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Bataille en mer (FB 1622)

    La lumière d’une bougie éclairait faiblement un bureau de bois. Charles rédigeait une missive qui devait partir sur le champ. Au dehors on entendait les hurlements des hommes et les canons qui faisaient feu, Charles restait pourtant concentrer sur son écriture. Imperméable au tumulte extérieur il rédigeait d’une écrire fine et élégante sans paraitre incommodé par les soubresauts du navire. Franck enfonça la porte du bureau et, sans le moindre cérémoniel, prit la parole d’une voix haletante.

      -«Cela se passe mal ! On a trop peu de puissance de feu vis-à-vis du bâtiment ennemi. Ils feront mouche avant nous c’est une certitude. Pas moyen de les approcher rapidement, les épaves nous causent trop de problèmes. Si on ne les aborde pas rapidement on va couler ou on reste hors de portée de tir !»

    Charles n’avait pas encore terminé sa rédaction et écoutait donc tout en écrivant. Il termina en même temps que fut clos le rapport réalisé par son tireur d’élite. Le bretteur prit néanmoins le temps d’apposer son sceau personnel en bas de la lettre qu’il venait de rédiger. Il tendit ensuite cette missive à Franck qui s’empressa de la lire.

    Au QG de la Marine de South Blue,
    De Charles Higan, Leader de l’escadron bleu,

    Salut et paix !

    Nous nous trouvons actuellement dans votre Blue. A l’heure où j’écris ces mots nous donnons la chasse au navire pirate décrit par l’état major comme la « furie de South Blue ». En effet, je puis confirmer que ce navire dispose d’une très bonne rapidité et de très bons canonniers. Il est pour nous, comme pour la majorité des navires de marine lambda, impossible de l’envoyer par le fond sans prendre de risques importants. C’est pour cela que nous avons été dépêchés sur place attendu que nous sommes des experts en abordage.

    Dans l’hypothèse où nous ne puissions pas aborder le navire dans le cimetière d’épave je vous prie de bien vouloir dépêcher sur place un groupe de plusieurs navires afin de tenter des manœuvres d’encerclement. Nous ne nous ferons pas distancer dans ces eaux mais ne pouvons pour autant assurer le succès de notre mission seuls. Nous allons tenter de faire sortir le navire ennemi du cimetière d’épave et espérons trouver, hors du cimetière, les renforts nécessaires à l’encerclement. Nous tenterons d’effectuer la sortie du cimetière par le Nord.

    Pour rappel nous ne désirons aucunement mettre en danger des troupes inexpérimentées. Aussi contentez vous d’organiser les manœuvres d’encerclement qui réduiront drastiquement les capacités de déplacement adverse. Une fois le navire immobilisé nous réaliserons l’abordage. Je vous rappelle que la furie de South Blue a obtenu du granit marin qu’il convient de récupérer au plus vite. Par conséquent, couler le navire n’est pas une hypothèse envisageable.
    Bataille en mer (FB 1622) Sceauescadron

    Franck releva la tête après lecture. Il sortit de la cabine du capitaine avec la lettre en main, rapidement il la confia à une mouette de la marine qui s’envola vers le QG de South Blue. Charles suivit son subalterne et se retrouva sur le pont du navire. Le ciel était dégagé et l’on voyait clairement, non loin, un voilier pirate qui tentait de s’enfuir. Il disposait d’une bordée de six canons qui ne cessaient de tirer dans la direction de l’anonyme, le navire de l’escadron bleu. Mais les marines d’élite s’étaient placés à bonne distance, hors d’atteinte des boulets de canons adverses.

    Charles s’adressa au navigateur qui tenait la barre fermement.

      -«On donne la chasse, reste derrière eux le plus possible. Emmenons-les en dehors du cimetière.»

    Le marin acquiesça de la tête et reporta son attention sur le navire ennemi. L’attente fut longue et ponctuée uniquement des boulets s’écrasant dans l’eau. L’escadron jouait une dangereuse danse avec son ennemi, une mauvaise manœuvre et c’était la fin. Si le voilier virait de bord trop rapidement s’en été fini de l’épopée de l’anonyme. Mais fort heureusement les pirates semblaient chercher la fuite plus que l’affrontement. En effet, le voilier avait plus de rapidité encore que l’anonyme, c’est d’ailleurs pour cela que la marine l’avait affublé du nom de « furie ».

    La chasse dura plusieurs heures mais les manœuvres étaient à l’avantage de l’escadron. Les pirates sortirent effectivement par le Nord du cimetière d’épaves. Ceux-ci espéraient certainement distancer leurs poursuivants dans une mer dépourvue d’obstacles. Charles porta son regard vers la vigie, il attendait un signe qui ne venait pas.

