Légende:
Maïna
Archi
Heïon
VLAM. Proche de se dégonder, la porte de la chambre s’ouvre violemment faisant claquer le bois contre le mur mitoyen.
-YAHAAAA. Aller Heïon dépêches toi un peu, on va encore être les derniers !!! Tu sais quel jour on est ? Mais oui bien sûr que tu l’sais. Cette année c’est notre année, je suis en pleine forme et j’suis sûre que l’un de nous deux va gagner…surtout que papa a dit qu’il ne participait pas. C’est une première ! Aller active toi l’sous-marin…en plus cette année ça va être grandiose, on fête le centenaire…
Ca, c’est Maïna qui débarque en grande pompe, comme à son habitude, bondissante, le regard pétillant de malice. Le sourire subtilement espiègle, elle hurle sa joie de vivre à qui veut bien l’entendre. Détachée, sa longue crinière brune ondule au rythme de quelques pas de danse improvisés. Le soleil même s’incline au travers de la fenêtre pour venir réchauffer sa peau de miel et irradier son visage. Un brin aguicheuse, elle se penche de temps à autres vers moi, la poitrine légèrement en avant comme pour attirer mon attention, elle m’ébouriffe les cheveux, se dandine encore un peu puis me tire le bras. Attelé à terminer ma première marionnette, je souris…simplement. Elle a bien grandi Maïna depuis ces années passées à parcourir tous les deux les rues du village à la recherche de mauvais tour à jouer aux habitants. Maïna…ma sœur, mon amie, ma partenaire des bons jours comme des moins heureux.
Aujourd’hui c’est le festival de la pêche sur l’île de l’Abondance, comme chaque année à cette date. La centième donc cette fois. Cette journée marque, comme chaque année, l’arrivée en masse des poissons qui font la réputation de l’île, poussés là par de puissants courants marins qui convergent tous en ce point. Ici, on trouve probablement les meilleurs pêcheurs de tout South Blue et peut être même d’ailleurs. Au menu du jour, concours de pêche, puis de cuisine avec le poisson amassé, et enfin grande soirée festive jusqu’à pas d’heure, alcool et poisson à volonté, le tout dans un décor superbe où les échoppes sont foison. Evidemment, cette journée ne s’adresse pas qu’à la population de l’île. Il n’est donc ainsi pas rare d’y voir débarquer tout un monde en quête de gloire passagère qui ferait d’eux le meilleur pêcheur du moment.
Bien sûr que je n’ai pas oublié cette journée. Je ne la manquerais pour rien au monde, d’autant plus que ce sera ma dernière fête de la pêche avant très longtemps. C’est décidé, je partirais l’année prochaine, la veille de la cent unième. Mais ça, tu ne le sais pas encore Maïna et je dois bien avouer que je ne suis pas pressé de t’en faire part. Je crains trop ta réaction et je n’ai pas encore trouvé les mots justes pour te l’annoncer. Je sais aussi que papa ne participe pas cette année, place aux jeunes comme il dit. Et je comprends bien ta satisfaction et tes espoirs affichés. Après tout, il est le vainqueur des cinq dernières éditions du concours de pêche.
Comme toujours je ne résiste pas bien longtemps quand tu m’entraînes de la sorte. Debout sans que je m’en rende compte, je laisse là tout mon fatras, j’attrape ma canne et mon filet au passage et me laisse à moitié traîner sur le sol en souriant toujours tendrement du spectacle.
-Hey les marmots, vous oubliez pas quelqu’un par hasard ??!? Vous croyez quand même pas que vous allez encore me laisser tout seul alors que vous partez vous amusez !!! Hop hop hop, on attend le meilleur et oui c’est moi Archi le nettoyeur héhé…
Comme vous l’aurez deviné, lui c’est Archi. Mon pote le poisson nettoyeur. Il parle beaucoup, ce qui ne me déplaît d’ailleurs pas lorsque ça m’évite d’avoir à le faire, mais c’est quelqu’un sur qui l’on peut compter. Et puis c’est en quelque sorte un homme poisson comme moi. Ca aide pour se comprendre d’avoir quelques branchies en commun. Il nous rejoint donc et nous voilà tous les trois filant vers le lieu du tournoi. Une belle journée qui s’annonce, une de celle qui vous redonne de l’énergie pour une semaine au moins.
