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Le mystère de l'homme en chocolat noir

- “Camillius ?”

Dans un sursaut, l’homme se tournait rapidement. Il gardait une main dans son dos, un sourire en coin, comme un enfant qui aurait fait une bêtise. Là, au milieu de la petite cuisine du bateau des Trois Grâces, l’humain draconique fixait Arondel, leur navigatrice, avec attention.

- “Oui ?”  répondit-il simplement, faisant mine de rien.
- “Relâche Comus.”
- “Comus ?”
- “Le chat.”
- “Quel chat ?”
- “Miaou …”

Dans un miaulement étouffé, le fameux Comus exprimait sa présence. Ce cri, proche d’un appel “au secours”, provenait du dos de Camillius. Et si le regard de l’homme préférait s’élever vers le plafond de la pièce, celui d’Arondel restait fixé sur lui avec un air sévère.

- “M’oblige pas à me répéter.”

Dans un long soupire, l’homme dégagea son bras valide pour dévoiler le sphinx noir, maintenu par le cou, les pattes pendantes dans le vide et l’air apeuré gravé sur son visage. Dans un geste puissant, Camillius jeta l’animal à la navigatrice avant de grogner en passant à côté d’elle. La femme rattrapa la bête sans rien ajouter à l’encontre de son collègue ronchon.

- "Il fallait pas jeter le cadavre que j'avais ramené de Hat Island par dessus bord !"
- "Il était entrain de décomposer. Ca puait la mort !"
- "Normal ! T'as pas voulu que je le mette dans le frigo !"
- "On va pas mettre des morceaux humains dans le frigo, ça met du sang partout !"

- “De toute façon on ne peut rien manger sur ce bateau.”  finit par répliquer le dragon.

Il poussa alors la porte d’une main, l’autre toujours enroulé dans des bandages de fortune et maintenu contre son torse par un vieux tissu arraché à un drapé. Depuis qu’ils avaient quitté Hat Island, Camillius passait presque tout son temps à panser ses plaies. Ou plutôt, à se faire panser ses plaies car pour son plus grand malheur, il n’avait jamais eu à faire ça autrement qu’en se léchant les écailles sanglantes jusqu'à que la douleur ne s’évanouisse toute seule. Des tonnes de bandages parsemés son corps, couvrant son torse de blanc crème qui se teintait de rouge en absorbant le sang perdu. Il avait mal, mais bien moins qu’auparavant et cela était bon signe. Il guérissait doucement. Son bras lui traînait un peu plus. Jamais il n’aurait cru que prendre une balle dans une aile sous forme de dragon se retranscriverait dans son bras en reprenant forme humaine. Et maintenant, il se retrouvait bloqué dans cet état pour éviter de devoir refaire l’ensemble de ses pansements.

En débarquant sur le pont, Camillius eut un long frisson le parcourant. Il était de nature à aimer la chaleur et les rayons du soleil, mais voilà plusieurs jours que ces derniers l’avaient quitté pour se cacher timidement derrière des tonnes de nuages. Et la nuit remplaçant le jour était encore plus froide que celle du désert. Le dragon tremblait, se frottant son bras immobilisé pour essayer de se réchauffer un peu alors que les lanternes du pont éclairaient que quelques mètres devant la proue du bateau.

- “Putain on se les caille ici. C’est quoi ce temps de merde.”

Il faisait sombre et terriblement froid, et alors que le Trois-Yeux grondait son mécontentement et son inconfort, Arondel finissait elle aussi par sortir de la cuisine, un long et épais manteau de fourrure entre les mains. Elle le jeta sur son collègue grognon en disant :

- “Tiens, c’était dans une des caisses qu’on a embarqué. Sûrement une contrefaçon bon marché. Mais au moins c’est chaud.”

Puis elle fit le tour de l’homme tremblant encore sous son veston pour le dévisager devant la silhouette élancée que lui dessinait la pièce de vêtement.

- “Si tu avais meilleur caractère, tu ferais un très bon partie. Milady.”  se moquait Arondel en cachant à peine son sourire derrière sa main.
- “Ahah très drôle.”

Et alors que la navigatrice avait laissé la direction aux silencieux, les larbins de l’équipage, l’un d’eux hurlait un traditionnel “terre en vue” alors que la connaisseuse annonçait au reste de l’équipage :

- “Ça doit être Boréa.”

La lune était haute dans le ciel et Arondel n'avait jamais besoin de plus que cet astre majestueux et des étoiles l'entourant pour se repérer sur North Blue.
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Cela faisait maintenant plusieurs jours que le beau temps de Hat Island avait quitté l'horizon pour laisser place à un tapis de nuages opaques et gris. Cela n'était pas pour me déplaire, le climat aride de l'île des cowboy m'avait donné moults maux de tête et ayant toujours vécu à Drum jusqu'à maintenant, j'étais davantage familier avec une telle météo. En plus de me familiariser avec les Silencieux mais également notre navigatrice, j'avais appris à utiliser mon fruit du démon avec plus de précision. Ainsi, je m'entraînais régulièrement à réaliser différents nœuds marins, suivant les instructions de Arondel, et ce à plusieurs mètres de hauteur grâce à mon invocations gantées.

"On est pas tes bonniches si jamais..."
"C'est pas toi qui répétais sans cesse qu'on était une seule et même personne ? Alors obéis à ton propre corps tu veux bien."


Les voix s'étaient faites un peu plus persistantes dernièrement, il semblerait qu'acquérir un semblant d'indépendance à travers la matérialisation des mains flottantes leur était monté à la tête... ou plutôt aux ongles ? Peu importe, je parvenais globalement à les garder sous contrôle, bien que je les soupçonne de voler mes rations personnelles d'une manière ou d'une autre.

"Puisque je te dis que c'est le dragon..."

En cas de désaccord ou de débordement il me suffisait dans tous les cas d'ôter mes gants noirs pour les faire disparaître, côté à la fois pratique mais représentant un gros point faible à ce pouvoir. Autre aspect que j'avais pu remarquer lors de notre affrontement sur Hat Island, les dégâts infligés aux mains flottantes étaient répliqués à mes véritables mains si je prenais le plein contrôle d'une paire, comme en témoignait la légère trace de brûlure sur le dos de ma main grise, souvenir laissé par le fusil du vieux juge désormais six pieds sous terre.

"- Boréa en vue ! C'est l'occasion parfaite pour se réapprovisionner." s'écria Arondel, accompagnée de Camillius.

"- Joli manteau Camillius, c'est la dernière collection du moment ?" le taquinai-je, alors qu'il se contenta de répéter ma phrase en lui rajoutant un air simplet et moqueur, tout en me bousculant de l'épaule à son passage.

Arondel et les Silencieux s'occupèrent d'amarrer convenablement la caravelle, il n'y avait aucun doute sur leur cohésion d'équipe, et tenter de les aider n'aurait fait que les ralentir dans leurs manœuvres. Quelques minutes plus tard le bateau était correctement attaché, l'équipage descendit sur la terre ferme. A peine nous fûmes au complet sur les quais, qu'un garde nous accueillit chaleureusement.

"- Bienvenue à Lavallière voyageurs, puis-je vous accompagner à une auberge, à moins que vous ne souhaitiez une famille de bienvenue ?" déclara-t-il.

"- Une auberge, cela conviendra très bien." lui répondis-je.

Les quais étaient sombres, mais des lampadaires éclairaient çà et là les pavés couverts de neige. Le garde fit signe à d'autres personnes venant d'accoster pour accompagner le groupe au complet vers l'auberge la plus proche.

"- Ca craint trop comme endroit..." marmonnait Camillius alors qu'il suivait le groupe plusieurs mètres derrière, dissimulé à la tête de file par les quelques personnes que le héraut accompagné. "Et puis cette neige me p-"

Je n'entendis pas la fin de sa phrase, heureux de voir que Camillius avait enfin appris à prendre sur lui même, quelque chose dont il pouvait s'estimer fier. Quelques minutes plus tard nous arrivions devant la bâtisse dans laquelle nous allions passer la nuit.

"- Je vous souhaite un bon séjour à Boréa, n'hésitez pas si vous avez la moindre question, mes semblables arpentent fréquemment les ruelles." nous dit-il en retournant vers les quais.

Enfin heureux d'être arrivé à destination, je me retournai, cherchant du regard Camillius parmi la douzaine de personnes qui nous accompagnaient.

"- Hmmm Davinia, tu sais où est Camillius ?" demandai-je à ma nouvelle cheffe d'équipage.

"- Mais quel boulet..." siffla Arondel en abattant une main à plat sur son front.
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Durant le voyage sur les Trois Grâces, Davinia s'était volontairement retirée des activités quotidiennes de l'équipage. La tension constante qui avait marqué leur séjour sur Hat Island et les événements qui s'y étaient déroulés l'avaient épuisée mentalement et physiquement. Maintenant que la situation était moins stressante, son corps et son esprit semblaient exiger un repos prolongé, et elle n'eut d'autre choix que de céder. Elle passait la moitié de son temps à dormir dans la cabine, rattrapant les heures de sommeil qui lui avaient échappé. Le confort relatif de sa couchette, loin de l'agitation du pont et des querelles incessantes entre Camillius et Bjorn, lui offrait un répit bienvenu. Elle se permettait enfin de laisser son cerveau se déconnecter complètement, et elle s'endormait souvent en lisant un des rares livres de philosophie ou de poésie qu'elle avait emporté avec elle.

