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Henri Dicule, le retour de la vengeance

Dans un long et profond sommeil, Camillius s’était installé sur un tas de berries regroupées au fond de la cale du bateau. Le même tas qu’il avait confectionné avec attention, prenant soin à toujours sélectionner les pièces les plus brillantes et à réclamer sa part en petite coupure. Car les bouts de papier appelé billet, cela ne l'intéressait pas. Non. Lui il aimait le brillant, le pimpant. Les pièces reluisantes et les joyaux colorés. Et ce n’était que de cela qu’était composée sa trésorerie. Trésorerie qui commençait à peser dans le fond du bateau, tant les économies du dragon étaient importantes.

Les remarques de ses camarades sur la situation ne l'empêchaient sûrement pas de dormir paisiblement sur son trésor, rappelant à tous que malgré l’apparence, il n’avait rien d’humanoïde. Et si ses rêves étaient bordés de massacre d'humains et d’une reconquête de ses îles perdues, ils étaient rapidement envahis d’une substance gélatineuse et humide. Le dragon se réveillait alors en sursaut, dégoûté par cette vision d’horreur dans son paysage idyllique, pour constater que la raison de l’interruption de son sommeil provenait avant tout de la présence de Bob, l’animal jaune et mou de Bjorn qui était venu se coller contre lui pour chercher chaleur et réconfort. Cependant, la substance étrange et particulièrement acide composant le slime avait commencé à attaquer le métal des berries et dans une expression passant de surprise à colère, Camillius attrapa comme il pouvait la créature informe.

Et remontant avec hâte sur le pont du navire, il gesticulait pour éviter de perdre des mains l’animal gélatineux qui ne cessait de lui glisser entre les doigts. Puis il criait :

- “Putain Bjorn ! Ton truc dégueu mange mes pièces ! Tu me dois 100 000 Berries !”

Avec aplomb, il réclamait réparation sans même savoir combien d’argent il avait perdu avant d’ouvrir les yeux au contacte de Bob. Et alors que Bjorn finissait par le rejoindre, Camillius lui jetait la créature comme il pouvait.

- “Garde ton truc loin de ma thune !”
- “Si tu les avais rangés dans un coffre comme on te l’a demandé plusieurs fois, tu n’aurais pas ce genre de problème.”
- "Gniah gniah gniah."


Ces mots qui faisaient alors grogner le dragon provenaient d’Arondel. Une membre de l’équipage, navigatrice et surtout, une trois-yeux parfaitement désagréable qu’après Camillius. Elle s’était installée un petit transat sur le bord du pont, profitant du soleil de la crique pour bronzer un peu et s’offrir du repos mérité. Car depuis peu, c’était dans les eaux de Tanuki que l’équipage avait fait escale, le temps de se faire oublier un peu suites aux précédents conflits avec la marine et surtout, de panser leur blessure. Les silencieux avaient pris le temps d’assurer les quelques réparations du bateau, de le nettoyer, de lui rendre un état plus qu’acceptable après ces mois à naviguer au travers de NorthBlue. Mais pour le dragon, tout cela n’était qu’ennuyeux. Ce n’était pas pour rien qu’il passait son temps dans la cale, à ronfler sur son tas d’or. Rien de ce que proposait l’équipage ne l'intéressait en surface. Et en plus, il avait fini le dernier marine qui fermentait dans son réfrigérateur personnel et ne pouvait plus noyer son ennuie dans la nourriture. Chien de vie.
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Cela faisait maintenant plusieurs minutes que Bristass s'affairait à me soigner. Bandages imbibés de baumes et plantes médicinales étaient sorties, ayant refusé toute piqûre de sa part. Soi-disant que ma guérison n'en serait que plus rapide, cependant je n'avais pas encore assez confiance en l'homme pour le laisser m'inoculer quoi que ce soit. J'avais plusieurs côtes brisées et d'autres sûrement fissurées à en juger par la douleur, sans parler des innombrables hématomes qui se faisaient néanmoins discrets sous ma peau grise. Si nous nous étions bien sorti pour notre fuite sur Zaun, l'affrontement avec Sissi m'avait clairement laissé un goût amer en bouche. Alors que le médecin finissait de m'expliquer comment infuser au mieux ses herbes pour en maximiser les effets, la voix du dragon interrompit la discussion, me jetant à mi distance le slime qui se contenta de s'écraser sur le plancher avant de se recomposer et de venir se blottir contre moi.

"- Si t'arrives à pas faire capoter la prochaine mission, alors je te rembourserai." lui répondis-je avec sincérité.

On avait beau s'en sortir à chaque fois, parfois de justesse, le dragon était quand même l'élément le plus imprévisible et problématique du groupe. Peut être qu'avec l'appât du gain, il se concentrera sur le plan la prochaine fois.

"- Et sois plus gentil avec Bob, il ne ressent peut être pas la douleur mais tes actes lui brisent le cœur !" rétorquai-je alors que Camillius avait déjà commencé à tourner les talons.

En effet, depuis notre départ de Zaun, je n'avais éprouvé que de la fascination pour la créature. Bristass, fervent connaisseur du marché noir, me raconta que le vendeur lui avait déjà parlé de la créature, ayant même essayé de le lui refourguer pour des expériences. Mais sa composition avait détruit toute tentative d'expérience, faisant marcher sa garantie il le lui aurait alors rendu. Créé dans une usine insalubre, ce dernier semblait dénué de toute sensation physique en dehors d'aimer les températures extrêmes, raison précise pour laquelle le blob alternait entre Camillius et Bjorn pour quémander de l'attention. Malgré toutes les expériences que nous avons essayé avec lui, comme le jeter du haut de la vigie, Bob parvenait toujours à se regrouper pour former cette masse difforme qui lui était si caractéristique. Après plusieurs minutes à caresser la créature de mes mains glacées, je le laissais vaquer à ses occupations alors que j'entretenais mes armes pour la première fois depuis un moment.

"- Tu devrais profiter du bon temps, ça fait un moment qu'on a pas profité d'un tel calme." me conseilla Arondel, les pieds toujours en éventail.

"- Je te remercie Arondel, mais je préfère être prévoyant, et je prends tout autant de plaisir à soigner mon arsenal, n'aie crainte." lui rétorquai-je, tout en buvant une gorgée d'alcool infusé avec les herbes de Bristass. Il n'avait jamais précisé dans quoi il fallait les faire infuser après tout.
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Davinia émergea de la cabine du capitaine, sa tenue plus décontractée que d'habitude, reflétant l'ambiance de détente qui régnait sur le navire. Vêtue d'un pantalon ajusté et d'une chemise légère, elle avait remplacé son habituel uniforme strict pour quelque chose de plus confortable. Ses cheveux, habituellement noués, tombent maintenant librement autour de son visage et son troisième œil était parfaitement visible. Elle passe une main dans ces cheveux sombre, replaçant distraitement des mèches rebelles. En descendant sur le pont, elle fait signe à ses membres d'équipage de se rassembler, indiquant qu'elle souhaite une réunion. Elle porte avec elle une tablette en bois soutenant un parchemin vierge et un crayon, accessoires qui témoignent de sa préparation pour discuter des projets et des objectifs à long terme de chacun.

Tout en avançant, elle étouffe un bâillement, signe qu’elle venait à peine de se lever, les cernes habituelles sous ses yeux aillant presque disparues grâce à toute les heures de sommeil qu’elle avait récupérer. Deux Silencieux, obéissant à ses ordres donnés plus tôt dans la journée, apportent une table ronde et quelques chaises, installant le tout au centre du pont. Un troisième Silencieux lui glissa une tasse de café fraîchement préparée entre les mains, qu'elle accepta avec gratitude. Davinia les remercia avec quelques mouvements de main et de doigts, s'exprimant dans le langage des signes pour communiquer son appréciation. Les Silencieux, compréhensifs et discrets, s'éloignent alors en silence, laissant Davinia avec son équipage principal. Maintenant Installée autour de la table, elle observa ses compagnons, son regard passant de l'un à l'autre avec une attention calme, peut-être même bienveillante.

"Bien, tout le monde est là. Prenons ce moment pour discuter de nos projets personnels et de nos objectifs à long terme," commença-t-elle en posant sa tasse de café. "Je veux que chacun ait l'occasion de partager ses aspirations et de voir comment nous pouvons travailler ensemble pour les réaliser."

Elle sort alors son crayon et se prépare à noter les idées et les souhaits de chacun, prête à adapter les plans de l'équipage pour intégrer les ambitions personnelles de ses membres. Elle en était venue à réaliser que même s’ils étaient un équipage, ils n’avaient jamais pris la peine de bien discuter ensemble, sinon c’était rapide ou sous l’échange du stress. Toutefois rien ne faisait en sorte qu’ils étaient vraiment loyaux les uns envers les autres, mais surtout envers elle… Toutefois, devant le silence qui s’étirait, elle rigola un peu.

