- “Camillius ?”
Dans un sursaut, l’homme se tournait rapidement. Il gardait une main dans son dos, un sourire en coin, comme un enfant qui aurait fait une bêtise. Là, au milieu de la petite cuisine du bateau des Trois Grâces, l’humain draconique fixait Arondel, leur navigatrice, avec attention.
- “Oui ?” répondit-il simplement, faisant mine de rien.
- “Relâche Comus.”
- “Comus ?”
- “Le chat.”
- “Quel chat ?”
- “Miaou …”
Dans un miaulement étouffé, le fameux Comus exprimait sa présence. Ce cri, proche d’un appel “au secours”, provenait du dos de Camillius. Et si le regard de l’homme préférait s’élever vers le plafond de la pièce, celui d’Arondel restait fixé sur lui avec un air sévère.
- “M’oblige pas à me répéter.”
Dans un long soupire, l’homme dégagea son bras valide pour dévoiler le sphinx noir, maintenu par le cou, les pattes pendantes dans le vide et l’air apeuré gravé sur son visage. Dans un geste puissant, Camillius jeta l’animal à la navigatrice avant de grogner en passant à côté d’elle. La femme rattrapa la bête sans rien ajouter à l’encontre de son collègue ronchon.
- "Il fallait pas jeter le cadavre que j'avais ramené de Hat Island par dessus bord !"
- "Il était entrain de décomposer. Ca puait la mort !"
- "Normal ! T'as pas voulu que je le mette dans le frigo !"
- "On va pas mettre des morceaux humains dans le frigo, ça met du sang partout !"
- “De toute façon on ne peut rien manger sur ce bateau.” finit par répliquer le dragon.
Il poussa alors la porte d’une main, l’autre toujours enroulé dans des bandages de fortune et maintenu contre son torse par un vieux tissu arraché à un drapé. Depuis qu’ils avaient quitté Hat Island, Camillius passait presque tout son temps à panser ses plaies. Ou plutôt, à se faire panser ses plaies car pour son plus grand malheur, il n’avait jamais eu à faire ça autrement qu’en se léchant les écailles sanglantes jusqu'à que la douleur ne s’évanouisse toute seule. Des tonnes de bandages parsemés son corps, couvrant son torse de blanc crème qui se teintait de rouge en absorbant le sang perdu. Il avait mal, mais bien moins qu’auparavant et cela était bon signe. Il guérissait doucement. Son bras lui traînait un peu plus. Jamais il n’aurait cru que prendre une balle dans une aile sous forme de dragon se retranscriverait dans son bras en reprenant forme humaine. Et maintenant, il se retrouvait bloqué dans cet état pour éviter de devoir refaire l’ensemble de ses pansements.
En débarquant sur le pont, Camillius eut un long frisson le parcourant. Il était de nature à aimer la chaleur et les rayons du soleil, mais voilà plusieurs jours que ces derniers l’avaient quitté pour se cacher timidement derrière des tonnes de nuages. Et la nuit remplaçant le jour était encore plus froide que celle du désert. Le dragon tremblait, se frottant son bras immobilisé pour essayer de se réchauffer un peu alors que les lanternes du pont éclairaient que quelques mètres devant la proue du bateau.
- “Putain on se les caille ici. C’est quoi ce temps de merde.”
Il faisait sombre et terriblement froid, et alors que le Trois-Yeux grondait son mécontentement et son inconfort, Arondel finissait elle aussi par sortir de la cuisine, un long et épais manteau de fourrure entre les mains. Elle le jeta sur son collègue grognon en disant :
- “Tiens, c’était dans une des caisses qu’on a embarqué. Sûrement une contrefaçon bon marché. Mais au moins c’est chaud.”
Puis elle fit le tour de l’homme tremblant encore sous son veston pour le dévisager devant la silhouette élancée que lui dessinait la pièce de vêtement.
- “Si tu avais meilleur caractère, tu ferais un très bon partie. Milady.” se moquait Arondel en cachant à peine son sourire derrière sa main.
- “Ahah très drôle.”
Et alors que la navigatrice avait laissé la direction aux silencieux, les larbins de l’équipage, l’un d’eux hurlait un traditionnel “terre en vue” alors que la connaisseuse annonçait au reste de l’équipage :
- “Ça doit être Boréa.”
La lune était haute dans le ciel et Arondel n'avait jamais besoin de plus que cet astre majestueux et des étoiles l'entourant pour se repérer sur North Blue.
