Ils vécurent... heureux ?

Aurais-je pu rêver d'un meilleur instant dans ma vie ? Là, moi dans ses bras, moi dansant, mes yeux perdus dans les siens. Ici, maintenant, nous ne sommes que nous. Lui, mon mari. Moi, sa femme. Pour le meilleur et pour le pire, nous sommes officiellement uni par les liens du mariage. Y a t-il plus grand moment que celui ci ? Celui où nous nous sommes dit "oui" peut être.
Sans doute. Mais si le oui, nous à amener à l'euphorie, cette danse est l'aboutissement de nos rêves, de notre désir d'être ensemble pour le reste de nos vies.

Est-ce seulement possible d'être plus heureuse que je le suis maintenant ? Là, sur la piste de danse, devant tous les convives réunis autour de nous, j'ai l'impression de nager dans un nuage d'amour, un nuage qui n'appartient qu'à nous. Et cela me fait presque oublié tous les désagréments que nous avons du subir lors de l'organisation de ce mariage.
Cela en valait la peine...

Les fameux préparatifs ont été un véritable calvaire. Et pour cause : il a fallu que la royauté de l'île des hommes poissons s'en mêle ! Non mais franchement, parce que je suis la fille d'un ancien garde royal, je dois forcément me retrouver devant les projecteurs ?!
Non, bien sûr que non. Ce qui nous a mis dans cette mouise c'est le fait que je sois la fille d'un membre de l'Esperance, ancien garde royal proche du roi, et épousant un humain et vice amiral de la marine en étant moi même médecin général des armées. Voilà pourquoi notre mariage sera demain dans la une des journaux alors que mince : On est personne à la base !

Sauf qu'aujourd'hui on devient le couple le plus populaire de la marine et le plus prometteur pour tous les fervents défenseurs de l'idéologie de la reine Otohime dont je fais partie depuis toujours. Est-ce pour ça que je suis tombée amoureuse dès que j'ai vu Shiro ? Non. Bien sûr que non. Mon amour pour lui va au delà de toute logique.

Toujours est-il qu'en cet instant magique, nous avons autour de nous des centaines de personnes venant de tous les horizons. Évidemment, le mariage se déroulant au palais Ryugu, tous les nobles de la cour de l'île des Hommes Poissons ont été conviés. Et comme nous sommes deux éminents membres de l'amirauté, beaucoup de gradés de l'armée sont venu fêter notre unions avec nous... Même des gens qu'on ne connait pas...

Et même des gens qu'on aurait préféré ne pas voir...

Notre danse s'arrête alors sous les applaudissements de l'assemblée que l'ont remercie main dans la main. Et c'est là que je les vois, eux, ces petits groupes qui se forment et dont la haine se fait ressentir par nos hakis de l'empathie. La main de Shiro serre la mienne, son regard cherche le miens et ses lèvres murmurent un simple "ça ira".

Alors je lui souris en retour. Oui, tant que nous serons ensemble, qu'importe ce qu'il advienne, ça ira.

Que dire face à un célébration de toutes les couleurs ? Oh, Gwen ne pensait point à la teinte des décorations du palais en pensant ceci, mais la variété ses convives ! Tant d’humains !  C’était peut-être le plus grand nombre  auquel l’adolescente de 17 ans avait fait face, tant d’inconnus auxquels quémander d’assouvir sa curiosité ! 

Vraiment, malgré son amour pour la formalité, la jeune sirène avait à peine réussi à se tenir tranquille pendant tout l’échange de vœux ! Mais l’attente venait à sa fin, première cérémonie close et pas au grand bal de célébration. Tant cibles étaient là à l’attendre, et si bien approcher directement le couple vedette du moment était peut-être trop osé… elle se devait bien de présenter ses félicitations comme toute bienséance demandait non ? Sûrement, le duo serait d’accord de lui décrire vite fait ce qu’était un oiseau ! Peut-être même que si elle demandait vraiment gentiment, le marié serait assez aimable que pour se déchausser ? L’un de ses servants lui avait juré solennellement que les humains, bah ils avaient 6 doigts de pied en faite ! N’étais-ce pas fascinant ?

