En une matinée froide, sur le pont d’une caravelle de la marine dans West Blue.
Vous savez, sergent, je...
Le vieux caporal n’a pas le temps d’entamer la seconde partie de sa phrase qu’il est déjà coupé par son interlocuteur.
Non, vraiment, Shiji, on va pas s’emmerder avec ce genre de protocoles bidons quand on est juste deux. Tu m’as vu récurer des toilettes pour Renard à l’époque, on va pas faire comme si on se connaissait pas.
Bon ben, si j’ai l’autorisation de "mossieur le gamin de merde" pour fa...
Il se fait interrompre une seconde fois, mais cette fois, les paroles sont accompagnées d’un regard amusé.
Pousse pas le bouchon trop loin, Shiji. Rappelle-toi que tu es -toléré- ici.
Le jeune homme termine sa phrase en rigolant alors que le caporal semble plus tendu.
TU SAIS DEPUIS COMBIEN DE TEMPS J...Ne t’emporte pas, Shiji, garde ton calme. Bordel, je vais jamais finir une phrase...
Il prend une grande inspiration et reprend :
Pour moi, c’est important, ces protocoles. C’est une part de ce qui, dans mon quotidien, va me séparer de ce que j’étais quand j’étais assigné à la garnison de Kage Berg. Alors... si ça vous dérange pas, sergent, j’aimerais continuer de vous appeler comme ça.
Le sergent applaudit et ajoute :
Tu as vu que tu pouvais terminer une phrase ? dit-il, non sans susciter un regard sévère de la part de son subalterne.
Bien, Shiji, fais comme tu l’entends. Cependant, on va être amenés à passer beaucoup de temps ensemble, alors viens pas pleurer plus tard.
Il laisse un léger blanc avant de reprendre, pour marquer une séparation avec un sujet plus sérieux et professionnel.
Je sais qu’on a parfois été… en désaccord par moments...
C’est un euphémisme si je peux me permettre.
Hmph, ouais, mais maintenant on n’est plus à Kage Berg. Je vais avoir besoin de personnes de confiance autour de moi, et bien que — ne te vexe pas — tu n’es pas le plus fort de la région, tes conseils et surtout la confiance que je peux placer en toi vont m’être précieux. Je… j’ai conscience de voir le bon en tout le monde et que c’est généralement de la connerie. Je vais avoir besoin que parfois quelqu’un me rappelle la dure loi de la vie avant que je l’expérimente moi... ou des innocents.
Il fixe l’horizon avec un regard qui pourrait presque paraître poétique, tellement il est rempli de pensées difficiles à interpréter.
Eh bien, sergent, si ce dont vous avez besoin, c’est d’un vieux gâteux qui va vous dire quand vous dépassez les bornes de la gentillesse, vous pouvez bien compter sur moi. On va les mater toutes ces petites raclures de West Blue.
West Blue, hein… Je pensais que tu avais de l’ambition, Shiji. J’ai pas rejoint la marine d’élite, et j’ai pas fait mon possible pour que Renard accepte que tu viennes avec moi pour qu’on croupisse ici. Un jour, tu m’as dit que, jeune, tu avais toujours rêvé de devenir quelqu’un d’influent dans la marine, non ?
Les lèvres de Shiji tremblent.
Si… vous aviez bien entendu, sergent. Il passe sa manche sur ses yeux alors que Kirei semble étonné de cette réaction.
Oh, désolé, je pensais pas que tu tenais autant à cette région...
Non, vous y trompez pas, j’ai passé des dizaines et des dizaines d’années de ma vie à attendre ça... Si on m’avait dit que c’était le petit con qu...
Kirei le fusille du regard.
Shiji, sois sérieux sur ce sujet.
Oui, c’est sorti tout seul, désolé, sergent. Je voulais dire que je m’attendais pas à ce que ce soit vous qui me promettiez ce dont j’ai toujours rêvé. Le vieux briscard réajuste son foulard avec agitation comme si ces paroles lui avaient bruler la gorge.
C’est toi qui es censé me ramener à la réalité quand je déraille, pas l’inverse, “caporal”.
Souriant alors qu’il mentionne le grade.
On va avoir beaucoup de choses à faire avant de pouvoir se porter candidats au-delà des Blues, et il faudra devenir bien plus fort aussi. Si la plupart des gens là-bas voguent dans autre chose que des caravelles et avec un énorme équipage, y a des raisons.
Si je peux me permettre, sergent, pourquoi vous cherchez une vie de danger alors que vous pourriez poser votre petit cul en garnison comme le lieutenant-colonel Renard ?
Kirei affiche un sourire et un regard plein de nostalgie alors qu’un soldat vient interrompre leur échange en leur amenant un café à chacun.
Voilà vos cafés, sergent, caporal. Alors que le soldat remet les cafés et tourne des talons il est coupé dans son élan.
Dites voir, avant que vous repartiez, comment définiriez-vous Grand Line ou le Nouveau Monde en un mot, soldat ?
Le soldat semble interloqué qu’une telle question lui soit posée. Il bégaye un instant avant de se reprendre :
Je dirais “danger”, mon sergent.
Alors qu’il se met au garde à vous, Kirei garde son sourire et glousse :
Rompez, merci pour votre réponse.
