« Et jamais son genou ne ploie. Et jamais sa tête ne tombe. Et jamais son corps ne souffre de blessure. »
Livre X, vers 47, « La malédiction de Judas ».
Livre X, vers 47, « La malédiction de Judas ».
J’avais perdu. Cela peut vous paraître bête, voir même totalement insignifiant, mais pour moi c’était le cœur du problème. Pourquoi perdais-je goût de la cage ? Pourquoi ne voulais-je plus utiliser les poings que je m’étais crée ? Surement que je n’avais plus confiance, surement que j’avais peur maintenant. Il paraît que c’est la première défaite qui coute, et que les autres cascadent à sa suite. Je ne sais pas pourquoi, mais j’y croyais. Je pensais que m’éloigner me permettrait, justement, de ne plus jamais tomber. Finalement, j’ai su. Que la défaite n’annonce chez moi qu’une fureur plus grande encore que la honte d’être tombé. Contre moi, ma faiblesse et mon penchant débonnaire qui me fait négligent. Alors je travaille dur, alors je fais des efforts. Trop tard.
Ce que je gagnais à perdre, c’était de vaincre. Ce que je gagnais de vaincre, c’était me perdre. Finalement, je suis complet, je ne souffre plus de faille. Du moins le crois-je. A quand la prochaine chute ?
C’est la froide sensation de la pierre contre une joue qui me réveille. Glacées, noires de poisse, granuleuses, je prends le temps de remettre mes idées en place. Je renifle, et se mêlent des odeurs désagréables à mes narines. Sang, pas très frais, mais aussi une bouffée de charogne, d’ivrogne et de tout ce que peut la terre peu portée de crasse. J’suis tombé sur un trou à rat ! Il me reste plus qu’à savoir comment j’y suis tombé. Première difficulté. Me lever, lentement, mes mains écorchées souffrent des gravillons sous moi. J’ouvre péniblement les yeux, un mal de crâne, tambour battant, me le fend en deux. Ma vision est trouble, mais fort heureusement, il fait sombre tous autours de moi. Je secoue la tête. Comme si je pouvais faire passer la douleur. Ce n’est pas une mouche qui tourne autours de sois et que l’on peut faire déguerpir, c’est un truc lancinant, à l’intérieur, qui pulse et qui craque.
Je m’adosse à un mur, et je lève enfin les yeux. Autours de moi, cinq type me regardent en chien de faïence. Un peu comme si j’étais un possédé qui allait leur sauter dessus à la moindre occasion. Pourtant, vu la gueule des clients, ça m’donne plus envie de les imiter. Les cheveux hérissés, la barbe drue, le regard fou, ils ont plus de crasse que de peau, et des haillons pour toute couverture. Je sais pas ou je suis tombé, mais ça pue. Littéralement.
Bon, premier bon point, on s’en rend compte, on m’a pas mit les fers. On dirait une geôle. En tout cas, ça sent la prison, ça à la gueule d’une prison… Et je me risquerai pas à vouloir savoir si ça en a le gout.
Maintenant qu’on sait ou on est, va pour savoir pourquoi. Première tentative de communication.
« Eh les tarlouzes, qu’est-ce qu’on fout là ? » Pas de réponse. Une fois ? Deux fois… Non toujours pas ? Bon bah je vais devoir en cogner quelques uns.
C’est quand même navrant. A chaque fois que j’essaie d’être sympa, d’utiliser la manière douce, faut toujours que ça foire. Je dois avoir un truc qui cloche. Peut-être même que c’est marqué sur mon front « Ne me répondez pas tout de suite, je frapperai quand même ».
Je dois vraiment avoir une sale gueule. J’me lève, avec pesanteur, presque gravité. Nouveau mouvement de recul. Y’en a qui montre les dents, qui met ses bras devant son visage, qui détournent le regard. Ils sont méfiants, peureux, maltraité. Non, je ne peux pas faire ça, je peux pas leur frapper dessus, ce serait injuste. Oui mais bien commode. Deuxième tentative, prise de contact espéré.
« Eh les p’tits gars quoi, parlez un peu ! »
Toujours rien ? C’est limite pathologique de flipper autant. Je me dirige vers celui qui montre les dents, avec un peu de chance, il aura pas la langue dans sa poche. C’est là qu’un immonde salopard en profite pour me sauter à la gorge ! Sans doute que mon futal à l’air confortable. Il l’est.
Par contre, m’attaquer, comme ça, c’est une sacrée connerie. Sa poigne se referme sur du vide, mon poing le cueille à la hanche. Gasp.
