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Devenir un Toon

En ce magnifique début de soirée, le vent venant de la mer caressait doucement les rues de Goldville (et non pas Gloat ou Gloamville, comme le croyait Ange ; enfin c’était presque ça, non ?). Goldville était une ville de taille moyenne établie sur la majeure partie d’une île à peine plus grande, à une dizaine de lieues de Logue Town ; elle vivait principalement de la pêche, du commerce et du tourisme. Dans le port, on trouve toutes sortes de bateaux : embarcations de pêche, caravelles, navires pirates, et aussi, en regardant bien, un bateau de la marine ; on y trouve aussi le Lady million, le navire des truands, actuellement à quai pour des réparations indispensables avant de rejoindre Grand Line.
C’est dans l’une des ruelles de la ville que l’on rejoint Ange Del Flo. Chose rare, il sait exactement ou il va : à la recherche d’un de l’indicateur le la maffia que l’on lui avait recommandé, il ne lui fallut beaucoup de temps passé dans les bars du port à questionner les habitants pour savoir ou trouver son personnage. A sa surprise, le fait de prononcer "TnT" faisait des merveilles, et l’on s’était fait un plaisir de le renseigner. Brocante Aaron Salace, 17 rue de la bonne fortune, située entre l’allée des pigeons et la rue du touriste crédule ; facile à trouver.

Cependant, au détour d’une maison, alors qu’il croyait toucher au but le voleur fût bien obligé de s’arrêter : devant lui se tenaient trois enfants, dont les âges devaient varier de 9 à 12 ans –enfin à peu près, évaluer les âges ce n’était pas trop son truc-. Ange les aurait sans doute ignorés et surement bousculés avant de reprendre sa route s’ils n’avaient pas été armés. En plus, ils affectaient tous un air méchant.

Courageux, mais pas téméraire : je vais faire un détour.

L’albinos pivota sur lui-même, pour se retrouver nez à nez à deux autres jeunes de respectivement 8 et 10 ans –en gros-, l’un en possession d’un maillet et l’autre de… d’un gros dictionnaire ?
L’un des enfants, celui qui semblait être le meneur, prît la parole :

- Tu le vois bien, étranger, toutes les issues te sont coupées. Mais ne t’inquiète pas : si tu fais ce qu’on te dit on sera gentils. Comme c’est un personnage secondaire au dessus du lot, il a même le droit à une couleur particulière, ce qui laisse présager le pire !
- Oui, on veut juste que tu nous donnes tous tes sous.
- Et même que si tu le fais, On ne te tapera pas trop.
- ‘xact
- Ouais, étranger, et tu ne finiras peut-être même pas dans une poubelle.


Haha, des gamins ! De simples gamins qui se prennent pour des grands ! Tu as eu peur pour rien.

- Ho-ho-ho (rire forcé), vous êtes de sacrés farceurs, hein ? Allez, bonne soirée les jeunes !

Le cambrioleur essaya de continuer son chemin, mais avant même d’avoir fait un pas le chef du groupe avait pointé son arme (une espèce de canne à pêche avec un assortiment de hameçons au bout) sur son torse. Il esquissa le sourire que font tous les chefs méchants dans ce genre de situation, et déclara :

- Plus un pas, étranger. On dirait que tu ne sais pas à qui tu as affaire ! Nous sommes…
- (en chœur) Nous sommes …
- Vous êtes… ?
- Nous sommes la bande…
- La bande …
- ‘bande ?
- Nous sommes des membres de la bande des terreurs des bas quartiers de Goldville, sous les ordres du terrible Jeff « deux visages », terreurs des bas quartiers de Goldville !
- Et tu es sur notre territoire de chasse !
- Ouais !
- ‘xact !
- Alors, tu commences à avoir peur étranger ?!
- …

Bon, j’ai pour principe de ne pas frapper les enfants. C’est mal et c’est lâche, mais ceux-là commencent à me pomper l’air.
D’ailleurs, depuis quand est-ce que tu as des principes ?


Sans crier gare, Ange saisit l’arme-canne à pêche d’une main et gifla son propriétaire de l’autre. Les gamins s’écartèrent précipitamment, mais l’un d’eux ne pût échapper au coup-de-pied-dans-le-derrière punisseur du sauvage. Dévoilant des crocs, pointant ses griffes, bavant et ricanant sans retenue, il réussissait pour une fois à terroriser des gens, et en profitait bien. Il lui suffit ensuite de lâcher un « mouahahaha ! » tout en dégainant une dague pour faire déguerpir ses agresseurs.

Non mais ! Pour qui ils se prennent ceux-là ?! Tsss, il a fallu que tu tombes sur le seul coin mal fréquenté de l’île.

***

Rue de la bonne fortune : c’est ici ! Le numéro dix sept… hum, alors… douze, quatorze, seize, … dix-huit ? Ah zut, il était du côté des chiffres pairs. Le voleur resta en plan le temps de comprendre le fonctionnement de la numérotation des maisons, puis se retourna et vît ce qu’il cherchait : de l’autre côté de la rue se trouvait bien en évidence la brocante ; la vitrine affichait un bric à brac comme on en voit dans tous les magasins de ce genre, qui tenait plus du décor que de la marchandise. Le voleur entra.

