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[Q] Cinquième chapitre ; Creuser son nid (2)


- « J-J’espère q-que t-ton con-contact viendra pour sûr ! »

- « Oooh, il viendra, ne t’en fais pas. Il est toujours là quand il y a un bon coup ! »


Lucia gonfla ses joues et tourna rapidement sa tête vers un autre côté pour ne plus me voir. C’est qu’elle était mignonne quand elle boudait, la p’tite ! Une véritable gamine, en fait ! J’eus un petit rire, ce qui eut pour effet de la faire grogner en plus de me lancer un regard noir ! Le fait d’être installée comme ça dans une chaloupe qui tanguait au gré des vagues ne l’enchantait guère. Il faut dire en même temps que nous étions à pas moins de 5 kilomètres des côtes de Manshon. Le fait que nous devions être récupérés par un équipage pirate expliquait notre position actuelle au beau milieu de la mer… Sans compter que cette chaloupe, nous l’avions volée sans remords au port de Manshon, avant de ramer comme des dingues en pleine nuit. Assis l’un en face de l’autre dans ce qui était une nuit noire, seule une lampe à huile en verre transparent nous offrait une petite lueur. Emmitouflée dans une large couverture, la pauvre naine se gelait les miches malgré ses vêtements plutôt lourds. J’devais avouer avoir froid moi aussi, mais mes pensées étaient focalisées sur le pognon et le business que nous allions pouvoir faire tourner si jamais nous arrivions à mettre la main sur le nid de vaches, loin des radars du Gouvernement Mondial…

- « N-N’empêche que j-j’ai trop froid… »

Souriant, je finis par retirer ma propre couverture pour doubler celle de Lucia qui fut étonnée et surtout touchée par mon geste au point d’avoir les yeux qui brillaient d’admiration. Cependant, elle recommença très vite à me faire la tronche lorsque je lui offris un sourire mutin pour la taquiner. Ça avait été comme ça toute la semaine d’ailleurs. Puisque mon contact ne pouvait pas débarquer du jour au lendemain, la naine et moi avions vécu ensemble dans une chambre d’un motel miteux pendant une semaine. La raison ? Nos têtes valaient cher, surtout pour la pègre locale. Lucia était la clé qui menait vers un gigantesque pactole. Moi… Et bien, j’étais juste un p’tit con qui avait plus ou moins cherché des embrouilles avec une chasseuse de primes évanouie dans la nature ! Rien que ça, oui ! Ladite semaine avait été marrante parce qu’il avait fallu dealer avec la promiscuité et l’ennui ; mais j’avais non seulement réussi à la cerner, mais aussi à créer un lien entre nous. Désormais, elle me mangeait dans la main et mon charme opérait sur elle. J’aurai même pu essayer de l’hypnotiser, mais je n’avais pas eu ce besoin. Avec le recul, je me fis la réflexion que c’était une très bonne chose. Quoi de mieux qu’une relation basée sur concret ?

Puis, soudain, alors que je rêvassais pour ne pas penser au froid dû à la brise marine qui soufflait dans notre zone par à-coups, mon escargophone sonna enfin ! S’il parvenait à capter mon gastéropode portatif, c’est qu’ils étaient enfin dans les parages. Plutôt que de décrocher mon den-den mushi, je m’emparai de mon sac que j’ouvris à la hâte avant de le fouiller pour en sortir une fusée de détresse que j’allumai à l’aide d’un briquet. Après avoir embrasé l’engin pyrotechnique, je le dirigeai vers le ciel et une pétarade sans suivi. Comme un feu d’artifice, un élément incandescent fut alors propulsé dans le ciel, non sans dessiner verticalement une trainée rougeoyante à mesure qu’elle gagnait le ciel. C’est à ce moment-là que je décrochai enfin : « C’est bon pour notre position ? » Qu’avais-je demandé sans même me fendre d’une salutation comme l’usage le voudrait. « Yo man ! C’est bon, on arrive ! Mate un peu à babôrd !  Yoooo ! » La voix du pseudo-rappeur arracha un haussement de sourcil à Lucia toujours assise à sa place, tandis que j’m’étais mis à rire en raccrochant. En quelques mois, c’était certain que Mina Hable ne changerait pas de sitôt ! Il était toujours aussi marrant et prévenant à sa manière. Un brave second.

- « Soulagée ? »

Lucia gonfla ses joues sans rien dire. Elle se leva, arracha mon sac des mains et s’empara de la longue vue que nous avions. A bâbord alors, elle scruta l’horizon et vit un point lumineux au loin. Je suivis également le point qu’elle guettait avant de sortir un fumigène rouge du sac que j’allumai ensuite avant de faire de grands gestes au-dessus de ma tête. Tous ces instruments-là, je les avais achetés du magasin de farces et attrapes en ville. Il fallait avouer qu’ils étaient bien pratiques. De son côté, Lucia, finit par avoir une exclamation enjouée. Mes contacts étaient bien là et fusaient vers notre position. Cela dit, plus le navire pirate approchait et plus le jolly roger du bâtiment était visible. C’est donc la mine déconfite que la naine finit par se retourner vers moi, avant de me demander d’un ton presque sévère : « C’est eux tes contacts, t’es sérieux là ?! » Et là, j’explosai de rire ! Les pirates du Junky en avait fait du chemin… Même si elle semblait les connaitre personnellement ! Lucia, quant à elle soupira longuement, avant de hausser ses épaules. Pas comme si on avait le choix, même si pour ma part, je leur faisais pleinement confiance. J’aurai pu demander à Lucia pourquoi elle faisait cette tête, mais mon petit doigt me disait que j’allais vite le savoir…

Après tout, leur navire n’était plus très loin…
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Une trentaine de minutes plus tard…

- « BAHAHAHAHA ! ÇA FAIT PLAISIR DE TE REVOIR MON CHER NIHIL ! »

- « Pareil mon bon vieux Jobby ! »


Une fois à bord de la caravelle du Junky, nous nous fîmes une accolade comme de bons vieux potes ! Et le pire, c’est que je jouais même pas la comédie ! Pour le coup, j’étais bien content de le revoir. Après une embrassade de quelques secondes, des bourrades amicales et des poignets de main d’hommes forts, nous nous jaugeâmes du regard pendant quelques secondes ! C’est qu’il avait bonne mine, le junky ! Le fric qu’on avait récolté ensemble quelques mois auparavant lui avait fait le plus grand bien ! Il avait toujours cette odeur caractéristique de came sur lui, mais qu’importe. Elle n’était pas insupportable. Du moins, pas pour moi. « Tu pues toujours autant la poudre ! Tu veux pas arrêter vieux schnock ? T’as plus l’âge ! » Ok. Pour la petite Lucia, ça passait clairement pas. Et puis, par la plus mauvaise des manières, j’venais d’avoir la confirmation qu’elle et Jobby se connaissaient bel et bien. Vu le pedigree du loustic, pas vraiment étonnant tout compte fait. Alors qu’il avait encore sa main gauche sur mon épaule, le capitaine du navire dans lequel nous étions serra sa poigne sous le coup d’une certaine irritation et roula ses yeux jusqu’à la petite silhouette de Lucia qui était gaillardement debout derrière moi, les poings sur les hanches. Son air était plus qu’hautain même : il était complètement défiant !

