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Cinquième chapitre ; Creuser son nid et le rouvrir


- « T’es pas ma daronne tu sais… »

- « Cela ne m’empêche pas de prendre soin de toi à ma façon, hihihi ! »


C’est comme un gosse que je gonflai mes joues, toujours couché sur le lit de la chambre que j’avais récupéré comme étant la mienne. Faut dire qu’elle était plutôt spacieuse et cosy comme chambre, d’où mon choix depuis que je séjournais sur le nid des vaches. Faite complètement en bois, la bâtisse, astucieusement accrochée à un rocher du nid des vaches avait des airs de bungalow. Les senteurs boisées et marines qui s’y dégageaient étaient très agréables et avaient pour effet de m’apaiser, voire de m’endormir très rapidement. A bien des égards, rester ici et profiter du business des lieux sans trop se casser la tête était un bon plan qui mériterait d’être envisagé. Pour quelqu’un de moins ambitieux, en tout cas. Sauf que de l’ambition, j’en avais clairement à revendre et il était hors de question que je reste moisir ici. Se reposer sur ses lauriers ? No thanks ! J’étais persuadé que Grand Line me réservait de bonnes choses ; d’autant plus que j’avais réussi à me constituer un petit équipage d’une centaine de personnes après avoir placé ce petit bout de Manshon sous ma protection. Et qui disait équipage disait lieutenants et donc second pour le coup…

- « Tu es tellement adooorableeeee ! »

- « Et toi t’es une putain de stalkeuse… »

- « Ara ara ! Ce ne sont point des manières de parler à une lady, môsieur le capitaine ! »


Sous un petit rire espiègle, Violetta, assise à mon chevet vint m’assener une petite pichenette sur la tête, comme pour me punir de mes grossièretés. C’était une blonde au corps très plantureux qui n’avait pas hésité un seul instant à vouloir me suivre. Elle avait été d’ailleurs la première à s’imposer carrément à moi et avait été de très bons conseils sur les aménagements à faire au sein du nid pour le redynamiser comme il se doit. Niveau castagne, elle n’avait bien entendu pas fait le poids lors d’une confrontation pour qu’on se jauge l’un l’autre, mais elle sortait clairement du lot quant au maniement des armes. Un vrai soutien à tous égards. Toutes ces raisons contribuèrent au fait que j’bronchai lorsqu’elle faisait ses caprices. Toujours couché sur mon flanc gauche, je l’observai d’un air résigné tout en me demandant comment elle avait réussi à se faufiler dans ma chambre sans que je n’aie réussi à la sentir arriver. C’est dire qu’elle aurait même pu essayer de me buter dans mon sommeil ! Un constat qui me fit froid dans le dos l’espace d’un instant, avant que la quarantenaire ne pose l’une de ses mains graciles sur ma tête…

- « Même si je voulais te tuer, je pense que je n’y arriverais pas. Quoique je pourrais peut-être t’empoisonner si jamais je commençais à m’ennuyer… »

- « On va éviter s’il te plait. Je suis encore trop jeune pour ça, hahaha… »


La blonde pouffa de rire et me tira gentiment l’une de mes joues d’un air tendre et presque maternel. J’avais parfois l’impression qu’elle me prenait pour l’un de ses proches. Un petit frère… Ou même un enfant… Va savoir. Cependant, n’était point un gros fouineur, je n’avais jamais cherché à creuser son passé plus que nécessaire. Le temps ferait surement ses œuvres… En attendant, la porte de mon petit cocon s’ouvrit à la volée pour laisser place à une autre de mes lieutenantes. Serenity. Une membre de la tribu des trois yeux, as de la gâchette, blonde et tout aussi belle que Violetta. La différence entre les deux femmes ? Le caractère. Si Violetta tenait plus de la mère poule sadique, Serenity était une boule d’énergie qui tempêtait à la moindre occasion : « MAIS QU’EST-CE QUE VOUS FAITES TOUS LES DEUX ?! » Sa voix criarde résonna dans tout le bâtiment, de quoi me faire grincer des dents. Violette, provocatrice dans l’âme, lui tira la langue en plus d’un clin d’œil amusé qui suggérait qu’il s’était passé quelque chose entre nous. Soupirant de plus belle, je consentis à me redresser de mon lit avant de désamorcer la bombe…

« Il ne s’est rien passé, évidemment. Je viens à peine de me réveiller. Du coup, qu’est-ce qui se passe pour que tu débarques comme une furie comme ça ? L’intimité, c’est à croire que vous connaissez pas hein… » Dis-je en faisant la tronche.