Quand elle n'était pas en train de dormir, l’espionne se consacrait à des tâches plus méthodiques et moins exigeantes sur le plan social. Un matin, déterminée à remettre de l'ordre dans leur matériel, elle décida de refaire un inventaire complet du bateau. Cette fois-ci, elle sollicita l'aide de quelques Silencieux, ces membres de l'équipage qui savaient compter sommairement. Leur aide lui facilita grandement la tâche, et ensemble, ils passèrent en revue chaque recoin du navire, vérifiant les provisions, les outils, et les équipements, mais aussi ce qu’ils avaient pu ramasser dans le hangar. Davinia dirigeait les opérations avec une efficacité froide, ses instructions précises et claires. Les Silencieux, habitués à obéir sans poser de questions, suivaient ses ordres à la lettre. Elle se déplaçait avec assurance parmi les caisses et les sacs, notant chaque élément sur un carnet en cuir qu'elle gardait toujours à portée de main. La tâche, bien que fastidieuse, lui procurait un certain réconfort. C'était une manière de reprendre le contrôle, de s'assurer que tout était en ordre et de préparer l'équipage.

Le contraste entre ses longues heures de sommeil et ses moments de travail méthodique était saisissant. Dans la cabine, elle se repliait sur elle-même, cherchant à récupérer et à se ressourcer. Sur le pont, elle redevenait la Davinia calculatrice, professionnelle et présente, s’intéressant à tout pour s’assurer que tout roulait à la perfection. Même si parfois ces deux compagnons loufoques lui arrachaient des sourires, elle les laissait vivre, comme tous les autres membres. Elle se montrait plaisante, pour offrir un environnement agréable, mais sans pour autant créer des liens trop fraternels, du moins dans l’immédiat. Il n’y avait eu que Camillius qui avait mérité plusieurs claques derrière la tête quand il était pris à vouloir grignoter les chats, l’Énigmatique très clair au sujet que s’il leur faisait le moindre mal, il allait retrouver le fond marin.

Ce cycle de retrait et d'activité ordonnée lui permettait de maintenir un équilibre précaire. Elle savait que son obsession pour le contrôle pouvait la conduire à l'épuisement, mais elle n'avait pas encore trouvé de meilleure façon de fonctionner. Pour l'instant, elle se contentait de faire ce qu'elle savait faire de mieux : observer, planifier, et tirer les ficelles depuis les coulisses. Même s'il n’y avait pas grand-chose à tirer à part de donner des claques, aujourd’hui c’était différent, ils allaient enfin mettre pied à terre. Davinia n'était pas habituée au froid mordant qui régnait sur les mers du North Blue. Ayant grandi dans un environnement plus tempéré, cette brusque immersion dans un climat rigoureux était un choc pour elle. Dès que le bateau avait quitté Hat Island pour s'aventurer vers Boréa, elle avait commencé à ressentir les premiers frissons, qui s'étaient rapidement intensifiés en un froid pénétrant, presque douloureux.

Pour contrer cette sensation glaciale, Davinia s'était emmitouflée dans plusieurs couches de vêtements. Elle portait une chemise épaisse et un manteau doublé, superposant chaque pièce dans une tentative désespérée de retenir un peu de chaleur. Malgré tous ses efforts, elle n'arrivait jamais à se sentir réellement confortable. Le froid semblait s'infiltrer à travers les tissus, se glissant sous ses vêtements pour s'installer directement dans ses os. Les pierres chaudes, chauffées sur le foyer de la cuisine, étaient une maigre consolation. Elle les plaçait dans ses poches ou les tenait entre ses mains engourdies, appréciant la chaleur temporaire qu'elles procuraient. Cependant, elle préférait les laisser aux chats de bord, ces créatures précieuses et fragiles qui avaient trouvé leur propre refuge contre le froid dans leur caisse portative.

Dans la cabine, les chats se blottissaient autour des pierres chaudes, ronronnant doucement tandis qu'ils profitaient de cette source de chaleur rare. Davinia les regardait parfois avec une pointe d'envie, regrettant presque de ne pas pouvoir faire de même. Elle trouvait un certain réconfort à voir ces petites créatures si à l'aise, leur présence apaisante et leur chaleur partagée créant une atmosphère légèrement plus supportable. Le froid affectait également sa concentration. Parfois, elle avait du mal à se focaliser sur ses tâches, ses pensées interrompues par des frissons involontaires. Ce climat drastique avait aussi un impact sur son humeur. Elle se sentait plus irritable, moins patiente, et plus encline à des accès d'impatience. Chaque nuit, en se glissant sous des couches supplémentaires de couvertures, Davinia espérait que le lendemain apporterait un peu plus de chaleur. Cependant, chaque matin, elle était accueillie par le même froid intense, lui rappelant qu'elle devait s'adapter à ces nouvelles conditions. Tout en marchant en direction de l’auberge, le bout de femme qui était restée silencieuse jusque-là, ruminant intérieurement contre le froid, s’exprima enfin.

"Pour une des rares fois, j’approuve Camillius, cet endroit est trop froid à mon goût," souffla la femme dont le visage était caché sous une large capuche. Son manteau cachait ses formes féminines tellement elle avait enfilé de couches de vêtements. "Arondel, si ça ne te dérange pas, pourquoi ne pas aller avec les Silencieux faire des emplettes ? Prends le trio habituel et cette liasse. J’ai dressé une liste de ce dont on va avoir besoin pour la suite… Et si tu pouvais trouver un gros congélateur, pour la nourriture et aussi pour avoir un espace pour mettre les corps de Camillius. J’ai l’impression que ça ne va pas être la dernière fois qu’on va avoir droit à des corps," annonça Davi en lui offrant les berries. "Et avec le reste, gâtez-vous, faites ce que vous voulez."
"C’est généreux. Parfait, je vais faire avec. Une fois à l’auberge, je commencerai certains trucs et je finirai demain."
"Merci, Arondel."

Une fois arrivée devant l’auberge, la capitaine soupira de soulagement, bien décidée à se prendre un bon bain chaud. Elle montait déjà les marches qui menaient à la porte quand Bjorn eut le malheur de l’interpeller. Elle soupira lourdement sans comprendre la gravité de la situation. Elle se retourna lentement, glissant ses yeux sombres sur le groupe présent.

"Il ne doit pas être très loin… Arondel, prends les Silencieux et entrez à l’intérieur. Commandez les chambres et reposez-vous, moi et Bjorn on s’en occupe," annonça-t-elle en lui donnant la caisse de transport des chats.
"Parfait, patronne, bonne chance."
"Bjorn, redescendons un peu le chemin, il ne doit pas être loin… Un truc a dû attirer son attention, il est comme un golden retriever, un peu con mais adorable quand même…"

Sur ces dernières paroles, elle commença à rebrousser chemin. Cependant, plus ils s’éloignaient de l’auberge pour revenir sur leurs pas, Davinia finit par réaliser que les pas de Camillius avaient simplement arrêté d’avancer à un moment. C’était comme s’il s’était volatilisé vers le ciel nuageux, mais s’il avait changé de forme, ils l’auraient tous su.

"Bjorn, un truc cloche… Regarde, ses traces s’arrêtent brusquement ici…"
"Tout va bien ici ?" demanda un garde qui faisait une ronde.
"Non, on a un compagnon qui a brusquement disparu…"
"Qu’est-ce que vous voulez dire ?"
"Exactement ce que je viens de dire. Regarde, ses traces s’arrêtent brusquement ici…"
"C’EST LE DOCTEUR LEONIDAS ACULA QUI A ENCORE FRAPPÉ !" s’époumona une vieille femme aux yeux exorbités.
"Qui ?!"
"LEONIDAS ACULA ! Il kidnappe les jolies demoiselles en pleine nuit pour les ramener chez lui !"
"Ça suffit, sale mégère, on n'a aucune preuve que ce soit véridique !" répliqua le garde. "De plus, ils ont dit leur compagnon, alors c’est un homme et non une femme."
‘’J’VOUS DIS QUE JE L’AI VU DE MES PROPRES YEUX !’’ Continue la vieille folle qui est finalement chasser par le garde.
‘’Rentrer à l’auberge, je vais passer le message pour l’égarement de votre ami, je vais avoir besoin de sa description. Nous allons ouvrir l’œil. Mais elle a raison sur un point, nous avons en ce moment un enlèvement de jeune femme, alors si j’étais vous je trouverais un lieu sure.’’ Continue le garde en regardant Davinia et il se tourna vers Bjorn. ‘’Et vous, ne la quitter par des yeux, il serait dommage qu’elle soit elle aussi perdue.’’

Après avoir prit la description de Camillius, il s’éloignant dans l’obscurité, laissant Bjorn et Davinia seuls.
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Du côté de Camillius, quelques heures plus tard,

Des fourmis dans les jambes, Camillius ouvrait les yeux doucement. Il se sentait mal, un peu nauséeux et il avait la bouche pâteuse. Avachis sur une chaise, les mains dans le dos, il redressait la tête pour observer devant lui une silhouette imposante. Il lui fallait un peu de temps pour distinguer l’homme cagoulé mais torse nu devant lui qui le dévisageait.

- “Oh non, Ferreh Raut, oh non. Qu’avons-nous fait !”

On entendait des griffes tapoter sur le sol de pierre avec empressement avant qu’une petite ombre se glissait dans le dos du trapu et, agilement, se hissait sur son épaule. Une créature difforme, une grosse chauve-souris chapeautée, aux ailes trouées, était venue coller un coup de sa membrane abîmée sur le crâne de l’humain restant immobile.

- “Nous nous sommes trompés ! Le maître ne sera pas content ! Non, pas content du tout.”

