions bien loin de l’endroit. Heureusement qu’il y avait nos chevaux. Je fis signe à l’un de mes caporaux pour déclencher toute la sécurité sur l’île par le biais de den den mushi. Ne savait-on jamais à qui on avait affaire… Mais pourquoi personne n’a pu prévoir cette arrivée depuis la tour de notre base ? N’y avait-il personne ou était-ce un bateau pirate déguisé en caravelle de commerçants ce qui aurait pu déjouer l’attention d’mes hommes ? Probable. Tout était probable. Alors que les sirènes se déclenchèrent sur le chantier et que les 900 marines du coin commencèrent à bouger pour assurer la protection du Léviathan j’fis un signe de tête à mon homologue avant de sauter par-dessus la rambarde. La hauteur était folle, mais j’étais bien habitué à ce genre de chose. Prendre l’échelle de coupée aurait été trop long. Une fois les mètres de hauteurs franchis, j’atterrissais bruyamment sur mes deux pieds tandis que le sol s’affaissait sous mon poids, provoquant des volutes de poussières. Aussitôt sur Terre que je courrais déjà vers les chevaux un peu plus loin. L’affaire me prit une bonne minute. Une fois près d’eux, j’grimpais direct sur mon pur sang préféré avant de commencer à cavaler. Les gens me laissaient alors passer. J’entendis des galops derrière… Sans doute qu’Alexander était derrière moi, m’suivant à la trace. Bien. Très bien. Au moins je savais que je pouvais compter sur lui. Alors que nous cavalions comme des fous et que nous sortions à peine du gigantesque chantier, que mon escargophone sonna…

                  • Alheïri à l’appareil, j’écoute !

                  • ÇA CRAINT COLONEL ! CE SONT LES PIRATES DE L’EQUIPAGE DE BHORBHOR GOURAAY ! ILS VONT ACCOSTER D’UNE MINUTRE A L’AUTREEEEEEEEEEEEEEEE !

                  • QUOI ?! IMPOSSIBLE ! CE TYPE…

                  Un Géant. Un forban de 82 Millions plus précisément. Venant tout droit de Grand Line. Pourquoi faisait-il son apparition à East Blue ? Le colonel ne le savait pas ! Peut être avait-il eu vent du Léviathan… Peut être voulait-il mettre l’île à feu et à sang… Mais une chose est sure ! Il n’allait pas se frotter à un seul, mais bien à deux grands colonels de la marine qui comme des fous cavalaient en direction du port. Le danger était imminent, l’heure était grave… Et le visage d’Alheïri complètement ferme. Ça allait barder !



                Dernière édition par Alheïri S. Fenyang le Dim 20 Nov 2011 - 18:09, édité 2 fois
                  La déception pouvait se lire au fond du regard du prêtre. Il se doutait bien que Alheïri était un homme à la volonté bien trempée, mais il aurait pensé le voir choisir le chemin du bien et non pas de la servitude. Il était vrai que le prêtre ne connaissait qu’un seul Seigneur et maître, et il n’avait pas juré fidélité à la Marine mais à la cause qu’elle servait. Cela n’était pas une union définitive mais il avait un mauvais pressentiment quant à la suite des événements. Trop de monde allait et venait dans les rangs de la Marine et le prêtre s’assurait d’une main de fer que cela ne puisse se passer sous ses ordres. Déserter les rangs d’Alexander Aegirson c’était déserter la juste cause de Dieu. Et c’était là acte d’infamie. On ne pouvait juger sans être jugé. Un dicton qui s’appliquait parfaitement dans cette situation. Il pensait le Colonel Fenyang homme assez bon pour ne pas penser à mal tant que telle situation ne se serait pas produite mais les objectifs du Paladin étaient clairs, soit il changeait les choses, soit il se retournait contre ceux qui malmenaient le monde. Il n’y allait pas par quatre chemins, mais il ne faisait qu’appliquer à la lettre les principes de son dogme. Il était en perpétuelle croisade, il ne fallait pas l’oublier, sauf qu’il ne cherchait aucun Saint Graal, du moins pour l’heure. Il fallait éradiquer le mal à sa racine, et si il y avait un loup dans la bergerie, il le réduirait en miettes peu importait le prix ou les moyens. Voilà ce que cela signifiait de se battre au nom du Tout Puissant. Nul sacrifice n’était trop grand pour sa cause. Alexander fut pourtant surpris d’apprendre que Satoshi n’était autre que le cousin d’Alheïri, encore un qui avait fait le mauvais choix. Il considéra alors pour la première fois l’idée que la graine du mal puisse germer en son collègue, mais repoussa rapidement cette idée. Il n’était pas responsable des agissements de sa famille, et lui-même, Alexander, n’avait aucune idée de qui étaient ses parents biologiques, bien qu’il fût admis qu’il n’était pas entièrement homme de cette terre, mais une âme divine incarnée pour le salut de tous. Il ne prêtait aucune foi à cette histoire, mais comment pourrait-il être le bras vengeur de Dieu, dans un autre cas ? Un des archanges ayant pris corps mortel pour marcher parmi les hommes et leur apporter sa lumière ? Il secoua la tête devant sa propre prétention et soupira de plus belle.

                  Le Colonel Fenyang était de plus en plus nerveux. Les paroles d’Alexander devaient l’avoir fortement troublé, et il avait du en percer le véritable sens. En plus d’être fort, il était tout sauf stupide. Et il savait maintenant pourquoi Alexander avait préféré faire une escale sur son île. Parler de trahison potentielle à voix basse était déjà dur, alors via escargophone … Quoi qu’il en soit, cette discussion lui avait déplu et son attitude parut bien moins chaleureuse au prêtre lorsqu’il lui proposa de reprendre la route à cheval. Du moins, lorsqu’il commença son offre. Une violente déflagration répondit à ses paroles, et le chantier sembla s’ébranler en entier. Toute la masse de travailleurs et de Marine se mit en branle et le prêtre compris que cette fois là, c’était une réelle attaque ! Alexander vit alors Alheïri enjamber le bastingage du Titan puis sauter dans le vide pour se réceptionner une dizaine de mètres plus bas. Impressionnant, mais pas tant surréaliste que ça. Le prêtre s’avança, quant à lui, sur le navire et mit sa main en visière pour observer ce qu’il se passait vers le Sud lorsqu’un bruit familier lui parvint aux oreilles. Sans se faire prier, il posa une main sur le parapet et se déporta dans le vide. Il se réceptionna lourdement, craquelant le sol aux alentours et soulevant un nuage de poussière impressionnant avant de grommeler. Il fit craquer sa nuque puis se releva en époussetant sa tenue. Il était loin d’être aussi agile qu’Alheïri, mais il faisait autant dans la dentelle que lui. D’un geste, il bloqua la bride sur le cou de sa monture et se hissa dessus d’une main, tirant une plainte lourde à l’animal. Il s’écrasa dans la selle et serra violemment ses jambes. La bête bondit alors en avant et entama une cavalcade endiablée. Alexander lui murmura quelques mots à l’oreille, alors qu’elle rattrapait l’autre Colonel. Rassemblant les rênes dans une seule main, il fit claquer les lanières de cuir sur l’encolure de l’animal, l’enjoignant à forcer encore l’allure.

                  « En avant, Alheïri, ce sont mes canons qui résonnent ! Hors de question que la bataille se passe sans moi !! N’entends-tu pas leur chant céleste ? Nul repos pour ces âmes intrépides ! Nul repos ne leur sera accordé. Allons, Alheïri, pour le repos des braves ! » hurla-t-il, éperonnant son cheval.