« Ah oui… Je me disais bien qu’il ne s’était rien passé… » Répondit-elle, toute rouge, avant de poser ses trois yeux vers Serenity, l’air frustrée. « Et sinon, Taiji est de retour avec de la marchandise. C’est notre première fournée depuis longtemps, donc j’ai pensé que tu voudrais voir ça… » Conclut-elle en haussant les épaules tout en éludant ma remarque sur leur tare commune : Le manque de respect de l’intimité.

« C’est déjà ça hein… » Grommelais-je, avant de me redresser pour aller me débarbouiller.

La journée promettait…
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Une demi-heure plus tard, au port du nid des vaches…

- « La pêche a été bonne Taiji ? »

- « Complètement. C’est pas bien difficile. »


Après une poignée de main virile, Taiji, un homme trois-yeux, garde de corps occasionnel de Lucia (ma collègue) et second me conduisit sur l’un des navires qui venait d’arriver. Après rapide visite, je constatai qu’ils s’étaient renfloués en matériels, mais aussi en esclaves à vendre. C’était assez impressionnant (et cocasse) de s’apercevoir que les esclaves avaient des milieux sociaux hétéroclites : des plus pauvres au plus riches/bourges.

- « Comme tu as dit le comprendre, on vise le plus souvent des navires de croisière sans grande sécurité. On chope tous les civils sur place et on fait également une razzia sur les objets de valeurs. C’est pas très compliqué comme procédé. »

- « Que des navires de croisières ? »

- « Tant que c’est un navire civil, on y va. On a des contacts un peu partout sur les blues. Des gars nous revendent des itinéraires de navires de croisières pour pas grand-chose. Suffit ensuite qu’on intercepte les malheureux avec toutes les infos qu’on a et c’est dans la poche. Et comme sur les blues, c’est pas des croisières ou des navires civils qui manquent… »


- « Pas mal… » Qu’avais-je dit avant de m’approcher d’une bourge qui n’avait guère plus que des haillons comme vêtements. La pauvre pleurait et ferma même les yeux lorsque je passai une main sur son visage, alors que nous étions toujours dans la cale du navire devant une multitude de captifs. « Il y a des alternatives ? »

- « Payer des esclaves pour les revendre ? C’est trop couteux. Les marges seront trop faibles. Bien entendu, il arrive qu’on fasse de bonnes affaires avec certains revendeurs indépendants, mais ça reste occasionnel. Par contre, on a effectivement une alternative intéressante : certains patelins revendent les leurs pour diverses raisons : soit parce qu’ils ont besoin de cash, soit parce que la personne vendue est coupable d’un grave crime… Bref, c’est pas non plus courant, mais ça fait parfois du bien à notre stock… »

- « Des rapts sur la terre ferme ? »

- « Rarement. C’est généralement trop risqué. Sur terre ferme, t’as des chances que des gens puissent t’échapper et aller tout raconter à la marine. Sur la mer, difficile de se cacher surtout qu’on coule généralement le navire abordé quand on le récupère pas carrément s’il peut être réutilisé, customisé ou même démantelé. On préfère ne pas garder de traces. »


Un blanc s’en suivit alors que je passai en revue les esclaves, avant de me retourner vers lui, souriant :

- « Le même principe s’applique pour les objets à refourguer ? »

- « Pour le recel ? C’est même plus facile avec de la marchandise, je dois t’avouer. On change rien du coup ? »
Qu’il me demanda.

- « Y’a pas de raison maintenant que tout est revenu à la normale. J’essayerai de chercher des partenaires pour qu’on puisse avoir de quoi vendre en temps difficiles, mais avec toi et Lucia, je m’inquiète pas que tout ira pour le mieux. Et puis, vu comment j’ai graissé la patte des locaux… »

- « Tu m’étonnes. Ils t’obéiront au doigt et à l’œil, surtout après ta démonstration de force de l’autre soir. Personne n’aimerait t’avoir comme ennemi, j’peux te l’assurer. »


- « Tant mieux mon pote ! » Répondis-je tout sourire en lui tapotant une épaule. « Je te laisse te charger de tout ça avec Lucia. Vous êtes rodés. Et puis, si vous avez besoin de quelque chose, suffira de me faire signe par escargophone ! »

Constamment austère, Taiji eut néanmoins un sourire sur le coup.