Oui ça fait mal, et t’es parti pour boiter pendant six mois. Tant pis pour toi, faudra pas venir pleurnicher. J'me retourne vers ma "cible" et lui fait le coup des gros yeux. Inutile, il ne déliera pas sa langue, le pauvre bougre n’en a plus. C’est ce moment là que j’choisis la porte pour s’ouvrir, laissant d’abords filtrer une mince raie de lumière, puis enfin deux gardes.
Je comprends tout de suite que c’est marche ou crève, quand l’un des deux plante son pétoire sur mon front, et que l’autre me passe les fers. Et puis, quand j’atteins le couloir c’est la l’apothéose. Un dédale. Bordel, faudrait être un sacré bœuf pour s’y retrouver.
Des flambeaux éclairent le chemin, le courant d’air qui rampe sous ma peau fait trembloter ses lumières. Tamisé voir même plutôt sombre, on eut dit des égouts, ou l’antre d’une quelconque créature malfaisante.
Les deux gusses qui m’accompagnent ont le visage fermé du professionnel. Et des costumes de ploucs. Genre rouge passé, délavé, avec des dorures sur les bords et des petits boutons blanc. Style veston tiré à quatre épingles, pas vraiment pratique pour bouger. Un pantalon noir moule leurs jambes, et des bottes ceignent leurs mollets. Touche finalement, des gants qui auraient du être blanc, mais qui ont virés au gris maintenant. C’était d’un pittoresque. Et pourtant je ne fis pas le moindre mouvement, ne tenta pas la moindre incartade.
Il faut savoir attendre son heure.
Principe de prédateur.
J’arrive près d’une nouvelle porte, bardée de fer et de chaînes, comme si ce qui se cachait la devant était plus terrible encore que ce qu’il y avait par derrière moi. On me pousse sans ménagement, tandis qu’une ouverture dans la pierre, jusque là invisible, ne m’invite à la suivre.
Le soleil qui ricoche sur le sable m’éblouit. Les cris de millier de spectateur m’assourdissent. Sa sent le sang à quinze mètre autours de moi. Je place une main –encore enchainée à l’autre tiens, devant moi pour caché l’éclat diurne. Devant moi, une dizaine de mectons se font bouffer par une sorte de Lion. Sauf qu’il est deux fois trop grand pour en être, et son immense queue d’une dizaine de mètre est ponctuée de piques à l’air pas jouasse, tout les dix centimètres.
C’est la merde Thomas… Qu’est-ce tu fous là ? Une lourde tenture recouvre une arène immense, des gradin de bois et de pierre t'entourent. En te retournant, tu vois un puits sans fond, et une porte métallique qui se referme sur ton échappatoire.
Ce que je gagnais à perdre, c’était de vaincre. Ce que je gagnais de vaincre, c’était me perdre. Finalement, je suis complet, je ne souffre plus de faille. Du moins le crois-je. A quand la prochaine chute ?
C’est la froide sensation de la pierre contre une joue qui me réveille. Glacées, noires de poisse, granuleuses, je prends le temps de remettre mes idées en place. Je renifle, et se mêlent des odeurs désagréables à mes narines. Sang, pas très frais, mais aussi une bouffée de charogne, d’ivrogne et de tout ce que peut la terre peu portée de crasse. J’suis tombé sur un trou à rat ! Il me reste plus qu’à savoir comment j’y suis tombé. Première difficulté. Me lever, lentement, mes mains écorchées souffrent des gravillons sous moi. J’ouvre péniblement les yeux, un mal de crâne, tambour battant, me le fend en deux. Ma vision est trouble, mais fort heureusement, il fait sombre tous autours de moi. Je secoue la tête. Comme si je pouvais faire passer la douleur. Ce n’est pas une mouche qui tourne autours de sois et que l’on peut faire déguerpir, c’est un truc lancinant, à l’intérieur, qui pulse et qui craque.
Je m’adosse à un mur, et je lève enfin les yeux. Autours de moi, cinq type me regardent en chien de faïence. Un peu comme si j’étais un possédé qui allait leur sauter dessus à la moindre occasion. Pourtant, vu la gueule des clients, ça m’donne plus envie de les imiter. Les cheveux hérissés, la barbe drue, le regard fou, ils ont plus de crasse que de peau, et des haillons pour toute couverture. Je sais pas ou je suis tombé, mais ça pue. Littéralement.