                  Le nom de Bhorbhor Goray résonna une seconde aux oreilles du Paladin alors qu’il franchissait les escaliers au galop. Il entendit à nouveau la salve de ses canons. Et il passa sous l’arche de la ville. Un sourire malsain s’épanchait sur ses traits alors que le Soleil illuminait à intervalles réguliers ses lunettes. Les gens fuyaient vers l’intérieur de l’île, là où ils seraient en sécurité, mais il n’y aurait pour eux aucune sécurité tant que la menace n’aurait pas été anéantie ! Le prêtre commença à murmurer quelques bénédictions dans son étrange langue et peu à peu une étrange lumière commença à émaner de sa croix, comme toujours lorsqu’il faisait appel à la folie qui logeait en lui. Peu importait ce que les autres penseraient de lui en cet instant, car il n’y avait qu’une seule chose qui valait la peine d’être considérée. À nouveau, il dévala des centaines de mètres à une allure défiant tout bon sens et finit par arriver en vue du port d’où déjà la fumée s’élevait. Un feu de tous les diables avait envahi les docks et déjà on se battait dans la place qui les jouxtait. Le U.G.S. Purgatory était invisible depuis ces lieux, mais le navire ne pouvait être défait aussi facilement. Il n’avait certes pas réussi à arrêter les pirates, mais quelques hommes du Paladin étaient présents sur la place. Aucune des hautes têtes, mais assez pour témoigner de la bonne santé de l’équipage, en majorité. Les autres devaient se battre à bord. La défaite n’était pas envisageable. Passant un pied par-dessus l’encolure de son animal, le prêtre s’écrasa lourdement sur un pirate au visage barré de cicatrices et il fit cela tant et si bien que sa colonne vertébrale se rompit dans un son affreux. D’un geste dégoûté, il se saisit de l’arme du pirate et la dédaigna en la laissant tomber à ses pieds. Il fourra ses deux mains dans ses poches et en tira un poing américain et sa Bible. De sa main blessée, il commença à psalmodier et à chuchoter doucement, lisant la page où un marque page noir trainait. Il rajusta son arme en étirant les doigts de son autre main, où le gant aux inscriptions « Evil must die » étaient gravées en lettres noires. Le cuir grinça alors que le Paladin serrait son poing autour de son arme et embrassait les cinq croix ornant celle-ci. Elles étaient faites d’argent pur et possédait la sainte vertu de châtier les âmes impies.

                  « Par moi on va vers la cité dolente. Par moi on va vers l'éternelle souffrance. Par moi on va chez les âmes errantes. La Justice inspira mon noble créateur. Je suis l'œuvre de la Puissance Divine, de la Sagesse Suprême et de l'Amour. Avant moi, rien ne fut créé sinon d'éternel. Et moi, je dure éternellement. »
                  commença-t-il à psalmodier, frappant à la tempe un premier pirate.

                  Le pauvre homme sentit avec lenteur les cinq croix marquer sa peau en de sanglantes contusions, mais pire encore, il sentit son arcade sourcilière céder sous la force du Colonel. Sa mâchoire suivit le mouvement et se délogea alors que la pommette du malheureux volait en éclat. Le visage éclaté, le forban s’écroula à terre, agonisant en de sordides soubresauts. Le Paladin enjamba la dépouille comme s’il ne s’agissait que d’un tronc qui ne méritait pas plus que ça son attention et asséna un nouveau coup dévastateur au plexus d’un autre pirate. Il s’envola droit et traina pendant plusieurs mètres sur les pierres irrégulières des docks. Il ne se releva pas. Une aura dorée commençait à tourbillonner autour du prêtre, s’intensifiant au fur et à mesure qu’il débitait ses paroles, toujours sur un fond religieux. D’un geste négligent, il finit par fermer sa Bible, puis d’un coup rageur, il claqua la tranche de l’ouvrage sur la nuque du malheureux qui avait tenté de l’attaquer par derrière. Le cou du triste sire se plia étrangement et il s’affala sans autre insanité. Le métal de l’écrit religieux du prêtre luisait à présent du sang du pirate et celui-ci essuya son livre sur les vêtements crasseux de l’imprudent. Les doigts du Paladin étaient crispés autour de son poing américain, mais ce fut pourtant avec une lenteur calculée qu’il rangea son édit pour finalement se saisir de son autre arme. Il répéta le même rituel, mais avec les deux armes cette fois-ci. Ses lèvres se retrouvèrent alors marquées du sang des précédentes victimes du prêtre mais son état de démence rendait ce détail occulte. Il fit tomber son manteau de Colonel d’un geste et révéla sa bure monastique, n’arborant que ses médailles militaires. Le bandage de son bras blessé commençait à se défaire peu à peu, mais déjà le sang s’y épanchait, teintant le tissu. Les bras ballants, le prêtre se rua à l’assaut du premier venu et l’envoya ad patres d’un claquement sec des deux poings contre ses tempes. Et ainsi, il poursuivit sa mortelle litanie, alors qu’un feu dément brûlait son âme. Il déchainait là sa force de fanatique, se taillant un chemin sanglant vers son navire, caché par les flammes. Il était recouvert de sang de la tête aux pieds lorsqu’il y parvint. Le liquide carmin coulait partout sur lui et imbibait ses habits à tel point qu’ils n’en paraissaient presque plus noirs. Et soudain, le silence se fit. Trois soldats s’étaient ralliés derrière Alexander alors qu’il se dressait face au rideau de flammes lorsqu’une caisse vola à travers celui-ci, droit vers le Colonel. D’un pas sur le côté, il évita le lourd projectile d’un cheveu, mais ses hommes n’eurent pas cette chance. La caisse vola en éclat, les écrasant contre un tas d’objets métalliques. Cette vue déclencha un nouveau sursaut de colère chez Alexander et il hurla sa rage à travers toute la place puis éclata d’un rire sadique. La fumée assombrissait les cieux, et masquait le Soleil. C’était là une scène apocalyptique. Les flammes se reflétaient dans le verre des lunettes rondes du fanatiques et son sourire immaculé s’étirait jusqu’à sa bouche alors qu’une ombre colossale se dessinait derrière le mur incandescent. Un pas lourd se fit entendre, à travers le tumulte des batailles, et un homme dépassant le prêtre de deux bonnes têtes fit son apparition. Il arborait une hache à deux mains et une lourde armure de bronze qui ne protégeait que ses avant-bras, son torse et ses tibias. Le reste ne faisait que souligner sa musculature impressionnante.

                  « Arishalk. Primé à vingt millions, une petite frappe chez les impies. Fidèle second du tristement célèbre Bhorbhor Goray. »
                  cracha Alexander, avant de faire claquer ses deux poings américains l’un contre l’autre.

                  Spoiler:


                  Le Barbare éclata d’un rire gras qui en disait long sur son intellect. Il leva son imposante arme et frappa d’un coup direct le prêtre. Celui-ci n’eut aucun mal à l’éviter mais fut autrement surpris par la secousse qui s’ensuivit. L’homme avait littéralement fendu la terre et la violence du choc avait failli mettre Alexander à terre. Celui-ci posa un genou à terre puis se releva lentement, arborant toujours le même sourire sadique. Du bout de l’index, il se replaça les lunettes puis sans crier gare, il se rua à l’assaut. Prenant de vitesse le second, il frappa du poing contre les plaques de métal protégeant son armure et fut agréablement surpris de le voir reculer, un profond impact dans l’objet. Ne lui laissant aucun répit, le prêtre replia son autre bras et forçant comme une brute, il relâcha son coup, frappant du plat de la main contre le plexus de son adversaire. Celui-ci, le souffle coupé, bascula à terre et lâcha une étrange grimace avant de se relever. Son armure était à présent complètement enfoncée, et le Paladin le narguait de toute sa folie. Retournant sa main, il le toisa et lui fit signe de s’approcher en la repliant. Le Barbare prit alors son énorme arme en main et l’envoyer filer à toute vitesse vers le Paladin. Surpris, celui-ci se contorsionna pour éviter l’objet, mais une des pointes se prit dans sa bure et arracha tout le haut de sa tunique, lui dessinant une large estafilade sur tout le torse. Alexander fut projeté à terre par la violence du coup, et resta une seconde sonné, alors que la hache rebondissait un peu plus loin. Il n’eut pas même le temps de comprendre ce qu’il se passait que deux énormes mains le saisirent au cou et au bassin et le levèrent dans les airs. Il fit le faciès grossier de son adversaire à quelques centimètres de lui puis il sentit la pression de ses énormes battoirs sur son corps. Le second tenta de briser le Colonel en rompant sa colonne vertébrale par sa seule force physique et il réussit à tirer un cri de douleur de la part d’Alexander.

                  « Moi … je suis l'alpha et l'oméga … » commença à psalmodier Alexander, l’énergie pieuse qui le traversait reprit alors une fougue toute nouvelle.

                  Hurlant à pleins poumons, le Paladin banda tous ses muscles d’un coup et parvint à se libérer de l’étreinte infernale de ce colosse dément. Arishalk, surpris, recula d’un pas et considéra d’un autre œil ce petit être qui venait de réussir à se défaire de sa technique de sa simple force physique. Il ne prit malheureusement pas le temps de ce demander ce qu’était cet étrange halo doré qui émanait de lui et pulsait de manière régulière. Les yeux d’Alexander avaient à présent une teinte bleue électrique surnaturelle et ils parurent étinceler lorsqu’il se releva, ruisselant de son propre sang. Il arracha ce qu’il pouvait rester de sa bure sur son torse et révéla ses cicatrices et les tatouages qu’il s’était infligé par le tourment du fer chauffé à rouge, recouverts par la suite d’une encre noire. Il écarta les bras un gonfla sa poitrine d’air avant de faire craquer sa nuque. Il plongea son regard dans celui de son adversaire et à nouveau, il lui sourit.