‘’Ne soyez pas timides ! Bon d’accord, je vais briser la glace. Mon but est plutôt simple et sur le long terme, mais j’aimerais créer des boutiques qui sont en lien avec mes passions, que ce soit dans la lecture ou la création d’objets insolites et unique. Tout ceci me permettrait en fait de placer un réseau de récolte d’information qu’on pourrait utiliser et revendre. L’information est synonyme de puissance dans mon domaine. Je suis quand même une espionne-assassin.’’

Elle tourna la tête vers Bristass et sourit en l’encourageant à prendre le tour suivant. Elle savait que le médecin de bord avait souvent des idées brillantes et des objectifs clairs, même s’il était parfois réticent à les partager ouvertement.

“Bristass, à toi. Quels sont tes projets et tes objectifs à long terme ?” Demanda-t-elle, son crayon prêt à noter chaque mot.

Bristass, surprit par l’attention soudaine, prend une profonde inspiration avant de répondre. Ses mains, couvertes de traces de baumes et de plantes médicinales, reposent sur la table devant lui. Son regard, habituellement concentré sur des tâches médicales, sembla contemplatif alors qu’il réfléchissait à ses aspirations.

“Eh bien, j’ai plusieurs objectifs,” commença-t-il, sa voix mesurée et calme. “D’abord, je souhaite approfondir mes connaissances en médecine, surtout les pratiques anciennes et les remèdes naturels que l’on peut trouver dans les différentes îles. Chaque nouvelle découverte pourrait non seulement améliorer nos soins à bord, mais aussi être une source de revenus si nous parvenons à vendre des remèdes efficaces et sur le long terme, c’est très pratique pour explorer le côté plus expérimental de la médecine.”

Il marqua une pause, son regard se posant sur Davinia pour s’assurer qu’elle suivait. Encouragé par son sourire et son attention, il poursuivit. Davinia hoche la tête, prenant des notes rapides sur son parchemin, appréciant la clairvoyance et le pragmatisme de Bristass.

“Enfin,” ajoute-t-il avec une lueur de passion dans les yeux, “je veux écrire un journal de bord médical, détaillant nos aventures et les défis médicaux que nous avons surmontés. Non seulement cela serait utile pour notre équipage, mais cela pourrait aussi servir de guide pour d’autres médecins en mer.”

Davinia termine de noter, puis leva les yeux vers lui avec un sourire satisfait.

“C’est excellent, Bristass. Nous allons certainement trouver des moyens pour intégrer ces objectifs dans nos plans futurs. Merci de les avoir partagés.”

Puis, tournant la tête vers le reste de l’équipage, elle demande : “Qui est le suivant ?” Encourageant ainsi d’autres membres à exprimer leurs ambitions et à contribuer à la vision collective de l’équipage des Érynies.


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Devant le regroupement de l’équipage autour de la table rapporté par Davinia, Camillius avait simplement suivi le mouvement. Aussi car lorsqu’il s’agissait des demandes de la capitaine, il avait appris à ravaler quelques secondes sa fierté pour obéir. Tout du moins, dans la majorité des cas. Car cette fois-ci, il commençait à trouver que tout cela devenait véritablement n’importe quoi. Alors lorsque le regard de ses camarades se posaient sur lui, attendant une réponse quant à ses “projets et plans d’avenir”, il ne pouvait contenir une grimace de dégoût.

- “Non mais on où est où là ?!”

Le dragon n’était pas content d’avoir été dérangé dans sa huitième sieste de la journée pour de telles bêtises. Et se redressant avec hâte il rajoutait :

- “On parle de nos “projets” puis ensuite on se brosse les écailles et on se vernit les griffes ?!”

Et s’il était assez simple de transposer les paroles de Camillius aux humains. Et son expression laissait très clairement penser qu’il n’était pas près à répondre à cette discussion de gamines jouant à la dinette.

- “Moi je me casse ! Vous êtes …”

Et sans même qu’il ait le temps de finir sa phrase, Arondel assise à côté se releva rapidement pour venir appuyer avec force à l’arrière du crâne du trois-yeux et lui écraser le plat du visage sur la table en bois dans un fracas sonore de bruit d’os qui se brise. Et dans un gémissement de douleur, le dragon relevait la tête pour glisser au sol sous ses jambes lâchantes.

Les regards surpris et interrogatifs se tournaient alors vers la navigatrice qui se rasseyait calmement avant qu’elle ne leur dise :

- “Quoi ? Ça fait des jours qu’il est désagréable. La violence c’est bien la seule chose qu’il comprend.”

Le dragon avait fini par se coucher sur le dos, se tenant le nez saignant en essayant de contenir sa rage et sa colère. Bjorn se pencha alors vers lui pour demander :

- “Ça va aller ?”
- “Je vous emmerde tous !”


Et d’un bras dressé, Camillius faisait un doigt d’honneur à l’assemblée soupirante. Il était claire que malgrès le rappelle à l’ordre, ce ne serait pas le dragon qui prendrait ce tour de parole, alors toutes les attentions se tournaient vers Arondel, les bras croisée toujours aussi dépités devant l’attitude de gamin mal élevé de Camillius.
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Je me prenais à nouveau la tête entre les mains devant tant de désinvolture. Mais pour le coup Arondel avait raison, le capricieux ne comprenait qu'à travers la violence, et un avoir élément aussi imprévisible pourrait s'avérer problématique à long terme. Puis Arondel s'éclaircit la gorge après avoir jeté un tissu à Camillius pour qu'il calme son saignement.

"- C'est évident non ? Je suis une navigatrice doublée d'une arnaqueuse, alors avoir l'équipage le plus riche et le plus imposant !" s'exclama-t-elle théâtralement en écartant les bras. "Après... Je dis pas non à me trouver un coin tranquille, avec un pirate dangereusement protecteur envers moi... Mais ça ne sera pas avant que le monde entier n'ait appris à nous craindre !" se reprit-elle.

Sous le regard quelque peu incrédule de ses interlocuteurs, Arondel se reprit et me fit un signe de tête en s'allongeant à nouveau les pieds en éventail.

"- Hmmm ça risque d'être un peu gênant à avouer, mais... La raison pour laquelle je me suis tiré de mon île natale c'est que j'ai une demi douzaine de voix qui se bousculent dans ma tête. Ces mains que vous voyez flotter de temps à autre et faire des choses plus ou moins arbitraires ou qui cherchent même à m'emmerder, ce sont la manifestation des voix que j'entends. Bien sûr je peux les contrôler de force, mais sinon elles agissent à leur gré, en fonction de leur personnalité et leurs envies." avouai-je en pointant du doigt l'une des mains qui fit un bref signe de salut, tandis qu'une autre apparut derrière moi et me mit un taquet à l'arrière du crâne.

"T'as pété un câble ? Pourquoi tu leur dis tout ça, ils vont juste te laisser là. Ils en ont déjà marre d'un dragon colérique alors un mec fou à lier laisse tomber !"

"On a besoin d'aide. J'ai besoin d'aide. Vous m'avez poussé à partir de Drum, mais je ne sais même pas quoi faire désormais."

"- Je ne suis pas particulièrement attiré par l'argent, mais ça ne signifie pas que tu peux prendre ma part Camillius." coupai-je dans son élan le dragon qui s'était brusquement redressé. "Là tout de suite, j'aimerai comprendre ce qui m'arrive, et idéalement trouver un moyen de régler cette situation." continuai je. "Mais je commence à bien aimer cet équipage, aussi bordélique et imprévisible soit-il."
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Davinia observait la scène avec un mélange de patience et d’exaspération face au comportement de Camillius. Elle tentait de maintenir l'ordre au sein de son équipage hétéroclite malgré le caractère de l’animal. La situation avec Camillius était un défi permanent, mais elle savait que sa loyauté et sa puissance étaient des atouts qui pouvaient devenir indispensables bien canalisés. La révélation de Bjorn, en revanche, était à la fois préoccupante et touchante, ouvrant une fenêtre sur sa vulnérabilité. Elle prit une profonde inspiration et se leva pour faire le tour de la table, Arondel venant de lui offrir une belle opportunité. Il était donc temps d’en profiter. Ainsi, elle capta l'attention de tous, qui la suivirent du regard. Elle se pencha à hauteur de l’homme-animal, glissant ses billes sombres sur les siennes. Lentement et avec une grande douceur, elle vint caresser les cheveux de celui-ci, repoussant les mèches de son visage et inspecta son nez éclaté.