    N’y tenant plus il sortit une longue vue qu’il calla sur son œil. Il chercha à l’horizon les traces d’une éventuelle arrivée de marin. Il souffla bruyamment après avoir fait chou blanc. Manifestement le QG de South Blue n’avait pas reçu suffisamment tôt le message de l’escadron. Charles voyait déjà le voilier prendre de l’avance, d’ici quelques heures il serait hors de vue...

    Mais alors que l’espoir commençait à perdre place dans le cœur du bretteur, la vigie hurla à la mort.

      -«Navire en vue ! A Bâbord !»

    Charles se tourna avec célérité. Il constate effectivement la présence de trois navires rapides qui fendaient les vagues avec force. Aussitôt il donna ses ordres d’une voix forte et assez joyeuse.

      -«ON CONTOURNE LE VOILIER ENNEMI PAR TRIBORD, LA MANŒUVRE D’ENCERCLEMENT COMMENCE ! LES TROIS NAVIRES VONT BIENTOT SE SEPARER. PREPAREZ VOTRE EQUIPEMENT, EPEES, FUSILS, PISTOLETS, GRAPPINS, PLANCHES ! NOUS ALLONS ABORDER CE SATANE VOILIER !»

    L’information traversa le navire avec rapidité, les hommes hurlaient leur joie d’en découdre. L’escadron allait enfin faire ce qu’il savait le mieux faire en mer, aborder ! Charles lui-même trépignait d’impatience à l’idée de se lancer sur le pont adverse et de croiser le fer avec ces maudits pirates. Les navires de la marine commençaient en effet à se séparer et à couper les retraites possibles du voilier pirate...
      La poursuite continuait, la furie de South Blue ne semblait pas vouloir rendre les armes et tentaient de fuir malgré l’apparition des nouveaux navires de la marine. Les trois autres navires allaient couper les retraites possibles du voilier pirate. La manœuvre allait nécessairement se terminer par une combat mais les pirates savaient pertinemment qu’ils n’allaient pas subir de canonnade, leur cargaison était bien trop précieuse pour la marine.

      Charles fronçait les sourcils en constatant la lenteur des manœuvres, l’abordage allait se complexifier à mesure que l’on laissait du temps de préparation aux pirates. L’anonyme allait surement subir de lourds dommages car il était évident que les pirates n’allaient pas se gêner pour tirer des bordées dès qu’un ennemi s’approcherait. Le bretteur en avait conscience mais ne pouvait pourtant envisager d’autres solutions pour récupérer le granit marin.

        -«Bon sang ! Comment a-t-on pu laisser du granit marin sans escorte suffisante. Il fallait confier cette tâche à des marines d’élite ! Maintenant nous allons probablement sacrifier plus de moyens pour exclusivement récupérer ce qui nous appartient de droit !»
        Les hommes s’étaient amassés autour de leur capitaine et regardaient avec attention deux cartes qui avaient été griffonnées, celles-ci représentaient le plan d'attaque et le placement des navires en approche. Charles reprit son explication une fois encore.


      Bataille en mer (FB 1622) Cartesrp

        -«Je le répète encore une fois pour que tout le monde digère bien l’information. Nous obtenons le renfort de trois navires de la marine, ils vont couper les retraites possibles du voilier en trois points. Les navires se positionneront au Nord, Au Sud et à l’Ouest. Nous allons prendre l’Est et rattrapé le voilier qui va inévitablement devoir se stopper sous la pression des autres navires. Nous devrons donc aborder. Nous allons très probablement subir une bordée avant d’être à proximité, nous ne seront donc probablement pas au meilleur de notre forme pour nous lancer dans la bataille. Fort heureusement nous avons l’habitude de ce genre d’accueils. Nous procéderons comme d’habitude. Un groupe de tireurs dirigés par Franck dans les gréements, un groupe qui investi le pont du navire ennemi sous mon commandement direct. Nous ne savons pas quel sera le nombre d’opposants ni même leurs capacités. Nous sommes totalement à l’aveugle pour cette attaque. Par conséquent suivez clairement les instructions. On élimine les dirigeants en premier, s’ils sont trop forts pour se faire abattre je m’en charge personnellement. Il y a de fortes chances pour que la cargaison de granit marin soit protégée et dissimulée, par conséquent évitons de la chercher tant que nous n’avons pas prit le commandement du navire.