- « Nihil… Ça te dérange pas si j’passe cette foutue gamine par-dessus bord ? On peut très bien faire sans elle, tu sais… » Qu’il me dit avec un sourire aux lèvres qui présageait rien d’bon…

- « C’EST QUI QUE TU TRAITES DE GAMINE ? TU VEUX TE BATTRE SALE DROGUÉ ?! »

- « FERME TA BOITE DE CONSERVE SALE NAINE ! T’AS CRU QU’TU POUVAIS FAIRE QUOI, HEIN ?!! »


Et les voilà partis dans des insultes que j’vais pas prendre la peine de détailler ici. Jobby m’avait écarté de son chemin en me poussant sur l’côté avant de se pointer devant la lilliputienne pour se mettre à beugler sur elle. Cette dernière, sans se laisser faire, avait redressé sa tronche vers le vieillard et s’était mise à son tour à le pourrir comme jamais d’une voix criarde ! La situation aurait pu dégénérer, mais elle était plus drôle qu’autre chose vu les rires de part et d’autre. Même Mina Hable, le second de Jobby s’était approché de moi en silence, sourire aux lèvres avant de me passer une bouteille de rhum de façon totalement détendue. Vu que la scène était plus comique qu’inquiétante, je haussai mes épaules avant de remercier Mina d’un hochement de tête, puis je récupérai la bouteille pour me mettre à boire au goulot en prenant plaisir à les voir se chamailler. Plutôt originales, ces petites retrouvailles. Au moins, je n’avais pas besoin de présenter la rouquine à Jobby, vice-versa, vu que j’avais préféré ne pas détailler la nature de mon besoin à Jobby par escargophone. Va savoir qui aurait pu tracer notre conversation et nuire aux projets que j’avais en tête. Et du coup, il se passa dix bonnes minutes comme ça, avant que la vigie ne gueule depuis son perchoir… « DES MOUETTES A 11 HEURES ! » pour que tout l’monde ne se bouge…

- « Les fumigènes auraient pu suffire, mais j’imagine que la fusée de détresse, c’était trop hein… » Que j’me murmurai à moi-même… Avant qu’on ne prenne le large, direction le nid des vaches !

Trente autres minutes plus tard et après avoir réussi à semer le navire des marines qui venaient vers nous, Jobby nous avaient conduit dans ce qui semblait être son bureau. L’endroit était exigu, poussiéreux, désordonné et mal éclairé, mais qu’importe ! Ça faisait largement l’affaire. L’homme se posa derrière ce qui semblait être un bureau couvert de quelques paperasses et de babioles. Il s’évertua ensuite à se faire une place dans tout le désordre de son mobilier, y plaça un parchemin pas trop poussiéreux avant de sortir une boite métallique de laquelle il extirpa sa poudre. En moins de temps qu’il n’en fallut, il traça trois bons rails de coke et se pencha rapidement pour sniffer bruyamment la première ! « AAAAAAAAAAHHHHH ! » Et sous ce qui semblait être un râle de plaisir, il s’avachit ensuite sur son siège, sourire béat aux lèvres, avant d’nous faire signe qu’on pouvait faire pareil. Lucia grimaça mais garda son calme avant de se poser sur un tonneau. J’avais fait pareil à côté d’elle avec un sourire amusé aux lèvres, tandis que Mina Hable, lui, s’était adossé à un mur presque pourri. C’est que de l’intérieur, il était plutôt vieux le rafiot. Il était p’être temps qu’il s’en achète ou qu’il en vole un autre, mais c’était pas moi qui lui ferait cette remarque…D’ailleurs, j’me fis la réflexion qu’il allait également me falloir moi aussi un navire… Et le bateau qui va avec.

Un sous-marin de préférence…  Mais on n’était pas encore à ce stade. Pour l’heure…

- « Pour être honnête, j’ai cru que t’avais cané toi aussi… Mes condoléances pour ta famille… » Que déclara Jobby à Lucia qui gardait sa mine boudeuse, les joues gonflés. « Et sinon, c’est quoi l’affaire ? »

- « Le nid des vaches est libre… Enfin… Façon de parler. D’après Lucia, les subordonnés des Audifreddi ont tout récupéré et elle a dû s’enfuir. Récupérer le coin, ça me semble bien comme plan en tout cas. »

- « … Mais à deux, c’est sûr que vous pourriez pas tous les liquider. »

- « Voilà. D’autant plus qu’on aura toujours besoin de sous-fifres pour faire tourner l’endroit. L’idée est d’en tuer certains et garder les plus pleutres pour faire tourner l’endroit en mon absence. Lucia en sera l’administratrice puisqu’elle connait bien les rouages de l’endroit, mais j’veux qu’elle soit intouchable quand je partirai ailleurs. »

- « Bahahahaha ! Et t’es d’accord avec ça la naine ? M’dis pas que t’as craqué pour ce fumier d’beau gosse ! »

- « QUOI ?! MOI ?! JAMAIS !! »
Hurla Lucia toute rouge et paniquée à l’idée qu’on puisse croire qu’elle avait succombé à mon charme… Ce qui était manifestement le cas pour nous autres.

- « Bwahahaha ! Tu sais bien choisir tes cibles, Nihil ! J’comprends, j’comprends ! » Qu’admit Jobby avant d’se pencher vers sa deuxième dose qu’il aspira avec tout le bon cœur du monde ! Puis, lorsqu’il reprit ses esprits, il ajouta : « Mais j’te connais ma couille ! Y’a pas que ça hein… ? » Qu’il demanda cette fois-ci avec un œil acéré.

- « T’as déjà entendu parler du trésor de Notre Dame du Crime ? »

- « Ouais, vaguement. Paraitrait que c’est un sacré pacto- » L’espace d’un instant, le vieux camé s’était interrompu, avait ouvert grand les yeux avant d’me regarder ensuite avec un gros sourire. Il percutait.