Attrapant entre ses dents les griffes abîmées de ses ailes, la chauve-souris se rongeait jusqu’à l’os ses onglets de kératine en s’asseyant sur l’épaule de son camarade, l’air névrosé. Devant ce spectacle, le dragon laissait sa tête lourde se pencher sur le côté. Il avait encore l’esprit embrumé et ne comprenait rien de ce qu’il se passait. Qui était-il ? Un comité d'accueil étrange de l’auberge peut-être ? Après tout, les coutumes humaines lui étaient inconnues. Il essaya de dresser son bras jusqu'à ce qu'une force le retienne. A chaque mouvement, des cliquetis métalliques faisaient écho dans la pièce humide. Impossible de ramener ses bras vers l’avant et ce bruit, il ne le connaissait que trop bien.

- “C’est quoi ce bordel ?”

Ce son familier avait ravivé l’esprit de Camillius qui ouvrait les yeux un peu plus grand, cherchant à comprendre la situation en tirant un peu plus fort sur ses bras. Rien n’y faisait, il était bel et bien attaché, d’épais fer le maintenait captif des deux étranges individus présents. Et si la petite bête semblait lui avoir donné quelques informations, le gros balourd n’avait dit aucun mot.

- “Peut-être que Monsh Erys pourra en faire quelque chose ?” demanda la chauve-souris en sautant de l’épaule de son collègue pour atterrir sur les genoux de Camillius. “Il a l’air costaud.”

La créature faisait le tour du dragon sous forme humaine qui grimaçait de douleur et d’inconfort en sentant les griffes du mammifère sur son corps. Et alors que le pelage sombre passait sous le nez de Camillius, ce dernier croqua la toison avec force. La chauve-souris, surprise, se mit à paniquer et à coller des coups de griffes rongés dans tous les sens jusqu’à entailler le visage du captif qui lâcha sa prise en reculant sa tête pour éviter de se faire éborgner. L’animal remonta promptement sur l’épaule large du trapu en hurlant :

- “Non mais ça va pas ! Barbare ! Grand malade ! Ferreh Raut, tue le !”

Alors que jusqu'ici l'homme n'avait pas bougé, il se pencha légèrement sur le côté dans un mouvement lent et lourd pour attraper une scie posé contre un mur. Puis, d'un pas s'avançant vers le captif, il dressait son arme sans un seul mot, sous le regard satisfait de la chauve-souris.


Dernière édition par Camillius le Lun 20 Mai 2024 - 14:11, édité 2 fois
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Cette histoire était de plus en plus étrange. D'abord l'enlèvement, ensuite la vieille folle qui vient ajouter son grain de sel.

"- Pas moyen qu'on rentre à l'auberge, on est d'accord là-dessus ?" demandai-je à mon acolyte, déjà presque sûr de sa réponse.

"- Pas moyen." me répondit-elle dans l'instant.

"- Content de voir qu'on est sur la même longueur d'onde. Essaye de voir où va cette vieille dame, elle pourrait constituer une piste, aussi bancal son témoignage puisse-t-il être. Je vais essayer de retrouver des traces de Camillius. Pitié que je ne tombe pas sur un cadavre écorché..." indiquai-je à Davinia.

Elle acquiesça et je remontais la route que nous avions emprunté quelques minutes auparavant tandis qu'elle allait dans la direction opposée. Sans attendre davantage, j'enfilai mes gants.

"Dispersion, retrouvez moi quoi que ce soit qui puisse avoir un lien avec notre dragon de compagnie."
"Tu nous as pris pour des limiers ?"
"Tu préfères que je vous traite comme des chevaux et que je sorte la cravache ?"


La voix arrogante n'eut rien à ajouter et les huit paires de mains que je venais de faire apparaître se séparèrent, investiguant les différentes ruelles perpendiculaires à la rue principale. Si cette dernière était relativement bien éclairée, les passages étroits qui en découlaient étaient sombres et présentaient un brouillard plutôt épais. Pas étonnant que des gens se faisaient enlever, il était quasi impossible de voir à plus de deux mètres de distance dans ces allées exigües.

"Hmmm, j'ai trouvé un truc ici !"

Au même instant un morceau de fourrure foncée me parvint entre les doigts, il n'y avait aucun doute, il s'agissait de la toison que Camillius avait sur le dos.

"Et ça quelques mètres plus loin."

Cette fois-ci un bouton arriva dans mon autre main. Je me hâtai vers l'endroit que les mains me désignaient. Sa disparition avait donc sûrement eu lieu dans cette ruelle. Cependant il ne semblait pas y avoir de traces de combat ou de lutte, quant au nombre de témoin, il devait être nul si on excluait le ravisseur. J'étais dans une impasse, et pas seulement au sens littéral du terme. Je rebroussai chemin, à moitié satisfait d'avoir trouvé des preuves, bien que ces dernières n'étaient pas d'une grande utilité. Après tout Camillius n'était pas connu pour prendre grand soin de ses affaires, alors celles qu'on lui prête...

Visiblement, Davinia m'attendait devant l'auberge, il semblerait que la vieille lunatique n'était pas allée si loin que ça.

"- J'ai en effet trouvé des traces de Camillius mais rien qui ne me permette de remonter sa piste. Il semblerait qu'il ne nous reste plus qu'une solution... Tu as pu trouver où s'était rendue l'autre vieille ?" expliquai-je à mon alliée aux cheveux sombres.
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Davinia se détache lentement de la conversation avec Bjorn, son esprit déjà en train de formuler un plan. Elle n'avait pas l'intention de laisser passer une opportunité d'obtenir des informations potentiellement utiles, surtout si elles concernaient la disparition mystérieuse de Camillius. Même si l'homme-dragon faisait partie de l'équipage depuis peu, elle n'en était pas moins possessive sur ce qui lui appartenait, et tout membre d'équipage était sien. La vieille dame qui avait mentionné le nom du Docteur Leonidas Acula semblait être une piste intrigante, et Davinia était déterminée à en savoir plus. Elle retrouve finalement la femme non loin, prenant une pause près d'une torche qui lui permettait de se réchauffer. Elle s'approche de la femme aux yeux exorbités, son visage caché sous la capuche de son manteau. Avec un sourire poli, elle lui adresse la parole, sortant du fond de l'une de ses poches de manteau une ration.

"Excusez-moi, madame," dit-elle d'une voix douce mais assurée, "j'ai entendu ce que vous disiez au sujet du Docteur Leonidas Acula. Je suis très intéressée par cette histoire. Auriez-vous la gentillesse de me donner plus de détails ?" lui demande-t-elle en lui tendant l'offrande.

La vieille dame, les yeux brillants d'excitation, hoche la tête avec empressement, lui arrachant la nourriture des mains. Elle ouvre la poche de tissu, commençant à dévorer la bouffe tout en déversant un flot de paroles.

"Oh, oui, bien sûr ! Vous voyez, j'ai vu de mes propres yeux ce qu'il a fait. C'était il y a quelques semaines, une nuit sombre et venteuse. Je rentrais chez moi quand j'ai vu ce monstre rôder près du port, cherchant sa prochaine victime. Il a enlevé une jeune fille, une beauté innocente, et l'a emmenée dans son antre maudit, loin des regards indiscrets."

Davinia retient un sourire intérieur. Les histoires de monstres et d'enlèvements étaient courantes dans les petites villes côtières, mais elles contenaient souvent un grain de vérité. Elle sort une bourse de berries de sa poche et la tend à la vieille dame.

"Merci de partager cette histoire avec moi," dit-elle, "je suis nouvelle dans la région et je crains que mes connaissances sur ce Docteur soient limitées. Je serais très reconnaissante pour tout renseignement supplémentaire que vous pourriez me donner. Et, bien sûr, je ne pourrais pas vous laisser partir sans vous remercier pour votre temps généreux."

La vieille dame prend la bourse avec des yeux avides, le sourire aux lèvres. Elle la fait disparaître dans ses propres poches de vêtements usées. Elle se frotte un peu les mains, avant de recommencer à manger et s'exprimer.

"Oh, vous êtes bien aimable, ma chère ! Eh bien, si vous voulez tout savoir sur le docteur Leonidas Acula, sachez que c'est un homme mystérieux, un savant fou qui vit dans une grande maison en haut de la falaise. On dit qu'il pratique d'obscurs rituels et qu'il se nourrit de sang humain pour rester jeune et puissant. Certaines personnes affirment avoir vu des lumières étranges briller dans sa demeure la nuit, et d'autres prétendent avoir entendu des cris étouffés provenant de ses cachots sombres."

Davinia écoute attentivement, prenant mentalement note des détails les plus saillants. Ainsi donc, la femme, malgré la folie, avait une imagination débordante. Toutefois, si son cerveau avait enregistré ce genre de chose, c'était qu'il y avait une pointe de vérité.

"C'est vraiment fascinant," dit-elle, faisant semblant d'être impressionnée. "Je vous suis très reconnaissante pour ces informations. Si jamais vous entendez quelque chose de plus sur ce mystérieux Docteur Acula, n'hésitez pas à me le faire savoir. Je serai toujours prête à récompenser la gentillesse." Avec un dernier sourire, elle s'éloigne de la vieille dame, son esprit déjà en train de formuler un plan d'action pour enquêter sur cette affaire.

Davinia revient vers l'auberge, pour y attendre Bjorn. Ils se retrouvent finalement là où ils s'étaient laissés plus tôt. Sans perdre de temps, elle va à sa rencontre, les laissant un peu dans la pénombre non loin de la lumière de l'auberge, son expression sérieuse mais ses yeux brillent d'excitation. Venant se glisser dans l'espace personnel de Bjorn comme elle avait pris l'habitude de le faire, ses mains gantées attrapent ses vêtements avant de lever son minois vers lui.