        Si nous ne venons pas à bout de l’équipage seul les navires de la marine vont peu à peu nous rejoindre et aborder également. Mais nous ne connaissons pas leurs capacités et la confusion pourraient bien emporter davantage d’hommes. Nous devons donc à tout prix tenter de réaliser la chose par nous même. Je ne vous cache pas que cette mission est très dangereuse vu notre technique d’approche et notre incapacité à définir la force ennemie...»

      Les hommes avaient écouté avec attention et gravité le discours de leur leader. Les hommes de l’escadron étaient préparés à ce genre d’éventualité. La force ne s’acquière que dans la douleur disaient certains instructeurs du ban...
        L’ambiance était tendue au sein de l’équipage de Charles. L’escadron s’apprêtait à réaliser une périlleuse attaque. L’abordage est une science qui ne se maitrise pas aisément. Mais l’escadron bleu était réputé pour ces capacités à éteindre toute menace sur un navire par le seul biais d’un abordage propre et efficace. Cette fois-ci les marins agissaient pourtant en aveugle et cela empêchait toute prévisibilité dans l’attaque.

        Le ciel était clair et le vent faible, la météo semblait venir en aide aux marins qui profitaient uniquement des courants pour encercler plus rapidement le voilier. Les pirates n’avaient plus tiré depuis leur sortie du cimetière d’épaves. Manifestement ils n’avaient plus de munitions ou tout du moins avait abandonné l’idée de couler l’escadron bleu à longue distance.

        Les trois navires de la marine respectaient le plan préétabli et avait commencé leur manœuvre d’encerclement. La situation semblait de plus en plus complexe pour les pirates. Après une bonne demi-heure de manœuvre complexe les navires de la marine ainsi que le navire de Charles avait encerclé presque complètement l’ennemi. Tous les regards étaient braqués sur la furie de South Blue qui semblait ne plus avoir d’échappatoire. Alors que Charles s’apprêtait à donner l’ordre d’approche, le navire pirate releva les voiles. Le leader de l’escadron considéra ce signe de faiblesse comme la chance qu’il devait saisir. Il ordonna donc l’attaque, l’anonyme devait s’approcher de sa cible pour permettre aux hommes d’aborder.

        Les visages étaient fermés, chacun semblaient vouloir vérifier chaque seconde ses armes comme si celles-ci risquaient de disparaitre si elles n’étaient pas constamment surveillées. Le bretteur avait déjà sorti son épée de son fourreau et tapotait frénétiquement le bastingage signe d’impatience fort. Franck était monté dans les gréements avec quelques hommes et vérifiait son fusil avec toute sa rigueur habituelle. Les hommes qui étaient avec lui l’imitaient avec conviction, les tireurs semblaient prêts à en découdre. Sur le pont le reste de l’escadron s’était équipé en conséquence. Les hommes avaient tous une épée en main, certains avait préféré relégué l’arme blanche au fourreau pour tenir en main un pistolet et un coutelas. Quelques marins portaient également de lourdes planches destinées à faciliter l’abordage. On pouvait enfin repérer des hommes portant grappin et corde se diriger vers les gréements pour aborder par le haut du navire.

        Charles savait qu’il n’était plus question de grands discours, il n’y avait plus qu’à attendre. Le navire avançait inexorablement vers sa destination finale. L’attaque allait se mettre en place dans les plus brefs délais. Encore quelques minutes d’attente et le voilier pirate allait être rejoint par l’Anonyme. A cet instant la seule interrogation du bretteur était de savoir quel type d’équipage il allait rencontrer. Une question lourde de conséquence puisque l’équipage adverse était la composante clé pour envisager une victoire ou une défaite. Malheureusement pour les marins d’élite la réponse ne s’obtiendrait qu’a un moment où celle-ci deviendrai obsolète...

        Le vent commença à se lever accélérant la vitesse de l’Anonyme. On pouvait déjà distinguer les silhouettes des pirates et entendre leurs cris menaçants. L’escadron répondit à ces grognements par ces propres cris. Les marins s'haranguer mutuellement tout en brandissant haut leurs armes. La situation commençait à se préciser, l’adrénaline montait en flèche et les adversaires se faisaient de plus en plus précis.

        Enfin... Après des heures de traque, la bataille débuta ! Tout se passa très rapidement. L’Anonyme se porta à la hauteur du voilier ennemi. Les cris raisonnaient maintenant en tous sens, impossible d’en définir la provenance tellement ceux-ci étaient omniprésents. On distingua néanmoins un cri se détachant clairement des autres et se répercutant dans les bouches des pirates. « FEU ! » Charles écarquilla les yeux lorsqu’il vit sortir de la coque les bouches de six canons pointées vers son propre navire. En quelques instants les six canons firent exploser leurs charges et des boulets sortirent de leurs réceptacles pour venir s’enfoncer avec puissance dans la coque de l’Anonyme. On vit plusieurs marins chuter des gréements suite à ces explosions.