Monsieur Aaron Salace, brocanteur mais surtout informateur de la maffia à mi-temps était un homme comme on en voit tous les jours dans la rue : une apparence simple, prévue que pour n’apparaitre que sur quelques cases, et un visage comme dessiné à la va-vite que l’on oublie dès que l’on ne l’a plus sous les yeux.
Répétant le mot de passe convenu, le voleur déclara :

- Quel temps agréable pour promener son dindon de compagnie, n’est-ce pas ?
- A qui le dites-vous ! Sauf que moi, j’ai juste un chapon apprivoisé.
C’était la réponse convenue. Prudemment, il regarda autour de lui, sous son comptoir, puis à travers la vitre avant d’ajouter :
- Monsieur Delflo, je suppose ? On m’a prévenu de votre arrivée.

Ange décida d’essayer l’art des questions de manière indirecte. Il n’avait pas beaucoup de pratique, mais il avait beaucoup regardé faire. Il s’appuya sur le comptoir, fît un grand sourire, et répondit:

- C’est mon nom. On m’a dit que vous aviez des renseignements pour moi.
- C’est possible, en effet. Le brocanteur sourit à son tour. Avez-vous déjà entendu parler des fruits du démon ?

Le cambrioleur connaissait. Dans sa tribu, on se transmettait de génération en génération la légende du chaman qui après avoir mangé un fruit étrange avait acquis la capacité de changer de couleur. Pas très utile comme pouvoir, me direz-vous, mais c’est suffisant pour impressionner une bande de naïfs de la trempe d’Ange. Il acquiesça.

- Et avez-vous déjà entendu parler de Wrath, le fameux capitaine corsaire qui a fait des ravages sur West Blue dernièrement ?

Bien qu’étant initié aux joies de la lecture, le sauvage ne lisait pas les journaux.

- Qui ça ? C’est une célébrité locale ?

Tss, encore un de ces simples d’esprits que l’on ne recrute dans la maffia que pour leur talent au combat, soupira intérieurement Aaron.

- Ahem, pas que. Il se trouve que ce corsaire, maintenant décédé, avait en sa possession une collection de fruits démoniaques, et que l’un d’eux ce trouve maintenant ici, à Goldville.

Voyant que l’expression du visage peu inspirée du cambrioleur, il ajouta :

- Et vous n’êtes surement pas sans savoir que chacun de ces fruits valent une fortune. Des dizaines de millions de berrys au bas mot.

Je suis en train de passer pour un ignorant et un abruti non ?
Comme d’habitude, hum ! Enfin, oui, c’est exactement ça.
Je vais essayer de caser une remarque intelligente, alors. Ça va faire personnage ténébreux et taciturne.
Ou alors type coincé ; il ne te manque que les cheveux noirs avec des épis.



Le commerçant expliqua au pirate avec des mots simples de quoi il retournait : une fois le Corsaire mort, divers organismes s’étaient accaparés certaines des pièces de sa collection de fruits. L’un avait été emporté et ramené à Goldville par un pirate qui espérait en tirer un bon prix avant de quitter le métier. Malheureusement pour lui, il s’en était fait dépouiller quelques jours après son arrivée par une bande de jeunes qui sévissait dans les environs. L’informateur s’était renseigné : le chef de ce gang était un certain Jeff, qui se présentait comme la terreur des bas quartiers de la ville. Son quartier général était situé quelque part dans les environs, mais il ne savait pas exactement ou.
Ange chercha à quels moments de la conversation il pourrait caser une réplique qui en mettrait plein la vue à son interlocuteur, mais il ne réussit à balbutier que des « ah », et des « d’accord ».
Après avoir soigneusement noté toutes ces informations dans un recoin de sa tête, l’albinos prît congé de monsieur Salace.

***

Quelques minutes seulement après le départ du pirate, un autre personnage entra dans la boutique. C’était un personnage d’une certaine taille aux cheveux blonds et vêtu à la manière d’un aristocrate négligé. Il fût forcé de baisser la tête pour entrer afin de ne pas faire tomber son chapeau haut-de-forme, rajusta son couvre chef, inspecta la pièce d’un œil critique, puis se dirigea tout droit vers le brocanteur.

- Tu vas me répéter tout ce que tu viens de dire à cet homme.

Ce n’était pas un ordre : c’était l’énonciation d’un futur proche.
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Spoiler:

Une fois sorti, Ange avait parcouru rapidement les rues aux alentours, comme s’il s’attendait à voir sur la façade de l’une des maisons le panneau : "Qg des terreurs des Jeff". Après seulement une petite dizaine de minutes de recherche, il commença à en avoir assez et s’arrêta pour réfléchir.

Dans l’immédiat, tu dois surtout trouver la cachette de ce fameux Jeff. D’ailleurs, j’ai déjà une idée sur la façon dont tu dois t’y prendre.

Rapidement, il trouva ce qu’il cherchait : un groupe de jeunes désœuvrés, habillés comme des délinquants avec des vêtements moches et de travers, les cheveux trop longs et ce genre de trucs.

C’est simple : il te suffit de trouver des membres de leur bande, de les provoquer, de les tabasser, et de les forcer à te conduire devant leur chef.

