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[O]n prend les mêmes et on recommence.

« Laissez passer ! Poussez-vouuuus ! Gniaaaaaaaaa ! »

Course effrénée dans la ville de Logue Town, un colis sous le bras. Ça sentait les ennuis à plein nez, et y’avait des raisons pour ça. Mais faut croire que je faisais toujours aussi bien les choses pour m’attirer des problèmes. Un aimant, un vrai. Un pot de miel posé au soleil en plein été, de quoi vous attirez toutes les abeilles à des kilomètres à la ronde. C’était mon talent. Un don certain que très peu m’enviait. J’avais la guigne, et ça commençait à se faire savoir.
C’était des ennuis, mais des petits ennuis pour le coup. Pas traqué par une bande de mafioso des bas quartiers de Shell Town, ni par un gros benêt prêteur sur gage. Non, ce jour-là, j’avais fait soft. Pas comme d’habitude. Même si d’habitude, je ne provoquai pas autant de grabuge, et je n’allai pas au-devant des problèmes volontairement. Mais ce jour-là, j’en avais décidé autrement. J’avais pris les choses en main, comme on dit. J’avais aussi foncé tête baissée dans un nid de frelons, sans même me soucier de ce qui pourrait m’arriver. Difficile de dire « j’vais m’en sortir avec une pirouette » avec trois gus à vos trousses qui ont l’intention de vous faire la peau parce que vous avez trop ouvert votre gueule et que ce n’était pas le bon jour pour le faire.

Je n’avais jamais su me taire lorsqu’il le fallait. Et aucune crasse de la vie ne m’avait permis d’en tirer une leçon. Têtue, la donzelle, hein ?

Bref, comme je disais, cette fois-ci, ce n’était pas du gros poisson que j’avais pêché, mais de la petite frappe qui se sentait plus. Du genre qui se la joue « gros dur » en bande, mais qui individuellement se fait latter les fesses par une demoiselle comme moi. Pour résumer : un petit désaccord de rien du tout avec les caïds de l’île pour en arriver à se faire courser dans toute la cité. Si je minimisai énormément le début de notre conflit, c’était parce que j’avais autre chose à penser. Comme, par exemple, éviter de me manger l’autre trapu avec ses baguettes sous le bras.

Logue Town, c’était une chic ville quand on avait le temps de la visiter. J’avais fait escale la veille pour récupérer une pièce importante que je devais monter sur Bee. Mais pas de bol, elle n’était plus en vente à mon arrivé. Et qu’à cela ne tienne, j’avais vaguement décidé de la subtiliser à quelqu’un qui ne la méritait pas et qui n’en aurait pas vraiment besoin. Autrement dit : les caïds à mes trousses. Simplement, ils ne s’étaient pas laissé faire, et ça allait être ma fête. Prise sur le fait, ils m’étaient tous les trois tombés sur le coin de la figure, mais j’avais réussi à m’enfuir. Fuite, prise de jambes à mon cou, tout le tintouin pour me subtiliser à eux. Mais ils avaient de l’endurance et la volonté de m’éclater la tronche, à croire que l’arme que je tenais sous le bras avait toute son importance.

« Reviens ici, morveuse !
- Ouais, on va t’faire la peau ! »

Comme je vous disais... C’n’était vraiment pas de chance. Sur le fond, j’avais mal agit : voler, c’est nul. Mais vous commencez aussi à connaitre ma passion pour mon ami, ainsi que cette volonté que j’avais à vouloir sans arrêt l’améliorer. Cette pièce à laquelle je tenais, avait de quoi faire flamber n’importe quoi. Ouais, un mécanisme à lance-flamme. Une petite merveille de technologie. Qui me valait bien des peines. L’outil était plutôt léger et compact, de quoi se transporter facilement. Niveau endurance, il ne durait que quelques minutes, au vu du réservoir à essence qui était vraiment minuscule. Mais ce n’était pas le genre de chose qui arrêtait une fille comme moi. Une fille qui savait se servir d’un tournevis.

« POUSSEZ-VOUS ! »

Ouf, manqué de peu, c’lui là. Le gars que j’avais failli me prendre de plein fouet se retrouva les quatre fers en l’air, percuté à la suite par les caïds qui me collaient aux basques. Le moment pour moi de filer, et de prendre la première qui s’annonçait à ma droite. Je pensais me subtiliser pour de bon, mais me retrouvai face à un cul-de-sac. Le temps pour les gus de se remettre debout et de reprendre leurs routes, j’étais faite comme un rat dans un piège à rat. A ma gauche, un mur. A ma droite, un autre mur. Derrière moi, les briques. Au-dessus ? Une échelle de secours qui montait droit dans un immeuble.