Le soldat s’éloigne, souriant du fait d’avoir été consulté, même pour quelque chose de si futile, alors que le sergent reprend la discussion :
Shiji, je t’ai dit que tu devais t’occuper des soldats. Tu ne les traumatises pas, hein ? Pourquoi il était à deux doigts de pleurer alors que je lui posais une question pareille ?
Le vieil homme semble embêté par la question.
Ils doivent bien apprendre la discipline et le respect des supérieurs, sergent.
Tu m’en diras tant… Vas-y molo quand même, s’agirait pas de devoir justifier cinquante démissions avant notre premier accostage. Enfin bref, je disais, enfin plutôt, il disait : le danger.
Le caporal le regarde avec un air circonspect, comme s’il discutait avec un débile.
Le danger ? Vous voulez y aller pour le danger ?
Ah bah quand je disais que tu étais premier degré la dernière fois, je pensais pas à ce point-là… Le danger pour les autres, Shiji. Même s’il se passe certaines choses ici… Les gens les plus dangereux et surtout les personnes les plus en danger ne sont pas forcément dans ces zones.
Ah bah oui, je comprends mieux.
“Le danger” répète-t-il, avec un air satisfait d’avoir compris.
Ça va être long...
De ? Le danger ?
Oh putain… Bref, j’ai assez détaillé tout ça. Est-ce que je peux compter sur toi ?
Hé, sergent, regardez à votre taille.
Kirei jette un coup d’œil vers le fourreau de son katana.
Vous avez forcé comme pas possible pour que je quitte la garnison de Kage Berg et que je vous suive dans la marine d’élite pour réaliser mes ambitions de quand j’étais plus jeune. Vous avez réussi à me convaincre et j’espère que ce sera la plus belle erreur de ma vie. Plaquer un coin sympa pour juste une chance d’atteindre l’objectif que je m’étais fixé à votre âge. M’enfin, pitié, venez pas remettre en doute mon investissement.
Je tenais juste à m’en assurer. On sera peut-être amenés à vivre des moments difficiles à l’avenir.
Shiji joint son supérieur dans un regard vers l’horizon.
Oui, mais on va devenir bien plus forts aussi, on aura plein de berrys, on sera connus partout et…
L’homme s’arrête, se rendant compte du regard en coin pesant de Kirei.
Oui, mais on va sauver des gens aussi ! Plein de gens !
Oublie pas les berrys quand même, ça pourra nous dépanner si jamais on se rate à un moment.
Les deux hommes rigolent ensemble, profitant de ce qu’ils savent être potentiellement une de leurs dernières fois au calme avant un long moment.
Alors qu’ils se reprennent, un soldat différent de celui arrivé précédemment se présente, se mettant immédiatement au garde à vous :
Sergent, caporal, on m’a demandé de vous dire qu’on arrive bientôt dans la zone que vous avez désignée.
Je vous remercie, vous pouvez y aller.
Alors que le soldat part avec le même regard émerveillé que le précédent, Kirei fusille Shiji du regard, qui se contente de hausser les épaules.
Rappelle-moi de venir assister à un de tes speechs quand j’en aurai l’occasion.
Oh, vous donnez pas cette peine, l’important c’est que ça marche, non ?
La manière est importante, Shiji, sinon qu’est-ce qui nous différencie de ceux qu’on met aux arrêts ?
Le vieux caporal essaie de réprimer un rire alors que le sergent soupire et lui dit :
Vas-y, lâche ta connerie.
Le côté où on se trouve par rapport aux barreaux.
Gardant un air sérieux, le jeune marine hoche la tête, perplexe, contrastant avec l'air satisfait de son interlocuteur.
Note que je m’attendais à pire. Mais y a vraiment parfois où j’espère que tu es en train de rigoler, puis je vois ton air sérieux et je me demande ce que j’ai bien pu faire à un dragon céleste.
En attendant, sergent, c’est bien pour ça que vous avez demandé que je vienne. Mon regard particulièrement réaliste sur la vie.
C’est sûr que tu ne débordes pas d’optimisme ou d’utopie… Mais tu marques un point.
Un des soldats aperçus plus tôt hurle depuis l'autre bout du pont.
SERGENT, Y A UN MESSAGE POUR VOUS, UNE NOUVELLE ATTRIBUTION APPAREMMENT !
Regarde ce que je disais, Shiji, la manière… On continuera plus tard.
Le vieux caporal se retourne avec une certaine véhémence, commençant à marcher d’un pas pressé vers le soldat alors que le sergent se dirige vers ses quartiers pour prendre connaissance de sa prochaine mission.
En ouvrant la porte, il jette un dernier coup d’œil vers ses deux subalternes.
C’EST COMME ÇA QUE JE VOUS APPRENDS À VOUS ADRESSER À UN SUPÉRIEUR ? OH, TU VAS M’ENTENDRE, TOI !
Kirei soupire et passe la porte avant de la refermer.
Il se dirige ensuite vers ce qui fait office de quartier pour lui, ou du moins, le cagibi qui en fait office. S’asseyant, il commence à lire la lettre qui lui est adressée.
Le jeune homme se parle à lui-même : Il s'agirait aussi de leur apprendre à transmettre les bonnes informations… “Nouvelle attribution”, super. “Restez dans la zone pour le moment, si besoin, ravitaillez-vous à Poiscaille.” C’est exactement ce qui nous a été demandé oralement quand on a quitté le BAN... Bon ben, direction Poiscaille.
Dernière édition par Kirei Seiki le Mar 12 Nov 2024 - 4:00, édité 2 fois