"Camillius, je comprends que tu aies tes réserves," commença-t-elle en fixant le dragon, "mais nous faisons tous partie de cet équipage, et chacun de nous a le droit de partager ses objectifs et ses préoccupations sans se faire ridiculiser. De plus, tout le monde a des rêves, des envies. C’est la même chose avec toi. Tu aimes les choses qui brillent, non ? Si tu ne les communiques pas au moment de les vouloir, on ne peut pas savoir, c’est comme quand tu as faim, tu nous le dis." Elle laissa un instant de flottement, pour lui laisser le temps de bien assimiler. "En soi, nous essayons de te traiter comme un humain, parce que tu agis comme tel, mais si tu refuses de communiquer, alors nous n’allons pas perdre de temps à te traiter comme un humain. Et tu sais ce qu’on fait aux humains pas importants ? Ils finissent esclaves ou morts… Et tu sais ce qu’on fait des animaux de compagnie qui ne sont pas coopératifs ? Ils finissent en cage ou morts… Nous ne voulons aucune de ces options pour toi. N’est-ce pas ? Alors il faut nous aider un peu, mon chéri." termina-t-elle toujours d’une voix calme et posée, en tapotant avec affection la joue de Camillius.

Elle se redressa finalement, reprenant sa place et laissant Camillius réfléchir à ses paroles. Elle se tourna ensuite vers Bjorn, un sourire rassurant sur les lèvres. Elle tapota son torse, comme elle avait l’habitude de le faire avec lui. Bristass, assis attentivement à la table, écoutait avec une intensité croissante les révélations de Bjorn. À mesure que Bjorn expliquait les voix et les mains flottantes qui les accompagnaient, les yeux de Bristass s'agrandissaient d'une fascination évidente. Bristass se pencha en avant, ses doigts tambourinant légèrement sur la table dans un geste de réflexion intense. Il sourit légèrement, un mélange d'excitation professionnelle et de curiosité personnelle.

"Bjorn, merci pour ton honnêteté. Nous avons tous nos démons à affronter, et savoir que tu as besoin d'aide est un premier pas crucial… Je crois que Bristass pourrait déjà t’aider sur les premiers pas, étant du domaine de la médecine, il pourra sûrement t’aider…"

"Bjorn, c'est absolument fascinant," dit-il, sa voix pleine d'enthousiasme. "Tu parles de manifestations physiques de voix dans ta tête... C'est unique. En tant que médecin, je n'ai jamais rencontré quelque chose de similaire. Les possibilités de comprendre et de traiter une telle condition... C'est un défi que je trouve particulièrement stimulant." Il prit une pause, regardant Bjorn avec un sérieux teinté d'admiration. "Je ne veux pas seulement t'aider à te sentir mieux, mais aussi à comprendre la nature de ces manifestations. Est-ce que cela a une origine physique, mentale, ou peut-être même une connexion plus profonde à quelque chose que nous ne comprenons pas encore ?" Bristass se redressa. "Avec ton accord, Bjorn, je voudrais étudier cette condition de plus près. Nous pouvons commencer par des observations simples et voir où cela nous mène. J'ai des connaissances en médecine traditionnelle et en herboristerie, mais cette situation pourrait nécessiter des approches plus innovantes."

"Bristass, freine un peu tes ardeurs et discute de ceci en privé une fois la réunion terminée." le reprit doucement Davinia en secouant un peu la tête.

"Ah oui... Pardon, je me suis laissé emporter." Annonça-t-il en se redressant pour s’adosser.

Elle se redressa, attrapant sa tasse pour prendre une gorgée de son café avant de continuer.

"Alors Camillius ? Tu veux partager quelque chose avec nous ?"


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Camillius attrapait le rebord de la table pour l’aider à se relever. Puis, de son autre main, il venait replacer la chaise qu’il avait fait tomber plus loin dans son mouvement d’humeur. A nouveau, les regards curieux et attentifs étaient braqués sur lui. Tous semblaient avoir oublié les révélations perturbantes du gris pour accorder plus d’attention au dragon qui aurait voulu reporter ces paires d' yeux autres part. Mais avant même qu’il ait le temps de dire quelque chose, lisant sûrement dans sa gestuelle ou son regard fuyant, Arondel relevait sa main menaçante. Elle indiquait à l’animal d’un simple geste qu’elle était tout à fait en position de lui éclater une nouvel fois son nez meutrie s’il continuait de faire l’idiot. Et cela, combiné au menace à peine voilée de la capitaine dont le dragon connaissait que trop bien le sadisme, le fit ravaler sa remarque dans un déglutition bruyant.

- “Je … je veux retrouver mes îles natales et chasser la vermine qui s’y est installée.”

D’un ton grognant, il avait fini par avouer ses desseins à l’équipage. Et loin d’en avoir spécialement honte, il ne voulait simplement pas entamer une discussion autour de son “projet d’avenir”. Car les Allods, c’était tout ce qu’il lui restait. Et que s’il les avait quittés il y a bien longtemps, maintenant qu’il était libre d’y retourner, il n’était pas près à laisser les humains investir l’endroit comme ils le voulaient.

- “Les Allods d’Izya qu’on les appelle maintenant ! Ah, depuis quand la terre des dragons appartient à une bipède stupide ?”

Camillius retint la remarque misogyne qui lui vint devant le regard prononcé des deux femmes de l’équipage. Et il reprit en disant :

- “Cette femme m’a volé ma terre pendant mon absence, mais je ne suis pas prêt à lui laisser sans me battre !”

Et pour cela, il avait intérêt à devenir sacrément fort. Car s’il était persuadé que les histoires racontées par les autres gladiateurs sur Helliday Island étaient probablement exagérées, son instinct lui criait qu’elle n’était clairement pas à prendre à la légère.

- “Et je ne laisserais aucun d’entre vous m’en dissuader ! C’est clair ?”

Une menace ridicule mais sincère. Camillius serait prêt à mourir pour ces rochers volants. Tout du moins, il se plaisait à s’en convaincre.
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Je ne m'attendais pas à des retours aussi positifs et rassurants. Et bien que Bristass semblait un peu trop intéressé et intrusif, sa préoccupation me rassura en quelques sortes.  

"Tu vois, il n'y avait rien à craindre"
"Parle pour toi, c'est de nous que tu veux te débarrasser, forcément qu'on aurait préféré que tu la fermes."
"Certes, mais si cela peut l'aider à aller mieux..."


"- Cela serait avec plaisir Bristass. Laisse moi juste un peu de temps pour mettre les choses au clair avec moi-même et on pourra se pencher dessus." répondis je au médecin très enthousiaste à l'idée de m'étudier.

Après quelques secondes de réflexion, Arondel rebondit sur les aveux de Camillius.

"- Attends quand tu dis Izya, tu parles de la pirate ?? T'es complètement malade, elle nous écrase en un clin d'œil, dragon ou pas. Si tu comptes vraiment te mesurer à elle, t'as intérêt à faire un sacré entraînement, et à t'y mettre dès maintenant." s'inquiéta notre navigatrice.

Le nom ne m'évoquait rien, mais c'était probablement dû à mon isolation au reste du monde pendant plus de vingt ans.

"- Je te savais avide de pouvoir, mais je ne t'imaginais pas aussi territorial. Même si après réflexion c'est plutôt logique de par ton statut de base d'animal." répondis je en repensant aux animaux sauvages de Drum qui se battaient sans cesse pour savoir quel clan aurait le dessus sur l'autre.

Après cet échange, je m'apprêtai à continuer l'entretien de mes armes, mais un bruit attira mon attention. Du bois qui craque, de l'eau qui s'écrase plus violemment sur les récifs, voilà ce que mon ouïe, développée dans la toundra, m'indiquait. Je tournais la tête et j'aperçus alors un navire, légèrement plus grand mais aussi plus abîmé que le nôtre. Je n'avais même pas besoin de prévenir mes compagnons de leur présence, puisqu'il était désormais difficile d'ignorer ce bateau qui fonçait droit dans notre direction, un drapeau pirate fièrement déployé et bien visible.
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Les yeux de Davinia ne quittaient pas Camillius qui avait enfin communiqué un peu plus sur sa personne. Après avoir félicité silencieusement l'homme en lui offrant un sourire entendu, elle se redressa et fronça les sourcils à l'avertissement de Bjorn. Toujours avec sa tasse de café fumante en main, Davinia fit une grimace avant de se lever de table. Elle fit quelques signes de main aux Silencieux, leur demandant de se préparer pour activer les défenses et de mettre le bateau en marche. Arondel ne se fit pas attendre pour se jeter à la barre, tandis que Bristass attrapait les chats pour les enfermer dans la cabine du capitaine avant de rejoindre la navigatrice. Davinia, accompagnée de ses deux hommes, s'approcha de l'avant du bateau, observant l'autre navire pirate qui fonçait droit sur eux. Le navire ennemi était légèrement plus grand, mais ses voiles déchirées et sa coque marquée de cicatrices montraient qu'il avait déjà vécu de nombreux combats. Le drapeau pirate flottait fièrement au sommet du mât, avec une tête de mort rouge sang sur un fond noir.