                  « … le premier et le dernier … »
                  continua-t-il, laissant ses bras tomber le long de son corps.

                  Et de nouveau, il se rua à l’attaque, encouragé par son sens dément de la justice et du châtiment divin. Il feinta à droite et porta son coup, gauchement paré par son adversaire qui semblait comme perdu sans sa hache. Puis son second poing rencontra la joue du colosse qui y perdit quelques dents et cracha un mollard ensanglanté avant de grogner de rage. Ne savait-il donc pas s’exprimer ? Profitant de la stupeur engendrée chez le barbare, Alexander frappa une troisième fois, puis une quatrième fois, atteignant à chaque fois son adversaire à un endroit différent. Arishalk laissa échapper un nouveau cri. N’ayant aucune pitié pour cet animal à la cervelle amputée, Alexander banda les muscles de son bras et frappa de toutes ses forces le pirate. Cependant, au dernier moment, son adversaire se déporta sur le côté et attrapa son bras. Il glissa ses mains sous son coude et d’une prise, il retourna le Colonel contre le sol où il s’écrasa bruyamment. Celui-ci eut le souffle coupé sur le moment et toussota, mais déjà le colosse revenait à la charge. Prenant son élan, il administra un coup de pied effroyable au prêtre et l’envoya voler à quelques mètres, où il s’écrasa avec un bruit sourd. Un filet de sang s’échappa de la bouche d’Alexander, alors que la montagne de muscles se ruait vers lui, hurlant comme un bœuf. Evitant la première attaque en roulant sur le côté, le Marine s’essuya le menton et pesta contre cet adversaire coriace. De nouveau il esquiva un coup monstrueux, mais encore une fois, Arishalk montra une vitesse étonnante pour son gabarit. Il anticipa Alexander et sauta pour lui administrer un violent coup des deux poings joints. Un bruit écœurant résonna dans la place, suivit d’une gerbe de sang. Contrairement à la bête avide de combat, le prêtre n’était pas stupide. Le pirate tenait le manche de sa hache entre les mains, étonné de sentir son propre métal à l’intérieur de sa chair. La pointe acérée de la pointe de l’arme perçait son abdomen. D’un geste, Alexander fit basculer le corps à côté de lui et, se servant de l’arme comme support, il se releva. Le sang envahissait la bouche du pirate, mais celui-ci tenta quand même de se relever. D’un geste de dépit, le Colonel retira l’arme de son ventre et observa avec délectation le tourment du pirate s’intensifier. Passant ses mains sur sa plaie, Arishalk tenait d’endiguer le flot de sang, mais le prêtre avait tranché trop profondément et touché non seulement sa colonne, mais aussi quantité d’artères et de veines. Il était condamné et rien ni personne ne pouvait y changer quelques chose.

                  D’un geste souple, le Colonel fit jouer l’imposante hache dans ses mains et abattit violemment le tranchant de l’arme sur la nuque dénudée de son adversaire à terre. Il sépara sa tête de son corps avec une précision étonnante, et le crâne de son défunt adversaire roula sur quelques dizaines de centimètres avant de s’arrêter. Sans quitter son sourire malsain, Alexander se baissa et saisit celui-ci par le cuir chevelu et passa l’imposante hache sur son épaule. Voilà qui lui ferait une arme de calibre à affronter un demi-géant. Il était couvert de contusions et sa blessure semblait heureusement superficielle mais elle ne voulait pas s’arrêter de saigner. Il n’y prêta aucune attention et s’avança fièrement vers le rideau de flammes. Et il le franchit.


                  « Le commencement et la fin. » termina-t-il, enserrant les cheveux du crâne d’Arishalk.
                      Il est fou cet homme, il est vraiment fou. Je ne comprenais pas pourquoi il prenait autant de risques à cavaler de cette manière là. Il lui avait fallu quelques secondes seulement pour me dépasser et me distancer follement alors que j’estimais que je progressais déjà à une allure démente. Nous étions certes aux abois, mais il fallait quand même être raisonnable et s’assurer d’arriver au port sans une seule égratignure. Le voyait-il de cet œil ? Sans doute que non… Mais l’heure n’était peut être pas adéquate à de tels questionnements puisqu’il me prouvait là, sa ferveur et son immense foi à défendre la justice et l’appliquer comme il se devrait. Je dois dire qu’il me bluffait et qu’un sourire naissait sur mon visage en le regardant galoper de cette manière. Je crois même que je l’aurais finalement imité en talonnant les côtes de mon destrier. J’crois bien. Si et seulement si je n’avais pas manqué de justesse de me faire tamponner la face par une branche que je dus éviter en me couchant littéralement sur mon animal. Les premiers signes du combat s’annonçaient déjà. De loin, j’eus l’ouïe malheureuse de coups de canons… Des fumées s’élevèrent au ciel… Des cris se faisaient entendre. Le temps n’était plus notre allié, malheureusement. Mais alors que je pensais à accélérer le rythme quitte à me rompre une côte, j’arrivais enfin à bon port, où déjà, Alexander était sous le feu de l’action. J’apercevais quelques marines sur place. Mes hommes ? Nan. Je ne reconnus aucun d’entre eux. Mais en cogitant deux trois secondes de plus, j’arrivais à la conclusion qu’il s’agissait des hommes de mon homologue, qui avaient plus ou moins anticipé l’attaque de l’équipage pirate qui abordait mon île. Les miens ne tarderaient surement pas, surtout que la plupart savait que j’avais pris les devants pour minimiser les dégâts qu’il y allait avoir dans cette bataille. Il n’était pas questions de laisser quiconque approcher le chantier du Léviathan. Pas questions…

                      Un boulet d‘canon sorti de nulle part, fonça droit vers nous. Tout en tirant sur la laisse de mon cheval qui freina sa course à temps, je dégainais mon meitou. Sans trop attendre, j’exécutais une coupe dans le vide. La résultante ne fut autre qu’une onde tranchante qui fit exploser le projectile à quelques mètres devant nous, tout juste avant qu’elle ne nous atteigne. Malgré le souffle de l’explosion important, je réussis à quitter mon cheval pour gagner la terre ferme et ainsi participer pleinement au combat. Mais à peine avais-je rencontré le sol que plusieurs pirates surgissaient de l’écran de fumée noire devant moi. Écarquillant mes yeux d’un air réellement surpris, je finis par reprendre toute ma concentration quelques secondes plus tard, avant d’aller à leur rencontre au pas de course. Ils couraient, que dis-je, se ruaient vers moi en vociférant de charmants mots d’amour à mon encontre, qui m’allaient droit au cœur. Le genre de belles phrases pleines de vulgarité, que je me passerais de vous dévoiler. Le premier d’entre eux me dépassait à peine au niveau de la taille. Il m’administra un gros coup de sa hache émoussée que je pris plaisir à parer d’un geste brusque. Son arme s’envola d’un coup et il n’eut que ses yeux pour voir ma lame qui s’abattait soudainement sur son épaule. Le sang gicla et un instant plus tard, l’ennemi était à terre avec un bras en moins. Son cri perça les quelques tympans aux alentours, les miennes mises à part. Il faisait beaucoup de bruits pour un bras perdu. Tsss… Mais alors que ses camarades se figèrent au vu de ce tableau peu séduisant, l’mec se releva et revint à la charge. Ca aurait été plus simple s’il était resté couché à même le sol, vraiment. Soupirant d’un air blasé, je consentais à me mettre en garde avant de le poignarder avec une facilité déconcertante. J’aimais donner une chance. Mais quand on en abusait, on ne pouvait que récolter la mort avec moi. Aussi hoqueta t-il violemment, avant de vomir du sang et de passer de vie à trépas…

                      Son corps chuta lourdement au sol. Je le regardais d’un air agacé avant de me résoudre à focaliser mon attention vers ses compagnons qui m’observèrent d’un air médusé. Était-il le plus fort d’entre eux ? On dirait bien. Puisque certains d’entres eux tremblaient dorénavant à peine de vue. D’autres plus courageux, grognaient de colère, avant de s’élancer vers moi dans des cris de guerre, de rage. Ils étaient trois, quatre… Non, cinq même à vouloir me charger simultanément. Des situations bien chiantes. Il a donc fallu me jouer au saltimbanque, évitant les coups qui pleuvaient ça et là. Une hallebarde qui détruisit la dalle après que j’ai effectué un bond périlleux vers l’arrière… Deux lames qui brassaient l’air, manquant de peu ma tête, si ce n’est des mèches de ma chevelure qu’ils réussirent à atteindre… Une flèche qui siffla en direction de mon entrejambe et que je du écarter… Bref, la totale. Pendant deux bonnes minutes, je m’étais attelé à éviter leurs offensives. Mais ne disait-on pas que la meilleure défense, c’est l’attaque ? L’heure était donc à la riposte ! Alors qu’ils voulaient attente à ma vie une nouvelle fois, je me dandinais de droite à gauche sur moi-même comme un alcoolique, sourire de gros débauché aux lèvres. Alors qu’une épée brassa une énième fois l’air dans le but de me fendre le crane, je disparus complètement de leur champ de vision. Choqués par ma nouvelle esquive, les pirates se retournèrent sur eux avant de regarder les alentours couverts de flammes et de fumées. Alors qu’ils se questionnèrent sur mon emplacement, l’un d’entre eux vit de sa poitrine jaillir une quantité faramineuse de sang. Les autres suivirent automatiquement le même sort, tombant comme des mouches au sol. Comme par magie, je réapparaissais alors au milieu de ces nouveaux cadavres baignés dans une mare de sang naissante ; content d’avoir pu utiliser ma fameuse technique des pas de velours qui consistaient à me déplacer sur la pointe des pieds sans m’faire voir…

                      • Eh bien eh bien… A qui l’tour ?