"Bjorn, j'ai obtenu des informations intéressantes sur le Docteur Leonidas Acula," commence-t-elle, ses yeux brillant d'anticipation. "Apparemment, il vit dans une grande maison en haut de la falaise, il a une réputation d'occultisme. On raconte même qu'il se nourrit de sang humain pour rester jeune et puissant."

Les mots semblent presque suspendus dans l'air alors que Davinia observe attentivement la réaction de Bjorn. Elle sait que cette histoire peut sembler extravagante, mais quelque chose dans son instinct lui dit qu'il y a peut-être plus de vérité là-dedans qu'on ne pourrait le croire au premier abord.

"Selon la vieille," poursuit-elle, "des témoins affirment avoir vu des phénomènes étranges agir. Il semble que ce Docteur Acula soit bien plus qu'un simple excentrique. Il pourrait bien être la clé de la disparition de Camillius." Termine-t-elle en serrant les poings sur les vêtements. "On devrait essayer de trouver cette falaise et cette maison en question."
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Du côté de Camillius,

Alors que le gros balourd abaissant son arme avec force, les muscles de son bras se contractant si fort que les veines en devenaient visibles, Camillius se décala de la chaise en se tournant pour tendre vers le coup une des chaînes qui le maintenant captif. Dans des éclats métalliques, le fer fut brisé et le premier bras du draconique libre.

- “Oh non, ça ne va pas du tout ! Ferreh Raut ! Fait attention !” Hurlait la créature dans la panique, sautant de l’épaule de la montagne de muscles pour fuir vers la porte. “Tue-le ! Vite !”

Dans un fracas, l’animal fit claquer l’entrée avant de tourner la clé dans la serrure à plusieurs reprises et de partir en courant dans les couloirs. Et de son côté, le fameux Ferreh Raut réitérait sa tentative de frapper le captif qui esquiva à nouveau l’attaque de la même façon et se libéra définitivement des chaînes qui le maintenait au mur. Un sourire se dessinait sur son visage alors que l’air circonspect se devinait sous la cagoule de la brute. Dans un ballet de flammes enrobant son corps, Camillius reprit son apparence originale et sauta sur le tortionnaire encore surpris. Les restes de fer attachés à ses poignées s’ouvrirent sous l’imposante largeur des membres écailleux et le dragon écrasa de sa masse Ferreh Raut contre le sol froid et humide. Plantant ses crocs dans l’épaule grasse, il arracha un premier son à sa victime, un cris étouffé par le cuir de la cagoule. Mais loin de se laisser faire et malgré la pression exercée par la bête, le tortionnaire serrait les doigts autour de sa scie, la dressait à nouveau et venait planter les dents de l’objet avant commencer à scier entre les écailles de l’animal. Sous la douleur, Camillius lâcha sa prise pour laisser un hurlement lui échapper avant de tourner la tête, et d’attraper dans sa gueule le bras actif de sa cible pour l’arracher à l’aide de sa puissante mâchoire. Le sang de son adversaire s'écoulait de la plaie laissée par le membre disparu, se mélangeant à celui de la bête qui coulait de l’imposante déchirure faite entre les écailles nacrées du dragon. Les yeux injectés de sang, de par la douleur et la rage, Camillius vint planter à nouveau ses crocs sanglant dans la gorge du cagoulé pour lui arracher la trachée et la jeter dans un coin de la pièce.

Des bruits de pas dans le couloirs s’accéléraient, plusieurs hommes armés de lances défonçaient la porte avec force avant d’entrer dans la pièce. Le dragon ne leur prêtait pas un regard, il saisissait la tête du tortionnaire entre ses crocs alors que ses griffes s’enfonçaient encore. Puis, tirant avec force sur le crâne de l’homme dont le cou était déjà fragilisé, il arracha la tête avant de la balancer sur un garde hurlant devant le cadeau. Camillius leva les yeux, déglutissant le sang remplissant sa gorge pour grogner sur les nouveaux arrivants prenant la fuite dans le couloir. Une course poursuite commença, le dragon enflamma son corps en fonçant dans le couloir souterrain, attrapant les uns après les autres les hommes armés et paniqués devant une situation dont on les avait absolument pas prévu. Et alors que beaucoup se retrouvaient déchiquetés en deux et que de rares survivants fuyaient, disparaissant dans l’angle du fond du couloir, Camillius aperçut la chauve-souris hurlant sur les gardes tuer la bête. Lorsque leur regard se croisa, le mammifère préféra à son tour prendre ses jambes à son cou alors que le dragon entamait sa course à ses trousses, brûlant les meubles habillant le couloir.


Dernière édition par Camillius le Mar 21 Mai 2024 - 13:54, édité 2 fois
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"- Il se nourrirait de sang humain ? Eh bien si c'est réellement lui qui aurait enlevé Camillius, il ne va pas être dépaysé..." désespérais-je à moitié. "Tu as bien parlé d'une falaise ? Je pense en avoir aperçu une lors de notre arrivée, mais il faisait sombre, pas évident d'être sûr de mon coup. Je vais voir Arondel, elle a dû mieux observer les environs que moi." continuais-je alors que je me rendis à l'intérieur de l'auberge, gravissant deux par deux les marches jusqu'à tomber nez à nez avec Arondel.

"- Où te rends-tu si pressé Bjorn ? Vous n'avez toujours pas retrouvé Camillius ?" me questionna-t-elle.

"- Malheureusement cette histoire semble un brin plus compliqué qu'une simple fugue. Je t'expliquerai en temps voulu, mais dis moi simplement, aurais-tu aperçu une falaise à notre arrivée ? De préférence avec une grande bâtisse ou un truc du genre." lui demandai-je en retour sans vraiment répondre à sa propre question.

"- Alors là... Il faisait si sombre, mais il me semble avoir aperçu de la lumière surplombant le côté ouest de l'île, sans aucune autre source lumineuse autour. Vous devriez en avoir pour peut être vingt ou trente minutes à pied." me répondit-elle après avoir réfléchi quelques secondes. "Faites attention, okay, j'ai pas envie de changer de capitaine à nouveau..." poursuivit-elle.

Une main apparût derrière moi, faisant un pouce en l'air, comme pour lui indiquer que nous ne prendrions pas trop de risques, mais ni elle ni moi n'y croyions réellement. Elle donna une pichenette au gant flottant qui disparut aussitôt, puis elle retourna dans la chambre donner les consignes aux Silencieux pour réaliser leurs courses. Je ressortis à la hâte, Davinia m'attendant toujours à côté de la porte du bâtiment.

"- J'ai plus ou moins eu notre réponse, selon Arondel il nous faut marcher vers l'Ouest pendant une trentaine de minutes, tu tiendras le coup dans le froid ?" demandai-je à Davinia.

Nous avancions tantôt dans la pénombre, tantôt dans l'éclairage peu fiable des ruelles, mais ces derniers se faisaient de plus en plus rares à mesure que nous nous éloignions du centre-ville. Je sentis Davinia se rapprocher de moi, soit pour se rassurer des menaces extérieures, soit pour se réchauffer, que sais-je. Nous continuions d'avancer, toujours une épée courte à la main, dissimulée sous ma cape. Puis, alors que nous empruntions un virage, dans une obscurité presque totale, de la lumière au tournant attira notre regard. Des torches alignées en deux rangées, un sens de la mise en scène très particulier. Le vent se fit de plus en plus fort alors que nous progressions parmi le cortège de flambeaux, à tel point que les lumières s'éteignaient presque systématiquement alors que nous atteignions leur niveau. Décidément, je n'étais pas frileux mais j'en eus des frissons. Voilà que nous étions devant la grande double porte. Sur le mur était écrit Dr. Acula. Pas de doute, nous étions au bon endroit.

"- Euhhh on fait quoi maintenant ? On défonce la porte ou on toque ?" m'inquiétai-je, bien que j'avais le présentiment que notre présence n'était plus une surprise pour les individus occupant l'endroit.
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‘’Pas le choix… On a besoin de lui…’’ Marmonna Davinia en resserrer son manteau autour d’elle et suivre Bjorn.

La neige crissait sous leurs pas, chaque mouvement enveloppé dans un silence pesant que seule leur respiration saccadée troublait. Davinia avançait à côté de Bjorn, ses dents claquant bruyamment dans l’air glacial. Elle sentait ses frissons, comme si le froid s’infiltrait directement dans ses os. Malgré les couches de vêtements qu'elle portait, le vent mordant du Nord Blue semblait percer chaque fibre de son être. Ils marchaient péniblement, leurs corps luttant contre les rafales glaciales. La neige tombait en lourds flocons, ajoutant une difficulté supplémentaire à leur progression. Chaque souffle de vent portait avec lui un froid si intense qu'il les faisait vaciller. Davinia serrait les poings, ses gants tremblant de froid, essayant de maintenir un semblant de chaleur.