À l'avant du navire ennemi se tenait Morgana, une femme imposante avec des cheveux noirs comme l'ébène, tressés en une longue natte qui tombait sur son épaule. Ses yeux perçants semblaient capables de transpercer l'âme de ceux qu'elle fixait, ce qui arracha un frisson d’inconfort à Davi, qui se rappela sa propre mère. Elle portait une tenue de pirate classique mais avec une touche personnelle. Un long manteau de cuir, décoré de broderies complexes, était drapé sur ses épaules. Ses pantalons étaient ajustés et ses bottes montantes, renforcées pour les batailles. Elle était aussi ornée de bijoux de valeur. Des armes semblaient plus ou moins dissimuler sous son manteau.





À ses côtés, se trouvait Karl Ambour, un homme grand et athlétique, qui dégageait une allure flamboyante et confiante. Il avait les cheveux blancs et longs, attachés en queue-de-cheval, avec des mèches perlées et ornementées de joyaux scintillants. Ses yeux étaient marqués de traits rouges, accentuant son expression malicieuse et énergique. Il portait une tenue noire sans manches, révélant ses bras musclés et puissants ornés de bracelets dorés. Ses yeux rouge vibrant trahissaient l’amusement et l’anticipation de la bataille à venir, et il tenait fermement une longue-vue, observant attentivement le navire de Davinia. Deux épées reposaient sur ses hanches.




Mais la véritable surprise fut la présence de Henri Dicule, un ancien compagnon de fortune que Davinia croyait disparu depuis longtemps. Henri avait l'air plus vieux, comme si la dureté de la réalité lui avait permis de murir. Il avait maintenant des cheveux noirs plus long et épais, tenus en arrière par un bandeau rouge. Ses yeux étaient et grands et expressifs, reflétant à la fois dureté et maturité. Il portait une tenue différente qu’à leur dernière rencontre, de couleur rouge avec des motifs dorés, et un sac à dos vert orné de détails dorés. Il était passé d’aspirant archéologue à jeune pirate. Ses yeux trahissaient une lueur de soulagement mêlée à de la vengeance en croisant ceux de Davinia.

Davinia serra les poings, sentant la colère monter en elle. Elle ne pouvait pas croire qu'Henri avait survécu, mais qu’en plus il avait trouvé des gens pour les traquer… Mais elle n'avait pas le temps de se laisser submerger par ses émotions.

"Préparez-vous au combat," ordonna-t-elle d'une voix ferme à ses hommes. "Nous allons montrer à Henri de quel bois nous nous chauffons. Et cette fois-ci je veux aucun survivant !"

Les Silencieux, parfaitement coordonnés, se mirent en position pour défendre le navire, tandis que le reste de l'équipage se préparait à l'affrontement. Davinia, le regard fixé sur Morgana, se promit de régler cette affaire une fois pour toutes. Tandis que leur caravelle se mettait en mouvement, un coup de canon fut tiré par l'équipage ennemi. La boule de métal ronde siffla dans l'air avant de percuter l'eau devant eux, envoyant des éclaboussures sur Davinia qui ne broncha pas. Elle garda la tête haute, prenant une gorgée de son café comme si cela ne l'affectait pas... mais en réalité, elle était bonne pour cacher ses émotions et jouer la comédie. Car à cet instant précis, elle avait été figée par la surprise et la peur en réalisant qu'elle aurait pu y rester. Davinia inspira profondément, raffermissant sa prise sur sa tasse.

"Arondel, à combien de distance sont-ils ?" demanda-t-elle d'une voix calme.

"Environ trois câbles, Capitaine. Ils se rapprochent rapidement," répondit Arondel, les mains fermement accrochées à la barre.
"Artor, Loyset et Serrell, préparez les canons. Les autres, tenez-vous prêts pour l'abordage si nécessaire," ordonna-t-elle.


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Alors qu’il regardait le bateau se rapprocher doucement, Camillius sentait des yeux insistants se poser sur lui. Et lorsqu’il tourna la tête, il grogna en voyant Arondel le fixer avec jugement, ou mépris.

- “Tu veux quoi ?”
- “Si tu n’avais pas laissé s’enfuir Henri, on en serait pas là. Je suis sûr que c’est lui qui les a menés à nous.”
- “Il m’a pris en traître la dernière fois ! Ca ne se passera pas de la même façon maintenant.”


Le dragon croisa les bras, comme un enfant boudeur. Cependant, il était loin de vouloir spécialement rester en place. Cela faisait maintenant des semaines qu’ils n’avaient combattu personne et sa dernière adversaire lui avait infligé une sacré correction. L’ego blessé, il attendait avec impatience que les pirates imprudents entrent dans son champ d’action pour aller s’attaquer à leur navire. Ce qui ne tarderait pas à arriver puisque Arondel et les Silencieux avaient déjà mis en marche la Caravelle des Trois Grâces pour aller à la confrontation, bien loin de chercher à attendre sagement que le conflit viennent à eux. Et si Davinia aurait sûrement préféré qu’ils mènent un abordage propre, ce n’était pas au goût du dragon qui, lorsqu’il vit l’opportunité, sauta par-dessus le bastingage pour se jeter du bateau. Et avant même de toucher l’eau, le Trois-yeux se changea en reptile volant et s’enveloppa de flamme dans un rugissement faisant vibrer l’air.

Il prit de l’altitude, évitant les quelques boulets qui ne lui étaient pas destinés, pour foncer vers le ciel. Puis, une fois qu’il survolait l’embarcation adverse, il replia ses ailes prêt de son corps, laissant l’air glisser autour de lui et faisant danser ses flammes inextinguibles. Un piqué dirigé vers l’imposant mât du navire ennemi et qu’il vint briser sur son passage, laissant le bois, de haut en bas, s’écraser sur ses écailles solides et s’embraser sous ses flammes. Puis, avant même d’atteindre le pont où couraient nombreux larbins des forbans, le dragon redressa sa trajectoire, ouvrant grand ses ailes de nacre, pour éviter de s’écraser au milieu de ses adversaires.

Et si la panique déclenchée par cette attaque flamboyante avait fait son effet, le dragon en voulait encore plus. Courbant alors son trajet, il vint se poser sur la proue du bâtiment, laissant ses flammes s’éteindre sous la brise marine.
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Voilà que le bateau s'approchait. Un bon demi kilomètre, toute la crique nous séparait encore, et pourtant il n'en fallait pas plus à Camillius pour prendre son envol et commencer l'offensive. Je ne pouvais me permettre d'attendre que les deux embarcations ne se rapprochent, il fallait agir maintenant avant que notre dragon ne finisse dans un état encore plus piteux. Deux paires de mains flottantes apparurent sur le pont, agrippant les quelques armes que j'avais laissées traîner après en avoir pris soin, tandis que je prenais tout mon élan en allant à l'autre bout de la caravelle. Je parcourus toute la longueur du pont, finissant ma course par un saut qui m'emmena directement sur les récifs de la crique. Bien que humides, la vitesse conservée me permit de garder un certain équilibre, et je remontais alors progressivement la trace du dragon. En cours de route, les gants ayant saisi mes armes me les transmirent à tour de rôle dans mes mains, rangeant celles en trop dans mon dos, et me saisissant à deux mains de mon meitou. J'approchai la lame de l'eau, qui recouvrit le métal et que je solidifiai en glace, ajoutant un demi-mètre à la longueur de cette dernière, en faisant presque une épée lourde à deux mains.

De la même manière qu'à mon départ, je débarquai sur le navire adverse en sautant, ce dernier étant plus proche de la rive, l'effort fut moindre. En atterrissant au milieu du pont, mon épée asséna un coup qui mit hors d'état de nuire plusieurs larbins regroupés au mauvais endroit, au mauvais moment. Je continuais de balayer mon champ de vision avec mon arme, tranchant plus ou moins proprement ce qui se mettait en travers de mon chemin. Puis à un moment, mon épée se bloqua, impossible de la mouvoir à nouveau. Je tournai le visage dans la direction concernée, et de mon unique œil je constatais pour la première fois un homme aux cheveux blancs et au gabarit tout aussi musclé que le mien. Ce dernier souriait tout en retenant d'une seule main mon épée, ses doigts s'accrochant fermement à la glace désormais ruisselante du sang de ses alliés. Il semblerait que la surface glaciale n'avait aucun effet sur l'individu, puisqu'il commençait même désormais à briser partiellement le revêtement glacé que j'avais soigneusement créé pour l'occasion.

