La quête du Two Piece

La main sur le front, les cheveux aux vents, une femme vêtu d'une robe noir scrute les horizons sur la proue du navire. Plissant des yeux, elle tend une sorte de boussole devant elle. Cet objet est un Log posé censé guider leur périple vers la prochaine île de cette mer capricieuse. La blonde aux pupilles blues agite l'engin tout en inclinant la tête. L'aiguille tangue pour revenir à la même position, c'est à dire opposée à la direction que prend le petit navire. La jeune femme doit se faire une évidence. De toute son existence et de toute sa carrière, il ne lui manquait plus qu'être perdu au milieu de la Route de les Périls. Cette jeune femme en question est loin d'être celle qui cède à la pression facilement. C'est une grande aventurière et riche héritière destinée à trouver le plus grand trésor de touts les temps du nom d'Eris, surnommée grandiosement par le peuple comme la Folle qui parle à l'oreille du One Piece… en réalité, ce n'est qu'une couverture. Son véritable nom? Il est classifié. Sa véritable allégeance n'est assujettie qu'à l'organisme le plus tentaculaire du monde, le Cipher Pol. Du nom de code Agent Tarentule, elle a été mobilisée par une section secrète pour traquer une traître parmi son institution, Farore Corsandre. Celle-ci aurait entamé un périple le long de la troisième voie de Grandline, une zone de cette mer dont le contrôle des autorités gouvernementales sont extrêmement faibles. L'agent Tarentule compte bien l'attraper par la peau des fesses, histoire de l'humilier avant que son exécution soit orchestrée.

La blonde jette un œil vers son collègue pour cette mission. Un ancien bagnard devenu un serviteur bien docile de sa Dame dont il porte le nom de Sinbad… une astucieuse couverture aussi, car, lui aussi, est un agent gouvernemental mandaté dans le secret. Cependant, il est du genre à ne pas rechigner à mettre un terme aux soucis en les égorgeant, si l'allusion est assez évocatrice. Un fou dangereux d'un style différent, pour former un duo complémentaire. Enfin, c'est sûrement ce qu'on pensait l'administrateur qui les a associés…

“Sinbad, nous avons un problème, mon cher. Ce log pose nous a totalement leurré. Nous sommes tombés la tête  la première dans le piège du baleineau.”

Toujours ce regard perplexe collé à son visage à chaque fois que l'agent Tarentule prononce la parole. Le bougre commence à comprendre que sa collègue ne prend absolument rien au sérieux et que tout est un jeu pour elle. A-t-elle point qu'il est difficile de séparer sa couverture de sa réelle personnalité ? On peut croire qu'elle a toujours été folle finalement.

“Voyons, Sinbad, tu ne connais pas cette histoire. Vois-tu, toutes les îles ont un champ magnétique propre. Tu le sais très bien car c'est dans notre formation dès la première année. Mais sais-tu que certaines îles qui ont été engloutis quelques siècles auparavant préservent des signaux magnétiques propres? Il s'agit d'une astuce que seuls les esprits tordus,  pervers et mesquins connaissent. Pour mener un équipage rival trop pressé à sa perte, tu lui vends un objet qui a tout l'air d'un log pose mais qui est, en vérité, un Eternal pose d'une vieille île disparue. Malheureusement, nous avons subtilisé quelqu'un qui avait beaucoup d'ennemis, et probablement, sans le savoir, notre larcin a sauvé sa vie.”

Grimpant les cordages avec dynamisme, la blonde crie haut-les-choeurs comme si elle était capitaine d'une grande frégate.

“Etat d'urgence sur le Navy Hope ! Restons quelques jours, mon plan est d'attirer un South Bird en continuant d'aller de l'avant. Pendant ce temps, on passe en mode survie ! Et nous allons survivre ! Car nous sommes qui ? Nous sommes des simples Civils sans histoire ! La voix du One Piece continue de nous appeler. Perseverons et le salut nous sera accordé après un baptême dans une piscine de pièces d'or ! Hihihi !”

Levant un bras vers le ciel, son charisme ne reçoit qu'en retour le bruit du vent. Le mine déçue, Dame Eris redescend.