-”Abandonne, ils n’ont pas que ça à faire et l’on doit trouver deux partenaires pour la prochaine danse…”

-”Allons Gwyn, on dansera juste ensemble afin d’éviter les rumeurs de fiançailles avec je-ne-sait-quel-triton ! Comme à notre habitude-” Sourire radiant, l’ainée se tourna vers la cadette, étoiles dans les yeux “Tu crois que si je leur tend une nappe avec une plume ils sauraient me dessiner une fleur ?”

-”Bien sûr, seuls les moins fortunés manquent une éducation artistique convenable. Un vice-admiral doit bien égaler quoi, un Duc ? S’il ne peut point au minimum imiter le célèbre Alguste Renoir, je serais décue.”

Allas, alors que la musique s’endormit et le couple finit la dance d’ouverture, qu’ils sourient ensemble à la foule applaudissante, c’est une véritable marrée d’adultes qui semble approcher Ellen et Shirou pour leur demander la prochaine dance ! 

-” Quoi ?! Gwyn, allons-y, vite ! “

-”Ah ? mais non, attendons juste notre t-”

-”Assez d’attente ! Temps aux réponses ! Je dois au moins savoir si un chien, bah c’est juste la moitié d’un poisson-chien !”

Et la petite Gwen, posée sur la bulle flotante qui lui sert d’appui hors de l’eau, ne peut que frapper le sol à petits coups de nageoire pour essayer de les rattraper, cercler l’attroupement à la recherche d’une faille dans laquelle se glisser, rébbondir un peu sur son siège afin d’entrevoir quelque chose au dessus de l’armée d’épaules, et zut, ce qu’ils avait l’air fâchés certains gaillards malgré le fait que ceci était un marriage !

Puis un triton devant mademoiselle trop centré sur lui même fait un grand geste de son bras, Force Gwen a se glisser en dessous ou manger du coude, la sirène apparaisant à l’intérieur du cercle devant une humaine qui sursaute et la repousse avec… dégout ? que-

Pas le temps de digérer l’hostilité fugace sur le visage d’une inconnue allas, ou encore les regards accérés d’une bonne partie des convives. Intimidée et glissant de sa bulle, Gwen s’agripe d’un glapissement à la première chose que ses instincts identifient comme sauf, y entoure sa queue autour pour bonne mesure.

Puis le même triton qui la mit dans ce pétrin rit, invitant plus d’un invité à faire de même.

-“HAHA ! A croire que vous avez un vrai don avec les sirènes mon cher Vice-amiral. Elles vous tombent dessus comme des guppys sur du pain !”

D’abord, confusion face à la blague de mauvais goût, puis ensuite, la terrible et gênante réalisation.

Est-ce vraiment une surprise que le visage ainsi que les écailles de Gwen devinrent  aussi rouges qu’un homard cuit lorsqu’elle réalisa qu’elle pendouillait des jambes jointes du marié ? Quelle honte ! Mais bouge sotte, qu’est-ce que tu fais ?! Oh mers, le couple est-il entrait de me regarder amusés ? I-ils sourient ! NOOOOON !!!

Immédiatement, je me penche vers la jeune sirène qui vient littéralement de s'emmêler dans les jambes de mon cher et tendre tandis que celui ci, en tout jeune marié qu'il est répond à la taquinerie du triton.

- Mais il y en a qu'une qui mérite mes faveurs.
- Ça va, vous ne vous êtes pas fait mal ?