Hop, je bondis.

Pas le temps de réfléchir à une autre issue : Bee était loin encore une fois, et je n’avais pas l’intention de me laisser mettre en pièce. Ils râlèrent, se remirent d’aplomb, tentèrent de m’arrêter, mais je fus plus rapide. Paf, je m’engouffrai dans la première fenêtre ouverte. Un couple se trouvait là, probablement de ceux illégitimes qui se cachaient pour s’aimer. Un salut rapide, et je sortis par la porte en l’ouvrant à la volée. Toujours sur mes talons : les trois caïds. Mais j’avais pris de la distance, de quoi monter quelques étages et de les semer.

Je me retrouvais dans un long couloir qui donnait sur plusieurs portes. Je filai un grand coup d’épaule dans la première pour l’ouvrir. Je devais me trouver aux troisièmes étages d’un hôtel et la chambre dans laquelle je venais de débarquer était habitée par un vieux monsieur, étonné de me voir ici.

« Oups… Désolée. »

Je le regardai, lui fis un beau sourire gêné et fis demi-tour. Mais les bruits dans les escaliers me firent revenir très rapidement sur mes pas : ils montaient. Je fermai la porte derrière moi et m’approchai de la fenêtre. Trop haute pour sauter. Je l’ouvris et regardai. La vue donnait sur la place principale de Logue Town, plutôt blindée pour l’heure. Quelques décorations ornaient la rue d’un bout à l’autre, accroché à de long fil. L’un d’eux était pendu au mur de ma fenêtre.

« Vous n’allez tout de même pas faire ça ? Me fit le vieil homme avec un air surpris.
- Pas comme si j’avais l’choix, répondis-je calmement. J’vous emprunte ça. »

Je m’emparai d’une ceinture posée sur le meuble et mis le ruban qui tenait le colis fermé dans ma bouche. Je grimpai ensuite sur le rebord de la fenêtre, passai la ceinture autour du fil et regardai en bas. C’était haut, et j’allai mal finir avec ces bêtises. Mais le lien descendait au premier étage de l’immeuble en face, ce qui réduirait ma chute. Une chance de pouvoir m’en sortir. Je n’avais jamais fait de tyrolienne. C’était le moment ou jamais. Surtout lorsque la porte fut enfoncée de nouveau et que les trois gus surgirent pour m’arrêter.

« RENDS-NOUS CA !
- Héhé. »

N’écoutant que mon courage (ou ma bêtise ?), je bondis dans le vide, tenant fermement la ceinture que j’avais préalablement enroulé autour de mes poignets pour une meilleure prise. Le fil s’affaissa sous mon poids, pas assez pour me faire m’écraser. Je n’étais pas bien lourde et je glissai le long, me rapprochant du centre de la place. Quelques personnes qui m’avaient vu faire levèrent un doigt vers moi pour me désigner, les autres me fixaient, surpris. Kicétéencorkecetfollelà, qu’ils devaient se demander. Un crac sonore retentit, suivit d’un fffziou qui me poussa à m’inquiéter. Relevant les yeux, le câble avait craqué. Et dans quelques secondes, j’allai m’écraser quelque part sur la place principale de Logue Town.

De la bouillie de Lilou, qu’j’vous dis.

Impossible de faire machine arrière, j’avais au moins l’espoir d’atterrir sur quelqu’un qui me ferait rebondir, ou amortirait ma chute. Mon deuxième souhait fut exaucé. Pas comme je l’espérai. J’étais à près de trois mètres du sol, décidai de lâcher la ceinture pour me préparer à m’écraser convenablement. Je tombai alors sur un gus qui faisait sa taille, son poids, et qui amorti en effet ma chute.

Ce fut violent, bref, intense. Un genre de déjà-vu, non ?

Il bascula en arrière sous le choc, roulant sur quelques mètres. Moi, je m’étais accrochée à son cou en espérant de pas mourir. Je n’étais pas morte. Un peu sonnée, miraculeusement en vie. Combien de côtes cassées ? Impossible de compter pour l’instant, je ne voulais même pas y penser. Et puis, je me relevai précipitamment, pas le temps de rester ici plus longtemps :

« Merci gars. J’te laaaisse, hei- »

Ce que je ne compris pas, c’est la pression qui s’exerça sur mes épaules l’instant d’après, suivis par une force au niveau de mon cou qui m’immobilisa. Je fus tirée violemment en arrière, puis plaquée au sol sans autre forme de procès. Deux hommes me tenaient le bras, les épaules et la tête. La joue contre la roche froide, je ne savais plus quoi penser. Pas la peine d’espérer articuler quoique ce soit, si ce n’est un petit couinement de surprise. Ce que je distinguai de mes agresseurs ? Un pantalon bleu et un haut blanc. Ce qu’ils étaient ?