- Hé, les mioches ! Vous savez que j’ai massacré vos copains, tout à l’heure ?!
Les enfants se regardèrent entre eux, sans comprendre.
- Alors, qu’est-ce que vous en dites ? Rien ?! Peut-être que vous avez trop peur pour me répondre ?
Mais qu’est-ce qu’ils ont ces gamins ? Je suis tombé sur le commando des sourds-muets ?
- Vous devez vous tromper, m’sieur, on est tous ici.
Ah, zut.
- Vous n’êtes pas de la bande des terribles des quartiers, ou je-ne-sais-quoi ?
La figure de l’enfant qui avait répondu se figea un instant. Puis, après quelques secondes, il sembla se reprendre et affirma avec un air innocent criant de vérité :
- Vous faites erreur, m’sieur, je ne vois pas que quoi vous voulez parler.

Mince, ça risque d’être plus compliqué que prévu. Tu ne vas pas pouvoir interroger un par un tous les gamins du coin. En plus, les passants te regardent bizarrement. Oh, mais il me vient une idée ! …

***

Depuis un coin sombre, le groupe d’enfants observait l’homme aux tresses-bizarres blanches. Quoiqu’étonnants, ses cheveux ne l’étaient pas autant que la drôle de pancarte qu’il s’était accroché autour du cou sur laquelle il était écrit :
"La terreur de je-ne-me-souviens-plus-quoi de Golomville, je te défie"
L’un des membres du groupe laissa échapper un rire hautain qui aurait pu être très convaincant si sa voix avait mué, puis ordonna aux autres de se mettre en position. A son signal, ils bondirent dans la ruelle et cernèrent le pirate.

Ange compta : ils étaient quatorze à l’encercler : neuf garçons, trois filles, et deux de sexe inconnu, à cause de leurs cheveux mi-longs leurs vêtements et leurs visages pouvant appartenir aussi bien à un garçon qu’a une fille.

Héhé, on dirait que j’ai tiré le gros lot, cette fois !
Il ne te reste plus qu’a tous les assommer, sauf un qui sera promu guide. Tu restes gentil bien sûr : ce sont des jeunes. Pas d’armes donc.


Le sauvage prît une expression qui lui donnait l’air de penser "hum, tu as l’air bon à manger, toi !", tendit ses bras, et attendît que ses adversaires portent le premier coup.

***

L’homme au chapeau haut de forme vînt à la rencontre du groupe de jeunes désœuvrés qui discutaient avec animation ; lui au moins ne s’encombra pas de questions inutiles :

- Toi, le petit avec les taches de rousseur et l’air pas dégourdi : cinquante berrys si tu me dis ou est parti le zazou avec les dents pointues.

***

L’assaut ne vînt pas. Un jeune parmi les plus vieux du groupe sortit des rangs. C’était un jeune adolescent de taille moyenne, et d’environ treize ou quatorze ans pour autant que pouvait en juger Ange. Ce qui choquait tout de suite en le voyant, c’était la particularité de son visage qui lui avait sans nul doute valu son surnom : tandis qu’une des moitiés était aussi lisse que la peau d’un bébé, l’autre était constellée d’acné. Il détonnait du reste du groupe par sa tenue soignée et ses cheveux peignés qui montraient que même si ses parents, ces irresponsables, le laissaient faire n’importe quoi dehors, au moins ils faisaient attention à l’apparence de leur fils. Le dénommé "deux visages" s’exclama plus qu’il ne déclara :

- Hein ?! Alors c’est toi qui veux me défier ?!! Tu m’as l’air d’un parfait abruti !!! Soit tu ne me connais pas, soit tu es un inconscient !!!!
Lorsqu’il parlait, on entendait presque la ponctuation.
- Tu l’auras voulu, l’adulte ! Moi, la Terreur Des Bas Quartiers de Goldville, je relève ton défi !!

C’est bon ça… un duel : je ne pouvais pas rêver mieux ! Et même pas besoin de le chercher, il est venu tout seul.

- Vous autres, en position ! Tom, Sam, Tim et Johan-Frederick, vous faites la première attaque !!

Les gamins nommés sortirent des rangs, brandissant respectivement un manche à balai, un couteau à pain, une pile de couvercles en métal aiguisés sur les bords, et un ballon de foot.

- Hé, ce n’était pas sensé être un duel ?
- Je ne t’empêche pas de te battre avec tes compagnons si tu en as amenés avec toi ! Dommage qu’il n’y en ait pas !!
- Ah, c’est juste. Bon, je n’ai rien dit alors.

Crétin.
Quoi ? C’est honnête, non ?
Oublies ça, concentres-toi plutôt sur le combat.


Disposés chacun d’un côté de manière à cerner Ange, les enfants attaquèrent. Le pirate évita le couteau à pain de Sam, saisit le manche à balai que tenait Tom, et s’en servît –du manche et de Tom- pour frapper Tim. D’un coup de pied, Johan-Frederick lui expédia son ballon à la figure.

- Haha, je vais te le renvoyer ton petit ballon, attends… (Ange donne un coup de tête dedans) … AÏE ! IL L’A REMPLI DE CAILLOUX CE SALE PETIT !!!