Je tentais un coup de poing rapide, mais l'homme réagit plus rapidement que moi, et voilà que mon avant-bras était désormais pris au piège dans une chaîne, fermement serrée autour de ce dernier. L'homme souriait tel un fou, et j'étais plus que bien placé pour savoir à quoi la folie ressemblait.

"- Je t'ai volé ton bras !" cria-t-il alors qu'il s'éloigna de moi, tirant de toutes ses forces la chaine derrière lui.

Malgré mon poids, sa force fut suffisante pour me faire violemment décoller dans sa direction, chose sur laquelle il enchaîna en m'assénant un coup de poing en plein ventre, coupant mon vol en plein élan.

"Ouch, celui là il fait mal aux tripes, et à l'égo..."

Je restais accroupi au sol, un avant-bras toujours piégé tandis que mon meitou trop lourd à manier, restait dans mon autre main, alors que l'homme continuait de rire aux éclats.

"- Arrête de faire le con Karl, ces types là sont dangereux. Tu te rappelles de cette cicatrice que je t'ai montrée..." répliqua Henri par dessus son épaule.

"- Mais tu nous as avoué après que tu t'étais juste pété la gueule en sortant du temple non ?" continua l'homme toujours aussi hilare.

"- On a dit qu'on en parlerait plus..." répliqua le jeune pirate d'une moue honteuse. "Bref, occupe toi de lui avant que ça ne dégénère à nouveau !"

Pendant que j'écoutais à moitié leur dialogue d'un intérêt plus que limité, j'avais discrètement englobé la chaîne dans de l'eau contenue initialement dans mon meitou, puis après l'avoir gelée, j'assénai un puissant coup de poing à l'aide de ma main libre. Le métal vola en éclat, libérant mon bras bien que la douleur ne fut pas négligeable.

"- Regarde ce qu'il a fait ! Henri, va me chercher une chaine de rechange tu veux bien, ce mec vient de ruiner l'ambiance !" ragea Karl alors qu'il dégainait pour de bon ses deux épées, prêt à en découdre.
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Davinia s'installait plus confortablement à l'avant, continuant de savourer son café sans quitter des yeux Morgana, tandis que ces deux grands fous, Camillius et Bjorn, décidaient de commencer à s'amuser avec certains des membres d’équipage de l'autre bateau. Morgana ne semblait pas impressionnée par les manœuvres de Camillius et Bjorn. Elle laissait ses hommes gérer la situation, gardant son attention fixée sur Davinia. Un Silencieux revenait rapidement avec les armes de l'espionne. Ils échangeaient pendant un instant leurs objets, permettant à l'énigmatique de fixer ses dagues dans son dos et à ses hanches. Elle reprenait finalement sa tasse, maintenant à moitié pleine, laissant le Silencieux retourner à ses préparations.

La navigatrice, Arondel, criait quelques ordres aux matelots présents, annonçant des précisions sur les manœuvres à suivre pour déplacer le bateau. Certains Silencieux s'activaient pour mettre en place les canons, ainsi que les boulets et la poudre. Au même moment, un autre coup de canon était envoyé depuis l’autre bateau, venant éclater la pointe gravée de la figure de proue et éclaboussant de bois le dragon figé dans un rugissement silencieux.

Davinia faisait signe aux Silencieux près des canons de viser le bateau ennemi. Elle laissait une longue pause, permettant à leur navire de se rapprocher encore un peu, puis elle faisait finalement signe aux larbins de faire feu. En même temps, elle prenait une nouvelle gorgée de café, terminant sa tasse avant de la déposer en sécurité dans une caisse. Pendant ce temps, l’explosion de la poudre et le sifflement des canons remplissaient l’air, et deux des quatre tirs touchaient leur cible, explosant la partie supérieure de la coque.

Un fin sourire moqueur se dessinait sur les lèvres sombres de l’espionne, tandis que l’expression de Morgana se fissurait. Le sourire de Davinia s'élargissait alors qu’elle faisait un geste de lever de chapeau invisible, provocant la femme ronde en face d’elle. Celle-ci serrait les poings et la mâchoire, criant des ordres avant de se tourner vers Davinia avec un regard mauvais, toute moquerie disparue. Elle plaçait un pouce sur sa gorge et faisait le signe d’une décapitation, tandis que Davinia ne faisait que sourire, trouvant la femme hilarante…

Morgana, avec une lenteur calculée, tirait une arme à feu de sous son long manteau noir, dévoilant un pistolet finement décoré. Elle le pointait directement vers Davinia, ses yeux brillant malveillante. Davinia, sans montrer la moindre trace de panique, attrapait son chapeau de capitaine, un sourire presque imperceptible jouant sur ses lèvres. Il y avait aucune chance que son ennemi puisse la toucher, la distance et le mouvement de vague rendait la chose presque impossible. Tandis que Morgana continuait de viser, semblant attendre le moment parfait, l'espionne se redressait lentement, ajustant une dernière fois le chapeau sur sa tête avec une élégance nonchalante.

Puis, en un éclair, Morgana pressait la détente. Le bruit sec du coup de feu résonnait dans l’air salé. La balle fusait, et dans un mouvement presque chorégraphié, elle frappait le chapeau de Davinia. Propulsé en arrière, le chapeau était emporté dans les airs, virevoltant gracieusement avant qu'un coup de vent ne l’emporte vers l’océan, le faisant disparaître dans les vagues en contrebas. Davinia, sans ciller, gardait son regard rivé sur Morgana, comme si l'incident n'avait été qu'un léger désagrément, mais intérieurement elle bouillonnait, un mélange de colère et de peur. Finalement, cette femme n’était pas à prendre à la légère.
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Le regard du Dragon était figé sur le jeune garçon qui s’activait de répondre au demande du fameux Karl. Et si l’animal n’avait pas bougé pendant que Bjorn se faisait martyriser, bien loin de se préoccuper du sort de son équipier, il ne pouvait contenir la rage qui l’envahissait de revoir le petit Henri qui l’avait tourné en ridicule et avait transpercé son égo de sa maladresse. Une haine viscérale qu’il dévoilerait sans détour.

Il prit son envole pour venir s’interposer devant la porte de la cabine du bateau. Et alors même que les échanges de boulets de canon faisaient rage, la bête tendit le coup, dévoilant ses crocs dans un de ses plus beaux sourires au jeune garçon qui se stoppa net.

- “ Comment on se retrouve, le nabot.” Grondait Camillius “Cette fois tu ne vas pas t’en tirer avec une pirouette.”

Et alors qu’il finissait sa phrase, son ouïe le prévient de l'arrivée immédiate d’un boulet dans sa direction. Il abaissa la tête avec rapidité pour l’éviter avant de le regarder s’écraser dans l’eau, de l’autre côté du pont. Contrarié par ce tir, Camillius tourna le regard pour hurler au navire de son équipage :

- “Putain mais faites attention les débiles ! Le prochain comme ça et je vous embroche sur place !”


Il savait que ce tir venait sûrement d’une visée ratée des silencieux et il était parfaitement prêt à mettre sa menace en place. Tout du moins, il essayerait sans que la capitaine ne le laisse faire.

Son attention se portait alors sur le jeune homme. Cependant, ce dernier n’avait pas attendu que l’animal lui accorde à nouveau un regard qu’il avait déjà filé à l’intérieur du bâtiment. Devant ce constat, Camillius hurla sa rage avant de se tourner pour défoncer la porte en bois et entrer de force à la poursuite du jeune Henri Dicule. L'intérieur était tout de bois et bien mieux rangé qu'à bord de leur navire. Au fond de la pièce un long escalier descendait dans la cale et l'imposant reptile peinait à se frayer un chemin jusque là. Et avant même qu’il n’arrive finalement au haut des marches, il entendit le bruit d’une course vive sur le plancher. Puis il vit Henri sortir du noir du fond du bateau, montant les marches deux par deux, et les mains remplis par une épaisse chaine en acier. Avec une aise impressionnante, il pivota autour du dragon pour l’éviter, glissa sous les pattes griffus et sans arrêter sa course, fila vers la sortie en hurlant :

- “C’est bon Karl, j’ai ta chaîne !”