Finalement, étant moi même en suspension dans les airs grâce à une bulle, c'est Shiro qui nous aide toutes les deux à nous remettre debout tandis qu'un des hommes poissons de service sort un corail à bulle pour remettre la bleue droite dans cet environnement aérien. Puis, l'homme de ma vie et moi échangeons un regard complice suivit d'un sourire d'appréciation avant qu'il ne pose un baiser sur ma tête et ne parte rejoindre quelques amis à lui qui le chambre gentiment.

- Venez, on va s'asseoir un moment pour que je nettoie votre coude.
- Laisse nous faire Ellen, c'est ton mariage aujourd'hui alors profite !
- C'est pas parce que je me marie que je ne suis plus médecin ! Et puis, je crois que cette demoiselle à plein de question en tête, je me trompe ?

Je lui adresse alors un sourire un poil moqueur tandis que mon haki de l'empathie m'indique clairement la gêne qu'elle ressent à l'instant même, ce qui, loin de calmer ma bonne humeur, m'arrache un petit rire tandis que je refuse une nouvelle fois l'offre de mes collègues de ne pas m'occuper d'elle. Trouvant alors une table avec au moins deux chaises libres, je la fais asseoir tandis que j'attrape une serviette propre et un peu d'eau. Puis, délicatement, je passe le linge sur l'éraflure, enlevant la poussière de celle ci.

- Là, c'est terminé. Vous devriez avoir une petite marque pendant quelques jours mais ça finira par disparaitre.

Et, sentant pertinemment son envie de me poser toutes ces questions, je repose la serviette avant de la regarder dans les yeux, un sourire de bienveillance sur mes lèvres, lui laissant tout le temps qu'elle souhaite pour s'exprimer.

- Agent Red ? Vous aimez les mariages ?
- Euh, c'est une question piège non ? Parce que ça ressemble à une question piège.
- Tout le monde aime les mariages agent Red.
- Ah, je le savais. J'ai bien fait de pas répondre moi...
- Tout le monde aime les mariages mais certains n'arrangent personne. Vous avez lu le journal ?
- Ah... Je crois que je sais de quoi on parle...
- Quelqu'un a décidé que ce mariage ne devait pas aboutir.
- Sans vouloir manquer de respect a qui que ce soit, j'ai l'impression que quelqu'un va être très déçu. A priori ils sont mariés, de mémoire de gazette, la répétition des vœux et le bal sur l'ile n'est guère qu'une formalité.
- Il est certain que pour la cérémonie proprement dite, c'est un peu tard, mais l'aboutissement d'un mariage c'est une longue vie de bonheur. Vous aimez votre vie agent Red.
- Permission de ne pas répondre Chef ?
- En tout cas votre boulot c'est d'aller leur pourrir la leur. La consigne c'est pas de fin heureuse pour ces deux la, vous allez piétiner leur conte de fée avec vos bottes.
- Est ce que je peux espérer des directives un peu plus précises ? Parce que la, c'est vague...
- Vous allez descendre sur l'ile des hommes poissons avec la délégation de Marijoa. Et servir de soutien a un agent du CP9 qui sera chargé de la mission principale.
- Du CP9 ? Je vais jouer les assistants d'un de ces tueurs ? Sérieusement ? Envoyez des sbires, c'est leur boulot a eux !
- La demande vint de plus haut, et mentionne spécifiquement un agent expérimenté.
- Super...
- Comment ?
- Je suis positivement ravi de cette opportunité de servir le gouvernement mondial monsieur.
- Je préfère ça. Allez vous préparer, le nom de l'agent que vous assisterez vous sera communiqué plus tard.

[...]

Et voila comment le pauvre agent Red se retrouvait à jouer les domestiques a dix milles lieux sous la mer. Obligé de faire le petit boulot d'un de ces psychopathes du CP9, qui, fidèle à leur réputation, c'était révélé être un authentique connard tout a fait imbuvable, et persuadé qu'il pouvait faire ce qu'il voulait du pauvre agent qu'on lui avait détaché.

Et le pire, c'est qu'il avait raison.

- La sirène qui vient de se rapprocher de nos cibles. Suis la et trouve des infos dessus !

