Un jour où l'autre, il faut trouver le courage de prendre son destin en main. A force de ne pas prendre de décision, on risque de marcher en arrière plutôt que d'aller de l'avant. J'ai dix sept années de vie maintenant, alors il est temps. Je ne resterai pas sur cette île où la seule chose à faire consiste à labourer les champs et vider des bouteilles de rhum. J'ai du courage, mais surtout de l'ambition. Celle d'être un jour respecté, tel que je suis. Celle d'être reconnu pour ce que je suis et non ce que je parais.
Alors je pars. Sans un regard en arrière. Je plonge dans l'océan en espérant pouvoir un jour arriver à Logue Town. La ville du possible, celle là même où je pourrai me construire. Mais pour cela, il me faut des billets verts, car l'argent n'est rien d'autre que l'essence du monde, et sans elle on ne peut rien. On ne vaut rien. Alors je pars pour « J'En froquais », la plus grande des fermes d'East Blue. Des rumeurs disent que l'on peut y gagner pas moins de 30 000 berrys par jour. Peut être suis je naïf d'y croire, sûrement même, mais des opportunités comme celle ci, on n'en a que trop peu dans une vie. L’appât du gain est trop fort, cette fichue monnaie attire l’œil jusqu'à rendre fou, elle pousse à prendre des décision que trop peu raisonnables. Mais la raison, je la jette, et ce depuis longtemps.
Si je suis à nager ainsi, vers un futur inconnu, c'est aussi pour cette raison. Mon organisme crie à l'action, mes mains veulent se confronter à des difficultés. Certains appellent cela le besoin d'aventure, je dirais plutôt le besoin de vie. Des années gâchées à ne rien faire de dangereux ne sont bonnes qu'à lapider d'injures. Je ne suis pas de ces hommes qui se cachent dans leur confort, dans leur lâcheté.
…
Mes pieds foulent enfin le sol après deux jours de nage à se nourrir de planctons et autres petits animaux. Ce fut un retour aux sources. J'observe maintenant le paysage à l'aide de mes yeux ankylosés par l'eau de mer, rougis par la fatigue. En espérant devoir rester ici le moins longtemps possible. Un No Man's Land. Une grande plaine où un nombre incommensurablement grand de porcs broute ci et là. Des centaines, des milliers, je n'en sais rien mais je ne pensais pas un jour en voir autant au même endroit. Un amoncellement, c'est le mot. C'est à peine s'ils ne se trouvent pas les uns sur les autres, à se noyer au milieu de la bouse. Au centre de l'île faisant plusieurs hectares, j'aperçois un grand bâtiment blanc, sans fenêtres, seule trace de vie humaine. De cette battisse je crois apercevoir une ombre s'approchant. Je suis obligé d'écarter mes pupilles à l'aide de mes doigts boursouflés. C'est bel et bien un homme, ou une femme, ou tout du moins un animal à deux pattes. N'ayant plus qu'à attendre, j'allume un cigare caché dans mon sac à dos hermétique. Cette bouffée redonne enfin des sensations à mes narines embrumées. Les minutes passent ainsi tandis que l'ombre devient peu à peu compréhensible de mes petites pupilles. L'animal est un homme âgé d'une vingtaine d'années, aux traits tirés et à la mine renfermée, il tient bien en évidence une arme à feu en bandoulière. Arrivé à ma hauteur, le soldat prend la parole d'un air très peu sympathique, voire méfiant. C'est à peine si je sens une once de respect dans sa voix. Je devrais avoir l'habitude de par ma race et pourtant...
_Salut la poiscaille, j'sais pas bien ce que tu fous ici, mais l'tourisme est interdit.
_Mmmh... On raconte que cette île offre du travail.
_Ah ouep c'est p't'être bien vrai. Mais c'est p't'être aussi vrai qu'on n'aime pas trop les hommes poisson par ici. M'enfin suis moi.
Mes jambes se mettent alors à suivre ce drôle de petit homme à l'air si supérieur jusqu' à arriver au niveau du grand bâtiment.
Le jeune soldat me fait alors entrer dans une pièce des plus somptueuse où un homme est installé. A ma vue, celui que je prends pour le propriétaire de l'île ne peut s'empêcher de faire briller de mille et un berrys ses yeux globuleux. Les cheveux vieillis par les années et un costard passé de mode depuis bien de trop longtemps font de l'être en face de moi un petit humain bien étrange. Au bout d'une courte discussion, je me rends tout de même vite compte de l'horreur de son âme. Assis dans un fauteuil bien de trop grand pour lui, il me tend un papier à l'écriture illisible.
_Ahahah une bête comme toi, ça va bien aider les affaires tiens. Signe là et t'es engagé.
L'observant d'un air méfiant, je ne peux m'empêcher une remarquer.
_Mmmh... Navré de vous poser cette question, mais... Quel sera mon salaire ?
_Ici, on travail avant, on pose les questions après. Les bavettes, c'est pour les fainéants pas capables de supporter l'travail. T'es venu ici pour trimer non ? Alors signe et dégage.
Dernière édition par Ishii Môsh le Jeu 20 Mar 2014, 11:33, édité 1 fois