- « Nihil, on donnera rien à ce vieux schnock ! » Intervint Lucia en croisant les bras sur sa poitrine avant de tourner la tête autre part, les joues gonflés et la mine toujours aussi boudeuse. Soit il lui avait fait une crasse, soit elle détestait la drogue… Voire les deux.

- « Yooo ! Ça s’trouve, les gars qui sont sur place ont récupéré tout le magot, non ? » Demanda Mina, sortant enfin du silence.

- « Ça m’étonnerait vraiment. » Répondit Lucia. « Si mes prévisions sont bonnes, ils sont sans doute entrain de se demander comment sécuriser le nid des vaches pour faire revenir de potentiels clients… »

- « Yooo ! Ouais… J’me souviens. Les fameuses vaches marines là ! On en a bien bavé la première fois le capitaine et moi. T’as beau en tuer une dizaine que tu te retrouves soudainement avec une centaine de bêtes sur le cul. J’imagine que c’est toi qui va nous ouvrir la voie pour ce soir ? »

Lucia acquiesça sans rien dire.

- « D’ailleurs, comment est-ce qu’on fait pour les passer ? » Questionna Jobby, la mine curieuse, prêt à se faire un autre rail…

Mais il n’eut pas le temps, que BOOOOOOOOOOOOOMMMMM !!!! une secousse ébranla brutalement le navire qui vacilla dangereusement sur un côté, avant de se stabiliser de nouveau, non sans tanguer dans tous les sens.

A croire qu’on était déjà arrivés dans la mauvaise zone…
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MEEEEEUUUUUUUUUUUUUHHHH !!!

En plus d’un mugissement monstrueux, des cris d’effroi se firent entendre sur le pont du navire de Jobby. Fallait pas avoir étudié à la Nouvelle Ohara ou être un élève de Vegapunk pour comprendre ce qui s’passait plus haut. Mais en attendant d’aller voir tout ça de nos propres yeux, nous nous levâmes tous en même temps, les mines froissées par des grimaces de douleur et de plaintes. Après tout, le choc et les secousses dont avaient souffert le bâtiment nous avaient projeté dans tous les sens ! Pour ma part, j’avais fini contre l’un des vieux murs du bureau de Jobby sans trop comprendre ce qui m’était arrivé, en plus d’avoir encaissé de plein fouet le petit corps de Lucia qui avait eu la chance d’être amortie par mon bide ! Autant dire que ça avait eu l’effet d’un coup de poing en pleine tronche et que j’avais même failli tomber dans les pommes ! Plutôt que de chercher à m’épousseter ou même m’assurer que je n’avais pas de côtes fêlées ou d’os brisés, j’étais immédiatement sorti du bureau avant de grimper les marches des escaliers qui menaient au pont supérieur. Une fois dehors, mon regard fut accroché par une immense silhouette dans la pénombre qui surplombait la caravelle et semblait nous observer en expirant puissamment par les naseaux. Les quelques torches allumées çà et là sur le navire ne permettaient pas de voir clairement le monstre, mais on avait bel et bien affaire à une vache marine. A croire qu’elles étaient actives même de nuit et qu’elles ne laissaient passer aucun bateau dans les environs…

- « PUTAIN C’EST QUOI CE TRUC ?! »

- « CAAAPITAAAAAAIIIINE ! »

- « ON VA CREVEEEEEEEEER !!!! »


Bon, autour de moi, classique : c’était la panique générale. La plupart des gars faisaient clairement dans leurs frocs ! On aurait dit qu’ils étaient en face d’un roi des mers et la comparaison n’était pas exagérée quand on voyait la taille de la bête et sa capacité certaine à couler notre vieux rafiot. L’un des sous fifres de Jobby, dans la panique, chargea un fusil et ouvrit le feu sur la grosse bestiole à plusieurs reprises ! Oh le con ! Devant sa bêtise, j’m’étais immédiatement mis à courir vers lui pour le plaquer brutalement façon rugbyman, mais le mal était déjà fait : il avait seulement égratigné la vache à quelques endroits çà et là, mais il avait surtout fait du boucan qui eut pour effet de faire émerger d’autres vaches autour de notre navire et en moins de temps qu’il n’en faut pour pester et maudire son sort. Il faut dire qu’en cette nuit noire, la mer était anormalement calme, d’où le fait que les détonations aient carrément surplombé le mugissement perpétuel des vagues, très peu impétueuses en cette soirée. C’était bien la première fois que n’importe quelle personne de ce navire maudirait les vagues ! Devant toute cette foule animalière entourant la caravelle, certains perdirent connaissance, tandis que d’autres retombèrent sur leur cul à force d’avoir les jambes flageolantes sous la peur. A cet instant précis, ils se voyaient tous entrain de couler et de finir dans la gueule de ces grosses bestioles menaçantes. Il y avait de quoi le penser. Mais alors que l’une des vaches amorçait d’ailleurs un mouvement de contre-attaque…

- « ARRÊTEZ-VOUS !!! »

… La voix criarde de Lucia se fit entendre sur un périmètre d’un kilomètre à la ronde au moins ! Elle avait fait son apparition à temps sur le pont accompagné par Jobby qui maugréait derrière elle et de Mina Hable qui, d’une main, essayait de contenir le filet de sang qui coulait depuis son arcade sourcilière. Le pauvre avait dû se manger un mur ou un meuble lorsque nous avions volé dans tous les sens dans le bureau de Jobby. Cela dit, le plus important était que les bêtes s’étaient immobilisées à l’ouïe de Lucia. Cette dernière, d’un pas conquérant et d’un air décidé s’avançait vers le bastingage que visait la vache qui voulait nous charger séance tenante ! Elle fit d’ailleurs un signe à l’animal qui se pencha vers elle et qui sembla ronronner au point de s’approcher assez et se laisser caresser le museau par la naine qui lui répétait des « gentille fifille » comme s’il s’agissait de son animal de compagnie. Et là, il eut une espèce de soulagement général ! Les hommes de Jobby semblaient se rappeler qu’elle les avait elle-même escorté jusqu’au nid des vaches à plusieurs reprises par le passé. Elle maitrisait vraiment ces monstres marins et c’était à se demander comment. Enfin… Pour les autres. Car de mon côté, j’avais fini par le comprendre à travers sa voix : tout comme moi ou le fameux Alaaric Minaro, Lucia maitrisait parfaitement l’hypnose vocale. Plus encore, elle semblait également avoir développé une vraie amitié avec ces monstres qui semblaient eux-mêmes la reconnaitre et l’apprécier à sa juste valeur.