Ce sale petit c… ?
Non, juste ce sale petit : n’oublies pas que tu parles à des enfants.


Sans lui laisser de répit, une gamine avec une hache, un enfant avec un fil barbelé, un –ou une- mioche avec un filet de pêche et un morveux armé de ciseaux de couture lui tombèrent dessus. L’un écopa d’un coup de pied dans le ventre, l’autre s’emmêla dans son fil, et le filet du troisième servit à enfermer le quatrième.


- Hoho ! Pas mal …!! A mon tour : "Hyper-méga-giga coups de batte dans les reins™ " !!!

Tiens, elle est originale sa batte. Il y a des chiffres barrés dessus : "1616 7 8 9 1 2 3 4".Ce doit être le nombre de victimes à son actif, mais en a-t-il tué 1623 ou seulement 7 ?
Je pense qu’il s’agit juste de la date… Ah, au fait, il essaie de te taper avec je crois.
Pas de problème, je vais l’arrêter avec la main !


Le sauvage tendit la main pour empoigner l’arme, et poussa un gémissement de douleur : il s’en fallut de peu pour que le choc ne lui torde le poignet ! Comme de nombreux adultes avant lui, Ange venait de payer son arrogance envers les enfants.
Jeff nota avec satisfaction le changement de comportement de son adversaire lorsque celui-ci, après s’être massé le poignet tout en poussant des jurons dans une langue qu’il ne connaissait pas, sortît ses dagues. Les deux combattants se toisèrent un moment, puis s’élancèrent l’un sur l’autre :

- "Supra-extra-méga pilon sur ta tête™ " !
- Le marteau piqueur !

Chacun y allait de son attaque : tandis que la terreur tentait d’assener un puissant coup de batte sur la tête du sauvage, celui-ci lui envoyait sa meilleure (et sa seule) attaque spéciale. Tenant chacune de ses dagues la pointe vers l’enfant, il lui expédia une série de coups rapides et violents. L’impitoyable soustraction des dorikis fît son effet, et le délinquant-en-chef encaissa l’attaque de plein fouet : en poussant un « Glaargh ! », il s’écroula par terre.
Désemparés comme le sont toujours les bandes de figurants crétins une fois leur chef vaincu, les subordonnés de Jeff ne savaient plus quoi faire et leur regard allait de celui-ci à Ange. L’un deux finit par proclamer :

- Vive monsieur-tresses notre nouveau chef !

***

Quand l’homme au chapeau haut-de-forme arriva sur place, il n’y avait plus personne. Cependant, le groupe on ne peut moins discret formé par Ange et les douze enfants braillards pouvais s’entendre à plusieurs pâtés de maison de distance et il n’eut aucun mal à les rejoindre. Après s’être approché furtivement, il les suivit de loin.
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La blessure de l’ex-terreur des bas quartiers était sans gravité, et il fût bientôt remis sur pied. Soutenu par ses camarades, il conduisit le cambrioleur à sa cachette, une cave dissimulée sous une bâtisse désaffectée. Pour l’atteindre, il fallait traverser un dédale de couloirs en mauvais état qui avaient probablement du servir à quelque chose un jour. Le Qg en lui-même était un simple local en béton, décoré de tapis hétéroclites et de draps de toutes provenances tendus sur les murs, ainsi que par de nombreux trophées allant du chapeau volé à l’ustensile de cuisine en passant par le pavillon pirate et la statue en toc. Toute la bande était réunie : ils étaient une trentaine de gamins en tout, affalés sur des fauteuils et des canapés disparates.
Au milieu, Ange et Jeff discutaient :

- […] C’est ça, je suis juste un… un chasseur de têtes, je traque les terreurs comme toi. Non, non, je ne veux pas devenir le chef de ta bande pourrie !
Quelques protestations et mots désagréables fusèrent de l’assemblée.
- Mais puisque je te dis que c’est la règle ! D’ailleurs, tu vas faire quoi si tu ne prends pas le commandement à ma place ?!! Tu vas repartir comme ?!!! On n’a jamais vu ça !!!!

Hé, ça ne va pas ça ! Il est hors de question que je devienne le chef d’une bande de gamins bêtes comme leurs pieds ! Je suis juste venu pour l’argent.
Eh bien justement : si tu es leur chef, ils seront obligés de te montrer leur trésor. A moins que…


- Ce que je veux, c’est un trophée. Qu’avez-vous à me proposer ?
- Habituellement, quand un chef de bande en bat un autre, il lui prend un de ses objets fétiches ! Ça pourrait être ma veste très classe, avec écrit "terreur" derrière, ma batte de base-ball,… ou encore mes boutons sur le visage !! Ajouta le garçon avec un air plein d’espoir.
- Non, non, pas ça. Vous n’auriez pas… je ne sais pas moi, un trésor ?
- Bah ! On à quelques armes, et un coffre qui contient cinq mille berrys, c’est tout !!
- Et vous n’auriez pas… hum, mais je dis ça comme ça, un objet de valeur que vous auriez dérobé récemment ?
- Euh… !
- Un truc comme... je-ne-sais-pas, moi, un fruit ?
- Aaah ! Si !! Tu parles de la grosse noix de coco bleue !!! Comment as-tu su ?!!! On comptait le mettre aux enchères, mais si ça peut sauver ma place de chef … Tojo, Sam, amenez-lui le fruit bizarre !!!!
Je l’aurai mérité celui-là. S’il ne valait pas quelques millions, je serais déjà parti.