Finalement, après une éternité à braver les éléments, ils arrivèrent devant une rangée de torches aux flammes vacillantes. Leur lumière dansante créait une atmosphère presque surnaturelle, guidant leur chemin vers le manoir qui se dessinait de l’autre côté. La façade sombre du bâtiment se dressait devant eux, imposante et intimidante. L’architecture gothique du manoir, avec ses flèches acérées et ses gargouilles menaçantes, semblait sortie d’un cauchemar. Chaque détail de la façade rappelait sinistrement la réputation du lieu. Les vitraux teintés projetaient des ombres inquiétantes, tandis que les murs de pierre noire semblaient absorber toute lumière, rendant l’atmosphère encore plus oppressante. Les arches et les contreforts massifs ajoutaient une impression de lourdeur et de mystère. Ils suivirent le sentier bordé de torches jusqu’à la porte imposante du manoir. Les battants de bois épais étaient ornés de motifs baroques en fer forgé, ajoutant encore à l’impression d’hostilité que dégageait l’endroit. Une gargouille, sculptée avec une précision effrayante, semblait les fixer de ses yeux vides, gardienne silencieuse de ce lieu maudit. Davinia et Bjorn échangèrent un regard. Les yeux de Davinia brillaient de curiosité, malgré le froid qui la faisait encore trembler. Elle secoue légèrement la tête, ses traits crispés par la tension et le froid.

‘’Nah, laisse-moi un peu de place, que je vois quelque chose.’’ Marmonna-t-elle.

Elle scruta la porte imposante du manoir, ses doigts engourdis fouillant dans les poches profondes de son manteau. Elle en sortit un petit kit de crochetage, ses outils parfaitement alignés malgré le froid. S'agenouillant devant la serrure complexe, elle jeta un regard rapide à Bjorn qui se tenait à proximité, gardant un œil sur les environs. La lueur des torches projetait des ombres mouvantes autour d'eux, trompant l’œil. Concentrée, elle inséra délicatement les crochets dans la serrure. Ses mains tremblaient légèrement à cause du froid, mais ses mouvements restaient précis et calculés. Chaque cliquetis de la serrure semblait résonner dans le silence nocturne. Elle sentait les mécanismes internes résister sous ses doigts, mais elle connaissait bien son métier. Lentement, patiemment, elle manipula les crochets, sentant chaque goupille céder une à une. Sa respiration, bien que contrôlée, formait de petits nuages de vapeur dans l'air glacé.

Après ce qui lui parut être une éternité, elle sentit enfin le dernier déclic, et la serrure céda sous ses doigts experts. Elle tourna délicatement la poignée, jetant un dernier regard à Bjorn avant d’ouvrir la porte avec précaution. Le grincement lourd des charnières résonna dans la nuit, dévoilant l'intérieur sombre et incompréhensible du manoir. Elle se redressa, rangeant rapidement son kit de crochetage dans sa poche. Bjorn s’approcha, prêt à entrer à sa suite. Davinia inspira profondément, ressentant une vague de satisfaction malgré le froid persistant. Ils étaient prêts à affronter ce qui les attendait à l’intérieur.

‘’J’espère qu’il ne fera rien de stupide… Ou qu’il est encore en vie…’’ Marmonna l’Énigmatique en tirant ses dagues et se faufilant à l’intérieur.
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Le museau dans un cadavre, Camillius ronchonnait. Entre deux coup de crocs pour déchirer la chaire de son repas, son esprit fulminait d’avoir perdu la trace de la bestiole noir qu’il rêvait d’égorger. Dans les longs escaliers tournoyants sur eux même, il avait eu plus que du mal à grimper vers les étages, quittant les sous-sols humides pour le rez- de-chaussée d’un manoir. Mais au moins, il avait réussi à attraper un garde de plus, le plaquant au sol avant de lui arracher son armure et de lui dévorer les tripes encore vivants. Maintenant, le calme s’était rétabli, l’homme avait rendu l’âme et le dragon dressait la tête en s’interrogeant sur la suite. Il ne savait ni où il était, ni où il devait aller. Et il avait assez peu d’espoir que qui que ce soit vienne à son secours. Pas grave, il n’avait pas besoin du gris et de ses femelles. Son museau frémissant, il arrivait à distinguer quelques odeurs malgré le sang le tachant. Il avait bien mangé et il se sentait bien mieux que lorsqu’il avait immergé. Il suivit alors un couloir, puis il tourna à droite, deux fois. Puis à gauche, une fois. Et alors qu’il entrait dans des pièces vides les unes après les autres, il se mit à rugir de frustration. Il était clairement perdu.

Courant droit devant, le dragon laissait de côté la logique pour suivre une route aléatoire et voir où elle finirait par le mener. Et s’il avait dû passer plusieurs fois au même endroit, mais au bout de plusieurs minutes il déboula dans un grand hall où le froid circulant lui tira une grimace.

- “Camillius !” Criait une voix étonné que le dragon reconnaissait.

Et tournant la tête, il vit le duo de pirate en train de s’infiltrer dans le manoir. Il les regardait, eux le regardaient, il les regardait, eux le regardaient. Bref …

- “Putain mais vous en avez mis du temps ! J’ai eu le temps de buter la moitié de l’endroit ! Regardez ce qu’ils m’ont fait !”

Et sans même donner plus d’explication, l’animal reprenait forme humaine pour présenter la plaie béante que la scie lui avait laissé sûr le côté des côtes et qui saignaient toujours.

- “Je vous jure, si je recroise cette foutue bestiole, je lui arrache la tête !” jurait-il en serrant le poing.
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Nous venions à peine d'avancer dans le hall sombre, seulement éclairé par les torches à l'extérieur ainsi que par la lumière de la Lune, que notre ami draconique fit irruption dans la grande pièce. En effet, si j'ignorais qui pouvait être à l'origine de ses blessures, il ne l'avait pas raté.

"- Approche, je vais regarder un truc." lui dis-je, sur le ton le plus calme possible.

"- Quoi ? Non, reste là ! Je sais pas ce que tu vas faire mais je veux pas que tu me touches !" criait le dragon alors que s'enchainait une course poursuite entre les piliers qui peuplaient le hall.

Tel un animal qui se serait blessé, il refusait de se laisser approcher. Au détour d'une énième colonne de pierre, une main flottante se mêla à sa course, lui faisant s'emmêler les pieds et chuter sur quelques centimètres.

"- Tu sais que t'es chiant quand tu t'y mets..." soufflai-je, alors que j'inspectais sa plaie qui saignait davantage après cette course acharnée, me mettant à califourchon sur son dos pour rester hors de portée de ses coups de mâchoire. Même en forme humaine, il n'était pas à sous-estimer lorsqu'il était de mauvaise humeur.

"- Laisse moi, j'ai pas besoin de ton aide ! Je veux juste retrouver l'autr- AHHHHH" se stoppa Camillius au moment où j'appliquais ma main glacée sur la zone de sa blessure.

Adoptant des mimiques de souffrance extrême, gesticulant dans tous les sens et poussant des gémissement de douleur qu'il refuserait sûrement d'assumer dans quelques minutes, il fut forcé de constater que le saignement avait grandement diminué, en plus d'avoir reçu une anesthésie temporaire de l'endroit. Je jetais un coup d'œil vers Davinia, bien qu'elle semblait aussi désespérée que moi par les réactions de notre coéquipier, elle avait l'air rassurée que ses heures ne soient plus comptées.

Puis, alors que nous venions de nous rassembler, des gerbes de flammes de toutes les couleurs apparurent de part et d'autres des deux rangées de colonne, allumant par la même occasion les torches qui y étaient attachées. Camillius applaudit brièvement pour la performance, avant d'apercevoir celui à l'origine de la prestation.

"- Soyez les bienvenus au manoir du Docteur Acula ! Dis moi Bartock, tu m'as parlé d'un dragon en furie, mais voilà qu'il n'y que trois humains, m'aurais tu menti ?" déclara un homme couvert de bandages, des fioles attachées tout autour de sa taille.

"- Mais puisque je te dis que le dragon était un humain lorsque nous l'avons capturé ! Oh non, le maître ne va définitivement pas être content... Occupe toi de leur cas Monsh, je compte sur toi pour les arrêter ici et maintenant !" s'écria la chauve-souris avant de donner deux coups d'ailes dans les airs en vain, continuant sa fuite sur ses pattes.

Au même moment, le dénommé Monsh généra une boule de gaz fluorescent qu'il projeta dans notre direction, alors que les grandes portes se refermèrent derrière nous dans un grand claquement.
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''Seigneur… Mais… Camillius, qui t’a fait ça ?'' souffla Davinia en s'approchant de lui, caressant doucement la blessure du bout des doigts.

Elle plissa les yeux, réalisant qu'ils n'avaient pas de médecin à bord du bateau. Si les garçons continuaient ainsi, surtout Camillius, ils allaient finir par en avoir vraiment besoin. Les bandages de fortune suffisaient pour des blessures légères, mais elle n'était pas infirmière. Elle fit le tour de l'homme-dragon, inspectant son corps pour détecter d'autres blessures, mais rien ne sembla apparaître. Sous les paroles de Bjorn, elle posa ses yeux sur lui, se souvenant qu'il avait déjà réussi à cautériser une de ses plaies avec son froid glacial. Allait-il refaire la même chose ici ? Après la scène la plus enfantine que l’Énigmatique n’aurait jamais cru voir un jour, un humain beuglant pour sa vie sur le ventre et un autre sur le dos, Camillius reçut enfin les soins nécessaires. Dans un lourd soupir, elle se rapprocha, haussant faiblement les épaules sous l’attention de Bjorn. Elle passa brièvement une main dans les cheveux sombres de l’humain, se rappelant que malgré son apparence trompeuse, il restait un animal sauvage. Le "dompter" serait plus fastidieux qu’elle ne l’avait cru.