Dans un sursaut, l’homme se tournait rapidement. Il gardait une main dans son dos, un sourire en coin, comme un enfant qui aurait fait une bêtise. Là, au milieu de la petite cuisine du bateau des Trois Grâces, l’humain draconique fixait Arondel, leur navigatrice, avec attention.
- “Oui ?” répondit-il simplement, faisant mine de rien.
- “Relâche Comus.”
- “Comus ?”
- “Le chat.”
- “Quel chat ?”
- “Miaou …”
Dans un miaulement étouffé, le fameux Comus exprimait sa présence. Ce cri, proche d’un appel “au secours”, provenait du dos de Camillius. Et si le regard de l’homme préférait s’élever vers le plafond de la pièce, celui d’Arondel restait fixé sur lui avec un air sévère.
- “M’oblige pas à me répéter.”
Dans un long soupire, l’homme dégagea son bras valide pour dévoiler le sphinx noir, maintenu par le cou, les pattes pendantes dans le vide et l’air apeuré gravé sur son visage. Dans un geste puissant, Camillius jeta l’animal à la navigatrice avant de grogner en passant à côté d’elle. La femme rattrapa la bête sans rien ajouter à l’encontre de son collègue ronchon.
- "Il fallait pas jeter le cadavre que j'avais ramené de Hat Island par dessus bord !"
- "Il était entrain de décomposer. Ca puait la mort !"
- "Normal ! T'as pas voulu que je le mette dans le frigo !"
- "On va pas mettre des morceaux humains dans le frigo, ça met du sang partout !"
- “De toute façon on ne peut rien manger sur ce bateau.” finit par répliquer le dragon.
Il poussa alors la porte d’une main, l’autre toujours enroulé dans des bandages de fortune et maintenu contre son torse par un vieux tissu arraché à un drapé. Depuis qu’ils avaient quitté Hat Island, Camillius passait presque tout son temps à panser ses plaies. Ou plutôt, à se faire panser ses plaies car pour son plus grand malheur, il n’avait jamais eu à faire ça autrement qu’en se léchant les écailles sanglantes jusqu'à que la douleur ne s’évanouisse toute seule. Des tonnes de bandages parsemés son corps, couvrant son torse de blanc crème qui se teintait de rouge en absorbant le sang perdu. Il avait mal, mais bien moins qu’auparavant et cela était bon signe. Il guérissait doucement. Son bras lui traînait un peu plus. Jamais il n’aurait cru que prendre une balle dans une aile sous forme de dragon se retranscriverait dans son bras en reprenant forme humaine. Et maintenant, il se retrouvait bloqué dans cet état pour éviter de devoir refaire l’ensemble de ses pansements.
En débarquant sur le pont, Camillius eut un long frisson le parcourant. Il était de nature à aimer la chaleur et les rayons du soleil, mais voilà plusieurs jours que ces derniers l’avaient quitté pour se cacher timidement derrière des tonnes de nuages. Et la nuit remplaçant le jour était encore plus froide que celle du désert. Le dragon tremblait, se frottant son bras immobilisé pour essayer de se réchauffer un peu alors que les lanternes du pont éclairaient que quelques mètres devant la proue du bateau.
- “Putain on se les caille ici. C’est quoi ce temps de merde.”
Il faisait sombre et terriblement froid, et alors que le Trois-Yeux grondait son mécontentement et son inconfort, Arondel finissait elle aussi par sortir de la cuisine, un long et épais manteau de fourrure entre les mains. Elle le jeta sur son collègue grognon en disant :
- “Tiens, c’était dans une des caisses qu’on a embarqué. Sûrement une contrefaçon bon marché. Mais au moins c’est chaud.”
Puis elle fit le tour de l’homme tremblant encore sous son veston pour le dévisager devant la silhouette élancée que lui dessinait la pièce de vêtement.
- “Si tu avais meilleur caractère, tu ferais un très bon partie. Milady.” se moquait Arondel en cachant à peine son sourire derrière sa main.
- “Ahah très drôle.”
Et alors que la navigatrice avait laissé la direction aux silencieux, les larbins de l’équipage, l’un d’eux hurlait un traditionnel “terre en vue” alors que la connaisseuse annonçait au reste de l’équipage :
- “Ça doit être Boréa.”
La lune était haute dans le ciel et Arondel n'avait jamais besoin de plus que cet astre majestueux et des étoiles l'entourant pour se repérer sur North Blue.