Ange s’attendait à ce qu’ils révèlent une cachette secrète, comme un coffre fort dissimulé sous un cadre ou une trappe sans le sol, mais le fruit était simplement rangé sous le coussin d’un des canapés. C’était une grosse noix de coco bleue, dont les fibres entortillées formaient des motifs en forme de spirales. Pour ceux qui savaient la ressentir, elle dégageait une certaine aura ; personne dans la pièce ne la ressentait.

***

Caché derrière la porte, le capitaine Spencer s’en mettait plein les oreilles. Lorsque l’on amena le fruit, il sentit que c’était pour lui un signal, et qu’il était temps pour lui de faire son entrée en scène. Il dégaina son sabre, et donna un violent coup de pied à la porte.

En entendant la porte ainsi malmenée, tout le monde tourna la tête pour voir ce qui se passait. Ils ne virent personne, seulement la porte qui allait heurter le mur avant de reprendre sa position habituelle. Ils n’aperçurent pas l’intrus, puisque celui-ci, à peine la porte ouverte, avait bondi en l’air ; grâce à ses talents d’acrobate, il se réceptionna magnifiquement sur le sol, à deux pas de l’enfant qui portait le fruit.

- Que personne ne bouge, sinon je tue votre camarade ! Je suis le capitaine Benoît Spencer, et je veux ce fruit.

Sa déclaration n’avait rien d’exceptionnel, mais il en était très content ; il l’agrémenta d’un sourire Colgate (ou Signal, ou Freedent…). Il n’aurait aucun remord à malmener l’enfant: les criminels n’ont pas d’âge et personne ne lui reprocherait d’en avoir attaqué un.

- Moi, je m’en fiche que tu le tapes, ce n’est pas mon copain.
- Hé, arrêtes de dire des bêtises monsieur-tresses !
- On ne va pas sacrifier Tojo juste pour un fruit moche qui ne sert à rien, immobilisez-le les gars !


En voyant la horde de gamins lui tomber dessus, le capitaine s’était mis en position de combat, le sabre en avant et les jambes fléchies, prêt à bondir. Il eut la surprise de voir que ce n’était pas à lui que les enfants s’attaquaient, mais au seul adulte de leur groupe, le type à la peau blanche. Quelle que soit sa force, il ne pourrait pas résister à la charge d’une dizaine de petits furieux. Puisqu’ils semblaient décidés à l’immobiliser et que personne ne s’intéressait plus à lui, il reporta son attention sur le porteur du fruit, resté immobile. Lorsqu’il tendit la main, l’enfant, trop content de s’en débarrasser, lui donna la noix de coco sans se faire prier, écopa d’une taloche gratuite –c’est normal de frapper les enfants, il faut en profiter avant qu’ils ne deviennent grands-, puis courut se réfugier derrière un canapé. Satisfait, son sabre dans une main et le fruit dans l’autre, Benoît Spencer quitta la pièce.

- Hé, arrêtez ! Il s’en va ! Aaaargh !!

Par rapport à ses subordonnés, Jeff possédait une certaine vivacité d’esprit. Il avait compris en voyant l’intérêt que portaient les deux hommes à la noix de coco bleue que celle-ci n’était pas une simple fantaisie de la nature, et qu’elle avait plus de valeur qu’elle n’en avait l’air.

- L’adulte s’est échappé avec notre fruit ! Rattrapez-le !!

Les membres de la bande des terreurs de bas-quartiers de Goldville lâchèrent Ange qu’ils avaient immobilisé au sol et se précipitèrent en criant joyeusement à la poursuite de l’intrus. On avait l’impression que pour eux, tout cela n’était qu’un jeu. Le Cambrioleur et Jeff restèrent seuls dans la pièce : chacun réfléchissait à la conduite à tenir.

Rah, les sales mioches ! Bon maintenant que leur chef est resté seul, je vais pouvoir le battre une bonne fois pour toute. Ensuite, je partirai à la recherche de ce voleur qui m’a devancé et j’en profiterai pour cogner tous les gamins que je croiserai !
Ce n’est pas une bonne idée : tu pourrais avoir besoin de leur aide pour rattraper le gars au grand chapeau ; en plus ils ne sont pas si nuls à la bagarre.
Mais ils m’ont pris en traitre !
Ils serviront de diversion, et voilà. Donc tu fais équipe avec eux, tu reprends le fruit… et tu files avec avant qu’ils n’aient le temps de réagir !
Ça me plait, comme plan !


Jeff quant à lui, tenait le même genre de réflexion : il pouvait toujours utiliser monsieur-tresses comme tanker pour vaincre l’homme au chapeau haut-de-forme. Avec un peu de chance, ils s’entretueraient et si ce n’était pas le cas il n’aurait qu’à achever le vainqueur pour récupérer son fruit, qu’il s’empresserait de revendre.