Habilement dissimulé dans son chapeau, le mini den den qui relie Red à l'agent l'empêche même de profiter de la fête tranquille.

- Des infos dessus ? Je croyais que tu bossais pour le CP9, pas pour la gazette de Marijoa.
- Elle discute avec les cibles, elle pourrait être parfaite pour servir de diversion, si elle est assez importante. alors bouge ton cul !
- Tsss

Que quelqu’un l’enterre, à ce moment même ! Quel mal avait pu la saisir ? Oh, Gwen n’avais point besoin d’avoir des pouvoir psychiques pour sentir le regard plein de jugement de sa jumelle un peu plus loin dans la foule- Elle connaissait des humains dans l’île voyons ! Pourquoi ne pas leur poser à eux ces questions ?

Enfin, car c’est des locaux bien sûr ! Qu’est-ce qu’ils en savent de la surface s’ils n'y vont presque jamais ?! Peut-être un humain de terre n’est même pas la même chose qu’un humain de mer ? Puis Brigandine dit souvent des bêtises rien que pour m’embêter !

Yep, raisonnement solide, son envie d’exposer ses questionnements à ces vetérans du monde inconnu au dessus de leurs têtes était légitime !

Mais alors pourquoi sa langue s’était-elle nouée ? Etais-ce le rire de la mariée qui l’avait intimidée encore d’avantage ? Cette attention indue à son égard pour une éraflure dont la jeune femme avait à peine réalisé l’existence ?

-”Je… enchantée Mme Fuuryuko.”  Voila, commencer formel était toujours la meilleure chose à faire ! “ Je me présente Gwen Dollyn, première née de Caer Dollyn." Peu à peu les écailles de la mademoiselle retrouvèrent leur teinte normale, un soupire poli venant couvrir sa honte. “C'est avec une immense joie que ma maison vous adresse ses plus sincères félicitations à l'occasion de votre union ! Elle est une source d’inspiration pour nous tous, on ne vous souhaite que le meilleur pour votre avenir.” 

Hop, félicitations faites ! Elle espérait ne pas avoir laissé paraitre trop d'enthousiasme dans sa voix ? Ugh, que c’était difficile parfois de garder sa joie de vivre sous verrou en public afin d’avoir l’air “présentable.” 

-”Sinon, pour ce qui touche mon entrée en scène mmm… informelle, je vous remercie pour votre assistance.” Elle se gratta une joue de l’index à ces mots, un rire gêné la quittant. “ ...Étais-ce si évidant que j’étais curieuse à votre sujet ?” Sa famille lui disait souvent que sa soif de découvrir le monde était une flamme indomptable certes, un puis ardent sans fond, mais sûrement c’était pas si mauvais que ça !… N’est-ce pas ? “ J-j’avais nulle intention de vous poser une quelconque question indiscrète ! C’est juste- vous travaillez pour la Marine ! Vous êtes allée là haut !” Hop, juste comme ça, un switch se déclencha, la jeune sirène se retrouvant à nouveau mains jointes avec des étoiles dans les yeux alors qu’elle se pencha autant que possible vers Ellen sans pour autant dépasser le convenable. “Personne ose faire ça à causse du danger ! C’est comment ?!“

Yep, autant dire que la jeune demoiselle n’avait pas besoin de beaucoup pour retomber dans ces vices. Puis si le regards des certains des convives les moins agréables commençaient à se porter un peu trop sur elle… la sirène n’était que trop joyeuse dans son ignorance.

Elle fait donc partie de la famille Dollyn, qui, si je me souviens bien, est une famille noble de l'île... Je comprends mieux pourquoi elle semble si curieuse de la surface, et comme elle le dit elle même, elle ne connait encore personne qui y soit allé. Pourtant, nombres d'entres nous faisons des escapades au soleil, surtout lorsque vient l'adolescence. Mais pour les bien née, je suppose que c'est quelque chose d'impensable...