Tout en entraînant les hommes vers la sortie, menaçant Camillius de lui administrer la pire taloche de sa vie s’il continuait à rouspéter, ils furent interceptés par un sous-fifre des plus particuliers. Encore plus désespérée qu’avant, elle frotta ses mains sur son visage, poussant un grognement sonore en roulant des yeux. Camillius reçut une petite claque derrière la tête à cause des applaudissements, l'arrêtant dans son élan. Elle lui lança un regard de côté, mais l’ignora rapidement.

''Arrrg… Tout ce que je veux, c’est un bain chaud et une nuit de sommeil. Pas courir après un dragon en détresse par ce froid glacial pour finir par affronter un… je ne sais quoi qui va me détruire la rétine avec ses jeux de lumière stupides ! Je te jure, Camillius, qu’une fois qu’on aura réglé le problème du château, tu finiras en fond de cale à te geler… la peau du cul,''
déclara l’espionne en ignorant les deux autres.

Un homme mince et sinistre apparut devant eux, un sourire malveillant aux lèvres. Il portait une ceinture remplie de fioles colorées, chaque fiole promettant un effet plus dévastateur que la précédente. Il s'inclina légèrement, comme un acteur avant de commencer sa performance. Derrière eux, les portes se refermèrent avec fracas, faisant sursauter Davinia. Elle se retourna rapidement avant d’être brusquement poussée par Bjorn pour éviter de recevoir un étrange gaz fluorescent. En bousculant Camillius dans la foulée, ils roulèrent ensemble un peu plus loin, Bjorn ayant utilisé toute sa force dans le procédé. Se redressant, une longue mèche de cheveux noirs, elle récupéra ses dagues et les mit en main tandis que ses yeux étudiaient le fameux Monsh.

''La chauve-souris s’en va, vite Camillius, va la récupérer avant qu’elle n’alerte plus de monde. Bjorn et moi, on s’occupe de ce cinglé coloré. Bjorn, évite de respirer ses gaz… Je n’ai pas l’impression que ce soit très bon pour nous'', annonça Davinia en sortant un de ses masques noirs et argent. Elle le plaça sur son visage avant de soulever et de mieux attacher son foulard sur le bas de son visage.

Ce n’était pas une protection infaillible, mais au moins elle protégeait son visage en cas d’éclaboussures. Avant que Davinia ne puisse réagir, Monsh lança une poignée de fioles dans sa direction. Les fioles éclatèrent en touchant le sol, libérant des gaz aux couleurs vives. Les deux équipiers furent ainsi séparés, et l’espionne se déplaça latéralement pour éviter les vapeurs montantes. Monsh, souriant toujours, jonglait avec une autre série de fioles, les lançant en un arc parfait pour essayer d’entourer ses adversaires de cercles de gaz. Davinia se faufila entre les nuages, ses mouvements rapides et fluides. Elle sortit ses propres armes, deux dagues fines, prêtes à percer la chair de son ennemi. Profitant de l'attention de Monsh sur Bjorn, elle attrapa deux petites bombes, alluma la mèche et les fit glisser en direction de Monsh. Les sphères, en forme de roses ouvertes, roulèrent jusqu’aux pieds de l’homme et frappèrent sa botte, ce qui lui fit pencher la tête. Au même moment, elles explosèrent en laissant échapper une épaisse fumée sombre et malodorante. Si d’ordinaire, elle les utilisait pour masquer sa fuite, dans l’immédiat, elles allaient servir de diversion.


Dernière édition par Davinia Valthane le Mar 28 Mai 2024 - 17:28, édité 1 fois
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- “Gniah gniah gniah” ronchonnait Camillius en levant les yeux au sol.

Il trouvait le duo bien gonflé de se plaindre alors que jusqu’ici, c’était lui qui s’était planté et séquestré. Mais il n’y avait rien de surprenant dans les complaintes de la femelle. Après tout, son genre devait l’empêcher de voir ce qui était vraiment important pour qu’elle ne se focalise que sur son stupide bain. Mais si une chose était sûr, c’était qu’il n’allait pas laisser cette stupide bestiole lui filer à nouveau entre les griffes. Alors que le trois-yeux courait pour rejoindre la porte se dressant derrière leur ennemi, ce dernier, la main devant le nez pour se protéger des effluves de Davinia, remarquait d’un œil vif le départ du troisième pirate. Il se déplaça alors rapidement, traversant les nuages comme si de rien n’était, pour venir se positionner non loin du passage du fuyard avant de dresser son bras au niveau de ce dernier et de le laisser se percuter la trachée dessus avant de tomber en arrière. Monsh rigola un instant avant d’ajouter :

- “Personne n’ira nul part.”

Puis l’adversaire dressa un point avant de l’écraser dans les côtes déjà blessé de Camillius. Ce dernier encaissa, saisissant le bras de Monsh après le coup pour l'agripper avec force. Puis, se transformant en dragon, les griffes de ses pattes venaient se planter dans la chaire de l’homme. Le nez fin du dragon avait remarqué quelque chose qui lui plaisait beaucoup mais dont il valait mieux éviter de parler à ses camarades. Alors sans plus un mot, le coup du dragon se dressa pour faire face au visage surpris et émerveillé du scientifique avant que la créature ne lui éternue des gerbes de flammes au visage. L’air gorgé du gaz du scientifique prit feu, déclenchant des détonations en chaîne dans toute la pièce. La bête profita des explosions pour relâcher le scientifique, se redresser et courir à la poursuite de la chauve-souris. Il laissait les flammes lui caresser les écailles, la chaleur le revigorant un peu plus après ce coup bas gratuit qu’il avait reçu et qui n’avait fait que raviver la douleur de ses plaies. Et sans se préoccuper de ce qui découlerait de son action, il disparaissait dans les couloirs pas encore atteint par l'incendie.
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Et ainsi, dans une série d'explosions retentissantes, Camillius disparut à nouveau à la poursuite de la chauve-souris. Cette fois-ci, mes deux compagnons ne pouvaient pas se plaindre du climat glacial de l'endroit, alors que la température à l'intérieur du manoir montait en flèche. Les fondations de pierre du manoir semblaient tenir bon face aux flammes, mais il fallait rester vigilant à ne pas se retrouver enterrés vivants. Malgré l'environnement flambant, le dénommé Monsh ne calmait pas ses offensives, continuant de projeter vers nous ses multiples boules de gaz. A en juger par leur réaction face au décor, les projectiles semblent exploser au premier contact avec un obstacle. Nous progressions entre les colonnes de pierre, grondant dans notre dos et projetant des débris de cailloux face aux légères explosions qu'elles subissaient.

Bon, il fallait tout de même tenter de couper court à cet affrontement, nous allions soit périr du manque d'oxygène, soit finir en multiples morceaux suite aux impacts explosifs. Il fallait mener l'offensive, tant que nous en avions l'occasion.

"- Davinia, fais moi confiance. Avance vers lui, je te couvre !" lui criai-je.

Alors que mon acolyte se décalait, j'interposai une main flottante entre elle et chaque projectile gazeux qui lui était projeté, les faisant exploser bien avant qu'elle ne soit à portée de ces derniers. Une nouvelle main apparut devant le scientifique fou, et arracha une fiole à sa ceinture, me la transmettant juste avant de disparaitre sous un coup de revers de Monsh. Une étiquette avec écrit "Flash" décorait le flacon volé.

"- Détourne les yeux Davinia !" hurlai-je, alors que je lançai la fiole de manière à ce qu'elle s'explose sur le plafond de l'endroit, pile en face de là où se trouvait Monsh, créant une intense explosion de chaleur et de lumière.
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Face à son manque de respect flagrant, les enfantillages de Camillius irritaient profondément Davinia. Elle se promit que, plus tard, une fois sortis de ce pétrin, elle lui donnerait une bonne claque derrière la tête. S'il voulait agir comme un enfant, elle allait le traiter comme tel. Comment disciplinait-on les enfants médiocres qui se croyaient rois du monde ? Avec des claques, des punitions, parfois de la douceur lorsqu'ils se comportaient bien. Il était impératif de dompter ce satané dragon qui les mettait plus en danger qu’autre chose. Elle allait lui dire sa façon de penser, mais à cet instant, le dragon sauta dans la fumée qu’elle venait de lancer. Main tendue dans sa direction, les yeux écarquillés par la surprise, son cri resta coincé dans sa gorge tandis que, quelques secondes plus tard, tout s’enflamma brusquement, la projetant vers l’arrière. Elle roula au sol, essayant de chasser la chaleur et les quelques flammes qui s’étaient projetées dans sa direction.

''Fuuuu…'' souffla Davinia, se redressant agilement en cherchant son compagnon au caractère enflammé.

Tel une boule de feu, il ressortit vivant de son attaque, défonçant par la même occasion le scientifique fou avant de prendre la poudre d’escampette en direction de la chauve-souris majordome. Malgré elle, Davinia soupira avant de se concentrer sur l’homme qui se tenait le visage entre les mains. Les bandages qui recouvraient autrefois son corps étaient partis en cendres, tout comme une partie de sa pilosité. Les flammes finirent par s’éteindre complètement faute de combustible, dévoilant un homme au corps marqué par des bubons juteux de pus ou de poison. Un liquide verdâtre s’échappait de certains, donnant une impression repoussante à l’Énigmatique. Toutefois, devant l’audace de Bjorn et surtout son air sûr, elle acquiesça positivement à ses mots et s’élança vers Monsh.