- Hé, l’adulte ! C’est ton trophée qu’il a pris !! Toi, tu veux rattraper le voleur pour son butin et moi pour venger mon honneur,… on fait équipe ?!!!
- Euh,… oui, je pense que je pourrais me servir de v… enfin, me battre avec vous. De toute manière je n’ai aucune envie de prendre un autre trophée à la place, comme ta veste par exemple ; je suis sûr qu’elle n’a aucune valeur marchande, hum ! Enfin, je veux dire… le fruit non plus mais… elle ne m’irait pas, voilà. Et j’en ai déjà une.
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Spoiler:

Benoît se souvenait très bien ou était la sortie : il devait tourner une fois à droite, une fois à gauche, encore à gauche, puis aller tout droit, et enfin prendre un escalier. C’était facile, alors pourquoi n’avait-il pas retrouvé le couloir de gauche ? Pourquoi n’avait-il pas trouvé l’escalier ?! Pourquoi avait-il descendu une échelle ?! Et pourquoi se retrouvait-il dans cette pièce vide ou s’entassaient des caisses éventrées ?! Pour couronner le tout, deux enfants l’avaient rejoint. L’un armé d’une collection de fourchettes de table et l’autre d’une canne à pêche, ils n’attaquaient pas et restaient à l’entrée de la pièce. Peut-être attendaient-ils les renforts ? En tout cas, ils discutaient à voix basse en le regardant et avaient l’air de bien rigoler. Le capitaine Spencer aimait bien les blagues : il avait un grand sens de l’humour, à condition que cela vise quelqu’un d’autre que lui. Lorsque l’idée lui vînt qu’il pouvait être l’objet de ces rires, sa figure se renfrogna, il raffermit sa poigne sur la garde de son sabre, et alla à la rencontre des deux jeunes. Avec une voix qui était un mélange de détresse et de fureur, il s’écria :

- C’est de moi que vous parlez ?!

Le changement était radical : sa figure était devenue rouge, et son corps était agité de tremblements. La tentation était trop forte, et l’un des deux enfants répondit sur un ton moqueur :

- Oui étranger : on parlait de ta coiffure, et aussi de ton chapeau.

Sans lui laisser le temps de réagir, Benoît lui assena un coup de sabre.

- Aouch !
- PERSONNE NE SE MOQUE DE MOI, COMPRIS ?!
- Aïïe ! Ouille !
- JE NE SUPPORTE PAS QU’ON RIGOLE DE MOI, TU ENTENDS ?!

Le second enfant s’était prudemment, mais l’homme n’avait d’yeux que pour l’enfant qui l’avait taquiné, et qui, recroquevillé sur le sol, maintenait son épaule en sang tout en gémissant. En continuant à pousser des cris de rage, le capitaine martelait le corps de son ennemi pour laisser libre cours à sa colère.
Les hurlements de Benoît et de sa victime finirent par attirer le reste de la bande, Ange compris. Ils contemplèrent le spectacle avec horreur puis, sur un signal de leur chef, ils se répartirent dans la pièce.

- Bon, écoutes, murmura le cambrioleur à Jeff, j’ai pas mal d’expérience dans le vol d’objets. Vous allez faire une diversion en l’attaquant pendant que je me faufile par derrière et que je lui prends le fruit sans qu’il ne se rende compte de rien.
Ce n’était pas du tout ce qu’espérait « deux visages ».
- Ah oui, mais si je fais ça, on risque d’avoir plein de blessés ! Alors que si tu lui fonces dessus le premier, comme tu es assez fort, tu pourras lui tenir tête pendant qu’on t’aide !!
Sale gosse. C’est sur toi que j’ai bien envie de foncer en premier.
Si tu crois que je vais te laisser mettre les mains sur mon fruit,… pensa la jeune terreur.
Le ton montait peu à peu.
- C’est vous qui avec perdu le fruit après tout, je ne vois aucune raison de risquer ma vie pour le récupérer à votre place !
- Tu n’as qu’à prendre mes boutons sur le visage à la place si tu tiens tant à avoir un trophée !
- Mais ça n’a pas la même val… enfin, ce n’est pas pareil de se balader avec le fruit dérobé à la terreur des bas quartiers de Gloamville ou de se trainer ses boutons sur le visage !
- Goldville ! Et mon acné est beaucoup plus connue que mon fruit !! D’ailleurs, comment as-tu su, que je le possédais ?!!!
- Ahem… va pour ton plan finalement, je fonce en premier.

Sortant ses dagues, Ange pénétra à l’intérieur de cercle que formaient Jeff et ses complices. Bien qu’encore tremblant, l’homme au chapeau semblait s’être calmé. Il rajusta son haut-de forme, prit une pose de combat, et fît mine d’attendre le bon vouloir de son adversaire pour débuter les hostilités. Vu le nombre d’ennemis présents, il regrettait de ne pas avoir emmené quelques membres de son équipage avec lui.

Tsss, encore un plan foireux ! Un face à face, il pouvait difficilement m’arriver pire.
Si : tu aurais pu à la fois te faire pour ennemis les gamins et le voleur.
En attendant, j’attaque comment ?