                      Avais-je dis d’une voix assez sinistre qui ne présageait vraiment rien de bon, en relevant lentement la tête vers ceux qui m’faisaient face. J’avais un air de gros tueur. Nous n’étions pas sur mer pour que je puisse avoir « trop » de complaisance. Ici, c’était Shell-Town. J’avais à protéger la construction du Léviathan et la ville d’un nombre d’au moins 5000 habitants. C’est vous dire les responsabilités que j’avais. Pris d’une frousse pas possible, le reste de l’équipage commença à fuir en direction d’un dock, quand tout à coup et dans un grand bruit de déchirure, leurs corps furent repoussés par je ne sais quoi vers ma personne. J’écarquillais une énième fois mes yeux, une main dans la poche, avant de les voir retomber avec véhémence sur le sol, autour de moi. Mais qui est-ce qui avait bien pu faire ça ? Un proche ? Non… Personne à part moi, Alexander, Ketsuno ma lieutenante et mes caporaux, n’aurait pu faire chose pareille. D’autant plus que ceux que j’avais cités n’étaient pas encore arrivés sur la place. Mais alors que je contemplais l’œuvre réalisée par je ne sais qui, une silhouette tapie dans l’ombre se dessinait au fur et à mesure, dans la poussière environnante. Je relevais ma tête et plissais mes yeux avant d’apercevoir un mec à la peau mate comme moi, coupe afro et armé de deux épées. Ses yeux étaient constamment fermés, et son sourire tranquille. Nous avions la même carrure si ce n’est qu’il semblait un tout petit peu plus mince que moi. Je haussais un sourcil avant de le regarder nonchalamment. Un épéiste hein… « Qui aurait cru que je te rencontrerais un jour… » Que je connaissais de réputation. L’homme à ma phrase agrandit légèrement son sourire avant de me complimenter sur mes exploits de tout à l’heure et sur la belle arme que j’avais. Meitou qui l’intéressait. Mais encore que pour l’avoir, fallait-il qu’il me tue. Ce qu’il me promit de faire d’un air sournois. Je regardais mon vis-à-vis et me mit à sourire à mon tour…

                      • Berbatov Spencer, épéiste notoire de West Blue. Prime estimée à 20 millions de Berrys. Stratège et troisième homme de main de Bhorbhor Goray. Anciennement chasseur de primes… Eh bien eh bien…

                      • Oh ! C’est d’un tel honneur d’être connu par un si grand colonel !

                      Belle ironie qui effaça immédiatement mon sourire. J’avais envie de lui dire, « petit bâtard, va », mais je m’en étais gardé en braquant ma lame vers lui dans un air de défi. Mes mirettes de jade glissèrent doucement vers les sabres du gars et je notais qu’il s’agissait d’Uchigatanas. Étant un connaisseur, je savais que ces lames étaient considérées comme étant les ancêtres du katana mais aussi comme étant des sabres de mauvaise qualité. Il avait en sa possession des objets rares ! Mais j’arrêtais de rêvasser rapidement quand il adopta une position d’attaque. Nous nous jaugions du regard pendant un moment et ce fut lui qui ouvrit les hostilités. D’un bon furtif, il réduisit rapidement l’écart ce qui me surprit tout bonnement. Malheureusement, mon temps de réaction ne fut pas comme d’habitude et je du essuyer un premier coup de sabre qui provoqua une grosse estafilade sur mon épaule gauche. Alors qu’il comptait réagir avec sa deuxième lame, j’avais fait un bond en arrière avant d’observer le sang qui se rependait et imbibait ma chemise blanche au niveau de l’épaule. L’coup faisait plutôt mal... Le bâtard avait réussi à toucher ma clavicule. Fermant l’œil droite sous la douleur qu’il me provoqua, j’empoignais solidement mon arme avant d’amorcer une offensive à mon tour. La douleur était mon quotidien et cette pauvre petite blessure n’était pas ce qui allait m’faire flancher ! A mon tour, je fis une belle prestation de ma rapidité avant de contre-attaquer avec un revers dont j’avais l’habitude. La violence du coup le décontenança puisqu’il réussit à le bloquer avec sa première lame, mais en titubant il donna un coup dans le vide avec sa deuxième pour se protéger. Alors que je l’évitais en m’abaissant furtivement, je voulus lui administrer un croc-en-jambe qu’il esquiva fort bien en exécutant un dernier salto digne de ce nom. Il se retrouva un peu plus loin, tranquille, pendant que je me relevais en me remémorant les moindres gestes qu’il avait effectués…

                      • Hola hola Colonel ! Montrez-moi donc ce qui fait tant votre renommée !

                      A sa nouvelle phrase, je le regardais d’un air plutôt vide, avant de recommencer à sourire. Voilà ce qui m’avait un peu manqué lors de notre première confrontation : Le sourire et ma sérénité. J’avais vu clair dans son jeu. Énerver pour mieux taper là où ça fait mal. Et faut dire franchement que j’en avais vu plein des comme lui. Aussi avais-je provoqué son étonnement lorsque je souriais. Sans m’occuper de mon épaule qui saignait je me remis en garde. Perdre contre un larbin de 20 millions qui était capable de frapper de plein fouet ses propres hommes ? Tss… L’idée n’était même pas envisageable. C’est alors que nous réduisions l’écart à la même seconde. Notre course folle nous mena à un équilibre de force conséquent lorsque nos lames s’entrechoquèrent. Si bien que l’impact provoqua une vague déferlante qui balaya tout autour de nous. J’utilisais là tout ma force. Le bougre avait du user de ses deux lames pour contenir mon attaque. Malheureusement pour lui, je ne reposais pas tous mes espoirs sur ma lame, mais bien sur ton mon corps entier. Car un instant plus tard, il gémit de douleur suite à un coup de pied fracassant dans son bide. Perdant le fil, il chancela maladroitement et je ne me fis par prier pour profiter de l’occasion. Apparaissant soudainement derrière son dos, j’élargissais mon sourire et finit par rengainer mon arme sans daigner regarder en arrière l’effusion de sang qui s’en suivit. Le forban hurla toute sa douleur sans pour autant rencontrer le sol. Il se retourna vers moi en respirant comme un taureau fulminant de colère, les sabres toujours en main. Tout en curant nonchalamment mon nez, j’en fis autant avant de regarder tranquillement sa poitrine largement lacérée par mon coup de tout à l’heure et toute ruisselante du sang qu’il se vidait progressivement. Nous ne jouions pas sur le même terrain. Dans un ultime effort, il se précipita vers moi en beuglant toute sa hargne. Évitant sereinement ses coups devenus malhabiles, j’écrasais ma paluche sur son visage, ce qui eut pour effet de casser son nez…

                      • AAAARRGGGHHHHHHH !!!