Comme prévu, à notre arrivée la plage est bondée. Papa et maman sont déjà là en compagnie de Kaïna. La cuisinière portative et les ustensiles qui s’y adjoignent sont déjà tous opérationnels. Comme il ne participe pas à la pêche cette année, papa a décrété qu’il mettrait tout en œuvre pour que maman remporte le tournoi des cuistots. Il a même réussi le tour de force d’entraîner avec lui l'aînée de ses filles. Certains de la perte de temps, il n’a même pas tenté avec Maïna.
Toute une foule s’amasse aux différents stands, pour faire le plein de nourriture jusqu’au midi ou s’inscrire aux différents concours. Pour celui qui nous intéresse une file humaine s’étire sur pas loin de cinquante mètres. Maïna entre en action.
-Hey, Marius, comment ça va ? Viens Heïon !
Un de ces gars, comme tant d’autres sur l’île, qui se damnerait pour lui rendre service en espérant qu’elle lui tombe dans les bras. L’avantage avec celui-ci en cet instant, c’est qu’il est en onzième place dans la file d’attente. Et voilà que Maïna se met à lui causer comme si de rien n’était, échangeant par instant avec le voisin de derrière lorsqu’il commence à s’inquiéter de s’être fait gruger. Elle fait preuve de courtoisie autant que d’astuce, juste ce qu’il faut pour le calmer. Pendant cinq minutes, elle draine l’attention alentour et sans que personne ne se rende compte de rien, nous voilà miraculeusement devant la caisse. N’ayant jamais perdu de vu son objectif principal, elle stoppe la conversation tout en douceur puis se tourne vers le guichetier en lui souriant :
-C’est pour deux inscriptions s’il vous plaît.
Elle paye, note nos noms, saisi les dossards qui nous sont attribués, puis nous nous éloignons.
-Aller salut Marius, à plus tard et bon courage pour le concours…même si c’est moi qui vais gagner…
Un sourire mutin et un clin d’œil plus tard, elle se tourne vers moi, satisfaite. Je lui rends cette satisfaction. Ce manège je l’ai vu fonctionner des centaines de fois. Je le connais par cœur mais il m’amuse toujours autant. Aucune méchanceté dans celui-ci, jamais, juste l’éclatante démonstration de la malice et de la finesse de celle qui me manquera à coup sûr.
Les billets en poche, plus qu’à attendre que tout le monde soit inscrit et déambuler dans les allées d’un festival qui s’annonce exceptionnel.
Maïna
Archi
Heïon
VLAM. Proche de se dégonder, la porte de la chambre s’ouvre violemment faisant claquer le bois contre le mur mitoyen.
-YAHAAAA. Aller Heïon dépêches toi un peu, on va encore être les derniers !!! Tu sais quel jour on est ? Mais oui bien sûr que tu l’sais. Cette année c’est notre année, je suis en pleine forme et j’suis sûre que l’un de nous deux va gagner…surtout que papa a dit qu’il ne participait pas. C’est une première ! Aller active toi l’sous-marin…en plus cette année ça va être grandiose, on fête le centenaire…
Ca, c’est Maïna qui débarque en grande pompe, comme à son habitude, bondissante, le regard pétillant de malice. Le sourire subtilement espiègle, elle hurle sa joie de vivre à qui veut bien l’entendre. Détachée, sa longue crinière brune ondule au rythme de quelques pas de danse improvisés. Le soleil même s’incline au travers de la fenêtre pour venir réchauffer sa peau de miel et irradier son visage. Un brin aguicheuse, elle se penche de temps à autres vers moi, la poitrine légèrement en avant comme pour attirer mon attention, elle m’ébouriffe les cheveux, se dandine encore un peu puis me tire le bras. Attelé à terminer ma première marionnette, je souris…simplement. Elle a bien grandi Maïna depuis ces années passées à parcourir tous les deux les rues du village à la recherche de mauvais tour à jouer aux habitants. Maïna…ma sœur, mon amie, ma partenaire des bons jours comme des moins heureux.
Aujourd’hui c’est le festival de la pêche sur l’île de l’Abondance, comme chaque année à cette date. La centième donc cette fois. Cette journée marque, comme chaque année, l’arrivée en masse des poissons qui font la réputation de l’île, poussés là par de puissants courants marins qui convergent tous en ce point. Ici, on trouve probablement les meilleurs pêcheurs de tout South Blue et peut être même d’ailleurs. Au menu du jour, concours de pêche, puis de cuisine avec le poisson amassé, et enfin grande soirée festive jusqu’à pas d’heure, alcool et poisson à volonté, le tout dans un décor superbe où les échoppes sont foison. Evidemment, cette journée ne s’adresse pas qu’à la population de l’île. Il n’est donc ainsi pas rare d’y voir débarquer tout un monde en quête de gloire passagère qui ferait d’eux le meilleur pêcheur du moment.