“Je savais qu'on aurait dû embarquer cet harponneur avec nous. Il était plus joyeux lui.”

“Oh !”

Entendant la nouvelle de son acolyte, la jeune reprend son rôle de plus belle. Sautant sur les cordages, Dame Eris scrute l’horizon pour parvenir enfin à repérer la flotte de pirates au loin.

“Oh Oh !”

Fixant leur pavillon, l’agent Tarentule comprend assez vite de quel genre d’hors la loi il s’agit. Un bon membre du gouvernement connaît les Supernovas sévissant dans la route de tous les périls, surtout en y entamant le voyage. Ceux-ci sont les Orphelins de Zaun, des truands sortis de tréfonds de leur misère pour prendre leur revanche sur la classe sociale supérieure. Autrement dit, ils attaquent de riches commerçants et bourgeois pour se faire une fortune. Elle se demande ce qu’ils font dans une route visiblement peu fréquentée. Dans tous les cas, il est bon qu’elle reste dans son personnage. Cette fois-ci, c’est réellement une question de vie ou de mort.

“Nous sommes sauvés ! Qu’est ce que je disais, la voix du One Piece a toujours raison.”

Balançant ses bras, la blonde reste infatigable pour attirer leur attention. Une initiation ridicule et totalement inutile, mais elle s’en amuse.

“Ouh ouh ! Ils viennent vers nous. Hihi ! Regarde donc leurs magnifiques navires, certainement un compétiteur de talent. Hum. Sans aucun doute.”

Les pirates parviennent enfin à accrocher le petit Navy Hope de grappin et un premier groupe saute sur le pont. Capulina s’exclame d’un enjoué à ces nouveaux venues

“Bienvenue dans le Navy Hope ! Merci de votre visite, vous nous sauvez la vie. Je me présente Dame Eris et, voici mon serviteur, Sinbad. Voyez-vous, nous avons une panne de Log Pose. Est-ce possible de vous en racheter un ? Même un tout petit.”

L’homme aux cicatrices lui attrape le coup en grognant. Il ne soucie guère d’étrangler cette femme à la mort. L’attitude d’Eris n’a pas l’air de l’avoir adouci.

“Qu’est ce que tu racontes, bordel?
-Oy. Calme toi, Gouken.”

Un autre individu à la stature imposante s’interpose. Ce visage est assez connu pour que Capulina le reconnaisse. Ce n’est autre que le Capitaine des Orphelins de Zaun, Bojack, dit le fauve. Son lieutenant lâche le cou d’Eris qui s’écroule au sol. Le terrible pirate se penche pour lui attraper le menton.

“Dis moi, ma jolie. Qu’est ce deux glandus comme vous faîtes perdue au milieu de Grandline?”

La blonde émet un rire gêné adoptant tous les signes de la peur.

“Hihi… nous suivons la voix du One Piece.
-La voix du One Piece? Il te parle?
-Oui, tous les jours ! Il me dit qu’il veut être trouver, que cela fait trop longtemps qu’il est seul et qu’il s'ennuie beaucoup. Je vais donc aller le trouver pour le consoler.
-Bahahah ah. Tu entends ça, Bardock? On a trouvé la barge qu’il te faut.
-Hum.”

Il lâche son visage pour se redresser. L’homme puissant pose ses yeux un instant sur le serviteur. Le regard hautain avec un sourire narquois, Bojack semble apprécier les prises faciles.

“Trève de plaisanterie. Nous ne sommes pas des enfants de cœur, ici. Et tes allures de petite bourgeoise commencent à irriter mon frère. Si tu ne veux pas mourir, baisse le regard pendant que l’on te dépossède de tout.”

Capulina reste sur ses genoux tandis qu’elle observe le sol l’air apeuré.

“Ahah ! Le regard ne ment jamais. Petite prise aujourd’hui, les gars. Embarquez tout et enchaînez-les. La chance nous sourit sur le chemin de notre succès.”

Lorsque l’attention est tournée un instant vers le Capitaine donnant ses ordres, un sourire apparaît sur le visage baissé de l’agente. Voilà que l’aventure prend un tournant inattendue, un challenge à la hauteur d’un agent d’exception.