Il n’avait adressé aucune parole, aucun regard, aucune seconde à la bête menaçante. Camillius baissait alors la tête, riant nerveusement, la bave coulant sur les marches de l’escaliers. Il avait le profond sentiment que le petit nabot lui avait manqué de respect et ne lui prêtait aucun crédit. Et dans une frustration mélangé à de la rage, il laissa s’enflammer ses écailles. Le feu commençait à brûler le bois et les possessions des pirates alors que la bête forçait le passage, se retournant en ouvrant les murs en deux, ouvrant au plus grand ses ailes pour abattre les parois du bâtiment, et il déchaina sa rage à l’intérieur de la pièce, finissant par la faire s’effondrer dans les flammes. Il rugit sa colère, émergeant des débris avec l'œil mauvais. Maintenant, il était vraiment énervé.
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Le dénommé Karl n'avait pas attendu le retour de son commis pour passer à l'offensive. A l'aide de ses deux épées, ce dernier couvrait une bonne partie de mes angles d'attaques possibles, ne me laissant pas le choix que de prendre des risques pour écourter ce combat en terrain ennemi. Heureusement, je possédais un avantage dont mon adversaire semblait être dépourvu, à savoir le pouvoir d'un fruit démoniaque. Ainsi, je m'aidais d'une paire de mains supplémentaire pour mener mon assaut contre le pirate. Malgré sa colère apparente au premier abord, il était aisé de deviner dans son regard qu'il prenait tout autant son pied à se battre férocement, réalisant des figures de plus en plus inattendues pour esquiver les coups qui le visaient non seulement de face mais également de flan voire même de derrière grâce aux gants armés que je contrôlais sommairement.  

"- Pourquoi tu fais tous ces trucs, tu veux que je tire sur ton doigt ?" me questionnait-il avec un air totalement sérieux.

"- Hein ??" ne pus-je m'empêcher de lâcher complètement décontenancé par la question absurde.

Ma garde fut relâchée moins d'une seconde, mais il n'en fallut pas moins à l'homme pour se propulser dans ma direction, créant une bourrasque derrière lui. Il ne se trouvait désormais plus qu'à quelques centimètres de mon visage, et contre toute attente, le pirate se contenta de m'attraper le menton sommairement entre son pouce et son index. Je tentai de me dégager de son emprise, mais l'homme semblait posséder une force qui me dépassait, sa main ne broncha pas d'un millimètre. Sans rajouter un mot, il me saisit ma main droite et me fit faire de même à son menton.

"- Aller, de nous deux qui rira aura une tapette !" s'écria-t-il de nulle part tel un forcené.

Je ne comprenais rien à ce qu'il était en train de se passer, mais Camillius n'était toujours pas ressorti de sa poursuite de Henri, et le reste des larbins semblaient respecter le petit jeu de l'énergumène. C'était peut être ma chance d'emporter ce duel de... blagues ? C'était quand même pas de chance que cela me tombe dessus, Arondel s'en serait tellement mieux sorti que moi. Je repassais rapidement à toutes les blagues qu'elle avait pu me faire. Bien que dernièrement, celles-ci consistaient surtout à foutre Bob sur la tête de Camillius ou sur la mienne en plein milieu de la nuit. Alors que je réfléchissais, l'homme tentait toutes sortes de grimaces ou de bruitages plus ridicules les uns que les autres. Je n'avais jamais été bon pour ce genre de choses, et ça n'allait pas être maintenant que les choses changeraient.

Alors que l'énergumène semblait à la recherche d'autres moyens de me faire rire, Henri fit à nouveau surface, lançant alors la chaine demandée directement vers son allié. Karl leva son bras libre pour attraper cette dernière en plein vol, sans même se donner la peine de regarder dans la direction d'Henri. La voilà l'ouverture. Si d'ordinaire je me serai contenté de planter ma lame dans le flan exposé de l'adversaire, le métal trouvant son chemin entre ses côtes, cette fois la situation n'avait rien à voir. Le blagueur avait donné les règles, et il fallait que je les suive. De nulle part, une main flottante apparue, chatouillant l'homme qui avait toujours son bras brandi au dessus de lui.

"- Bah- HAHAH !" s'exclama-t-il d'abord surpris par le geste, puis exposant aux yeux de tous sa faiblesse.

"Quelle honte ce combat..."

Et pour le coup je ne pouvais donner tort à mes voix interne, quelle humiliation pour un guerrier de ma trempe que de s'abaisser à ça... Mais mon adversaire n'était pas hors d'état de nuire pour autant. Après avoir laissé s'échapper son rire, il se ressaisit, me fixant droit dans les yeux, comprenant l'erreur qu'il venait de commettre. La voilà l'occasion de gagner. J'assénai un puissant uppercut après lui avoir lâché la barbichette, qui l'envoya valser plusieurs mètres plus loin.

Au même instant, Camillius surgit des entrailles du navire, bouillant de rage et envoyant le comique dans les airs suite à l'explosion d'une partie du pont central. Je m'attendais à cueillir l'homme à sa chute, mais il parvint à contrôler sa descente de manière à se rattacher à l'un des mats du navire, me toisant de haut avec la voile tendue dans son dos. Partir à sa poursuite serait beaucoup trop dangereux, il était bien plus agile que moi, en plus de jouer à domicile. Je fis mine de lui tourner le dos, neutralisant en quelques coups de poing les larbins me tombant dessus alors que je rangeais dans mon dos mon meitou. Ma main droite se faufila à ma ceinture, où mes doigts pénétrèrent le gant fraîchement acquis sur Zaun. Ma main droite recouverte de mon Pistol Glove, je fis volte face d'une traite, mon index et mon majeur pointés directement vers l'homme afin de guider le canon du pistolet.

Malgré la distance et mon acuité visuelle réduite de par ma condition physique, l'homme souriait à n'en pas douter, et je parvenais même à l'entendre ricaner à voix basse. Il avait pris le temps de raccorder ses lames à la nouvelle chaîne et n'attendait que mon offensive pour se jeter sur moi à nouveau à l'aide de ses pouvoir aériens. Mais une trop grosse rage de vaincre peut vous faire rater les détails les plus essentiels à la victoire, tels qu'une demi douzaine de mains droites flottantes, disposées juste derrière la voile du navire, toutes pointant sur le dos de l'homme à l'aide de la même arme qui recouvrait mes doigts. Les six coups partirent des gants, perçant le tissu de la voile et faisant successivement tressailler le corps du pirate, qui tomba du haut du mat et s'écrasant sur le pont avec la raideur d'un cadavre. Mais l'homme n'était pas mort pour autant, je l'entendais encore s'esclaffer, toussant du sang à chaque bouffée hilarante qu'il expirait. Cette fois, ce fut ma propre main qui tira cette balle, mettant fin à la souffrance de l'homme qui s'attendait sûrement à une issue différente.
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Le combat naval entre Davinia et Morgana commença avec une intensité qui fit vibrer les mâts de leurs navires respectifs. Les deux capitaines, chacune à la tête de leur équipage, lançaient des ordres clairs et rapides pour manœuvrer leurs bateaux dans des positions stratégiques. Davinia, bien consciente de l'importance de chaque décision, avait rejoint la navigatrice pour être épaulée dans cette tâche. La femme, bien plus expérimenté qu’elle pourrait anticiper certains des mouvements de leur adversaire.

Morgana, de son côté, menait son navire avec une poigne de fer. Ses ordres retentissaient sur le pont, guidant son équipage avec une froideur efficace. Elle fit abaisser les voiles pour gagner en vitesse, se plaçant habilement dans un angle favorable pour une salve de canons. Les canons de son navire tonnèrent, projetant des boulets de métal en direction de la Caravelle des Trois Grâces. L'un d'eux frappa violemment la proue, finissant d’arracher la tête draconique, envoyant des morceaux de bois dans les airs.

Arondel, anticipant la manœuvre, à son tour fit virer la caravelle pour offrir un angle de tir optimal. Les canons du bateau répondirent en écho, déversant leur puissance destructrice sur le flanc du navire d’ennemi. Le choc fit trembler la structure adversaire, laissant des fissures béantes dans la coque. Des hurlements d'effroi et de douleur montèrent du pont adverse, mais Morgana restait impassible, ses yeux fixés sur son adversaire.

Les deux navires entamèrent une danse mortelle, tournant en cercle comme des prédateurs enragés. À chaque virage serré, les coques grincèrent sous la pression, les voiles claquaient dans le vent, et les mâts menacèrent de s’entrechoquer. Les échanges de tirs se poursuivirent sans relâche, chaque capitaine essayant de trouver l'ouverture fatale. Des gerbes d'eau s'élevaient à chaque coup de canon manqué, et les deux équipages tiraient à vue avec des mousquets et pistolets, le pont se transformant en un véritable champ de bataille.

À un moment critique, les navires se rapprochèrent tant que leurs voiles effleurèrent l'une l'autre, créant un fracas de bois et de cordages. La proximité devint telle que les hommes les plus audacieux, ou peut-être les plus fous, se précipitèrent pour lancer l'abordage. Des grappins furent jetés, s'accrochant aux rambardes opposées, tirant les deux navires encore plus près. Les premiers pirates sautèrent d'un pont à l'autre, armes dégainées, prêts à en découdre. Sur le pont, Davinia s'élança à la rencontre des assaillants, repoussant les envahisseurs avec une ses armes ou ses tentacules capillaires armés pour protéger Arondel. De l'autre côté, Morgana, armée de son épée, guidait ses hommes dans un assaut acharné.