- « Ecartez-vous et dites aux autres de ne pas toucher au navire. Ce sont mes amis, d’accord ? »

Même si elle usait d’un brin d’hypnose dans sa voix, les bêtes et surtout celle qu’elle caressait de la main acquiescèrent et beuglèrent presque gentiment avant de commencer à s’éloigner du navire de l’estropié. Ce dernier, sans pressions, s’était allumé une pipe le sourire aux lèvres. Il devait être habitué à la scène, lui aussi. Pour ma part, je me redressai du gars que j’avais fait tomber et m’époussetai tranquillement. Les hommes de Jobby s’étaient mis à crier de joie un peu partout sur le navire, tandis que Mina Hable, lui, s’envoyait une grosse lampée de son breuvage, satisfait du dénouement, tout comme son capitaine qui fumait une pipe. Alors que ça sautait un peu partout de joie, Lucia, elle, était toujours debout sur la balustrade (qu’elle avait grimpé au préalable pour pouvoir caresser la vache) et continuait de fixer l’horizon, songeuse. Je m’approchai d’elle pour ma part, avant de passer une main dans sa chevelure, non sans lui chuchoter : « Bien joué. » Contrairement à d’habitude, la naine ne broncha pas, sans doute nostalgique de ce temps pas si lointain où elle faisait la passeuse pour le compte de sa famille maintenant six pieds sous terre. J’aurai pu la réconforter, mais j’étais pas spécialement doué pour ce genre de choses. Je pouvais même faire semblant, mais j’étais certain que pour le coup, elle me grillerait. Alors, c’est en silence que j’retirai ma main de ses cheveux et que je la laissai seule. Elle avait peut-être besoin de calme.

- « La sale gosse va bien au moins ? » Que m’demanda Jobby lorsque j’arrivai à sa hauteur.

- « J’imagine que non. Ça doit pas être évident d’avoir perdu ses parents. Ces vaches et le nid, c’est un peu tout c’qu’il lui reste… » Que j’avais répondu en soupirant.

- « T’es étonnement compréhensif. On aurait presque dit qu'ça sent le vécu. » Dit-il en plissant les yeux.

- « T’es devenu un fouineur maintenant ? » Que répondis-je sourire jaune aux lèvres. Jobby haussa les épaules et me fit signe de retourner dans son bureau.

On avait encore des choses à planifier.
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- « ILE EN VUE ! »

Une heure trente plus tard, le navire arrivait enfin vers l’île tant attendue… Ou plutôt l’îlot. Il avait l’air d’un de ces vieux châteaux sinistres qu’on pouvait rencontrer au fin fond de la cambrousse ; et dont les rumeurs superstitieuses attestaient généralement du fait qu’ils étaient hantés. C’était en tout cas l’impression que j’avais à travers le hublot du bureau de Jobby qui avait fini dans les vapes à force de sniffer. Le pauvre peinait maintenant à se réveiller. Il avait eu le nez creux tout à l’heure, preuve qu’on ne la lui faisait pas. Un vieux renard, clairement ! Les gens qui avaient mon respect étaient vraiment très rares et j’devais avouer qu’il faisait maintenant partie de ces rares personnes. Un sourire barra mes lèvres en le voyant bailler à s’en décrocher la mâchoire, tandis que Mina Hable se tenait à côté de lui en s’envoyant quelques lampées de son breuvage. Le dude n’était même pas saoul alors qu’il buvait depuis l’incident des vaches marines. Quelle vie quand même ! A eux deux, ils formaient une bande de lascars que j’aurai bien aimé avoir sous ma coupe, carrément. Un projet qui pourrait se concrétiser si j’prenais un peu plus d’envergure… Mais aussi de puissance. Il faut dire que j’étais clairement plus le même depuis le début de l’année… Et que j’étais pas prêt de m’arrêter, maintenant que les temps glorieux me souriaient…

C’est donc sur cette pensée que je quittai la pièce poussiéreuse et mal éclairée pour monter tout doucement vers le pont. Une fois dehors, l’air frais vint me faire frissonner un instant avant que mon regard ne soit une nouvelle fois happé par l’immense îlot qui me faisait face. L’endroit semblait grouiller de vie, puisqu’il était illuminé çà et là, par endroits. C’était d’ailleurs ces faibles lueurs qui nous avaient permis de l’approcher sans trop de mal en dépit de la nuit noire qui nous entourait. Le ciel avait décidé de bouder la lune, aujourd’hui, ce qui ne facilitait généralement pas les conditions de navigation. Ceci dit, entre les loups de mers qui accompagnaient Jobby et la maitresse des vaches marines, il y avait de quoi dormir sur ses deux oreilles ! En parlant d’ailleurs de Lucia, cette dernière s’était carrément hissée sur la proue du navire et semblait obnubilé par la silhouette sinistre du gigantesque caillou droit devant. Après plusieurs mois de cavale, elle rentrait enfin chez elle, sur l’île qui l’avait vu grandir. J’imaginais aisément qu’elle devait la tête pleine d’idées, mais aussi une certaine appréhension puisque les résidents actuels avaient voulu sa mort. C’était donc l’occasion pour moi de marquer encore plus de point en m’assurant sa loyauté à travers une éventuelle grosse baston en perspectives. Halala ! Qu’est-ce qui fallait pas faire pour du fric…

Au bout d’une trentaine de minutes, le navire finit par accoster au mini-port de l’îlot. Vu de près, il était quand même plutôt impressionnant. Au-delà des quelques constructions sur pilotis, force était de constater que l’ingéniosité de la famille Audifreddi était sans commune mesure. Ils avaient réussi à adosser de multiples cabanes et bungalows à même la roche. J’avais certes vu des constructions bien plus complexes que celles-ci ; mais ces dernières m’épataient tout de même parce qu’elles avaient été faites avec les moyens du bord et cela se ressentait. Dans cette architecture rustique, il n’y avait pas que de l’ingéniosité, mais un amour manifeste de la débrouillardise et de la nature que j’pouvais ressentir. L’îlot en soit n’était absolument pas dégradé. Les occupants s’étaient juste adaptés à ce qu’il pouvait offrir, tout simplement. Autour du gros caillou donc, une mini-ville sur pilotis s’étendait petit à petit et semblait grouiller de monde vu les voix qu’on entendait depuis le pont du navire. Très clairement, l’endroit était fait pour moi. Il serait tout simplement ma base sur les mers Blues ; parce que oui, j’avais l’ambition de retourner sur Grand Line pour accroitre ma force, mais aussi mes possessions. Mais une chose à la fois, évidemment. Il était temps de jeter l’ancre et de descendre nous confronter aux nouveaux propriétaires du coin…