Dans une petite course rapide, elle fit une pirouette vers l’avant pour se propulser vers le haut, dagues et tentacules tendues vers l’avant, offrant quatre armes au lieu de simplement deux. Tandis qu’autour d’elle tout explosait dans des couleurs psychédéliques, elle retenait sa respiration tout en faisant confiance à l’homme qui la suivait depuis quelques mois. Certaines des dagues rencontrèrent la chair brûlée de son ennemi, les autres furent bloquées, repoussant malgré la surprise l’espionne qui atterrit avant de rouler plus loin. En entendant une nouvelle demande, elle ferma les yeux. Elle marmonna dans son masque, mais s’exécuta, roulant vers l’arrière pour mettre de la distance.

Le flash éclaira la pièce, aveuglant Monsh qui n’avait pas remarqué le vol de sa bouteille. Titubant un peu, l’homme frappait devant lui pour essayer de se protéger, l’un de ses avant-bras protégeant son visage. Davinia profita de ce moment pour se précipiter à nouveau vers lui, une tentacule capillaire s’étirant vers ses jambes pour le faucher et le faire tomber tout en le transperçant de l’une des lames rouges manœuvrées par ses cheveux. Elle sauta sur ses jambes, le maintenant au sol.

''Bjorn, finis-le ! Il faut rejoindre Camillius.''
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Droite, gauche, le voilà de retour dans l’infernal dédal de couloir du manoir. Mais heureusement pour lui, il savait parfaitement lorsqu’il risquait de retourner sur ses pas. Le feu avait pris dans les couloirs, berçant de doux crépitements la recherche du dragon. Il grognait, se concentrant sur ses sens pour continuer de suivre la piste de cette foutue chauve-souris. Cependant, Camillius était bien plus rapide et vite, il rattrapa la bestiole. Lui sautant dessus comme un félin sur une proie, il la plaque au sol, glissant sur un bon mètre et rappant la peau du pauvre animal contre un épais tapis rouge. Et alors que leur glissade les amenés à entrer dans une nouvelle pièce épargnée par l'incendie se propageant il entendait une voix s’élever :

- “Bartok ! Qui est donc ce malotru ?!”

Un homme, assis à une longue table couverte de plats, dégustait son dîner en regardant le duo. Camillius avait saisi d’une main le coup de la chauve-souris et alors qu’il redressait les yeux pour voir son interlocuteur, il sentait sous ses doigts la bestiole gigoter.

- “Ma…Maître … Je …”

L’animal n’arrivait pas à finir sa phrase que le dragon resserrait déjà sa poigne sur son coup, lui arrachant un gémissement de douleurs et d'étouffements. Le regard de Camillius détaillait l’homme se redressant avant de scruter la pièce. Une imposante fenêtre s’étendait sur l’entierté du mur du fond, détaillant un ciel sombre et des étoiles lumineuses et le long des autres murs étaient alignés d’étrange statue de femme nue taillé à même un matériaux brun et rigide. Cette vision ne manqua pas de faire rougir les pommettes du dragon avant qu’il ne détourne les yeux pour se concentrer sur son nouvel adversaire.

D’un geste de la main, l’homme fit dresser un liquide brunâtre du sol qui s’était écoulé pendant un instant où le dragon était distrait. Et juste avant que le liquide n’impacte le trois-yeux, il devint solide et le repoussa avec force, lui faisant lâcher sa prise avant de le plaquer contre un mur. L’odeur montant au nez du dragon et provenant de la substance lui faisait dresser les babines.

- “Laisse moi buter ta saloperie !” Criait le dragon sous forme humaine.

Il était hors de question pour lui de laisser partir cette créature, source de ses derniers problèmes et de la blessure douloureuse que Bjorn avait essayé de soigner. La chauve-souris enfin libre courait au pied de son maître avant de prendre une petite impulsion et d’essayer de grimper le long de la jambe de l’étrange homme. Puis, d’un revers de la main, il se fit frapper par l’homme et retomba au sol, surpris.

- “Au pied Bartok ! Je t’ai déjà dis de ne pas grimper sur ma jambe !”
- “Oui Maître” répondit alors la bestiole en se cachant derrière l’homme.
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Le malotru couvert de pus s'était mangé la bombe éblouissante de pleine face, et à en juger par ses mouvements hasardeux et transpirant la peur, il n'était pas immunisée à cette dernière. Habilement, Davinia le balaya et j'entendis distinctement le corps du scientifique heurter le haut des escaliers. Sans hésitation et comme en réponse à l'appel de mon alliée, je portai une main à mon dos, agrippant fermement une hache qui y était accrochée, et celle-ci fut transmise dans un claquement de doigt à une main déjà en hauteur, au niveau des deux combattants. Je décidai alors de faire apparaître une seconde main et prenant possession de la paire fraîchement invoquée, je me saisis à pleines mains de l'arme et trancha la tête de l'homme au sol, qui n'eut qu'un cri de désespoir comme dernière parole.

Je montais à mon tour les escaliers, de manière conventionnelle pour ma part, cependant même dans la mort, le dénommé Monsh tentait de stopper notre avancée, ses fioles se brisant au fur et à mesure qu'elles dévalaient les marches. Les liquides corrosifs manquèrent de me brûler les pieds, et c'est finalement dans un saut puissant que je finis mon ascension de l'escalier. L'avantage de poursuivre un dragon qui brûle tout sur son passage, c'est qu'il est assez facile de le suivre à la trace. Les moquettes cramées, les tableaux flambés, ce n'étaient pas les indices qui manquaient à l'enquête. A mesure que nous avancions, une odeur alléchante nous parvint, sucrée et presque réconfortante.

"- Camillius ?!" criai-je au détour d'un virage, lequel nous amenait dans une grande salle de buffet, à la décoration aussi somptueuse que douteuse.

"- Mais ! Combien sont-ils Bartok ? Et que font-ils ici ?" s'exclama le grand homme habillé tout de noir, situé au bout d'une table beaucoup trop longue.

"- Ils sont tous là, Maître. Il y a eu une erreur lors d'un réapprovisionnement, et les amis du dragon sont venus le chercher... Sincèrement navré Maître Acula." couina la chauve-souris répugnante.

Contre un pilier se trouvait notre ami draconique, maintenu contre la structure de pierre par une matière sombre. Je brisais à l'aide d'un gant flottant ce qui entourait le cou du dragon et les morceaux sombres revinrent à une forme liquide avant de retourner vers l'homme sombre, se fondant dans sa cape.

"- J'ai l'impression que le vrai combat ne fait que commencer..." murmurai-je avec une forme d'anxiété en découvrant un tel pouvoir.
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Davinia suivait Bjorn silencieusement, restant un poil en retrait derrière sa stature impressionnante. Tandis qu'ils avançaient d’un pas sûr, elle essayait d’évaluer la situation. Ils se trouvaient dans une posture délicate, en plus d’être dans un manoir inconnu. Si elle comprenait bien ce qu'elle avait vu, cet homme, le comte Acula, était un utilisateur de fruit du démon. Et au vu de leur équipe, ils n'avaient absolument rien d’utile contre un tel utilisateur. Observant le comte Acula, Davinia remarqua la matière sombre qui avait retenu Camillius se replier dans la cape de l'homme. Cela confirmait ses craintes. Il possédait un pouvoir étrange et potentiellement très dangereux. Elle savait que la force brute ne suffirait pas. Tout en attirant l'attention du grand sombre, elle expliqua la situation à Bjorn.

''Bjorn,'’ murmura-t-elle tout bas, ses yeux fixés sur leur adversaire. ''Cet homme est dangereux... Clairement, il utilise un fruit du démon... La force brute ne sera pas utile contre lui... Il faudra être intelligents et innovants pour se débarrasser de lui.''

Bjorn hocha légèrement la tête, ses yeux à la fois concentrés et inquiets. Davinia savait qu'il comprenait la gravité de la situation. Tandis que le comte Acula observait ses nouveaux adversaires avec un sourire narquois, elle commença à réfléchir rapidement à un plan. Ils devaient trouver un moyen de neutraliser ses pouvoirs et d'exploiter ses faiblesses ou au moins se débarrasser de lui. Le temps était compté, et chaque seconde passée dans cette salle augmentait leur danger. Elle savait qu'ils devaient agir rapidement et de manière coordonnée. Prenant les rênes de la situation, Davinia aboya des ordres à ses compagnons d’un ton autoritaire.

''Camillius, utilise tes flammes pour le faire reculer ! Bjorn, occupe-toi de ces tentacules sombres et protège Camillius. Je me rends utile en cherchant une ouverture. À trois, on attaque !''

Le groupe acquiesça, chacun préparant son rôle dans la bataille à venir. Le comte Acula, debout à l'autre bout de la pièce, observait calmement, un sourire narquois étirant ses lèvres. Avec de la chance, ils pourraient utiliser cette arrogance à leur avantage. Il était visible que le comte ne les prenait pas au sérieux. Elle tire une nouvelle bombe échappatoire, ce souvenant que la fumée était très inflammable, elle la lance en direction de l’homme qui l’intercepte facile, mais ceci ne l’empêche pas d’exploser en l’enveloppant un peu.

''Un, deux, trois !''

Au signal, Camillius se lança sur l’homme envoyant une volée de flamme en direction du comte. Le feu éclaira la salle, créant des ombres dansantes sur les murs. Le comte Acula fit un pas en arrière, levant un bras pour se protéger. Une masse sombre, semblable à du chocolat liquide, jaillit de sa main, formant une barrière qui absorba une partie des flammes. Bjorn se précipita vers les tentacules brunes qui émergeaient de la vague montante, une hache brandie et prête à trancher. Avec une force impressionnante, il abattit son arme, coupant net l'une des tentacules avant de se tourner vers la suivante. Les morceaux tranchés se liquéfièrent, se reformant rapidement, mais Bjorn restait implacable, ses mouvements rapides et précis.