                      L’énième cri de souffrance qui perça mes tympans. J’eus limite pitié pour cet homme étant donné que j’étais loin d’avoir mauvais fond. Malheureusement pour lui, j’étais obligé de continuer. Le poing que je lui avais fait encaisser brisa l’ossature de son nez qui éclata en sang. Je le rattrapais dans sa chute alors qu’il lâchait ses armes avant de loger une fois, deux fois, trois fois mes genoux dans ses flancs. Sa bouche débita une grosse boule de gerbe sanguinolente. Je le relâchais et multipliait les coups de poings sur son visage. Son visage auparavant beau était d’une laideur saisissante vu que je lui refaisais le portrait. C’est alors qu’il tomba enfin au sol. Il convulsait grave. Son faible regard me suppliait de l’achever, moi qui m’étais acharné sur sa personne pour le bien de ma population, du projet du Léviathan. Il faut dire que si je n’avais pas eu ces responsabilités, peut être qu’il aurait-il eu plus de chances, étant donné que j’avais la mauvaise/bonne (Au choix) habitude d’épargner la vie des pirates que je rencontrais. Pour arrêter de le faire souffrir plus longtemps, je sortis une nouvelle fois mon meitou en le regardant avec une once de regret. Tout ce payait sur Terre. Notamment le mal. Et c’est ainsi que je me penchais vers lui, avant de lui arracher la tête d’une seule coupe. Alors qu’elle roula à quelques mètres plus loin, je m’étais retourné dans ce véritable capharnaüm, posant mon glaive sur mon épaule intacte. Il me fallut une bonne minute de recherche parmi les cris, les coups de feu, les corps et les flammes vives du coin avant d’apercevoir Alexander et la tête décapitée qu’il tenait dans sa main. Une bien triste image qu’il me donnait de lui et qui me faisait penser à la bestialité dont Arashibourei pouvait faire preuve ; bien que je ne m’arrêtais pas à ça pour le cataloguer de « marine psychopathe » comme beaucoup de nos semblables. Pour attirer son attention vu que j’arrivais derrière son dos, je raclais la gorge avant de stopper ma marche à ses côtés…

                      • Le mieux serait que tu lâches ça…

                      Oui oui. J’avais eu le culot de le lui dire malgré l’aide qu’il m’avait apporté, le tout sous une voix un peu agacée. Parce que c’était bien beau de défendre la justice, mais c’était encore mieux quand on le faisait sobrement. Ici, il salissait son image de marine. Idem pour son image de curé. Bien que je ne pouvais pas lui en porter rigueur. Qui étais-je pour d’ailleurs ? Juste un petit colonel d’un coin reculé d’East Blue. Je pouvais moi-même retirer cette tête hideuse de sa main qui avilissait tout son être, mais je m’arrêtais seulement à la parole en espérant qu’il me comprenne. On avait quand même eu un bon timing, il faut le dire. Finir nos combats respectifs presqu’au même moment, c’est fort. Là, il me prouvait encore une fois sa force. Alors que je finissais par regarder vers l’horizon, mon visage se froissa d’horreur lorsque je vis une silhouette colossale. Et lorsque celle-ci qui s’était précautionneusement avancée en silence dans l’eau, foula Shell-Town pour la première fois, la terre s’ébranla soudain. A un tel point que je cru avoir affaire à un tremblement de terre tellement le sol sous mes pieds vibra à une intensité folle. Dans un bruissement d’ailes assez sinistre et unique, les oiseaux de la forêt de l’île s’envolèrent dans le ciel. Signe annonciateur d’un rude combat qui promettait. Toujours impressionné par cette masse de 20 à 30 mètres de hauteur, camouflée par la fumée ambiante, je me mis à grogner en sifflant imperceptiblement le nom du géant. Un géant. Un pirate géant… Décidemment, ça n’en finissait pas de me rendre visite du côté des pirates. Après des humains, un homme poisson, j’me retrouvais maintenant avec un géant. Qu’est ce que demain me réserverait ? La tribu des longs-bras, des hommes chèvres ? Tsss… Sans même me poser des questions et sans même avoir encore vu son visage, je contractais les muscles de mes deux bras, avant de m’écrier…

                      • ONOOOOOOOOOOOO !

                      Le colonel décocha une gigantesque lame de vent à couleur orangée qui détruisait le sol au fur et à mesure de son avancée vers le titan qui leur faisait face dans l’ombre. L’attaque allait-elle faire de l’effet sachant qu’elle pouvait raser une bonne partie d’un galion ? Allait-il la dévier ? L’esquiver ? Serait-il gravement blessé ? Mystère et boule de gomme.

                      Le 9 mai 1969, à deux kilomètres de la frontière nord de Shell Town, la 101ème Division d’Infanterie de l’armée de la Marine progresse vers la colline 937. Pour eux c’est une simple reconnaissance. Pour les Révolutionnaires, la colline 937 est une zone stratégique. La dizaine d’appelés de la 101ème Division, peu formée au combat, devait effectuer cette mission de routine en moins de deux heures. Ils résisteront héroïquement pendant neuf jours. Ce texte ne raconte pas leur histoire.

                      Le charnier incandescent montait et les odeurs n’étaient pas pour plaire. Des monceaux de corps reposaient ça et là, même si on ne pouvait dénombrer qu’une centaine de morts, c’était déjà trop. Juché sur un tas de débris, le Colonel Alexander avançait d’un pas dément, chacun de ses gestes vibrant d’une étrange énergie pieuse. L’énorme hache qu’il portait, posée sur son épaule, tranchait avec le personnage. Torse nu, il était maculé de sang mais semblait n’en avoir cure(é). Sa peau était roussie par les flammes, et un sourire malsain reposait sur ses lèvres. Le vent venu des océans agitait le bas de sa bure, rendue lourde par les affres de la bataille. Une large estafilade barrait son torse et bien que le prêtre ne semblait pas en souffrir, un sang épais en coulait. De multiples contusions le marquaient, mais ce n’était rien en comparaison de tout ce qui apparaissait sur son corps marqué par différents actes de foi. Alexander tremblait presque, et l’air sembler pulser autour de lui, alors que chaque pas qu’il exécutait le rapprochait de sa cible. Tout ce carnage contribuer à attiser sa colère, et renforçait par là même ses convictions. Il avançait au milieu des flammes de l’Enfer et se dirigeait vers le maître des lieux. La personnification même de Satan et le mettrait à bas, tout comme il avait mis à bas ces pirates. Il les aveuglerait de sa divine lumière et mettrait un terme à leur hérésie. Un jour viendrait où tous s’agenouilleraient devant lui et reconnaîtraient la toute grandeur de Dieu. Un jour tous ces impurs seraient vaincus et alors l’humanité serait sauvée. C’était ce vœu, formulé maintes fois, qui guidait chaque action du Paladin. Il ne pouvait mourir, ni aujourd’hui ni jamais. Il était habité par la volonté du Seigneur et nul ici ne pouvait se targuer d’être autant touché par sa grâce que lui. Il était son envoyé sur terre, venu en ces lieux pour accomplir son divin châtiment. Une Croisade qui n’en finirait peut être jamais. Mais peu lui importait car ces combats étaient toute sa vie.

                      Les paroles d’Alheïri le tirèrent un instant de ses pieuses élucubrations et le prêtre chancela une seconde, sentant cette curieuse force le quitter en même temps que le carcan sordide qui dirigeait ses pensées. Il tourna la tête vers son homologue et lui adressa un sourire à moitié dément. Il ne comprenait pas, il ne savait pas ce qu’était ce mal qu’ils pourchassaient. Comment lui en vouloir, lui qui n’était qu’un égaré, qui n’avait pas encore trouvé la foi ? Oh certes, il était un homme de bien, mais cela ne lui arrogeait pas pour autant la connaissance intrinsèque de ce mal. Alexander soupira et retint un doux rire. Il était effrayant, ainsi. Il remarqua que son allié était lui aussi marqué par les combats, avait-il mis à bas un autre lieutenant de ce sordide Bhorbhor Goray ? Ah ah ah … peu importait de qui il s’agissait, tant que cela était fait. Le prêtre considéra un instant la tête qui pendait à son bras et releva les yeux vers Alheïri. Il le dévisagea avec le même sourire, puis du bout du doigt replaça ses lunettes. Non, non. Il ne comprenait pas, car la voie du Seigneur ne lui apparaissait pas. Il fallait que tous contemple ce spectacle, que tous voient que le mal ne restait jamais invaincu, ni impuni. Que tous sachent ce qui les attendait s’ils arpentaient ce chemin. Et encore, ce n’était pas le bûcher qui avait fait face à Arishalk. Cet homme était trop dangereux pour être ainsi traité, mais ce n’était que par le feu que l’on purifiait. Le feu sacré de la divine punition. Amen.

                      « Lâcher ça … non. Ce sont des pirates, des âmes noires et corrompues jusqu’à la moelle rassemblant les pires vices que ce monde puisse contenir. Qu’ils sachent tous que nous ne sommes pas des couards, que nous remplissons notre devoir avec honneur car la lumière du Seigneur est avec nous. Qu’ils contemplent la mort de leurs chefs, qu’ils sachent que le même tourment les attend. Que ces misérables se réfugient dans leurs craintes et se repentent de tous leurs péchés car une fois jugées, toutes les âmes sont égales. Et le tourment que nous leur infligerons ici ne sera rien en regard de ce que les Enfers peuvent leur réserver. » répondit-il, avec une voix qui ne lui ressemblait plus tellement.