        Charles hurla à la mort et s’élança par-dessus le bastingage pour venir prendre place sur le pont adverse. Les deux navires étaient suffisamment proches pour permettre de sauter directement de l’un à l’autre. Les marins suivirent leur chef certains sautant directement, d’autres usant des grappins ou des planches. L’épéiste se retrouva donc le premier sur le navire adverse et il s’élança directement sur un adversaire. Il lui trancha rapidement le torse et le laissa s’effondrer sur le sol. Alors qu’il s’apprêtait à s’élancer vers un autre adverse il prit conscience de la qualité de ces adversaires.

        Le bruit était assourdissant et tous avaient presque trouvés un adversaire. Les combats étaient acharnés mais Charles perdit quelques secondes à examiner ces adversaires qu’il pourchassait depuis plusieurs heures. L’équipage ne devait pas être bien plus nombreux que le sien et il était composé exclusivement d’hommes à la musculature imposante. Tous arboraient des cicatrices profondes et des colliers où étaient retenues des médailles de la marine. Il était clairement évident que les pirates de cet équipage étaient des durs à cuir, ce qui expliquait en partie leurs capacités à dérober du granit marin, une des ressources les plus précieuses de la marine.

        L’épéiste trouva rapidement son véritable adversaire, un homme qui se tenait un peu en retrait et bordait une barbe noire très garnies. Il devait avoisiner les deux mètres et portait une épée d’une taille impressionnante. Il portait également un manteau de la marine constellé de sang de telle sorte qu’on eut presque dit que le blanc avait complètement laissé place au rouge. Alors que Charles contemplait celui qui ne pouvait être que le capitaine du navire, celui-ci trouva également le regard du leader de l’escadron bleu. Sans attendre il laissa apparaitre un large sourire et sauta tout bonnement en direction du bretteur borgne. La massive épée du pirate trouva la lame de Charles qui ne pouvait plus reculé.
        Un combat entre les chefs venait de se lancer. Autour d’eux les crépitements des balles se faisaient encore entendre et les lames s’entrechoquaient partout sur le pont du navire. Les hommes s’affaissaient régulièrement et il était impossible de définir qui prenait le dessus sur qui.

        Pour l’heure Charles ne pouvait que se battre contre le premier des pirates. Il échangeait coup pour coup en respectant précautionneusement son propre style à l’épée. Il était assez facile de prévoir les attaques de l’énorme capitaine pirate mais le pont du navire était petit et largement occupée. Charles ne pouvait donc que parer et dévier du mieux possible les attaques de son ennemi. La différence de poids jouait en défaveur du soldat de la marine qui dans un si petit espace ne pouvait pas donner de véritable amplitude à ses mouvements. Les assauts répétés du pirate semblait pouvoir faire rompre les planches sous les pieds d’Higan.

        Franck qui était sur les gréements de l’anonyme contemplait la scène avec bien plus de sang froid. Il constatait la perte progressive de ces frères d’armes. Il ne pouvait pourtant les épaulés plus que ce qu’il ne faisait déjà. Régulièrement il ajustait un tir et abattait un ennemi. En bas une quarantaine d’hommes s’affrontaient et le pont du voilier était si petit que tirer des hauteurs étaient presque impossible. Le tireur d’élite avait d’ailleurs fait descendre les autres tireurs, il était impossible pour eux d’ajuster proprement un tir dans cette mêlée. Le plan d’abordage de l’escadron se trouvait mis à mal par la petitesse du pont et la grande corpulence de l’équipage adverse. Franck porta alors son attention sur une partie du navire où se trouvait Charles, manifestement le combat était plus serré que d’accoutumée. Il était en effet rare de voir un épéiste tenir tête au capitaine de l’escadron bleu... Cette scène ne put qu’aggraver le sentiment d’impuissance du numéro 2 de l’équipage.

        Les coups du capitaine pirate devenaient maintenant dangereusement proches du visage de Charles qui peinait de plus en plus à faire reculer son adversaire. Pourtant le bretteur à l’œil unique n’avait pas dit son dernier mot et était parvenu à taillader le tronc de son adversaire mais celui-ci semblait indifférent à toute forme d’attaque à l’épée... Alors que tout espoir était perdu l’œil expert de Charles découvrit une faille dans la garde de son adversaire alors que celui-ci s’apprêtait à réaliser une nouvelle attaque verticale. Sans plus attendre il se fendit afin d’atteindre au cœur son adversaire mais l’épée massive du pirate vint à la rencontre de la rapière du Charles et trancha complètement la lame de telle sorte que le leader bleu se retrouvait maintenant avec une garde d’épée en main...