Quelques semaines plus tard…

Une femme mince en haillons est dans une cabine spacieuse, portant une serpillière les mains usés par des multiples tâches serviles. Elle passe avec un geste exagérément gracieux, nettoyant la crasse et la poussière sur son passage. Ses pas ressemblent à une valse tandis qu'elle chantonne une comptine pour enfant avec un grand sourire.


Soudain, une autre femme plus ronde et recroquevillé sur elle-même entre dans la pièce.

“Éris?
-Dame Éris. Voyons, Cunégonde, combien de fois dois-je le répéter ?
-Mais, nous sommes des esclaves.
-Et bien?
-Je me dis que si nos maîtres nous entendent, ils te frapperont.”

Posant sa serpillière dans le seau, elle s'approche de son amie de circonstance en touchant du doigt sa joue potelée.

“Allons, allons, ma chère. Ils s'en fichent de ce que l'on peut dire tant que l'on fait les tâches les plus ingrates.
-Pourquoi tu es aussi…
-Perspicace? Un de mes nombreux héritages familiaux !
-Non. Depuis que tu es arrivé, tu as l'air tout le temps heureuse malgré les traitements que tu as subi.
-Quelques coups de fouet pour avoir ricaner ne me font pas de mal. J'ai vécu pire.
-Et là fois où ils t'ont accrochés sur la proue pendant trois jours sans manger.
-Ah oui. Hihi ! Une formidable attraction !
-Tu sais… tu as un beau visage, si tu étais moins… comme ça. Tu pourrais devenir concubine.
-Quel Enfer ! Je préfère largement nettoyer la boue la plus crasse.”

Bien évidemment, la vie de servitude lui est insupportable, que les humiliations sont éprouvantes et que sa captivité chez les Orphelins de Zaun l'épuise. Néanmoins, deux aspects de sa psychologie étrange rendent les choses plus aisée. Se savoir dans un rôle qui lui plaît et sa prise d'informations récente. Au début, elle pensait faire face à un contre temps très gênant. Elle avait le plan de tous les assassinés dans leur sommeil. Mais c'est sans compter une piste crucial que lui a été ouvert. Un coup du destin qui pourrait commencer à faire croire que le One Piece l'assiste vraiment dans son aventure. Un peu de mystique ne fait pas de mal, surtout pour s'en moquer, se dit-elle. Finalement, si on change de mentalité, on peut supporter une situation plus dégradante et injuste soit-elle. Il suffit d'apprendre à la désirer et apprécier cette misère pour qu'elle n'en soit plus une. Après avoir dompter son corps pour en faire une arme, maîtriser son esprit semble devenir pour l'agent Tarentule, la complétude secrète du Rokushiki. Qui n'a jamais pensé au versant spirituel de cet Art martial, Capulina commence tout juste à l'envisager. Mais, pour le moment, sa survie et sa mission sont les priorités.

“Cunégonde, est-ce qu'Élise est dans la cabine de Maître Gouken ?
-Euh… oui, elle y dort encore, comme d'habitude, mais pourquoi ?
-Je vais la réveiller. Hihi !
-Attends… ce n'est pas trop osé ?
-Mais non, j'ai un petit cadeau pour elle.”

Se dirigeant vers la cabine du plus jeune frère et lieutenant des orphelins de Zaun, Dame Éris entre sans aucune gêne en effectuant une révérence exagérée pour s'annoncer.

“Élise de Rosan, mes hommages !”

Une femme brune et au physique bien plus avantage que les deux esclaves se redressent avec non chalance et lassitude. Son regard vide et agacé fixe la cause de son réveil.

“La folle et la petite grosse… tu as ce que j'ai demandé ?
-Du cyanure à base de tous les pépins de pommes moulus et distillés ! L'alchimie peut-être si divertissante parfois. Je me suis laissée aromatiser le tout avec un arôme de fleur d'oranger. Aussi délicat que votre beauté goanne.”

