Colonel ?
… Arf. C’est lui ça, vrai. Une semaine pourtant déjà, et l’est pas encore bien habitué à c’grade le Tahar. Faut dire qu’à Marie-Joa y a pas mal d’autres trucs à digérer qu’un changement d’nom. Infos, apéritifs, r’gards condescendants d’l’amirauté, les joies d’être dans le cœur du cœur du cœur. M’fin bref. Qui voilà ? Lieutenant-Colonel Ela Inboshassee pour le servir. Jolie poupée, un peu jeune mais pleine de promesses. Blonde, ça faisait longtemps. Du caractère, pas là où elle est pour rien à la différence de pas mal d’officiers en station ici. F’ra l’affaire, il s’est renseigné avant d’la choisir parmi les figues les plus, hm, pulpeuses qu’on lui proposait… Quoi y a donc, ptite ?
Vous êtes demandé, Colonel.
Demandé ? Arf, du gratin assurément. Maintenant c’est lui qui demande qu’on s’déplace, normalement. A part les pontes justement. Puis la façon dont la miss l’a dit, c’est qu’c’est urgent. Ou gênant, la nuance est mince sur son mignon minois d’belle plante. Barf. Où ça ? La cour ? La cour. La chambre, le costard, le Narnak, le col, les couloirs, les escaliers, non, l’autre escalier, rah, putain de plan, quel est le con qu’a designé c’t’endroit ?! Et la cour. Merde, le Narnak se décroche, réajuster ça.
Bonsoir Colonel Tahgel.
Cette voix. Onze ans, pas une ride. Dans la voix. Sur le visage, y en a quelques unes qu’sont apparues. Au coin des yeux. D’jolies rides, pas des crevasses. Toujours les mêmes yeux clairs, les ch’veux libres pareils. Quel âge ça lui fait ? Trente-six, trente-sept ? Une plante mûre qu’a pris soin d’elle. Maint’nant qu’il y pense, c’normal qu’Ela f’sait un peu la gueule y a deux s’condes en faisant passer l’message. Jalousie instinctive d’femme à femme.
Jenv ?!
Elle sourit. Putain, que d’souvenirs qui l’assaillent, là, maintenant tout de suite. D’un coup. Des flashs, des putains d’flashs qu’aveuglent sur l’instant. Corbeau, la cour martiale, Flermet, la prison. Le verdict, la promo. Le lendemain. Oh, le lendemain… Il sourit aussi, mais pas d’la même façon. Il a dix ans d’moins qu’elle, il est toujours fou, il a pas la même maturité qu’elle qu’a vu la vie la mener pas loin du faîte de sa carrière. Amirale qu’elle est, tiens, d’ailleurs. Logique, avec les années. Il est troublé, c’était pas prévu au programme, faut l’temps d’absorber l’info. Un truc de plus à absorber. Un bon truc.
Observons deux papillons.
Qu’y dit pour temporiser. Ils s’asseyent. Y a pas d’papillon. Bon, parlons alors. Ils parlent. Elle est maquée. Maquée dur. Ca fait genre cinq ans. Boah, ouais, bon, soit, c’dans l’ordre des choses. Qui c’est ? Un gars bien ? Un goéland aussi ? HEIN ?! Putain non, mais comment t’as pu ? Pas lui, pas LE Flermet. M’enfin, Jenv ? C’était quoi l’idée ? Y t’courait après ? Rah le fumier. C’pas Montrouge que j’aurais dû buter en douce à l’époque après l’procès, c’pas sa femme à lui, pauvre mutilé impuissant, qu’j’aurais dû libérer du joug marital. C’est lui, c’est c’t’enflure de pourri. Enfin, pourri honnête, mais bon, Tahar se maîtrise pas, c’est la colère qui l’fait parler. Pour quelques mois encore il est dans la vingtaine, c’sont les restants d’sa fougue de jeune qui parlent.
Elle, elle s’amuse, à l’entendre parler comme ça. C’est rafraîchissant, ça la change des gens qui la respectent en surface et la poignardent dans le dos. Ou la respectent vraiment mais du coup sont d’une transparence ennuyeuse au possible. Quand elle a appris la nouvelle de sa nomination au poste de colonel – non elle n’a eu aucune influence là-dessus – et de ce qu’il était missionné à Marie-Joa pour les huit prochains mois, il a fallu qu’elle vienne le voir. Si près d’elle, c’était un signe.
Il réalise soudain que, si elle sourit parce que ça lui fait vraiment plaisir de le voir, si sa voix a gardé sa fraîcheur d’antan, y a un truc qui cloche. Elle est réservée, elle l’était pas avant. Enfin pas en dehors des cercles où son grade lui imposait une certaine froideur. Y a un truc qu’est pas net, mais elle le dit pas. Son mariage ? Non, autre chose. Autre chose qu’elle le dira pas. Pendant les mois qu’il a passés avec à l’époque, il était certes rien d’plus qu’un jeune con qu’avait pas encore la vingtaine mais il savait déjà lire les femmes et il a appris à la connaître, elle. Elle se lève, ça lui a fait plaisir de le voir. Au revoir colonel Tahgel.
Amiral.