Du fait de notre arrivée plutôt inhabituelle vu qu’il n’y avait pratiquement plus de passeurs pour faire fonctionner l’île comme il se doit, notre présence suscita de l’engouement. Qui plus est, le pavillon de Jobby n’était pas inconnu des lieux puisqu’il était plusieurs fois venu faire affaire dans le coin. De ce fait, rien qu’au port, ça grouillait de monde. Pas moins d’une cinquantaine voire une centaine de personnes. Quelques-uns se battaient même pour se faire une place, histoire d’avoir la chance de nous convaincre d’acheter ce qui leur restait de marchandises. Autant dire que c’était déjà chaotique à notre descente. De ce fait, ça criait à tue-tête pour attirer notre attention et c’était vraiment invivable. Cependant, une voix gueula plus fort que les autres. « HEY ! MAIS C’EST LUCIA PUTAIN ! » Et là, le silence fut. La naine n’était clairement pas une inconnue ici. C’était même tout le contraire ! Mais à voir les mines déconfites qui se froissèrent très rapidement, tout portait à croire que ce que nous avions anticipé comme scénario allait inévitablement se dérouler. C’était presque triste comme constat et surtout con comme réaction. Se priver de leur « passeuse » revenait à gâcher le potentiel de ce lieu qui pouvait pourtant encore bien servir ! Tout compte fait, m’approprier cet îlot n’était pas une mauvaise chose…

- « BRULONS-LA ! »

- « NON, ON VA LA DEMEMBRER D’ABORD ! PUIS ON LA DECOUPERA EN MORCEAUX POUR NOURRIR NOS CHIENS ! »

- « NAN, ON LA COULE DANS LA MER ET ON EN PARLE PLUS ! »

- « VAUT MIEUX LA TORTURER POUR TOUT C’QUE SA SATANÉE FAMILLE NOUS A FAIT ! »


PAAN !!!!

Au beau milieu de ces brouhaha nourris par toutes ces voix criardes, une détonation s’en suivit…

Et l’un des gueulards, tomba à la renverse, raide mort, d’une balle reçue en pleine tête.

Le silence se fit aussitôt, avant que les regards se détournent du cadavre frais vers ma bibi. Vers ma main, plus précisément ; Main qui tenait l’arme à feu fumante que j’avais chourré instinctivement à Jobby à mes côtés…

- « Désolé les gars. Vous étiez trop bruyants pour le coup. C’est juste que non, ça va pas être possible. Lucia va non seulement rester en vie, mais j’vous annonce que j’deviens le propriétaire du coin. » Annonçais-je tout sourire.

De quoi méduser et nos vis-à-vis, Jobby (surtout pour l’arme que j’lui avais chourré) et même Lucia au bord des larmes et toute tremblante à mes côtés…

- « Nihil, pour vous servir, messieurs dames. J'suppose que vous avez déjà dû entendre mon nom çà et là hein ? Mais vous pouvez m’appeler boss, ça marche aussi ! »
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- « TUEEEEEEEEEEEEEEEEEZ-LES ! »

Et voilà. Mêlée générale ! J’avais mis le feu aux poudres, mais c’était inévitable. Tant pis ! Les hommes de Jobby furent très réactifs et se jetèrent sur les locaux qui nous faisaient face et qui voulaient notre mort. En un rien de temps, des cris de rage et de douleur se firent entendre un peu partout et le sang commença à couler à flot. Mais certainement pas le nôtre, oh que non ! En effet, les pirates de Jobby étaient pour la plupart des habitués de la castagne, tandis que ceux qui nous faisaient face étaient pour la plupart des commerçants qui ne maitrisaient pas forcément la science du combat sous toutes ses coutures. De ce fait, ils morflaient salement et des têtes volèrent un peu partout. Leur avantage numérique n’en était presque plus un, à force. Pour ma part, j’avais soulevé Lucia comme un sac à patates avant de me mettre un peu plus en retrait, surtout que Jobby m’avait arraché son arme à feu avant de descendre un bon nombre de personnes en se marrant comme un fumier ! Là, il était tout simplement dans son élément ! Lucia, pour sa part, était perdue. Loin d’être une sanguinaire (sans pour autant être une enfant de cœur), elle déplorait ce dénouement tout en étant soulagée d’être très clairement protégée par bibi et les pirates du camé. D’ailleurs, c’est en la posant à mes côtés que j’passai une main dans sa chevelure.

- « T’en fais pas. On est pas là pour tous les décimer, mais cette bataille va nous permettre de mettre les choses au clair pour les autres. »

Toujours larmoyante, la naine renifla bruyamment et acquiesça silencieusement en restant à mes côtés. Si habituellement, elle se serait elle-même jetée dans la bataille en sortant son marteau, les choses étaient différentes sur le nid des vaches. Je sentais bien qu’elle avait de la peine pour certains de ces gens qu’elle avait côtoyé sans pourtant les prendre de haut. D’ailleurs, de ce que j’avais même compris de Jobby lorsque nous étions dans la cabine, Lucia était la moins sadique de toute sa famille. Un peu cruche sur les bords, mais pas la plus mauvaise, puisqu’elle ne traitait jamais vraiment mal ces gens -sauf si on la cherchait un peu trop, bien évidemment. C’était donc à se demander pourquoi cette partie des locaux lui vouaient une haine disproportionnée au lieu d’essayer de l’inclure dans les affaires du coin. Peut-être parce qu’ils se sentaient illégitimes à gérer un endroit quasi-désert en sa présence ? Hormis le fait de vouloir tout rafler et de se venger sur les traitements ignobles de sa défunte famille, c’était surement l’une des raisons les plus probables. Triste que d’en arriver là et de ne pas savoir faire la part des choses. Y’avait plus qu’à séparer le bon grain de l’ivraie parmi ces gens-là, tout simplement. Le champ de bataille requérait aussi ma présence, ne serait-ce que pour montrer à ces gens de quel bois j’me chauffais…

- « Remonte sur le navire. Quand on aura tout nettoyé, tu pourras redescendre. »