Les deux adultes se toisèrent longuement puis, le premier, Ange s’élança. Tenant fermement sa dague gauche, il lui fît faire un rapide mouvement vers le haut contre l’épée de son adversaire de façon à l’écarter. En même temps, il précipita l’autre vers son torse. Pour ceux qui le connaissaient, en plus de tous ses autres caractères, Benoît Spencer était réputé pour ses talents d’acrobate qu’il avait transformé en style de combat: quand le sauvage vint pousser son sabre, il se servit de celui-ci pour prendre appui sur la lame de son adversaire et se propulsa en l’air, exécuta un salto au dessus de l’albinos, et retomba derrière lui, dos à dos. Sans perdre de temps puisque c’était un combo' qu’il avait l’habitude d’enchainer, le capitaine se retourna à demi et passa à l’enchainement « un coup de pied dans le dos, et un coup se sabre une fois au sol ». Ange ne fut sauvé que par le réflexe qu’il eut de se jeter au sol dès qu’il sentît son ennemi dans son dos. Il se reçut souplement sur le sol, se roula vivement sur le côté, puis se redressa d’un bond. C’est l’a qu’après avoir regardé autour de lui il constata qu’aucun des enfants qui étaient sensé le soutenir n’avait bougé.

Finalement, je vais devoir me battre tout seul, hein ? Et je serai forcé me farcir tous les gamins une fois que j’aurai étalé le voleur.
Ce n’est pas très enthousiasmant. Ce qu’il te faudrait, c’est les forcer à se lancer d’eux-mêmes dans le combat, en créant la pagaille ou en faisant semblant de te faire battre par exemple.
Me faire battre ? Ça voudrait dire me faire blesser exprès, et ça c’est hors de question !
Alors il va falloir leur pondre un bon gros mensonge.
Hum, je vais tirer un coup de pistolet au hasard, en espérant qu’il blesse ou au moins qu’il fasse se sentir en danger un des membres de la bande, et je dirai que ce n’est pas moi qui ai tiré mais monsieur-haut-de-forme. Ça passera tout seul, ils attaqueront, et je pourrai revenir à mon plan de base.


Le coupant dans ses réflexions, le capitaine s’était approché de lui par bonds espacées à droite et à gauche pour masquer sa trajectoire. Arrivé à deux pas de l’albinos, il feinta d’abord à droite avant de reporter son sabre à gauche pour frapper au niveau de la poitrine. Plutôt que de chercher à contrer, le cambrioleur s’était reculé préventivement afin d’éviter la feinte, si bien qu’il réussit sans difficulté à parer la véritable attaque. Benoît fît un bond en arrière pour éviter une contre-attaque, et eut la surprise de voir de l’autre s’était écarté lui aussi. Profitant du fait qu’une bonne distance les séparait maintenant, Ange rangea une de ses dagues et tira de sa veste son pistolet. A la vue de l’arme, le capitaine Spencer eut un rictus moqueur, et lança une remarque qui aurait pu passer pour une tentative de déstabiliser son adversaire, comme le font souvent les méchants qui se la jouent ou les gens qui aiment bien discuter philosophie tout en combattant, mais qui venait en réalité du fond du cœur :

- Ce n’est pas avec ton petit pistolet que tu vas m’avoir : je peux facilement éviter ton tir !
- Bêta comme tu m’en as l’air, je crois surtout que si tu essaies tu vas encore te ridiculiser. Comme tout à l‘heure, quand tu hurlais.
C’était cruel de la part d’Ange de ce moquer de ce pauvre homme, mais le but n’était pas de le blesser moralement, seulement de voir sa réaction sachant qu’elle allait être disproportionnée. D’ailleurs, elle ne se fit pas attendre :
- JE NE HURLAIS PAS !!!
- Mais si, et tu recommences.
Il ressemblait à un petit enfant énervé.
- NON, JE NE CRIE PAS !!!
- Si, si, il a raison, ne put s’empêcher d’ajouter un des membres de la bande des terreurs.
- TAIS-TOIII ! DE TOUTE FAÇON VOUS ÊTES TOUT BÊTES !

C’était le mot de trop. La soif de bagarre que les enfants refoulaient depuis de début de l’affrontement se libéra, et saisissant le prétexte de cette insulte minime toute la bande se déchaina contre le capitaine devenu fou furieux. Jeff en tête, ils lui tombèrent dessus avec la ferme intention de venger leur honneur, si honneur il y avait.
Mettant en pratique l’aptitude que finissent par développer tous les voleurs d’agir sans se faire remarquer, Ange profita de la confusion générale pour se replier prudemment, puis pour se placer dans le dos du capitaine. Les gamins l’attaquaient par petits groupes, mais motivé par la fureur il parvenait à leur tenir tête. Le voleur avança une première fois sa main en direction du fruit, que Benoît maintenait coincé entre son torse et son coude gauche, mais il dut la retirer rapidement pour éviter de se faire blesser par un coup de couteau à beurre que l’un des enfants tentait de porter au capitaine Spencer. Le cambrioleur s’écarta légèrement, et attendit qu’une occasion se présente.