Davinia profita de la distraction créée par ses compagnons pour se glisser furtivement sur le côté, s’approchant de la table pour en faire le tour et venir attraper la bouteille d’alcool. Au même moment, elle est dérangée par la chauve-souris qui se jette sur elle et un semblant de combat des plus disgracieux ou Davinia essaye de frapper l’équivalent d’une mouche. Finalement, après un grognement de frustration, elle réussit à attraper la petite créature et à l’envoyer contre le mur du fond, l’assommant immédiatement. Elle retourne immédiatement son attention vers ses hommes, se rapprochant avec sa nouvelle arme improviser en main. Ses yeux cherchaient une ouverture, une faiblesse dans les défenses du comte. Elle remarqua que chaque fois qu'Acula manipulait le chocolat sombre, son attention semblait légèrement dispersée. Saisissant sa chance, elle serra ses mains et glissa les mains dans ses poches pour tirer une dague. Le comte Acula fit un geste brusque, et une pluie de projectiles en chocolat se dirigea vers eux. Davinia esquiva habilement, se faufilant entre les attaques, ses mouvements rapides et gracieux. Les projectiles éclatèrent sur le sol, libérant des éclats chocolatés qui éclaboussèrent le masque de l’espionne.

''Camillius, plus de flammes !'' cria Davinia, en voyant le comte momentanément distrait. ''Bjorn, ne lâche pas !'' Annonce l’Énigmatique qui vient fracasser le fond de bouteille avec la dague, elle lança ensuite le liquide sur l’homme.

Le dragon laissa un grognement de mécontentement, mais obéit, crachant un torrent de feu encore plus intense. Le comte Acula fut contraint de reculer davantage, ses tentacules de chocolat se tordant pour former une nouvelle barrière. Profitant de ce moment de faiblesse, Davinia s'élança, attrapa une bombe et la lança sur l’homme, qui disparut dans un nouveau nuage blanchâtre qui prit immédiatement les flammes à cause de Camillius. Le comte Acula, bien que puissant, montrait des signes de frustration. Ses attaques devenaient plus frénétiques, moins précises. Il était clair qu'il n'avait pas prévu une résistance aussi organisée. Ses yeux se plissèrent de colère alors qu'il réalisait qu'il faisait face à un groupe déterminé et prêt à tout pour le vaincre.

''Continuez !'' cria Davinia, sentant qu'ils gagnaient du terrain. ''On ne lui laisse aucune chance de reprendre le dessus !'' dit-elle en pointant finalement la fenêtre derrière le comte.

Davinia attrapa deux chaises, se déplaçant pour venir s’installer vers la fenêtre et l’éclata avec ses meubles. Ceux-ci trouvèrent le chemin du vide, terminant leur course dans une marée de pierres acérées en contrebas. Un vent froid glacial s’engouffra, enveloppant tout le monde de sa froideur, éteignant les chandelles et les flammes de l’entre, envoyant valser la nourriture. Mais surtout, la combinaison de la chaleur de Camillius et du vent glacial offrit un choc au comte Acula, qui se vit brusquement ralenti dans ses actions.
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Le vent froid venait tirer une grimace à Camillius qui laissait ses flammes le recouvrir pour éviter d’être dérangé par la température alors que le comte, mi humain mi liquide, fit un pas en arrière avant de sentir la fin de la falaise sur laquelle il avait installé son manoir. Le vent le poussait dans tous les sens, et le liquide qui le composait se faisait embarquer dans des bourrasques glaciales. Et alors qu’il semblait stopper son étrange capacité pour se reformer entièrement, affichant un corps humain brûlé par endroit, Camillius dressa une jambe pour coller au Dr. Acula un puissant coup de pied dans le ventre.

- “Va crever !”

Le repoussant alors, le comte tomba en arrière, chutant vers la mer dans un cris strident qui se décomposait en même temps que son corps fait de chocolat avant de s'éclater sur une rocher et de fondre dans l’eau.

Cet homme était loin d’être un redoutable guerrier et la témérité, ou la folie, des pirates leur avaient sûrement permis de vaincre. Cela et l’organisation engendrée par le leadership de Davinia. Mais Camillius ne le reconnaîtra jamais. à la place, il se dépêchait de rentrer dans le manoir alors que ses flammes s'éteignirent doucement sous le vent glacial. Il avait un autre adversaire à vaincre : cette foutue chauve-souris. Il posa tout de même une main sur sa plaie saignante de nouveau sous les affrontements alors qu’il se rapprochait de la bestiole. Mais loin de vouloir la tuer, il voulait d’abord la faire souffrir. Il s’accroupit à ses côtés avant de lui coller une claque retentissante qui ne manqua pas de la tirer de son sommeil. Un sourire satisfait sur le visage, Camillius laissait ses flammes le recouvrir un peu plus. La créature était paniquée et son visage retranscrivait toute la terreur qu’elle pouvait ressentir.

- “Ah ! Non pitié ! Ne me tuez pas !”
- “Oh pas tout de suite. La mort, ça se mérite.” Ricana Camillius alors qu’il approchait sa main du crâne de la bestiole dont les oreilles se fondirent en arrière presque instantanément.
- “Non ! Arrêtez ! Je peux vous donner tout l’or du comte !”

Et s’il y avait bien une chose que le dragon préférait au massacre, c’était bien les pièces retentissantes, brillantes et réfléchissantes. L’or et les joyaux. On aurait pu le croire vénale mais il n’était qu’un simple dragon, attiré par les trésors.

- “Ça, ça m’interesse. Dis-nous tout.”

Il reculait alors sa main pour laisser à la bestiole la liberté de s’exprimer plus librement.
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Après l'affrontement mouvementé, se finissant par un bain nocturne du cadavre du comte, qui semblait dépourvu de toutes forces après la longue chute et qui coula irrémédiablement. Une bonne chose de faite, nous avions retrouvé notre dragon, il ne restait plus qu'à repartir. C'était sans compter sur Camillius qui devait défendre son ego et qui s'en prenait désormais à la chauve-souris ignoble.

"- Suivez moi, je vais vous conduire vers le trésor de feu maître Acula..." geignit-il.

"- Avance. Sache que si c'est un piège, la mort ne sera qu'un soulagement comparé à ce qu'on t'infligera." le menaçai-je, alors qu'il lâcha un petit cri de peur.

L'animal tira sur un chandelier éteint, faisant coulisser une cheminée et dévoilant un large escalier, dont les bougies s'allumaient de part et d'autres du passage s'enfonçant sous le manoir. Alors que nous avancions dans le chemin dérobé, des voix se faisaient entendre, plutôt des cris à vrai dire, certains de peur, d'autres de rage, tous semblant provenir de femmes. Dans les souterrains étaient enfermées des femmes, une vingtaine à en juger par la taille des cellules qui les retenaient captives.

"- Ne faites pas attention à ces femmes, continuons d'avancer s'il vous plait, nous y sommes presque..." enchérit le serviteur sans même accorder un regard aux prisonnières.

De ses doigts crochus, il agrippa un trousseau de clés et mit en évidence l'une d'entre-elles avant de l'insérer dans la serrure d'une porte d'acier. Suite au mouvement de rotation, un clic résonna et le passage s'ouvrit, laissant apparaître des richesses à ne pas savoir quoi en faire. On aurait pu littéralement se baigner dans les berries, et ce fut précisément ce que Camillius fit dès qu'il en eut l'occasion. Pièces d'or, billets, bijoux et parures, il y avait ici plus de ressources que je n'aurai pu l'imaginer.

"Comment on va ramener tout ça ? On va pas laisser de l'or traîner ici quand même ?"
"Oh, ce n'est pas la main d'œuvre qui manque..."


Je revins sur nos pas, et d'un coup précis je défonçai l'un après l'autre les deux verrous qui séparaient les femmes kidnappées de leur liberté.

"- On vous a libérées, en remerciement, vous allez nous aider à ramener toutes ces richesses dans notre bateau, on en a pour plusieurs minutes de marche alors on ne tarde pas, les plus déterminées pourront faire un tour à dos de dragon. Quant à celles qui refusent, elles lui serviront de dîner." leur ordonnai-je en tapant dans les mains pour hâter le rythme, bien conscient des mensonges qui venaient d'être promis. "Toi l'affreux, va leur chercher de quoi se couvrir ainsi que des sacs pour qu'elles puissent les remplir au maximum, et plus vite que ça." lâchai-je à Bartok, qui multiplia les allers retours, les bras remplis de tissus et de fourrures.

Plusieurs dizaines de minutes plus tard, il ne restait presque plus un bien dans la réserve du défunt propriétaire des lieux, le sol brillait presque de propreté, alors que les sacs en jute portés par les esclaves étaient pleins à craquer.

"- Superbe mesdames, formidable travail d'équipe, le comte savait choisir ses esclaves." riai-je, alors que j'ouvrai la marche pour remonter dans la grande salle du manoir.

Les flammes des couloirs ne s'étaient pas calmées, et le craquement des structures en bois étaient peu rassurants. Heureusement, l'endroit regorgeait de passages cachés qui étaient restés indemnes des flammes, afin de rejoindre l'entrée de la demeure. A l'instant où la bande arrivaient au grand complet dans le hall, les portes battantes qui menaient sur la grande allée extérieure s'ouvrirent, et c'est le regard étonné d'une quinzaine de hérauts de l'aube stupéfaits qui croisa le nôtre.

"- Davinia, je te laisse expliquer à ces gens notre situation...?" soufflai-je en sa direction, bien que le combat semblait inévitable.
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