Lucia ne se fit pas prier et remonta immédiatement se mettre à l’abri, tandis que je me jetai également dans la bataille, entre plusieurs personnes qui se battaient déjà farouchement. Après avoir esquivé un coup d’estoc d’un ennemi, je lui flanquai un gros coup dans les couilles ce qui le força à lâcher son épée que je récupérai pour lui trancher la tête. Bon, le maniement des lames, c’était pas du tout mon fort, mais faut faire avec ce qu’on a. L’arme me permit d’ailleurs de contrer quelques attaques et d’assener des coups brutaux devant moi puisque je tailladai dans le lard ! Une gorge tranchée par ci, un ventre ouvert par-là, autant dire que j’faisais clairement pas dans la dentelle ! Il m’arrivait bien entendu de manger brutalement des coups de poings ou kicks en pleine face, mais pas de quoi me désarçonner pour autant puisque j’me débattais comme un beau diable çà et là. Puis, à un moment donné, j’fis un signe à Jobby qui n’était pas trop loin et ce dernier enchaina plusieurs coups de semonces dans les airs. Aussitôt, tous les pirates du camé bouchèrent leurs oreilles via divers moyens, avant que… « AAAAAAAAAAAAAAAH !!!!! » … Mon cri strident ne fasse entendre sur un bon kilomètre à la ronde ! Bien évidemment, nos ennemis eurent pratiquement tous leurs tympans qui vrillèrent, avant que ce ne soit l’hécatombe…

Ils étaient tous tombés comme des mouches sans trop comprendre pourquoi.

De quoi permettre à mes alliés de les achever sans effort et ce sous le regard effrayé des observateurs planqués dans la plupart des bâtisses environnantes.

- « Putain, t’es vraiment un chanteur d’opérette, toi… »

Jobby riait jaune. S’il s’était cette fois-ci protégé les esgourdes comme ses hommes, il se souvint néanmoins de notre première rencontre où il avait gouté à cette capacité malgré lui. D’ailleurs, il était l’un des rares à s’être rapidement relevé avant de fuir. C’est dire à quel point mon acolyte était un dur à cuire. Pour ma part, j’eus un rire moqueur avant de m’avancer pour planter ma lame en plein cœur d’une de mes victimes qui gisaient au sol et qui gigotait à cause de l’effet de mon cri dans son oreille interne pratiquement bousillé. Plus de souffrance dans l’eau delà. Sa mort était une sorte de délivrance, si on voulait relativiser. Y’avait plus qu’à m’appeler Saint Nihil. J'en tuais alors une multitude à l'aide de Jobby et ses hommes. Une centaine de personne ou p'être plus ? Va savoir ! Mais alors qu’on pensait qu’on avait fait le plus gros du travail, une silhouette massive se dessina entre des bâtiments et se glissait manifestement vers notre direction. On devait taper dans les 10 mètres, facile. Bientôt, il apparut à nous, armé d’un gros gourdin et sa mine aussi effroyable que patibulaire ne disait rien qui vaille. Faut croire que c’était le dernier gros obstacle auquel on allait se heurter avant de pacifier l’endroit. Pile comme me l’avait dit Lucia. Ancien garde de corps des Audifreddi, ce demi-géant qui nous faisait maintenant face était le boss des environs. Incontestablement. Vu sa dégaine, tu m’étonnes que Lucia et les clients habituels aient déserté l’endroit…

- « Pas b’soin d’explication. J’vais tous vous écraser… » Qu’il finit par dire de sa voix rocailleuse…

Argo, 1800 dorikis, demi-géant de 10 mètres, boss autoproclamé du nid.:


Dernière édition par Nihil le Ven 19 Juil 2024 - 0:18, édité 1 fois
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Cela étant dit…

« Agenouille-toi. » Qu’avais-je dit à l’égard du titan alors qu’un silence oppressant s’installait après son apparition.

Un claquement de doigts de ma part s’en suivit tout d’suite après. Ma phrase surprit tout le monde autour de moi. Qu’il s’agisse des pirates du Junky ou même des sous-merdes qui avaient suivi leur champion et qui nous faisaient maintenant face. D’ailleurs, peu après mon « ordre », ces derniers explosèrent de rire, me prenant certainement pour un fou ou un type qui devait avoir perdu la tête après s’être mangé plusieurs coups dans une bataille qui semblait ne plus tourner en notre faveur. Il fallait avouer en même temps que j’avais pas fière allure. Je saignais par endroits et mes vêtements aussi froissés que déchirés me donnaient l’air d’un vrai chiffonnier malgré ma plastique toujours avantageuse. De mon côté, les forbans du camé, l’air complètement hagard, se demandaient ce qui m’arrivait. Seuls Jobby et Mina froncèrent leurs sourcils, persuadés que je manigançais quelque chose. Et puis, d’un seul coup, il se produisit l’impensable : le grand dadais de 10 mètres de haut, sans comprendre ce qui lui arrivait, fléchit son genou droit, puis le second de sorte à se mettre à genoux devant nous. C’était bien ce que j’pensais : il valait clairement pas plus de la moitié de ma force. Rien qu’un grand épouvantail… Et dire qu’il faisait pourtant peur à la naine… In fine, il ne s’agissait que d’une énième arnaque comme on pouvait en croiser partout…

- « Jette ton arme derrière toi et approche ton cou près de moi… »

Et comme une poupée désarticulée, le demi-géant jeta alors son gourdin par-dessus son épaule, écrasant au passage une partie de ses suivants qui n’avaient pas eu le temps de fuir. Puis, docilement, comme un animal, approcha sa gueule de la mienne et me tendit son cou comme un agneau en sacrifice acceptant son sort. Sourire aux lèvres, je lui tranchai la gorge comme on égorgerait un bélier durant une fête religieuse. Une quantité prodigieuse d’hémoglobine se déversa au sol, m’éclaboussant comme jamais au passage, le tout sous le regard horrifié de tous : Jobby, Mina, leurs larbins, Lucia, les locaux qui pouvaient pas nous voir… Bref, tout l’monde ! Le pauvre géant était complètement tombé à plat ventre tout en se tenant la gorge salement tranchée pour contenir tout le sang qu’il perdait, mais rien à faire. Sa mort était inéluctable. Son agonie dura alors une bonne poignée de minutes sans que personne ne daigne agir, tant les esprits semblaient choqués devant sa mise à mort. En même temps, qui aurait pu faire grand-chose devant un titan pareil qui gigotait un peu partout au sol et qui se vidait de son sang encore et encore ? Ses borborygmes et ses agitations brisèrent par à-coups le silence presque mortuaire qui s’était installés, jusqu’à ce qu’il finisse enfin par rendre l’âme. Une mort horrible à la hauteur du message que j’voulais véhiculer…

De quoi faire peur tous ceux qui m’entouraient. Même Min Hable et Lucia en frissonnaient d’effroi.