                      « Qu’ils contemplent leur triste sort. Et qu’ils quémandent le pardon. Am… en ?! »
                      continua le prêtre, interrompu par une violente secousse.

                      Un bruit si puissant que tout Shell Town trembla d’un seul coup, lorsque la chose posa le pied sur terre. On la distinguait à peine, mais elle surpassait déjà les plus hauts bâtiments de la ville. Même Alexander en resta bouche bée, quelques secondes, avant de reprendre ses esprits. Jamais il n’avait combattu de géant, et jamais il n’aurait pensé la chose si colossale. Mais ce n’était pas pourtant qu’il se débinerait. Un éclat de rire naquit dans sa gorge, alors que tous, ou presque, tremblaient devant le colosse qui s’avançait vers eux. Nouvel adversaire, nouveau challenge ! Un être aussi monstrueux ne pouvait qu’avoir été vomi des enfers ! C’était là une chose si démoniaque que la tuer ne pourrait que plaire au Seigneur ! Un pas de plus vers la consécration, un pas de plus vers la purification ! Le Paladin se vit à nouveau enrobé de cette étrange aura fanatique qui avait le don de se matérialiser autour de lui, entourant sa peau d’une lueur dorée caractéristique. Sa croix ballotait sur son torse au rythme du vent. Soudain, il eut la sensation d’être aspiré en avant, et une puissante bourrasque s’envola de l’épée de son homologue. Une gigantesque lame orangée jaillit de l’arme d’Alheïri, emportant débris et vent avec elle. L’attaque fut si puissante qu’elle créa un trou d’air et révéla un instant la totalité du champ de bataille au prêtre. L’U.G.S. Purgatory était la proie des flammes, et de nombreux cadavres jonchaient le port autour de lui. Il reconnut de loin certains de ses hommes, mais il vit aussi que d’autres combattaient. Mais ce ne fut pas cela qui attira son regard et lui tira un cri de rage. La fumée dissipée, tout lui apparaissait clairement, et à présent, toute la monstruosité de la bête lui apparaissait. Il était haut d’une trentaine de mètres et maniait un marteau démesuré dont le poids seul aurait fait sombrer le plus résistant des navires ! Une lueur rouge sombre animait son regard d’une bestialité terrifiante. La créature était presque nue, et n’arborait qu’un pagne masquant sa virilité. Sa peau semblait si épaisse que des cicatrices de la taille d’un homme s’y enfonçait sur une profondeur inquiétante. À l’évidence, toute armure était superflue devant un tel mastodonte. Mais au lieu d’inquiéter le Colonel, comme tout homme sensé, le spectacle attisa sa haine et déclencha en lui un sursaut de fureur. Il ramena son bras gauche derrière son dos, et d’une impulsion monstrueuse, il expédia la tête d’Arishalk vers son capitaine. Celle-ci vola droit vers lui, filant dans les airs avec une trainée sanglante peu alléchante. Puis, se penchant vers l’avant, le prêtre commença à dévaler les quelques dizaines de mètres qui le séparaient de sa cible. Il fit tournoyer la gigantesque hache de feu le second de Bhorbhor autour de son corps et finit par prendre appui sur une pile de tonneaux pour prendre son envol. Il atterrit sans peine sur bâtiment annexe, certainement un entrepôt, mais ne s’arrêta pas là. Cherchant à gagner de la hauteur, il banda tous les muscles de ses jambes, et prit son élan. Les pierres s’enfoncèrent sous le poids du Colonel, alors qu’il prenait son impulsion.

                      Spoiler:

                      « In nomine patris …. Filii … et Spiritus sancti !! » hurla-t-il, alors que la silhouette de son adversaire s’approchait de plus en plus.

                      Levant les bras, le prêtre abattit son arme démesurée sur la couenne du géant, lui déchirant la peau dans un bruit de succion écœurant. La bête hurla de douleur, n’ayant certainement pas prévu que ce petit insecte soit capable d’arriver jusqu’à elle et secoua violemment son bras dans le but de chasser cette nuisance. Se cramponnant à l’objet encore planté dans le bras de Bhorbhor, Alexander hurla de nouveau et alors que ses lèvres s’agitaient dans une litanie silencieuse, il retira la hache et tendit tous ses doigts, levant le bras. Il frappa violemment la créature et enfonça sa main dans sa chair abîmée, déclenchant un nouveau geyser de sang puis une fois stabilisé, il frappa de nouveau. Il dut s’y reprendre à deux fois avant de faire à nouveau saigner le colosse, mais celui-ci hurla tout de même de douleur. Un sourire sadique se dessina alors sur le visage d’Alexander, alors que l’immense main du géant se glissait par-dessus lui pour l’aplatir. Il lâcha alors son arme et retira sa main, rouge du sang de Bhorbhor, de sa plaie puis exécuta un salto arrière pour éviter le coup. Evidemment, la stupide créature se fit prendre au piège et claqua sa main sur son biceps, écrasant la hache. De nouveau, elle cria et secoua sa main où à présent l’arme était enfoncée. Elle l’arracha d’un coup de dent et adressa un regard bestial à la petite créature qui glissait le long de son bras gauche. D’un geste sec, elle leva le bras puis le rabaissa. Alexander sentit curieusement le contact de la chair fétide de Bhorbhor le quitter, et le vide le happer. Il se vit décrire un magnifique arc de cercle, à la merci des vents. Puis ce fût le regard carmin du géant qui l’accueillit. Criant de rage, il banda ses muscles et adressa un formidable coup en direction du Colonel, en mauvaise posture. Le sang d’Alexander ne fit alors qu’un tour, aucune échappatoire ne s’offrait à lui. Il gonfla ses poumons d’air, et croisa ses bras devant lui, se protégeant du coup à venir. Le prêtre ferma les yeux et attendit le choc.

                      « Vade retro, Satanas ! »hurla une voix bien connue.

                      Un violent coup résonna dans le port, suivit d’un craquement écœurant. Alexander ouvrit les yeux et aperçut le corps sanglant de son second qui filait vers lui à une vitesse inconcevable, sa masse brisée encore dans les mains. William Saint Cutberth le percuta et l’emporta dans sa chute, tandis que le coup du géant frôla le Colonel. Les battements du cœur du Paladin commencèrent alors à s’emballer, et une rage sans commune mesure le prit. Il entoura de ses bras son ami de toujours et son hurlement de rage surpris tout le port, alors qu’il s’écrasait violemment dans la carcasse de ce qui fût son navire. Une gerbe d’échardes et autres esquilles s’envola du navire puis le silence se fit.
                          Super… Moi qui croyais avoir tout misé sur l’attaque pour surprendre le titan, eh bien c’était raté. Parce ce que oui, il avançait toujours aussi tranquillement vers ma ville qu’il menaçait de détruire et oui, je l’avais malencontreusement loupé. Ma blessure à l’épaule m’avait joué un sale tour à la dernière seconde où j’attaquais. J’avais jute réussi à balayer tout ce qui entravait notre chemin, ou plutôt son chemin, à savoir : Flammes, fumées, cadavres, ces petites broutilles qui rendaient clair la vue qu’on pouvait avoir sur ce véritable monstre. Qu’est ce qu’il y avait de si tentant ici pour qu’il s’emmène sans craintes avec ses hommes ? Le Léviathan ? Certes, ce vaisseau était grand, mais de là à vouloir l’voler pour naviguer avec, c’était quasiment impossible. Pour cette masse surtout. De toute façon, j’ne voyais pas ce qui puisse intéresser un géant pareil à part peut être la destruction de la ville pour son plus grand plaisir… Que des sadiques ces gens là... Complètement dépourvus de bon sens. Alors que je grognais de rage en serrant la garde de ma lame, je vis la tête qu’Alexander tenait plus tôt voler vers le colosse pour aller le heurter. Hohé ! N’était-ce pas lui qui avait auparavant refusé de se débarrasser de cette satanée tête lorsque je le lui avais dit de le faire ? Cherchait-il à provoquer la colère du monstre qui était déjà excité à l’idée de venir nous dézinguer ? Tss… Ce mec est d’une folie sombre. Son fanatisme à l’égard de la religion et de la justice, prenait le pas sur sa conscience et il s’abaissait à des bassesses incroyables. J’aurais voulu lui flanquer une baffe ou deux pour lui remettre les idées en place, mais il accentua son image de « fou » à mes yeux lorsqu’il se précipita tout seul vers le monstre. S’il réussit l’exploit de blesser le géant avec hargne et intelligence, il était bon de noter néanmoins qu’il avait fini par échouer avec véhémence sur son bateau, sous mon regard médusé. Mais alors que le géant grogna en se dirigeant vers le navire en affreux état, je lui criais dessus !