En effet, Élise de Rosan était une fille de bourgeois de Goa qui ne rêvait que de s'anoblir. Malheureusement, la révolution du coin les ont forcés à la fuite. Laissant une entreprise commerciale sur Grandline pour refaire sa richesse, ils sont mal tombé. Les mercenaires qui les escorter ont été massacrer, le marchand tué, sa femme noyé lorsqu'elle a tenté de fuire avec sa fille. Il ne reste que Élise, qui est devenu concubine depuis plusieurs années déjà par peur. Comment Dame Éris sait tout ça ? Car elle lui a tout raconté. Élise est connue pour rester tardivement dans ses couches et Capulina a rangé la cabine plusieurs fois en sa présence. Bien qu'au début, elle l'a malmené car son sourire lui était insupportable. La concubine de Gouken a commencé à trouver une oreille pour se confier. La curiosité de l'Agent Tarentule était poussé par autre chose que la simple histoire tragique d'une bourgeoise déchue. Et Élise l'a remarqué. Si bien qu'hier, elle demande à Éris un service particulier en échange de ce qu'elle sait sur les plans de l'équipage.

“Vous n’avez pas oublier notre marché.
-Oui… c'est vrai. Qu'etais-ce déjà ?
-Vous aviez évoqué la dernière fois que les navires vont bel et bien quelque part depuis le passage à Dead End et que nous sommes pas les premiers à avoir croisé votre chemin.
-Je n'en sais pas plus sur l'île en question. Tout ce que je sais, c'est que Bojack est en obsession sur la recherche d'un trésor.
-Le One Piece?!
-Si tu le dit.
-Mais quelle piste suit-il?
-Aucune idée. Mais il semble en compétition avec ce qu'ils surnomment la Reine Rouge. Gouken ne cesse de rabâcher qu'il veut la massacrer.”

Un grand sourire sur le visage, son intuition est confirmé. En fin de compte, il n'y a plus à attendre le bout moment pour tuer ces pirates abjects, ils vont la mener tout droit vers son veritable objectif.

“Hihi ! J'ai été ravi de faire affaire avec vous, Mademoiselle de Rosan.
-Satisfaite donc. Deguerpissez, je veux être seule.
-Mes adieux, Élise de Rosan.”

Le ton de Capulina prend des allures respectueuses comme si c'était réellement la dernière fois qu'elle se parlait toutes deux. Elles ne se sont pas considèrés comme amies. Les deux savent l'une l'autre qu'elles en tirent profit mutuellement. Ainsi, comme une relation d'affaires, l'agent Tarentule ne pose aucune question sur les raisons de sa demande et quitte la pièce avec Cunégonde. Celle-ci, ayant plus de cœur, semble peu à l'aise avec l'échange qui vient d'avoir lieu. Elle chuchote son inquiétude.

“Dis… elle va faire quoi avec tout ce poison?
-N'est-ce pas évident ? Elle va se suicider.”

La froideur des mots de Dame Éris contraste avec le gémissement choqué de la petite esclave.

“Ne sois pas surprise, ma chère. Cette femme a perdu toute sa valeur. Ce n'est plus qu'une coquille vide qui vend des parts d'elle même pour survivre. Et, aujourd'hui, il ne reste plus rien. Regrettant son passé sans l'espoir de pouvoir y revenir, elle mène une vie sans espérance, ni rêve, une vie de renoncement. Et lorsque l'on a renoncé à tout, il reste qu’une dernière chose à abandonner.”

La blonde soupire en prenant un grand bac avec tout les ustensiles pour laver du linge.

“La vie elle-même.”

Elle s'arrête un instant pour s'incliner vers Cunégonde.

“Toi qui envie les privilèges de ses femmes, retiens ceci. La souffrance du martyre est bien plus enviable que de mener une vie qui ne vaut plus la peine d'être vécue.”

La pauvre et gentille esclave se recroquevillé sur elle-même en retenant des larmes.

“Oups. Je crois bien avoir pourri l'ambiance. Allons, allons, nous avons du linge à blanchir. Faisons-le en chantant sur le pont. Hihi !”

Dans son esprit, elle ne pense qu'à communiquer ses nouvelles informations et la suite des plans à son servi… collègue Al-Sah-Him. Les choses sont probablement difficiles à endurer mais, cela sera probablement la mission la plus importante de leur carrière. Enfin, si les autorités n'ont pas déjà rayé leur nom en l'absence de nouvelles dans la liste des agents en service…