Le seul qui avait finalement regagné son calme habituel, c’était Jobby. Et c’est lui qui finit par l’ouvrir d’ailleurs…

- « L’adversaire idéal hein ? Une chance sur deux que ça marchait, ton truc. C’est de l’hypnose comme la gamine, c’est ça ? »

- « Héhéhéhé, t’as fini par capter, on dirait ! »

- « Disons que j’avais un doute depuis ton coup monté à Suna Land. T’es vraiment l’enfoiré que tu penses être, bahahahaha ! »


Et sous le rire d’un Jobby qui m’avaient démasqué, je haussai les épaules non sans lâcher un soupir amusé. Ses pirates étaient toujours aussi choqués qu’impressionnés. Lucia, quant à elle, restait silencieuse sur le navire, ayant agrippé une rambarde comme si sa vie en dépendait. C’était la suite qui serait déterminante, pour elle. L’ayant senti après avoir jeté un coup d’œil vers elle, j’effectuai ensuite un saut périlleux pour me hisser sur le crâne du demi-géant que je souillais de ma présence avant d’avoir une vue sur tout le monde, vice-versa. La question qui s’en suivit fut sans équivoque : « Qui veut subir le même sort ? » Pas un mot de plus. Pas un ordre. Rien qu’une question. A priori banale, certes, mais ô combien déterminante ! Devant ma gueule à présent effrayante, tous nos adversaires lâchèrent leurs armes dans des bruissements sourds qui se poursuivirent pendant une bonne trentaine de secondes. Tous comprirent qu’ils n’avaient aucune chance. Pas devant la défaite cuisante et ultra-facile que je venais d’infliger à cet homme qui était certainement plus fort que lui. Oui oui. Toutes les aventures n’étaient pas que des récits épiques, typés shonens et teintées d’une difficulté maximale. Certaines étaient bien plus faciles que d’autres et celle-là était de cet acabit : peu difficile. J’venais de faire un échec et mat, de quoi me satisfaire intérieurement !

- « On a peut-être mal commencé notre histoire ensemble, mais on peut certainement changer les choses pour un avenir commun et meilleur. Constatez vous-même : Qu’est-ce que vous pouvez espérer de ce recoin déserté par tous vos clients ? A l’extérieur, y’a plus que des rumeurs sordides sur vous et la marine pourrait débarquer d’un jour à l’autre pour tout raser. Vous comptiez vraiment sur cet énergumène pour vous protéger ?! » Qu’avais-je dit en piétinant à plusieurs reprises le géant sous mes pieds. La plupart des locaux déglutirent à l’idée. Bien. Mon discours passait tout doucement. « Lucia n’a jamais été votre ennemi. Elle était peut-être une Audifreddi mais qui d’entre vous a-t-elle déjà maltraité comme les membres de sa défunte famille ? Et sans ses compétences, comment est-ce que vous comptez escorter vos clients les plus importants jusqu’ici, hein ?! » Là, il eut des murmures, puis quelques hochements de tête… « J'suis pas ce géant. J’vais contraindre personne à travailler pour moi et Lucia. J’irai même plus loin : ceux qui veulent s’en aller peuvent faire leurs valises. Aucun mal ne leur sera fait. Mais ceux qui veulent travailler pour moi, avoir mon réseau, mes conseils, ma protection, une plus grande marge de manœuvre dans l’business et baigner h24 dans du fric, ceux-là qu’ils lèvent le poing ! Parce que j’vous garantis une chose : C’est ensemble qu’on fera tout : on réussira ensemble, et on crèvera ensemble ! »

A la suite de mon laïus quasi improvisé, je levai le poing droit au-dessus de ma tête, l’air déterminé !

Petit à petit, seconde après seconde, des portes et des fenêtres s’ouvrirent… Des sourires fleurirent… Des airs déterminés se dessinèrent…

Et tous, comme un seul homme, levèrent les poings.
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Une heure plus tard…

- « On réussira ensemble, et on crèvera ensemble. Putain, t’es vraiment un chien, Nihil ! »

- « Bah, ça a été convaincant non ? Tu t’attends à quoi ? A un discours politique comme si j’parlais à des bourges et aristos ? »


Après ma réponse à Jobby, nous échangeâmes un regard, avant de nous bidonner comme des baleines ! Y’avait pas à dire, avoir un type qui nous comprenait de A à Z, y’avait rien d’mieux ! Il était un peu comme le grand frère ou l’meilleur pote que j’avais jamais eu. Assis sur des caisses, nous regardions faire Lucia qui faisait un tour du propriétaire de tout le nid et qui réorganisait au mieux tout le monde sur place. Plutôt que d’avoir débité un discours fondé sur la peur, j’avais mis en avant la solidarité et c’était surtout ça qui avait touché les cœurs des uns et des autres qui durent de toute façon se rendre à l’évidence : sans Lucia et sans un type providentiel comme bibi, ils couraient tous à la ruine voire à la fin. J’étais donc le rayon de lumière ou encore cette étincelle d’espoir qui venait illuminer leur monde morne et sans aucune perspective d’avenir. Les voir donc s’activer comme une fourmilière très bien organisée m’faisait plaisir et me confortait dans le fait que j’avais eu les mots justes et que j’étais venu au bon moment. La mort spectaculaire du géant, ainsi que mes différentes compétences en avaient effrayé plus d’un… Mais les avait également confortés dans le fait que j’étais assez fort pour les défendre. Un nouveau patron puissant, séduisant qui à la tchatche et qui promet monts et merveilles, forcément, ça captive…

- « C’est quoi le plan maintenant, yooo ?! » Vint me demander Mina Hable, alors que ses hommes aidaient les locaux à repousser le corps massif du géant que j’avais égorgé à la mer. Autant que les poissons bouffent son corps hein.

- « Je vais maintenant vous conduire à la cave qui cache les trésors. Mais elle est truffée de quelques pièges que même moi je ne connais pas. » Intervint à son tour Lucia qui avait fini par nous rejoindre, sourire aux lèvres.

- « T’as l’air bien contente toi, maintenant que t’as un protecteur attitré… »

- « Ferme ta gueule, sale vioque ! »


Et voilà que Jobby et Lucia recommencèrent à se chamailler comme d’habitude. Je les laissai faire pendant une minute ou deux avant que Lucia ne se décide à se calmer et nous fasse signe de la suivre. Par précaution, Mina Hable fit signe à une dizaine d’hommes de venir avec nous et voilà que nous prîmes la direction des dédales du nid. Après s’être armés de torches et après avoir emprunté des chemins obscurs et quelquefois étroits, nous arrivâmes devant une vieille grange qu’elle ouvrit sans perdre de temps. Poussiéreuse comme jamais, l’intérieur contenait un bric-à-brac faisant du lieu une sorte débarras. Rapidement, sous ses ordres, les sbires de Jobby se débarrassèrent d’un certain nombre d’objet… Qui cachèrent une trappe. Une putain de trappe ! « C’est ici que le trésor se cache. Y’a une cave tout au fond, qu’il parait… Mais j’en sais pas plus. Et si ça se trouve, il n’y a rien, hihihi ! » Bon ok, la p’tite avait voulu détendre l’atmosphère… Mais lorsqu’elle se retourna pour vos nos gueules presque déformées par la colère, elle se ravisa en se confondant en excuses. Même la mienne lui avait fait peur, surtout après tout le temps que j’avais passé sur cette histoire. Fallait vraiment qu’il y ait ce qu’on cherchait au bout, parce que ça risquait de ne pas bien s’passer. Pas de quoi nous décourager, puisque les pirates ouvrirent finalement la trappe et…

CLIC !