Bien sûr que je n’ai pas oublié cette journée. Je ne la manquerais pour rien au monde, d’autant plus que ce sera ma dernière fête de la pêche avant très longtemps. C’est décidé, je partirais l’année prochaine, la veille de la cent unième. Mais ça, tu ne le sais pas encore Maïna et je dois bien avouer que je ne suis pas pressé de t’en faire part. Je crains trop ta réaction et je n’ai pas encore trouvé les mots justes pour te l’annoncer. Je sais aussi que papa ne participe pas cette année, place aux jeunes comme il dit. Et je comprends bien ta satisfaction et tes espoirs affichés. Après tout, il est le vainqueur des cinq dernières éditions du concours de pêche.
Comme toujours je ne résiste pas bien longtemps quand tu m’entraînes de la sorte. Debout sans que je m’en rende compte, je laisse là tout mon fatras, j’attrape ma canne et mon filet au passage et me laisse à moitié traîner sur le sol en souriant toujours tendrement du spectacle.
-Hey les marmots, vous oubliez pas quelqu’un par hasard ??!? Vous croyez quand même pas que vous allez encore me laisser tout seul alors que vous partez vous amusez !!! Hop hop hop, on attend le meilleur et oui c’est moi Archi le nettoyeur héhé…
Comme vous l’aurez deviné, lui c’est Archi. Mon pote le poisson nettoyeur. Il parle beaucoup, ce qui ne me déplaît d’ailleurs pas lorsque ça m’évite d’avoir à le faire, mais c’est quelqu’un sur qui l’on peut compter. Et puis c’est en quelque sorte un homme poisson comme moi. Ca aide pour se comprendre d’avoir quelques branchies en commun. Il nous rejoint donc et nous voilà tous les trois filant vers le lieu du tournoi. Une belle journée qui s’annonce, une de celle qui vous redonne de l’énergie pour une semaine au moins.
Comme prévu, à notre arrivée la plage est bondée. Papa et maman sont déjà là en compagnie de Kaïna. La cuisinière portative et les ustensiles qui s’y adjoignent sont déjà tous opérationnels. Comme il ne participe pas à la pêche cette année, papa a décrété qu’il mettrait tout en œuvre pour que maman remporte le tournoi des cuistots. Il a même réussi le tour de force d’entraîner avec lui l'aînée de ses filles. Certains de la perte de temps, il n’a même pas tenté avec Maïna.
Toute une foule s’amasse aux différents stands, pour faire le plein de nourriture jusqu’au midi ou s’inscrire aux différents concours. Pour celui qui nous intéresse une file humaine s’étire sur pas loin de cinquante mètres. Maïna entre en action.
-Hey, Marius, comment ça va ? Viens Heïon !
Un de ces gars, comme tant d’autres sur l’île, qui se damnerait pour lui rendre service en espérant qu’elle lui tombe dans les bras. L’avantage avec celui-ci en cet instant, c’est qu’il est en onzième place dans la file d’attente. Et voilà que Maïna se met à lui causer comme si de rien n’était, échangeant par instant avec le voisin de derrière lorsqu’il commence à s’inquiéter de s’être fait gruger. Elle fait preuve de courtoisie autant que d’astuce, juste ce qu’il faut pour le calmer. Pendant cinq minutes, elle draine l’attention alentour et sans que personne ne se rende compte de rien, nous voilà miraculeusement devant la caisse. N’ayant jamais perdu de vu son objectif principal, elle stoppe la conversation tout en douceur puis se tourne vers le guichetier en lui souriant :
-C’est pour deux inscriptions s’il vous plaît.
Elle paye, note nos noms, saisi les dossards qui nous sont attribués, puis nous nous éloignons.
-Aller salut Marius, à plus tard et bon courage pour le concours…même si c’est moi qui vais gagner…
Un sourire mutin et un clin d’œil plus tard, elle se tourne vers moi, satisfaite. Je lui rends cette satisfaction. Ce manège je l’ai vu fonctionner des centaines de fois. Je le connais par cœur mais il m’amuse toujours autant. Aucune méchanceté dans celui-ci, jamais, juste l’éclatante démonstration de la malice et de la finesse de celle qui me manquera à coup sûr.
Les billets en poche, plus qu’à attendre que tout le monde soit inscrit et déambuler dans les allées d’un festival qui s’annonce exceptionnel.