Ouai, viens visiter le pays des pétales, tu verras c’est sympa, le panorama, les odeurs, et même les beau gosses ! Pourquoi j’ai écouté mon senpai déjà ? Ah oui, on m’a apprit à respecter mes ainés. Au final, c’est qu’un vieux plan drague à la con. Il a deux ans de plus, mais rien dans les biceps. Il manque cruellement d’initiative, on dirait que rien que mes yeux gris le bloquent dans ce qu’il voudrait, pourrait, devrait me dire. Bon, du coup, je l’ai perdu dans le bois au djinn, après une « ballade innocente et instructive » qu’il m’a proposé ; J’ai uniquement accepté pour le semer au creux du bois, dans un coin qu’il me disait tranquille pour discuter, et moi, je le voyais venir à des kilomètres, et j’avais pas envie d’avoir de mauvais rapports avec un supérieur, alors le temps qu’il tourne la tête, j’ai couru de toute mes forces, crochetée un arbre, effectuée un saut de main réglementaire, et j’suis partis comme ça, de cabrioles en cabrioles pour pas me faire voir.
En une dizaine de minutes, au centre du Vizirat, je trouve une auberge « La pétale de pan » qui me semble pas trop horrible. La façade est entretenue, même pour un champignon je lui trouve un petit air sympa, mignon. J’entre dans le bar, ou quelques habitués sont a un comptoir, et ou un mec dans le fond de la pièce sirote une pinte les deux pieds sur la table, le reste de son anatomie planqué dans l’ombre. Mystère. J’ai toujours aimé les percer, comme d’autre le font avec des boutons d’acnés.
- Vous me conseillez quoi ? Pour décompresser d’une lourde journée …
Je commande une spécialité locale, un genre de thé à base d’une décoction de champignons et de racines d’une plante dont je me fous du nom. On me sert en quelques mouvements précis… Je me place à l’autre bout de la salle, histoire de pas faire l’intéressée par l’inconnu qui continue de boire en solitaire, sans tenir compte de ma trogne. Et bah je sais pas vous, les filles, mais les gars qui me calculent pas j’ai envie de les accoster.
Mais j’évite, parce que je suis pas le genre à faire le premier pas, je suis de la vieille école tu vois, genre quand on va manger au restaurant, je ne partage pas la note. Ou quand on doit sortir les poubelles, je passe mon tour. A moins que les déchets soient humains, et là, je veux bien ma part de claques à distribuer. La vielle école je te dis. Celle qui te prend, qui te jette et qui te fait sortir tout ton jus comme une chaussette.
Bref, je trouve que mon discours est un peu bizarre ; Pas habituel… Je commence à avoir sommeil … J’ai les yeux qui papillonnent, j’ai du mal à soutenir le regard droit, ma tête se baisse, mes forces me quittent un peu. C’est bizarre non, qui a mit un éléphant à la peau rosée derrière le bar ? Et pourquoi les habitués se tournent-ils vers moi comme ça ? Heu… Les gars… Au secours ? Aucun mot ne parvient à sortir de ma bouche… J’essaye de me lever mais mes muscles me font défaut, et je titube de plus en plus en essayant d’échapper aux mecs à tête de dragons, ou de démons, ou de dragon-démons, qui me poursuivent.
Je suis sur le point de tomber, que je me raccroche à l’inconnu dans son coin, frappant son verre en me rattrapant par sa veste, la bière éclabousse nos deux visages … Je vois trouble, mais lui, il a pas l’air commode non plus ! Encore une hallucination ? Je dois resister … Bordel, pourquoi ça n’arrive qu’à moi ce genre de merde ? La bière finit par terre, les gars parlent mais j’entends que des bruits étouffés par le voile cotonneux qui commence à me prendre, comme si mes jambes c’étaient des nuages, comme si ma volonté c’était de la ouate.
Et comme si mon dernier espoir, c’était le gars du fond, qui a l’air encore plus dangereux que la faune locale.