        Son regard resta néanmoins emprunt de sérieux et il ne put s’empêcher de lâcher quelques mots dans le brouhaha.

        «Je n’ai perdu que du fait de la piètre qualité de mon épée, loue ta chance d’être encore en vie.»
        Charles était maintenant à la merci de son ennemi qui sans un mot afficha le même sourire large et dédaigneux qu’au début du combat. Il fit basculer sa massive épée au dessus de son épaule et l’abattit en direction du crâne de Charles. Le bretteur était bien décidé à ne pas esquiver ce coup qu’il considérait comme sa punition pour ne pas avoir vaincu son adversaire.

        Franck, le tireur d’élite, contemplait la scène depuis les gréements de l’anonyme. Il vit la destruction de l’épée de son chef et écarquilla les yeux en voyant l’épée du capitaine pirate se lever vers le ciel. L’homme ne put s’empêcher de crier.

          -«NOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOON !!!!!!!!!!!!!!!!»

        La voix de Franck semblait couvrir le brouhaha de la bataille mais rien n’empêchait la lame du pirate de descendre de plus en plus vers le crâne de sa victime. Charles pour sa part conservait un regard mauvais à l’adresse de son adversaire. Les secondes semblèrent des heures tandis que la lame s’approchait inexorablement du bretteur borgne.

        Puis... Soudain... Alors que tout espoir semblait avoir quitté Charles, un incroyable nombre de détonations s’éleva dans les airs. Le bretteur, goguenard, regardait le capitaine adverse qui semblait ne plus bouger. Après quelques secondes d’immobilisme total des deux capitaines, le plus massif des deux s’effondra sur le sol. Sur son dos, de nombreux impacts de balles étaient présents. Charles, Franck, les membres de l’escadron bleu et les pirates de la furie de South Blue portèrent tous leurs regards vers la mer où ils découvrirent la raison de ces détonations.

        Deux des trois navires de la marine s’étaient approchés du voilier pirate alors que l’abordage avait lieu. Une cinquantaine de marines étaient maintenant présent le long des bastingages et avait fait feu en l’air et sur le capitaine ennemi qui était en retrait par rapport au groupe. Tous les hommes lâchèrent leurs armes alors que les soldats de la marine investissaient le navire pirate.
        Un Officier de la marine monta sur le pont. Cet homme ne se présenta pas mais s’approcha de Charles pour lui parler.

          -«Nous avons reçu votre missive et sommes venus comme vous avez pu le constater. Nous avons également respectés votre plan mais j’ai pris la liberté de me diriger vers la zone de combat dès que j’ai constaté que le voilier avait relevé ses voiles...

          Sans nous vous seriez probablement mort mon ami... Ces hommes étaient loin d’être des pirates de bas étage. Néanmoins la réussite de cette attaque n’aurait pu avoir lieu sans votre sacrifice. Je vous remercie.»

        Sans attendre de réponse d’un Charles hagard, l’officier de la marine prit la direction de la soute du navire tandis que ces hommes faisaient prisonniers les pirates encore en vie. Le granit marin fut récupéré et en prime la marine découvrit un butin d’approximativement un million de berry. Le tout fut évidemment emporté par la marine normale.

        Franck avait rejoint son capitaine pour lui livrer son rapport de la bataille, il avait le teint pâle et les lèvres frémissantes. Charles attendit son rapport avec anxiété bien qu’il avait lui-même tiré ses propres estimations en contemplant les cadavres jonchant le sol.

          -«Sergent Chef Higan, nous déplorons une perte d’environ 15 hommes et l’anonyme a été sévèrement touché lors de la bordée. Néanmoins nous ne souffrons d’aucune avarie et nous pourrons rejoindre aisément le QG de South Blue pour les réparations. Un des officiers à également accepté de nous confier le commandement de quelques uns de ces hommes afin qu’ils nous aident à manœuvre notre navire jusqu’au port du QG...»

        Charles entendit le rapport et remercia de la tête son caporal qui avait certainement livré un effort considérable pour paraitre distant vis à vis de la situation de l'escadron. Le bretteur tenait encore en main la poignée de son épée qu’il regarda avec pitié. Cette défaite semblait cristallisée dans cette épée brisée... Certes en tant que bretteur, Charles devait aussi s’intéresser à son équipement, mais les meitous n’étaient pas des armes faciles d’accès, même pour le leader de l’escadron bleu...

        De plus, avec les pertes qu’il venait de déplorer, l’obtention d’une telle arme n’était pas encore d’actualité...