- Et bien que dire... Le soleil est telle qu'on peut nous le décrire : si lumineux que le regarder en face peut nous éblouir au point de ne plus rien voir. Quant à sa chaleur, c'est comme être à côté de l'âtre d'un feu en hiver, c'est à la fois chaleureux et réconfortant. Mais aussi dangereux si on n'y fait pas attention ! Car comme le feu, le soleil est capable de brûler, sauf qu'il faut cela de manière assez pernicieuse... Car on ne sent pas du tout la brûlure sur le moment...
Que dire d'autre... Le vent peu être aussi chaud que froid. Si parfois il est agréable et permet de supporter les fortes chaleurs de certaines îles, il peut aussi être traitre et emporter tout ce qu'il y a sur sa route. Et la pluie est souvent plutôt désagréable bien que nécessaire pour que les champs puissent se recouvrir de végétation parfois encore plus dense que la forêt marine !

Mais vous savez Mademoiselle Dollyn, le mieux serait encore que vous alliez voir par vous même ce qu'il en est. Surtout si cela vous passionne à ce point ! Vous pourriez par exemple demander une escorte officielle pour y faire un tour ! Je peux vous assurer que le monde de la surface est moins dangereux que ne le décrit nos histoires.

Ces fameuses histoires que l'on raconte aux enfants qui ne sont pas sage sur les danger de l'esclavage et de cette race mangeuse de poisson qui pourrait ne pas hésiter à nous transformer en sushi... Oh bien sûr, ces risques existent, mais ils sont bien moins répandu qu'on veut nous le faire croire.
Pour preuve : je suis toujours bien vivante et je côtoie des humains chaque jours. Mieux encore, j'en dirige du fait de mon statut de Médecin général des armées. Et puis, je viens d'en épouser un, si ça c'est pas une preuve que je peux faire confiance aux humains...

D'ailleurs, le voilà qui me regarde en souriant. Comment ne pas craquer face à ces yeux amoureux ?

- Gwen Dollyn, ce fut un plaisir de parler avec vous. Mais je dois vous laisser, mon mari m'attend pour la prochaine danse. N'hésitez pas à passer me voir dans la semaine si vous avez d'autres questions ! Je serais ravie de vous répondre.

Lui décrochant un clin d'œil, je me redresse sur ma bulle et m'avance alors au travers de la foule pour finalement retrouver les bras accueillant de l'homme de ma vie. Ahlala, si tout pouvait toujours être aussi merveilleux que cette journée !

Épier les conversations et lier des bouts de phrases qu'on entend pour en faire une synthèse efficace, l'enfance de l'art au CIpher Pol. Et comme la demoiselle sur laquelle je dois me renseigner est présentement la cible de toutes les conversations, suspendue comme elle est aux pieds des deux étoiles de la soirée, ça dégoise un max et ça ne se gène pour cracher un peu sur ses écailles...