… Arf. C’est lui ça, vrai. Une semaine pourtant déjà, et l’est pas encore bien habitué à c’grade le Tahar. Faut dire qu’à Marie-Joa y a pas mal d’autres trucs à digérer qu’un changement d’nom. Infos, apéritifs, r’gards condescendants d’l’amirauté, les joies d’être dans le cœur du cœur du cœur. M’fin bref. Qui voilà ? Lieutenant-Colonel Ela Inboshassee pour le servir. Jolie poupée, un peu jeune mais pleine de promesses. Blonde, ça faisait longtemps. Du caractère, pas là où elle est pour rien à la différence de pas mal d’officiers en station ici. F’ra l’affaire, il s’est renseigné avant d’la choisir parmi les figues les plus, hm, pulpeuses qu’on lui proposait… Quoi y a donc, ptite ?
Vous êtes demandé, Colonel.
Demandé ? Arf, du gratin assurément. Maintenant c’est lui qui demande qu’on s’déplace, normalement. A part les pontes justement. Puis la façon dont la miss l’a dit, c’est qu’c’est urgent. Ou gênant, la nuance est mince sur son mignon minois d’belle plante. Barf. Où ça ? La cour ? La cour. La chambre, le costard, le Narnak, le col, les couloirs, les escaliers, non, l’autre escalier, rah, putain de plan, quel est le con qu’a designé c’t’endroit ?! Et la cour. Merde, le Narnak se décroche, réajuster ça.
Bonsoir Colonel Tahgel.
Cette voix. Onze ans, pas une ride. Dans la voix. Sur le visage, y en a quelques unes qu’sont apparues. Au coin des yeux. D’jolies rides, pas des crevasses. Toujours les mêmes yeux clairs, les ch’veux libres pareils. Quel âge ça lui fait ? Trente-six, trente-sept ? Une plante mûre qu’a pris soin d’elle. Maint’nant qu’il y pense, c’normal qu’Ela f’sait un peu la gueule y a deux s’condes en faisant passer l’message. Jalousie instinctive d’femme à femme.
Jenv ?!
Elle sourit. Putain, que d’souvenirs qui l’assaillent, là, maintenant tout de suite. D’un coup. Des flashs, des putains d’flashs qu’aveuglent sur l’instant. Corbeau, la cour martiale, Flermet, la prison. Le verdict, la promo. Le lendemain. Oh, le lendemain… Il sourit aussi, mais pas d’la même façon. Il a dix ans d’moins qu’elle, il est toujours fou, il a pas la même maturité qu’elle qu’a vu la vie la mener pas loin du faîte de sa carrière. Amirale qu’elle est, tiens, d’ailleurs. Logique, avec les années. Il est troublé, c’était pas prévu au programme, faut l’temps d’absorber l’info. Un truc de plus à absorber. Un bon truc.
Observons deux papillons.
Qu’y dit pour temporiser. Ils s’asseyent. Y a pas d’papillon. Bon, parlons alors. Ils parlent. Elle est maquée. Maquée dur. Ca fait genre cinq ans. Boah, ouais, bon, soit, c’dans l’ordre des choses. Qui c’est ? Un gars bien ? Un goéland aussi ? HEIN ?! Putain non, mais comment t’as pu ? Pas lui, pas LE Flermet. M’enfin, Jenv ? C’était quoi l’idée ? Y t’courait après ? Rah le fumier. C’pas Montrouge que j’aurais dû buter en douce à l’époque après l’procès, c’pas sa femme à lui, pauvre mutilé impuissant, qu’j’aurais dû libérer du joug marital. C’est lui, c’est c’t’enflure de pourri. Enfin, pourri honnête, mais bon, Tahar se maîtrise pas, c’est la colère qui l’fait parler. Pour quelques mois encore il est dans la vingtaine, c’sont les restants d’sa fougue de jeune qui parlent.
Elle, elle s’amuse, à l’entendre parler comme ça. C’est rafraîchissant, ça la change des gens qui la respectent en surface et la poignardent dans le dos. Ou la respectent vraiment mais du coup sont d’une transparence ennuyeuse au possible. Quand elle a appris la nouvelle de sa nomination au poste de colonel – non elle n’a eu aucune influence là-dessus – et de ce qu’il était missionné à Marie-Joa pour les huit prochains mois, il a fallu qu’elle vienne le voir. Si près d’elle, c’était un signe.
Il réalise soudain que, si elle sourit parce que ça lui fait vraiment plaisir de le voir, si sa voix a gardé sa fraîcheur d’antan, y a un truc qui cloche. Elle est réservée, elle l’était pas avant. Enfin pas en dehors des cercles où son grade lui imposait une certaine froideur. Y a un truc qu’est pas net, mais elle le dit pas. Son mariage ? Non, autre chose. Autre chose qu’elle le dira pas. Pendant les mois qu’il a passés avec à l’époque, il était certes rien d’plus qu’un jeune con qu’avait pas encore la vingtaine mais il savait déjà lire les femmes et il a appris à la connaître, elle. Elle se lève, ça lui a fait plaisir de le voir. Au revoir colonel Tahgel.
Amiral.
Dernière édition par Tahar Tahgel le Mar 18 Oct 2011 - 23:24, édité 1 fois