Benoît repoussait comme il le pouvait la horde de gamins qui tentaient de le mettre en pièces à l’aide d’objets divers, bien que la plupart d’entre eux n’ait absolument pas été conçus pour servir d’armes. Peu à peu, sa fureur s’était muée en panique, et alors qu’il affrontait celui qui semblait être le chef de la bande armé de sa batte de base-ball et aidé par deux de ses camarades, il regrettait sérieusement de ne pas avoir emmené quelques membres de son équipage avec lui. A une seule main, il avait de la peine à repousser toutes les attaques et le fruit du démon qu’il tenait le gênait. Finalement, il se dit que cette grosse noix de coco bleue avait beau être précieuse, elle n’en restait pas moins dure et il se mit à s’en servir de massue pour distribuer des coups à qui en voulait. C’était ce qu’Ange attendait : tandis qu’après avoir écrasé le nez d’un gamin avec le fruit, le capitaine parait une attaque au visage de Jeff avec son épée, le sauvage se précipita sur lui, et lui et profitant de son déséquilibre lui arracha la noix de coco de la main. Dans la confusion générale, personne ne semblait l’avoir vu.

Maintenant, je me faufile discrètement vers la sortie ?
Tu es fou ! Tu ne pourras jamais traverser toute la salle sans te faire remarquer ! Si au moins le fruit avait été d’une couleur discrète… mais il est gros et bleu !
Alors… je le cache sous ma veste ?
Ben tiens, tu auras l’air malin avec la bosse que ça va former !
Alors je fais quoi, moi ?! Je l’avale ? Et je le recracherai ensuite par voie naturelle…
Hum, pourquoi pas : les trafiquants font ça aussi.
Hé ! Mais je n’étais pas sérieux !


Puisqu’aucune autre solution valable ne se présentait, le sauvage inspira une grande bouffée d’air, puis enfonça le fruit dans sa bouche. On pourrait croire qu’il est impossible d’y faire entrer quelque chose d’aussi gros, et encore moins de le faire traverser ensuite son œsophage et le reste, mais il y avait des précédents. Il existe peut-être une technique, comme y croire très fort, ou ne pas savoir que c’est physiquement impossible.

- Hé, Monsieur-tresses, c’est quoi ce que tu as dans la bouche ? Demanda une des gamines restées à l’écart (une du genre petite robe rose et tresses blondes, et toujours impeccable ; et insupportable aussi ; on se demande bien ce qu’elle fiche dans un groupe comme celui des terreurs des bas-quartiers de la ville).
- M…mf… *gloups*.
- Hé, hé ! Monsieur-tresses il a mangé quelque chose !

La petite n’avait pas parlé très fort –quoique d’une voix très pointue ; et agaçante en plus- et il régnait dans la salle un brouhaha indescriptible, mais le combat cessa.

- C’est vrai, ça ?! Tu as mangé quoi ?!!
- Noon ! Tu n’as pas fait ça ?!
- Hé, l’autre m’sieur y n’a plus l’fuit dans sa main !
Assez paniqué, surtout à l’idée que l’on puisse lui demander de restituer le fruit tout de suite, Ange recula prudemment dans un coin de la pièce.
- Euh… je… ce n’est pas ce que vous croyez !
- Il l’a mangé ! L’abruti, il l’a mangé !!
- Je… mais non, c’en est un autre que j’ai mangé. Hum, j’avais des noix de coco dans la poche, et j’ai eu un petit creux… oui, oui, des bleues. Et j’ai de très grandes poches.

Je fais quoi maintenant ? Je suis dos contre le mur, la sortie est à l’opposé, et quelque chose me dit qu’ils vont mettre leurs différents de côté le temps de me régler mon compte.
Tu continues à reculer.
Ben tiens ! Si seulement je pouvais disparaitre dans le mur.


A ce moment, Ange ressentit une étrange sensation, comme si on l’avait enfermé dans un moule à crèpes et qu’on avait fait faire à ce moule un demi-tour. Une fois remis de cette drôle de sensation, il fut très surpris de se retrouver dans un couloir vide, de l’autre côté de la cloison.

Heiiiin ?

Mais alors, je… j’ai traversé le mur ?

Ça voudrait dire que… peut-être que je suis un toon ? Et je ne m’en suis jamais rendu compte ?!
Ou pas. Tu sais ce qu’on raconte sur les fruits du démon. Des fruits étranges aux couleurs bizarres, recouverts de spirales, et qui maudissent ceux qui les mangent tout en leurs conférant d’étrange pouvoirs. Tu as avalé le tien, et on peut peut-être considérer que tu l’as ingéré.
Euh… alors j’ai mangé le fruit du toon ? Ça veut dire que maintenant je peux traverser les murs, faire sortir mes yeux de leurs orbites, résister à des chutes mortelles, et me faire découper en morceaux sans mourir ?!
Une chose est sûre, c’est que tu peux traverser les murs, alors autant en profiter pour sortir d’ici.


***

Grâce au pouvoir du fruit du portier, le sauvage réussit sans mal à regagner l’extérieur. Un fois dehors, sa première décision avant de rejoindre le Lady Million fut de se rendre au port pour y piquer une tête dans l’eau, afin de savoir si oui ou non sa nouvelle capacité était bien due au pouvoir de son fruit.

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