- C'est une des deux filles d'un certain Kair ou Caer Dollyn. Une famille de sirènes de haute naissance, ou en tout cas l'équivalent local d'une sort de noblesse héréditaire classique. Le père est visiblement un adepte du courant pro Otohime qui a le vent en poupe à la cour en ce moment, d'ou son invitation à la fête. Quand à sa môme, d’après les commentaires que j'ai entendu, elle est plutôt du genre brillante a faire de l'ombre aux gens, et bien trop maligne pour se faire des amis à la cour. J'ai croisé quelques rombières qui ne rêvent que du jour ou elle se fera enfin taper sur les doigts pour la punir de son impertinence.
- Je m'en branle, c'est bon.
- C'est bon pour quoi ? C'est toi qui m'a demandé de creuser sur elle !
- Je m'en branle parce qu'elle à établi un contact avec la cible, donc ça suffit. D’après son dossier Ellen est du genre a ramasser tous les chiens des rues qu'elle croise. Elle l'a aidé, et elle le fera encore, donc ça suffit, y'a besoin de rien de plus. Un agent compétent l'aurait capté immédiatement.
- Connard.
- Quoi ?
- Non rien, je disais à un serveur que je reprendrais bien du canard.
- Ben voyons. En tout cas c'est bon, fume la.
- Fume la ? C'est pas très protocolaire ou limpide comme formulation.
- Sorti du CP9 Vous êtes des vraiment tous des charlots... Abime la, fais lui mal, blesse la. Ce dont j'ai besoin c'est qu'elle souffre d'une blessure suffisante pour qu'on ait besoin de la soigner ailleurs qu'ici, mais pas assez grave pour qu'on ne puisse pas la déplacer. Je mise sur le fait qu'Héléne voudra la prendre en charge en personne, et je les coincerai sur le chemin de l'infirmerie. Est ce que c'est protocolaire et limpide comme formulation espèce de guignol ?
- Putain de sociopathe...
- J'ai rien entendu.
- Je m'occupe de ça.


Mais quel connard putain ! Plus jamais je bosse avec ces tarés du neuf, ils ont qu'a se pignoler et s'entretuer entre eux !

Bon. Et maintenant ? L'heure est à la danse, et je maitrise le mouvement. Mais un coup de couteau discret c'est possible dans une ambiance de boite de nuit, sur des danses de cour soigneusement chorégraphiés, c'est nettement plus compliqué de suriner et de disparaitre dans la foulée sans se faire repérer. Alors quoi ? Un empoisonnement alimentaire ? Non, j'ai pas de poison violent, pas le temps de faire une enquête allergie, et puis un simple vomissement la remettrait en état. Pareil pour l'étouffement, ça ne la fera pas bouger. Non, il faut une blessure... Lui péter une cheville en passant à coté ? Jouable pendant la danse sur un faux pas, mais Héléne va juste la faire asseoir avec un sac de glace, pas la trainer à l'infirmerie... Peut être qu'en poussant un serveur à la poignarder avec une flute de champagne ? Compliqué... Tiens... Le tir de bouchon dans l’œil ? Non, pas suffisant...

Je passe en revue mes options, observant le décor, les gens, listant les armes potentielles quand soudain la révélation me tombe dessus. Et le mot n'est pas vain, parce que je viens de remarquer le magnifique lustre qui surplombe la piste de danse. Une monstruosité de cristaux translucide et taillés pour étinceler de milles feux en renvoyant la lumière, des cristaux taillés, pointus, tranchants ! A qui il ne manque qu'une bonne impulsion pour une chute mortelle !

Hum. Peut être un peu trop mortel d'ailleurs.... Rah, dommage !

Bon, tant pis, il ne reste que la gaffe absurde.

Pendant que le couple phare se met à danser et que tout le monde les regarde avec des cœur dans les yeux, je me rends au buffet ou une paire de larbins est en train de se lancer dans le découpage difficile d'un espadon d'au moins deux mètres. Un découpage de maestro a huit mains, avec couteaux et fourchettes en argent, sous le regard d'un public admiratif devant une telle habileté. Pff. Je suis sur que je pourrais en faire autant, je vais même faire mieux ! Il ne faut qu'une seconde de passe passe pour mettre la main sur un des couteaux de réserve. Puis je passe à l'action. Je met un croche pied discret à un serveur de passage qui me renverse son plateau de verre dessus, un sautillement d'esquive parfaitement normal me permet de coller la pire des jambes de bois au plus gros noble du coin qui attend en salivant la fin de la découpe. La douleur est telle qu'il s'effondre immédiatement de tout son long, droit sur le bout du plateau que son poids, par un magnifique effet de levier catapulte immédiatement dans les airs pendant que la table s'effondre dans un fracas assourdissant.