Le chaos régnait désormais sur les deux navires, entrelacés dans une mêlée sans merci. Des lames scintillaient dans l'air salin, des cris de rage et de douleur se mêlaient au fracas des armes. Au milieu de cette violence déchaînée, alors que les deux équipages s'affrontaient avec une brutalité sans retenue, les regards de Davinia et Morgana se croisèrent à travers le tumulte. Leurs yeux se fixèrent avec une intensité presque palpable, une promesse silencieuse de confrontation imminente. Sans un mot, elles se frayèrent un chemin à travers le chaos, esquivant les coups et les balles, chacune résolue à affronter l'autre.

Davinia, agile, se mouvait rapidement, ses dagues prêtes à trancher. Morgana, imposante et sûre d'elle, dégaina son épée avec une aisance qui témoignait de son expérience. Elles se retrouvèrent face à face sur le pont, la tension entre elles crépitant dans l'air chargé de poudre et de sel. Le premier coup vint de Morgana, une attaque puissante visant à briser la défense de Davinia. Celle-ci esquiva d'un mouvement fluide, répliquant avec un coup rapide de ses dagues. Les lames s'entrechoquèrent dans une pluie d'étincelles, le métal chantant sous la force de l'impact. Morgana recula d'un pas, surprise par la vitesse de son adversaire, mais elle se ressaisit aussitôt, ses yeux se durcissant.

Les deux femmes entamèrent alors un duel féroce, une danse de mort où chaque mouvement était une question de vie ou de mort. Davinia exploitait sa vitesse et son agilité pour esquiver les assauts puissants de Morgana, tandis que cette dernière utilisait sa force brute pour tenter de briser la défense de l'espionne. Les lames sifflaient dans l'air, chaque coup paré de justesse, chaque contre-attaque menaçant de percer une défense déjà mise à rude épreuve.

Les coups s'enchaînaient avec une rapidité déconcertante, le bruit des épées couvrant à peine les cris des hommes qui continuaient de se battre autour d'elles. Des éclats de bois volaient à chaque impact violent contre les rambardes ou les mâts. À un moment, Morgana parvint à déséquilibrer Davinia d'un coup de pied bien placé, mais l'espionne se redressa aussitôt, roulant sur le côté pour éviter un coup qui aurait pu lui être fatal. Elles se faisaient face à nouveau, haletantes mais décidées. Leurs regards se défièrent encore une fois, une lueur de défi dans les yeux. Morgana attaqua avec un cri de guerre, tentant de mettre fin au duel d’un coup décisif. Mais Davinia, avec un coup calculée, para le choc, utilisant l’élan de son adversaire contre elle pour la désarmer d’un mouvement fluide en renfonçant son accroche sur elle avec ces cheveux tentaculaires.

L'épée de Morgana vola dans les airs, atterrissant avec fracas sur le pont. Désarmée mais loin d’être vaincue, elle se redressa, les poings serrés, prête à continuer le combat à mains nues. Davinia, tenant toujours ses dagues, observa un instant son adversaire. Alors que les deux femmes se tenaient face à face, leurs poitrines se soulevant au rythme de leur souffle, un silence tendu s'installa entre elles, rompu seulement par les bruits distants des combats et le claquement des vagues contre la coque des navires. Morgana, le visage marqué par la colère, fit un pas en avant, les poings toujours serrés.

‘’Tu as vraiment cru que tu pourrais t'en sortir après ce que tu as fait à Henri ?’’ cracha-t-elle, sa voix chargée de reproches. ‘’C'est à cause de toi qu'il est dans cet état ! Toi et ton équipage de traîtres !’’

‘’Henri a choisi son camp. Il savait ce qu'il risquait en devenant archéologue. Ce n'est pas moi qui l'ai poussé à agir comme un lâche et prendre la fuite. Tout ce qu’on a fait a été de lui inculquer une leçon de vie importante ! Autant plus que son ancien mentor n’était pas l’homme le plus honnête ! Nous faire-faire tout le travail à sa place et ne pas nous payer à la fin ! Je ne fais pas la charité moi.’’ Répondu Davinia qui soutenait son regard, impassible.

Morgana serra les dents, ses poings tremblant sous l’effet de la rage qui bouillonnait en elle.

‘’Il vous a fait confiance, et toi, tu l’as abandonné, laissé pour mort !’’ Sa voix se brisa un instant, trahissant l'émotion qu'elle tentait de contenir. ‘’Henri était... est un gamin de valeur. Il ne méritait pas ça.’’

Davinia haussa légèrement un sourcil, un sourire froid étirant ses lèvres.

‘’La valeur ne signifie rien quand elle est mal placée. Tu devrais le savoir, tu es toi-même une pirate. Dans ce monde, c’est chacun pour soi. Et puis, nous ne l’avons même pas touché, il a pris la fuite avant ! De plus, s’il était si précieux à tes yeux pourquoi l’avoir mené à sa perte !? Pourquoi avoir nourrir son désir de revenge ?’’

Les mots de l'espionne frappèrent Morgana comme une gifle, mais elle ne se laissa pas déstabiliser.

‘’Tu parles de valeur comme si tu en connaissais le sens, mais tout ce que je vois, c'est une femme prête à tout sacrifier pour arriver à ses fins, même ceux qui lui sont loyaux.’’

‘’Loyauté ? Ce n'est pas ce que j'ai vu chez Henri. Il a trahi son mentor, en prenant la fuite. De plus, je traite très bien mon équipage parce que je préfère de loin la loyauté à la peur, à quelques exceptions…’’ Déclara Davinia qui avait incliné légèrement la tête, ses yeux se rétrécissant.

‘’Tu n’as aucun remord, n’est-ce pas ? Pas une once de culpabilité pour ce que tu as fait.’’ Ragea Morgana serra les dents, la rage éclatant dans ses yeux.

Davinia resta silencieuse un moment, scrutant le visage de Morgana comme si elle cherchait à y lire quelque chose. Puis elle haussa les épaules.

‘’La culpabilité ne sert à rien dans notre monde. Ce qui compte, c'est de survivre. Henri a fait son choix, et j’ai fait le mien. Si tu es là pour venger son honneur, tu perds ton temps.’’

Morgana eut un rire amer et bougea lentement l’un de ses mains, un mouvement presque imperceptible, mais l’énigmatique le remarqua juste assez pour attiser sa paranoïa.

‘’Ce n’est pas seulement pour Henri que je suis là. C’est pour tout ce que tu représentes. Ton égoïsme, ta soif de pouvoir, ton mépris pour ceux qui t’entourent.’’ Elle se pencha en avant. ‘’Aujourd'hui, c’est toi qui paieras le prix.’’

‘’Je crois qu’il y a une misconception de nous, mais je n’ai pas à me justifier à une inco…’’

Davinia n'eut pas le temps de finir sa phrase. D'un geste vif, Morgana sortit un pistolet dissimulé sous son long manteau, le pointant directement sur elle. Le temps sembla ralentir, chaque fraction de seconde s'étirant douloureusement alors que Davinia comprenait qu'il lui serait impossible d'éviter la balle. Trop proche, trop rapide. Mais, en un ultime réflexe, elle tenta de dévier son corps, espérant que le projectile n'atteindrait pas un organe vital.

Morgana appuya sur la gâchette, et la détonation retentit, assourdissante. Des gerbes de flammes jaillirent du canon, illuminant brièvement les deux femmes. La balle frappa Davinia avec une violence inouïe, la projetant en arrière. Elle roula sur le pont, son corps s'immobilisant finalement, une flaque de sang commençant à s'étendre sous elle. Sa poitrine ne semblait plus se soulever, et un lourd silence s’installa sur le navire. Tous les regards étaient rivés sur les deux capitaines.

Morgana, un sourire large et cruel étirant ses lèvres, s’approcha de Davinia. Elle se pencha pour la saisir par les cheveux, la soulevant sans ménagement. Mais à cet instant, la ruse de Davinia se révéla. Malgré la douleur lancinante dans son épaule, là où la balle l'avait touchée, elle réunit toutes ses forces et planta brusquement ses dagues dans les flancs exposés de Morgana. Les lames s'enfoncèrent profondément, et la main de Morgana, qui tenait encore les cheveux de Davinia, se crispa.

Davinia, les yeux brûlant de douleur, mais aussi de plaisir, enfonça ses Nightkiss dans les creux des clavicules de Morgana, déclenchant une gerbe de sang qui éclaboussa son propre visage. Le visage de Morgana se tordit de douleur, et son regard autrefois victorieux se vida lentement de toute vie. Les secondes parurent interminables, mais finalement, la vie quitta les yeux de Morgana, et elle s’effondra au sol, inerte. Le navire resta silencieux, l'écho de la bataille semblant se dissiper, alors que les regards des deux équipages se posaient sur le corps sans vie de leur capitaine.