Bon, premier bon point, on s’en rend compte, on m’a pas mit les fers. On dirait une geôle. En tout cas, ça sent la prison, ça à la gueule d’une prison… Et je me risquerai pas à vouloir savoir si ça en a le gout.
Maintenant qu’on sait ou on est, va pour savoir pourquoi. Première tentative de communication.
« Eh les tarlouzes, qu’est-ce qu’on fout là ? » Pas de réponse. Une fois ? Deux fois… Non toujours pas ? Bon bah je vais devoir en cogner quelques uns.
C’est quand même navrant. A chaque fois que j’essaie d’être sympa, d’utiliser la manière douce, faut toujours que ça foire. Je dois avoir un truc qui cloche. Peut-être même que c’est marqué sur mon front « Ne me répondez pas tout de suite, je frapperai quand même ».
Je dois vraiment avoir une sale gueule. J’me lève, avec pesanteur, presque gravité. Nouveau mouvement de recul. Y’en a qui montre les dents, qui met ses bras devant son visage, qui détournent le regard. Ils sont méfiants, peureux, maltraité. Non, je ne peux pas faire ça, je peux pas leur frapper dessus, ce serait injuste. Oui mais bien commode. Deuxième tentative, prise de contact espéré.
« Eh les p’tits gars quoi, parlez un peu ! »
Toujours rien ? C’est limite pathologique de flipper autant. Je me dirige vers celui qui montre les dents, avec un peu de chance, il aura pas la langue dans sa poche. C’est là qu’un immonde salopard en profite pour me sauter à la gorge ! Sans doute que mon futal à l’air confortable. Il l’est.
Par contre, m’attaquer, comme ça, c’est une sacrée connerie. Sa poigne se referme sur du vide, mon poing le cueille à la hanche. Gasp.
Oui ça fait mal, et t’es parti pour boiter pendant six mois. Tant pis pour toi, faudra pas venir pleurnicher. J'me retourne vers ma "cible" et lui fait le coup des gros yeux. Inutile, il ne déliera pas sa langue, le pauvre bougre n’en a plus. C’est ce moment là que j’choisis la porte pour s’ouvrir, laissant d’abords filtrer une mince raie de lumière, puis enfin deux gardes.
Je comprends tout de suite que c’est marche ou crève, quand l’un des deux plante son pétoire sur mon front, et que l’autre me passe les fers. Et puis, quand j’atteins le couloir c’est la l’apothéose. Un dédale. Bordel, faudrait être un sacré bœuf pour s’y retrouver.
Des flambeaux éclairent le chemin, le courant d’air qui rampe sous ma peau fait trembloter ses lumières. Tamisé voir même plutôt sombre, on eut dit des égouts, ou l’antre d’une quelconque créature malfaisante.
Les deux gusses qui m’accompagnent ont le visage fermé du professionnel. Et des costumes de ploucs. Genre rouge passé, délavé, avec des dorures sur les bords et des petits boutons blanc. Style veston tiré à quatre épingles, pas vraiment pratique pour bouger. Un pantalon noir moule leurs jambes, et des bottes ceignent leurs mollets. Touche finalement, des gants qui auraient du être blanc, mais qui ont virés au gris maintenant. C’était d’un pittoresque. Et pourtant je ne fis pas le moindre mouvement, ne tenta pas la moindre incartade.
Il faut savoir attendre son heure.
Principe de prédateur.
J’arrive près d’une nouvelle porte, bardée de fer et de chaînes, comme si ce qui se cachait la devant était plus terrible encore que ce qu’il y avait par derrière moi. On me pousse sans ménagement, tandis qu’une ouverture dans la pierre, jusque là invisible, ne m’invite à la suivre.
Le soleil qui ricoche sur le sable m’éblouit. Les cris de millier de spectateur m’assourdissent. Sa sent le sang à quinze mètre autours de moi. Je place une main –encore enchainée à l’autre tiens, devant moi pour caché l’éclat diurne. Devant moi, une dizaine de mectons se font bouffer par une sorte de Lion. Sauf qu’il est deux fois trop grand pour en être, et son immense queue d’une dizaine de mètre est ponctuée de piques à l’air pas jouasse, tout les dix centimètres.
C’est la merde Thomas… Qu’est-ce tu fous là ? Une lourde tenture recouvre une arène immense, des gradin de bois et de pierre t'entourent. En te retournant, tu vois un puits sans fond, et une porte métallique qui se referme sur ton échappatoire.
Dernière édition par Judas le Mar 08 Nov 2011, 10:01, édité 1 fois