Pendant une longue seconde d'éternité, tout le monde observe le poisson qui traverse les airs, paraissant presque a nouveau vivant a l'exception de des filets à nu, entourés d'outils de découpe et de garniture. Puis le poisson rencontre Gwen, et la féérie volante redevient un vaudeville. Tout le monde se met à pousser des cris affolés, on se jette sur la gamine qui vient de se prendre un poisson en pleine poire et qui, heureusement, n'est que sonné, on l’attrape, on la relève. Et c'est la qu'on se rend compte du drame !

Enfoncé jusqu'a la garde dans son épaule, un des couteaux à découper qui a volé avec le poisson ! Improbable non ? Complétement impossible oui. en tout cas quand il n'y a pas d'agent dans le coin pour réussir ce magnifique lancer de couteau pendant que tout le monde fixe le poisson.

- Ne touchez pas à ce couteau ! Si vous l'enlevez elle pourrait se vider de son sang.

Héléne, parfaite dans son rôle. C'est presque dommage que ce soit sa soirée d'adieu...

Un moment, excitée, plongée dans ses pensées alors qu’elle mesurait avec soin les paroles d’Hélène, qu’elle s’imaginait déjà à la surface en train de faire mille et une découverte.

Puis le suivant, quelque chose… La transperca avec violence, puis un poisson de plus de 100 kg lui tomba dessus, et… Et.. La bulle de Gwen éclata sous le poids, et la mademoiselle qui allait avoir une sale bosse demain sur la tête suite à la rencontre style sandwich entre un espadon et le sol se retrouva soudainement terrifiée, une douleur comme elle en avait jamais senti lui traversant l’épaule. 

Sa sœur cria, quelqu’un lui saisit le poignet et lui empêcha de toucher par réflexe la zone affectée, puis alors que Gwen essaillait vainement de comprendre ce qui lui arrivait, tout un public flou derrière ses larmes s’enflamma.

-” Qui à fait ça ?! Qui ose ?!”
- ”C-c'était un accident, je crois, j’ai vu un noble tomber sur la table et-”
- ”Quelqu’un m’a frappé ! On m’a frappé exprès !”
-”Laissez-moi approcher ! Utilisez ma chemise comme bandages !”
-” Ça sent le coup monté ! Je suis sûre que c’est un des humains venus ici qui à fait ça ! On n'aurait pas dû les inviter.” 
-”QUOI ?! Dis-moi ça à la face si tu l’oses mi-sardine ! J’ai vu de mes propres yeux que c’est l’un de vos serveurs qui a trébuché et caussé la gaffe ! Ce n'est pas notre faute si votre race inférieure-”

Gwen n’écouta pas le reste dans le très soudain et magnifique brouhaha qui s’éleva, chaque invité hurlant plus fort que son voisin alors que les éléments les plus haineux de la soirée… Ne tardèrent pas à profiter de l’occasion, la sirène blessée en leur sein ne devenant plus qu’une excuse pour donner libre cours à leur haine.

Quelqu’un bouscula Hélène, et Gwen ne put que sangloter tandis qu’elle se couvrit de son mieux avec sa queue, à deux doigts de la crise d’angoisse alors qu’elle n’avait soudainement plus aucun espace, que la foule déjà serrée et agitée autour du drame commença à se pousser les uns les autres. Puis quelqu’un dans le tas fit un nouveau faux pas, frappa sans faire exprès la garde du couteau sur son épaule et-

L’hurlement de la  jeune Dollyn s’élève par-dessus le boucan, son sang ne tapissant le sol que plus rapidement encore. 

Le pauvre humain en cause du coup, le même qui avait proposé sa chemise comme bandages, ne put que pâlir comme un linge et paniquer à son tour.

-” Oh ciel !  Pardon ! Pardon je-”

Il n’eut pas le temps de finir de s’excuser profusément qu’un homme-poisson tigre à ses côtés, totalement livide, lui brissa la mâchoire d’un seul coup poing. 

Et juste comme ça, tout dégénéra encore davantage.