Dernière édition par Davinia Valthane le Lun 19 Aoû 2024 - 16:49, édité 1 fois
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Si le dragon avait réussi à détruire une grosse partie du navire, ce dernier flottait toujours sur l’eau, permettant aux deux équipages de continuer les combats. Et alors que Bjorn continuait de s’opposer à Karl et que Davinia avait enfin rejoint le navire ennemis pour affronter Morgana, Camillius en flamme courrait après Henri au travers du pont dévasté par les combats en écrasant ou éjectant dans la mer tous les larbins qui venaient s’interposer. Dans une course frénétique, dans des mouvements hâtifs et imprécis, le dragon essayait d’attraper le jeune pirate. Ses crocs claquant derrière le garçon qui le faisait paniquer et lâcher des petits cris de panique.

D’un bond puissant, l’animal diminua la distance qui le séparait de sa proie, si bien qu’il plaqua de sa patte le torse de l’enfant au sol rageur.

- “Tu m’auras pas le monstre ! Je suis plus fort que la première fois !”

Le rire rauque de Camillius couvrit les détonations des canons. Ses dents nacrés et pointus ne laissaient présager une alimentation purement carnivore et il avait hâte d’ajouter “enfants insolents” à sa liste de mets délicieux. Mais alors même qu’il ouvrait la gueule pour planter ses crocs dans la tête d’Henri, ce dernier se tortilla assez pour sortir une dague de son dos et la planter avec force dans la patte du dragon. Dans un rugissement de rage, Camillius relâcha la pression et laissa l’enfant se redresser et prendre la fuite.

Puis, arrivant au bout du navire, Henri se tenait droit sur la proue. Lentement, il se tournait vers le dragon flamboyant qui avait ralenti la cadence pour se rapprocher doucement du garçon. Son regard déterminé faisait face à la férocité de la bête. Et avant même que cette dernière ne pose sa patte meurtrie sur le bois craquant sous le feu, Henri observa ses deux camarades se faire exécuter. Une tristesse infinie couvrir son visage alors qu’il tendait le bras vers Morgana tombante inerte en hurlant :

- “NOOOOOOOOON !” Puis l’instant suivant, il plantait son regard dans celui du dragon en ajoutant : “Vous êtes des monstres !”

- “T’es pas le premier à me le dire. Et tu seras pas le dernier.” RIcana Camillius en continuant de s’approcher, tendant le cou pour croquer le petit bout d’homme.

Henri, en réponse, dressa simplement son majeur, avant de tendre les bras et de se laisser tomber dans l’eau tumultueuse. Le dragon surpris sauta au bout de la proue pour regarder où avait atterri le jeune garçon pour ne distinguer que des vagues s’écrasant férocement sur la coque du navire dévasté. Cherchant d’un regard enragé Henri, il entendait les bruits de nouveau boulet ravager le pont avant de sentir la proue se dérober sous ses pas. Il ouvrit ses ailes pour bondir en arrière et retrouver le sol ébréché du pont qui menaçait à son tour de s’effondrer. Les flammes avaient envahi une partie du navire, les pirates étaient en déroute et leur vaisseau menaçait de s’effondrer. D’un regard en arrière il voyait ses camarades presque aussi mal au point que leur adversaire. Et alors même qu’il allait prendre son envole pour rejoindre leur propre navire, laissant les deux autres se débrouiller, il hésita.

Il regardait Bjorn puis Davinia, observant la femme mal au point agoniser. Grognant, les babines retroussées, il prit une décision qu’il n’aurait jamais pensé prendre. Il s’envola rapidement, rejoignant Davinia avant de l’attraper avec ses griffes acérées.

- “On bouge Bjorn !” Criait-il à son camarade qu’il savait plus en état de se débrouiller.

Et retournant sur leur navire, Arondel avait déjà commencé à faire marche arrière dans le but d’aller s’abriter plus profondément dans le crique et éviter que les flammes ne se répandent aussi dans leur bâtiment. Camillius déposa doucement Davinia sur le pont ciré de leur navire, laissant à Britass s’en occuper pour la suite.
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Le bref silence qui avait suivi l'exécution des deux coéquipiers de Henri fut brisé par le cri de ce dernier, après quoi il abandonna littéralement le navire. Il semblerait que nos méfaits avaient été correctement accomplis, alors que le bateau qui avait hébergé les affrontements flambait de plus beau. Mon allié draconique s'envola en emportant notre capitaine, une intention qui me surprit de la plus belle des manières. En me retournant vers notre navire, je constatais que ce dernier s'était déjà éloigné de notre position. Mon premier réflexe, fut de tenter d'emprunter le chemin inverse, voulant emprunter à toute vitesse les rebords escarpés de la crique. Mais le côté du bateau le plus proche du bord était également celui qui avait commencé à sombrer en premier. Voilà que les deux rives étaient désormais hors de ma portée, l'élan me manquait pour quitter l'endroit en évitant de tomber dans l'eau agitée et qui se jonchait d'écume et de débris de bois en tout genre.

Je ne saurai expliquer d'où me vint cette idée, mais c'est pendant que le bateau commençait sérieusement à sombrer dans l'eau que je sautai vers le cours d'eau. Sous chacun de mes pieds, apparut alors une main gantée, la paume tournée vers le haut et soutenant mon corps, cherchant encore mon équilibre. De là, les mains s'enchainaient les unes derrière les autres, me frayant un chemin sur une vingtaine de mètres et me permettant finalement de rejoindre la rive la plus proche. A peine mes pieds effleurèrent le sol que je commençai ma course pour rattraper notre navire, qui avait définitivement connu des victoires moins amères. Le pont semblait avoir pris de bons dégâts et les Silencieux faisaient de leur mieux pour combler les éventuels trous tout en jetant par dessus les cadavres des intrus qui y avaient péri.

L'adrénaline commençait à diminuer alors que je foulais enfin de mes propres pieds les planches abîmées de notre navire. C'est alors que les premières douleurs commençaient à apparaître, des douleurs que nos dernières aventures n'avaient cessé d'ouvrir encore et encore. Ces pauvres côtes n'étaient pas prêtes d'avoir fini de souffrir. Bristass était clairement le meilleur recrutement depuis Arondel, et c'est rempli de confiance en nos fidèles serviteurs silencieux que je me dirigeais vers l'endroit où notre médecin avait dû s'abriter du danger, j'allais avoir besoin d'une plus grosse dose...
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Après le sauvetage in extremis de Davinia par Camillius, celle-ci fut rapidement conduite dans ce qui servait d’infirmerie à bord du navire. Bristass, le médecin de l'équipage, s'activa sans perdre une seconde, retirant la balle logée dans le creux de sa clavicule. La blessure était grave, la balle ayant frôlé de justesse des artères cruciales. Une fois la balle extraite, Bristass fit boire à Davinia une concoction de son cru, aux propriétés curatives puissantes. Peu après, elle sombra dans un sommeil profond et réparateur.

Bristass, sans perdre de temps, se tourna ensuite vers Bjorn, qui avait également subi des blessures au cours de l'affrontement. Le traitement qu'il reçut fut moins clément, ponctué de soins douloureux et de concoctions à l’odeur nauséabonde, typiques des remèdes de Bristass.

Pendant que leurs leaders se reposaient, les Silencieux reçurent l'ordre de fouiller la plage et les récifs de la crique, à la recherche de matériel utile laissé par les pirates défaits. Lors de leur exploration, ils découvrirent les corps sans vie de Morgana et Karl, échoués sur les rochers, mais Henri restait introuvable.

En poursuivant leurs recherches, ils mirent la main sur les trésors dispersés dans les environs à la suite du naufrage du navire ennemi. Bien que la majorité des richesses se trouvait encore dans la coque éventrée du vaisseau, d'autres pièces précieuses étaient éparpillées autour du bateau coulé, témoignant de la bataille qui venait de se dérouler.

Finalement, après quelques jours supplémentaires à profiter du climat exotique et apaisant de l'endroit, l'équipage prit le temps de se reposer et de récupérer de leurs blessures. Une fois leur énergie retrouvée, ils entreprirent de refaire le plein de matériel nécessaire aux réparations mineures du navire. Ils s'approvisionnèrent chez l'ébénisterie de Tanuki, réputée pour ses bois de qualité, et en profitèrent également pour récupérer des vivres et quelques moutons, ajoutant ainsi à leurs réserves pour le voyage à venir.

Une fois les préparatifs achevés, ils levèrent l'ancre et mirent le cap sur leur prochaine destination prêts à affronter de nouvelles aventures.
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