                          • HÉ GROS LARD ! VIENS VOIR UN PEU PAR ICI !!!

                          Lui criais-je. La grosse masse difforme arrêta de se diriger vers le bateau déjà en piteux état, avant de retourner son faciès immonde vers l’endroit où je me trouvais. Elle promena quelques temps ses yeux menaçants ça et là, avant de les braquer d’un seul coup vers moi. Gros sourire psychopathe aux lèvres, je regardais le type d’un air de défi, avant de poser ma lame sur mon épaule intacte. Prenant soudainement un air dubitatif, l’géant commença à se gratter la tête. Je finis par tordre ma bouche vers l’avant (Kisaru quand tu nous tiens), avant d’écarquiller mes yeux non pas d’effroi, mais bien de surprise. Alors que Bhorbhor semblait réfléchir sur la phrase que je lui avais lancée énergiquement, l’un de ses hommes lui cria que j’étais l’homme à abattre, celui qui avait emprisonné Apôgon, un homme poisson de 45 millions que j’avais vaincu à South Blue il y a de cela un trimestre maintenant. Agrandissant ses yeux sur ma petite personne, le géant finit par hurler toute sa colère, au point de créer une bourrasque énorme qui faillit m’faire voler comme du vulgaire papier si je n’avais pas planté mon meitou dans le sol pour m’assurer un appui infaillible. Autant dire que sa gueule était d’une puanteur inégalable. Ladite bourrasque qu’il généra par son simple cri de colère finit de chasser toute la fumée environnante sans compter l’éteinte des flammes qui rongeaient différentes bâtisses ou tout autres objets. Ainsi donc, il était un ami de l’homme poisson que j’avais défait… J’comprenais mieux maintenant sa venue ici. Et alors que je me redressais doucement vu mes musclées contractés, j’le voyais se précipiter vers moi, par de lentes mais grandes enjambées. En deux trois mouvements, il était déjà à quelques mètres de moi. J’aurais pu creuser la distance si et seulement si j’avais eu le temps d’anticiper sa course, mais celle-ci provoqua de tels tremblements au sol que je fus obligé de chercher équilibre notable. Et à force de chercher l’équilibre, j’ne vis pas l’arme qui fendait vers moi… Si ce n’est sa gigantesque ombre qui me couvrait « presque » du ciel et du soleil… Chienne de vie…

                          « BOOOUUUUUM ! »

                          Le sol vibra plus que jamais. Le coup du géant détruisit complètement la moitié du dock qu’il avait martelée de son arme sans trop de pitié. Une arme massive. Un gros morceau qui méritait Impel Down ! Qu’en était-il de mon cas ? Oh ! Simple. J’étais enseveli sous un tas de débris, après m’être in-extrémis tiré de là par ma technique de déplacement rapide. Je m’étais hissé sur la pointe de mes pieds, avant de reculer d’une manière preste, si bien qu’il ne me vit pas éviter le coup et frappa dans le vide. Il n’y avait qu’un bout de l’arme qui me menaçait. S’il m’avait visé correctement, sans doute qu’il m’aurait écrabouillé malgré ma force et malgré mon meitou. Ça aurait été une géante épée ou hache, je l’aurais bloqué sans problèmes, mais ici, on parlait quand même d’un marteau et qui plus est, hérissé de pointes. Si c’est pas la joie… L’impact du coup par contre, m’avait propulsé inévitablement contre le mur d’un bâtiment que je trouais façon missile. L’bâtiment en lui-même s’effondra de moitié et je me mangeai moult poutres et briques. C’est vous dire la puissance du tas de muscles qui en finissait avec nous en deux temps trois mouvements. Me concernant, j’avais du mal à respirer et à m’en sortir. Beaucoup de mal. La poussière des résidus et les objets entassés pêle-mêle sur moi avaient presque réussi à m’évanouir. Une pointe s’était profondément enfoncée juste en dessous de mon omoplate droite. Ma blessure à mon épaule gauche s’était largement agrandie et mon arcade sourcilière ainsi que mes lèvres, saignaient comme jamais. Du sang, j’en perdais beaucoup. Du temps, nous n’en avions plus tellement si j’voulais considérer le fait que pour se venger, Bhorbhor irait détruire la ville sans une once de pitié. Moi l’homme fort de ce terrain, il m’fallait agir. Et au plus vite ! En parlant du forban, celui-ci semblait satisfait de ses attaques si bien qu’il me croyait mort et qu’il riait bêtement. Cependant et à la stupéfaction générale -L’pirate et le reste de ses hommes en vie-, une grande maisonnée fut soudainement soulevée par un homme à première vue mal en point… Et c’est homme là, c’était moi…

                          • Petit bâtard…

                          Murmurais-je pendant que tous mes muscles tremblaient sous les tonnes que je soulevais, comme s’il s’agissait d’un fait anodin. Alors que Bhorbhor voulut réagir à ma réapparition inattendue, je lui balançais la bâtisse que j’avais soulevée tant bien que mal. L’truc qui pouvait au moins écraser la moitié de son corps. L’pirate en voyant le projectile géant catapulté vers lui, anticipa un quelconque choc en le démolissant à l’aide de son marteau. Malin, je récupérais mon sabre non loin de moi et je me mis à sauter agilement sur les détritus de la maison qui tombaient. Une fois arrivée au niveau de son ventre, je fis un bond périlleux pour au moins atteindre sa gorge que j’allais lacérer si j’en avais l’occasion. Mais c’était sans compter sa réactivité sur le chemin dangereux que je me traçais vers sa personne. Alexander lui avait tellement montré des couleurs qu’il ne voulait plus se laisser approcher par le moindre morpion. Fort cela et en pleine impulsion vers lui, je me mis en position d’attaque et soulevait ma lame au dessus de ma tête. J’allais exécuter le « ONO » sur son ventre. J’allais le faire. Mais alors que l’une de ses mains venait me taper ou m’aplatir comme un humain le ferait avec un moustique, je me retournais et vers elle et m’écriait une nouvelle fois : « ONOOOOOOOOOOOO !!!! » Cette fois là, l’attaque fut différente. Très différente. La vague destructrice que j’engendrais était d’une telle intensité qu’elle prit une couleur anormalement rougeâtre avant de frapper de plein fouet le bras libre de Bhorbhor qu’elle coupa d’une facilité déconcertante. Toujours dans mon vol, l’attaque m’étonna tellement que j’écarquillais moi-même les yeux, avant de voir l’avant bras du géant chuter dans la mer qu’elle agita, ce qui eut des répercussions sur les bateaux éclaboussés par le sang et l’eau qui tanguaient dangereusement. Mais le pauvre n’avait pas finir de souffrir. Car au moment ou père Newton décida que je devais retomber en pique, j’fis un effort pour tournoyer sur moi-même, avant de « ONNNNOOOOOOOOOOO !! » décharger une nouvelle attaque encore plus conséquente qui cette fois barra merveilleusement bien son ventre au point de l’assimiler à un volcan en éruption, tant le sang en jaillit !

                          • GHAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAA !!!

                          Ô douleur, ô douleur ! Si j’avais été un pur psychopathe, il aurait été certain que j’allais me délecter de son cri de souffrance. Je l’avais tellement déchiqueté que le jet puissant du sang de son bide m’projeta à mon tour sur la carcasse d’Alexander sur laquelle je chutais lourdement. Mais il n’y avait pas eu que ma chute. Celle de Bhorbhor aussi qui tomba sur l’un de ses flancs et donc sur la terre ferme, écrasant au passage plusieurs corps de ses défunts compagnons. Heureusement qu’il était tombé sur la Terre, sans quoi, sa supposée chute dans l’eau aurait crée un raz-de-marée qui aurait pu inonder les premières terres de ma ville. Comme quoi… Pour ma part, je m’étais une nouvelle fois extirpé des détritus du navire mort, complètement lavé du sang infect de ce sale troll. Ça m’apprendra à le déchiqueter n’importe comment, m’disais-je en me réussissant à me hisser sur le pont du bateau. Alors que je partais m’effondrer sur le bastingage pourri du navire de mon homologue, j’entendis la bête gémir de douleur. L’un des bras avait été sérieusement touché et tenait une arme –D’où sa maladresse quand il essaya de m’écraser-, l’autre était tout bonnement coupé et son ventre était presque ouvert. Elle n’était pas encore morte et reviendrait surement à l’attaque. Il fallait vite s’bouger le fion à commencer par ma personne. J’entendis des cris et sifflets lointains qui me permirent de ne pas m’évanouir sur place…. Mes hommes étaient sur le chemin ! Bien ! Si j’avais eu mon escargophone, j’aurais ordonné qu’on l’achève à l’aide des canons sur la tour de ma base, mais sous doute l’avais-je perdu au cours de mes nombreuses chutes. Je crachais une grosse boule sanguinolente, avant de me relever et de tituber comme un demeuré. J’finis par sauter du bateau en tombant sur mes deux pieds au sol. Encore une fois, j’échouais lamentablement. Je m’aidais de mon meitou, avant de me relever et de respirer un grand coup pour pouvoir crier…

                          • ALEXANDER !!! OÙ ES-TU BORDEL ?