Quant à moi, j’avais fini par sortir du navire, les mains dans les poches tout en laissant aux trois-yeux le loisir de commander ses sous-fifres pour conduire les futurs esclaves dans leurs futures geôles en attendant que de potentiels acheteurs rappliquent… Et ça n’allait surement pas tarder !
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Quelques heures plus tard…

J’avais commandé à tous mes nouveaux hommes de faire une nouvelle fois le tour des lieux, juste au cas où. Le nid avait donc été passé au peigne fin, mais personne ne trouva grand-chose, ni en bien ni en mal. L’endroit allait retrouver son lustre d’antan, aucune espèce de doute là-dessus. Cependant, ce qui me titillait était l’absence évidente de moyens de défense. Il fallait surement repeupler les eaux environnantes de vaches marines, d’escargophones caméra également ; mais aussi et surtout planquer des canons sur l’île un peu partout pour se défendre, au cas où. Qui plus est, je devais également m’assurer que la marine de Manshon où les mafias du coin ne viennent pas fouiner dans les environs pour nous chercher des poux. Je devais donc graisser la patte des uns et menacer (ou faire affaire) avec les autres. C’était une évidence. Avoir des garanties de la sorte ne serait surement pas de trop, surtout que je n’allais pas moisir dans le coin. Après tout, mes fonds avaient fondu comme neige au soleil, ce qui me poussait donc à devoir me bouger le cul pour chercher du fric. Et qui disait bouger disait aussi navire. Jobby pouvait toujours me dépanner, mais il me fallait également un navire personnel pour me déplacer…

- « Bref, il me faut du fric quoi… » Dis-je d’un air pensif…

- « On n’aura pas de bénéfices avant au moins un bon mois, tu sais… » Me répondit Lucia qui m’avait rejoint sur l’un des pontons de notre mini-port.

- « Tu m’espionnes maintenant ? On peut plus avoir d’intimités dans cette vie hein ! »

- « Va te plaindre ailleurs, m’sieur le chef. La promiscuité, c’est un peu la base ici, tu sais… »


J’eus un soupir amusé en regardant la naine hausser ses épaules avant de boire une pinte de bière. La pauvre s’autorisait une pause fraicheur bien méritée. Depuis ma prise de pouvoirs sur cet îlot, l’héritière des Audifreddi qui était mon associée ici (et qui allait devoir gérer les lieux lorsque je ne serai plus dans le coin) n’avait pas arrêté de travailler pour remettre de l’ordre dans tout ce bordel. Maintenant, tout était au poil. Chacun des locaux savait ce qu’il avait à faire, d’autant plus j’avais un peu adouci les mœurs avec du fric en veux-tu en voilà ! Peut-être que j’aurai pas dû trop leur en donner, maintenant que j’étais presque sur la paille. Ce mois risquait d’être difficile, surtout si je devais m’acheter un navire digne de ce nom, vu l’équipage que j’avais maintenant. Ça risquait pas d’être une partie de plaisir ! « On a renoué avec nos anciens contacts et partenaires et on leur a assuré que le nid des vaches était dorénavant fonctionnel comme avant. » Lucia, dans sa générosité me rassurait un peu. De ce côté-là, il n’y avait plus grand-chose à faire. Pareil pour les problèmes qui se dessinaient sous mes yeux… Mais chaque chose en son temps. Maintenant, il ne me restait plus qu’à aller de l’avant. Les autres détails, on les fignolerait plus tard.

- « On peut ouvrir proprement ? »

- « C’est pas comme si je t’attendais pour le faire ! On a même des clients qui vont débarquer ce soir ou demain matin vu le nouvel arrivage d’esclaves qu’on s’est fait. »


Soupir amusé. La jeune femme ne perdait pas de temps. Parfait. J’aurai pu lui tirer les joues pour la recadrer sur son impertinence, mais elle ne changerait pas de sitôt. Mieux valait laisser passer. Et puis vu le travail qu’elle avait accompli avec Taiji qui serait là pour l’épauler, il n’y avait pas grand-chose à craindre pour l’instant. Cela étant dit, mon nom allait plus que jamais circuler et j’allais surement être sous le projecteur des hautes instances du Gouvernement Mondial. Pour avoir été un temps des leurs, je savais plus ou moins comment ça se passait. Chaque action allait dorénavant être décisive. J’étais maintenant à deux doigts de basculer dans la piraterie pure, mafieux et pirates ayant une nuance tellement fine dans ce monde qu’on pouvait facilement confondre les deux catégories. Avoir une prime sur ma gueule hein ? Y’avait surement moyen que ça devienne inévitable, même en la jouant fine. Les choix qui s’offraient à moi étaient cornéliens, si bien que j’étais hésitant pour la suite des évènements à venir. C’était donc une période charnière pour moi. Mais étonnamment, j’eus un sourire amusé. Y’avait pas plus excitant que de foncer tête baissée vers l’inconnue. Dans une certaine mesure évidemment, on s’entend…

- « On peut dire que c’est une affaire rondement menée ! »

- « Ouaip. Du coup, tu pars quand ? »

- « Dès ce soir. Je dois renflouer les caisses. Et puis, j’ai besoin d’un navire… C’est l’urgence du moment vu tous ceux qui me suivent maintenant. »


Lucia termina sa pinte, me tapota et se retourna vers le nid…

- « Bon courage m’sieur le chef ! Préviens-moi quand tu seras sur le départ ! »

L’avenir promettait comme on dit !
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