Un mécanisme se fit entendre, avant qu’une flèche ne vole vers nous… Ou plutôt droit vers la pauvre Lucia qui n’eut pas le temps de bouger. Heureusement à ses côtés, j’eus le temps de réagir à temps et c’est d’un mouvement réflexe que j’usai de mon poing gauche pour dévier la grosse flèche qui partit se ficher autre part. Malheureusement, le projectile m’errafla et me fit salement saigner, si bien que la pauvre naine se mit à paniquer en balbutiant, au bord des larmes ! Elle eut tout de même la bonne idée de déchirer un pan de ses vêtements pour venir immédiatement contenir le saignement et me faire une sorte de garrot. L’un des hommes de Jobby récupéra la flèche et la snifa, avant de grincer des dents : « Elle est empoisonnée, Nihil. Faudrait retourner au navire, j’ai quelques petits antid- » Un signe de main de ma part le coupa, avant que celui qui semblait être le toubib de l’équipage du camé ne déduise instantanément « Mithridatisé ? » Ce à quoi je lui répondis par un hochement de tête et un sourire. Ce dernier eut un soupir et Jobby se mit à s’esclaffer, ce qui perdit la pauvre Lucia qui semblait toujours inquiète. Néanmoins, une tape sur son épaule de ma part s’en suivit avant que je ne me dirige en premier vers les escaliers que présentaient la trappe ouverte. Temps d’aller récupérer notre dû, hein !

- « Allez, suivez-moi ! J’vais être votre bouclier humain ! » Que j’leur avais dit avec un sourire…

Et c’est sur cette phrase que nous nous enfonçâmes dans les souterrains du nid…

Et quel parcours ! En peut-être une bonne heure (j’exagère à peine !), on aura tout eu : le supplément de flèches empoisonnées ? Check ! Les trappes  qui s’ouvrent brusquement sur un certain poids pour laisser tomber les victimes sur des pals longs de 5 bons mètres ? Check ! Les serpents qui tombent du plafond ? Check ! Les murs qui se rapprochent les uns des autres pour vous écraser ? Check. L’eau qui remonte dans une salle condamnée où il faut composer un code pour ouvrir la porte suivante ? Check… Bref, en une heure, on aura clairement tout vu, surtout pour un simple souterrain qui menait à une cave et dont le chemin était carrément linéaire. Finalement, c’est en n’y croyant plus qu’on est finalement arrivés à la caverne d’Ali Baba. Avec la seule torche qu’on avait réussi à garder intacte dans nos périlleuses aventures, nous allumâmes les vieilles torches de part et d’autre de sorte dans la salle aux trésors, de sorte à l’éclairer et voir enfin de très gros coffres entreposés tout au fond. 5 caisses pour être précis. Après avoir jeté des pierres dessus pour être sûr qu’il n’y avait pas un autre traquenard quelque part, les pirates de Jobby partir bousiller les cadenas dessus, avant de les ouvrir et de rester bouche bée. Et lorsqu’ils se retournèrent quelques secondes plus tard vers nous avec le sourire, tout le groupe comprit aussitôt !
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- « Putain de merde… »

Jobby m’ôta les mots de la bouche alors qu’on s’était également rapprochés des coffres. Pour le coup, c’était la bonne expression. Putain de merde.
- « Y’en a XXX millions là… »

« Ah bah oui, on parle du fameux trésor de Notre Dame du Crime et j’comprends pourquoi… »

- « Finalement, c’était pas un mauvais plan d’ramener la petiote ici. »

- « QUI EST-CE QUE TU TRAITES DE PETITE SALE VIOQUE ?! »


Et pendant que Jobby se chamaillait une nouvelle fois avec Lucia, je posai mes mains sur ma tête, comme si j’y croyais. Tous les coffres étaient bourrés d’oseille. Des berrys en veux-tu en voilà ! C’était fou ! Même dans mes années au Cipher Pol ou à la mafia de North, j’avais jamais vu autant de blés en un seul endroit ! Tu m’étonnes que les Audifreddi aient truffé l’endroit de pièges en le gardant précieusement secret… Hormis cette incroyable découverte, l’un des hommes de Jobby semblait avoir trouvé une sorte de compteur pour bloquer/stopper/arrêter les pièges. Une bonne nouvelle pour le chemin retour…

- « Ça s’fête avec d’la gnôle ça, yoooo ! »

- « Et de la came ! Beaucoup de came ! »

- « Vous êtes vraiment pitoyables… »

- « Bon allez, on doit s’partager tout ça les gars ! Une caisse pour soudoyer toute la populace du nid, une autre caisse à injecter dans la rénovation du coin et on se partage équitablement les 3 autres ! Deal ? »


- « DEEEEAAAAALLLL !!!! » Qu’ils crièrent tous en chœur !

Voilà ce qu’on appelle une affaire rondement bien menée ! Et un trésor, un !

C'est à l'aube d'ailleurs qu'on ressortit avec les caisses avant de faire une distribution de fric à tous les survivants qui nous avaient sagement attendu. Y'avait qu'à voir comment ils étaient heureux de recevoir chacun un gros pactole pour comprendre qu'ils me seraient dorénavant et plus que jamais dévoués ! Il y avait vraiment eu de quoi acheter mais surtout consolider leur fidélité à mon égard, mais aussi à celui de Lucia dont ils semblaient ne plus souhaiter aucun mal. L'argent adoucit les moeurs, c'est bien connu !

Là dessus, c'était devenu clair et net : J'étais officiellement le maitre des lieux !

Et comme convenu, avec Jobby et Lucia, nous nous repartîmes le reste du fric après avoir retiré ce qui allait également me servir à retaper les lieux et à en refaire un sanctuaire du crime ou plutôt un nouveau marché noir d'un tout nouveau genre !

L'avenir promettait vraiment !
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