                          Parce qu’il me fallait le voir… Pour qu’on puisse à deux, en finir avec cette abomination qu’était Bhorbhor…



                          Le gout amer du sang emplissait la bouche du Paladin. Il relâcha un flot de liquide et écarta d’une main fatiguée les monceaux de débris qui reposaient sur son corps. Curieusement, il reconnaissait l’endroit. Il était enfoncé dans son propre lit et reposait dans la cabine qui fut autrefois la sienne. L’autel trônait à sa gauche, miraculeusement épargné par les flammes et les dégâts, et son armoire était éventrée. Mais ces détails ne marquèrent pas son esprit. Son bras gauche reposait à ses côtés, marqué de nombreuses contusions et entailles, et saignait abondamment. La blessure des précédents combats s’était ouverte à nouveau, et la douleur martelait ses tempes. Son torse était criblé d’échardes et autres indésirables, et témoignait du sale état dans lequel le prêtre se trouvait. Il se redressa, tirant sur ses jambes. L’effort lui arracha un soupir plaintif, mais il put se redresser. Il toussota mais d’aspect général, il était plutôt épargné. Ce qui n’était pas le cas de l’homme qui gisait à ses pieds. Son bras reposait dans un angle inapproprié, et sa chevelure immaculée était collée à ses temps par le sang qui s’échappait à grosses gouttes d’une sale blessure à la tempe. Ses yeux étaient fermés, mais il respirait avec difficulté. Il essayait de bouger mais ses jambes ne répondaient apparemment plus. Quant au bras qui autrefois maniait la masse, il était dans un tel état qu’on ne pouvait même plus parler de fracture. Un frisson d’horreur parcouru l’échine du Paladin, alors qu’il arrachait d’une main tremblante de rage les poutres qui s’étaient abattues sur Sir William. Le vieux second était en mauvaise posture, et Alexander sentait son sang s’échauffer au fur et à mesure qu’il constatait l’étendue des dégâts. Pourquoi s’était-il interposé ? Pourquoi, Seigneur, rappeler un si valeureux guerrier ?! Avait-il fini de servir, était-ce la récompense ?! Non, ça ne pouvait pas se terminer comme cela, c’était inconcevable ! Alexander commençait à perdre ses moyens, lorsque la main gantée du vieil homme saisit fermement son poignet.

                          « Ad maiorem Dei gloriam. » chuchota-t-il, d’une voix faible.

                          Le Paladin posa son autre main par-dessus celle de son ami de toujours, et inspira profondément, jugulant un frisson qui n’avait rien de commun chez lui. Aussi dément qu’il était, il était capable de chagrin. Une larme salée perla de son œil, glissant le long du verre brisé de ses lunettes, et chassant le sang accumulé sur sa joue. L’aura dorée qui émanait de lui s’estompait peu à peu, alors qu’au dehors, la bataille faisait rage. Il fit glisser sa main jusqu’au torse de Saint Cutberth, et enserra son autre main, cherchant à l’apaiser.

                          « Gloria Patri et Filio et Spirito Sancto. »
                          répondit-il, d’une voix lourde.

                          Se mordant la lèvre, le Paladin détourna la tête un instant, puis revint vers le fidèle soldat gisant à ses pieds. William dardait sur lui ses prunelles grises et restait étrangement serein. Un sourire béat se dessina sur ses traits, et il n’en serra les doigts d’Alexander que plus fort. Il ferma les yeux et une larme s’échappa de ses paupières.

                          « C’est ainsi que j’ai toujours voulu partir. Tu verrais ce que je vois, Alexander, tu verrais … la lumière, Sa lumière. D’entre tous, je suis béni. Car à travers toi, j’ai existé. Porte mon fardeau, fils. Porte mon fardeau jusqu’au plus profond des Enfers et inonde les du feu de Dieu. » lâcha-t-il, avec difficulté.

                          Le prêtre acquiesça, sans un bruit, et soupira bruyamment, tenant de chasser cette chape lourde qui s’était abattue sur ses épaules. Encore un homme de bien qui finissait par expirer par la faute des sbires de Satan, et les hommes du calibre de William n’étaient pas foule, sans compter qu’il était un des plus grands amis d’Alexander. Celui-ci ravala sa tristesse, et posa sa main droite sur le cœur de son fidèle compagnon. Il n’avait pas le droit de flancher, pas maintenant ! C’était les aléas d’une bataille, ils connaissaient tous les risques, et ce, même s’il s’en sentait coupable, au fond. Il savait que William avait tenté de le protéger, et réussit, mais il se sentait à la fois blessé de ne pas avoir pu le sauver, et que celui-ci ait pu croire que le Paladin ne s’en remettrait pas. Alexander était persuadé qu’il ne pouvait mourir en ces lieux, pas encore ! Mais peut-être était-ce ainsi que tout devait se dessiner, sa quête funeste coûterait la vie à beaucoup d’hommes, et ils se devaient de le savoir. Mais il ne pouvait nier que sa haine était attisée par cet acte de vilénie et il ne faisait que réfréner cette male émotion qui ne demandait qu’à jaillir. D’un geste emprunt d’une grande violence, le prêtre enfonça son index dans la blessure qui barrait son torse et l’en retira maculé de sang, retenant une grimace de douleur. Il approcha son doigt du front de William et lui dessina une croix ensanglantée, symbole du saint sacrement. Il joignit les mains de son ami sur sa poitrine et récita à voix basse.

                          « Per istam sanctam unctionem et suam piissimam misericordiam adiuvet te Dominus gratia Spiritus Sancti, ut a peccatis liberatum te salvet atque propitius allevet. »

                          Par cette onction sainte, que le Seigneur, en sa grande bonté vous réconforte par la grâce de l'Esprit Saint. Ainsi, vous ayant libéré de tous péchés, qu'il vous sauve et vous relève. Le dernier sacrement. Le sourire de William s’affaissa quelque peu, mais garda toute sa simplicité, alors qu’une bulle de sang se formait à la commissure de ses lèvres. Un pellicule de sueur s’était dessinée sur sa peau, et sa respiration devenait de moins en moins régulière, tout en ralentissant. Des larmes s’échappèrent à nouveau des yeux du Paladin, alors qu’il se relevait, ne pouvant supporter de voir ainsi les derniers instants de son ami. D’un geste rageur, il arracha ce qui restait de son armoire et sortit une bure intacte. Il la fit glisser sur son dos, frémissant d’une rage qu’il n’avait connu depuis longtemps, et la boutonna calmement, malgré tout. Il se saisit se sa Bible, à moitié éventrée par les débris. Le poids démentiel de son vêtement le rassura. À présent, il n’était plus nu. Il s’agenouilla aux côtés de William et lui narra en latin les épreuves des sept étages du Paradis, jusqu’à ce que son souffle se soit éteint. Bien qu’il fût agenouillé, le prêtre tremblait et ses mots étaient de plus en plus hachés. Il se releva soudain et laissa tomber l’ouvrage aux côtés de celui qui fut son plus brave compagnon et se retourna vers le trou qu’il avait creusé en entrant par là, déjà obstrué. Il laissait une mare de sang à chacun de ses pas, mais l’heure n’était pas à de tels détails. Son cœur réclamait vengeance, et son âme le sépulcre pour ce démon. Croisant les bras, le Paladin fit glisser huit lames de baïonnette entre ses doigts et d’une simple torsion des poignets les expédia face à lui. Le mur vola en éclat, au moment même où un nouveau choc ébranlait le bateau. D’un geste sec, le Pater fit glisser de nouvelles lames entre ses doigts et un sourire plus effrayant que jamais se dessina sur ses lèvres. Dans sa tenue encore épargnait, il paraissait indemne … mais il n’en était rien, tant physiquement que mentalement. Il fit jouer ses lames entre ses doigts à une vitesse inimaginable, engendrant un cliquetis assez dérangeant, alors qu’il entamait une douce litanie qui emportait sa colère vers des sommets inexplorés. Tout n’était plus que rouge et carnage autour de lui, et son œil ne se rivait que sur une seule créature. Ce géant dégénéré qui hurlait de douleur, le bras arraché et le ventre troué. Et fatidiquement, il termina par …