« Colonel ?! Comment allez-vous ?! Colonel, répondez-moi !
- Mé laichez-moaaaaaa !
- Nous la tenons, elle ne s’échappera pas !
- Probablement une terroriste !
- Kwah ?!!! Chui pach terrorichteuh ! »

Et c’était qui ce putain de colonel ? Ah, merde. Je n’arrivai rien à voir, comme ils étaient agglutinés autour de lui. C’était bien ma veine de tomber sur un représentant de la marine. Et le gars qui me tenait le bras n’y allait pas de main morte. J’avais super mal !

« Vouch allez le cacher !!
- La ferme !
- Colonel Fenyang, ça va aller ? »

Boarf, qu’ils étaient vilains. En tout cas, beau merdier. Et puis, Fenyang… Fenyang, ça me disait bien quelque chose. Probablement un gus à qui j’avais eu à faire, mais sa tête me revenait pas sur le coup (quand on a une mémoire de poisson rouge).
Chouette Lilou, cette fois, t’as fait fort ma grande.


Dernière édition par Lilou B. Jacob le Ven 30 Mar 2012 - 15:33, édité 1 fois
  • https://www.onepiece-requiem.net/t3945-fiche-technique-de-lilou#4
  • https://www.onepiece-requiem.net/t2202-
    21 heures après notre arrivée, dans les rues de Logue Town.
    • Franchement dit, laisser tes hommes pour aller te faire une fille, c’est pas du tout sérieux Salem… Surtout quand tu sais que les ingénieurs doivent se ravitailler pour le Léviathan ! Blablablablablabla… Dis, tu m’écoutes au moins quand j’te parle ?!

    • Je t’écoute mon vieux, je t’écoute…

    Et me voilà. En plein milieu de Logue Town. Sous un soleil de plomb et au beau milieu d’une marée humaine. Avec quelques marines à mes talons, dont Marone, l’un de mes lieutenants qui faisait partie de mes hommes surs. Un bras droit en quelque sorte. Qui s’permettait de me faire la morale sur ce que j’avais à faire ou pas, du coup. Je grattais ma chevelure d’un air désolé tout en subissant ses réprimandes. Tout ça parce que je les avais abandonné à la caserne du colonel Chouchou pour aller m’faire plaisir chez l’une de mes maitresses. J’avais cherché, j’avais trouvé. Mais qu’est ce que nous étions de faire ? C’est simple : Rechercher les scientifiques du Léviathan qui étaient partis faire des courses de dernière minute et qui n’étaient escortés que par mes deux autres lieutenants Ketsuno et Sarkozyzy. J’aurais pu laisser Marone tout gérer vu qu’il était la tête pensante du groupe, mais ce dernier avait tout fait pour m’emmener avec lui alors que j’aspirais à un repos bien mérité. J’aurais pu refuser, m’imposer en tant que colonel, mais ce n’était pas mon comportement d’autant plus que j’entretenais avec lui, une relation purement fraternelle. Nous avançâmes donc dans l’une des ruelles les plus animées du district, quand soudain, un bruit sec se fit entendre. Totalement dans les vapes, je n’y avais pas vraiment fait attention. Ni même aux avertissements qu’on me criait. En fait, j’étais complètement déconnecté de la réalité… Jusqu’à ce qu’un objet non identifié vienne lourdement m’tomber dessus. Et que ma nuque embrasse le bitume chauffé par le soleil, et ce sur plusieurs mètres, avec tout l’bon cœur du monde…

    Heureusement encore que je portais une casquette, sans quoi j’me serais fait une nouvelle coupe… D’quoi me rendre bien moins séduisant, tiens… Le reste s’en suivit tout de suite après. Par reste, j’voulais parler de l’arrestation de c’qui était tombé sur moi et qui voulait prendre la poudre d’escampette. Il s’agissait d’une fille apparemment. J’avais d’ailleurs cru sentir une poitrine se comprimer sur mon faciès, sans compter que l’odeur de la personne m’était plutôt familière. ‘Fin bon, c’était p’être mon imagination sordide de tous les jours. Alors que mes hommes s’affairaient autour de l’assaillant, Marone vint tout de suite m’aider à me relever. Mis à part une petite bosse au niveau de la nuque qu’on ne remarquait même pas, j’avais pas grand-chose finalement. A force d’entrainements et de combats, j’m’étais forgé un corps de titan qui était habitué à prendre gros. Le bon côté des choses, c’est que j’avais même retrouvé mes esprits. Et que je distinguais nettement tout c’qui était autour de moi. Je me baissais reprendre ma casquette avant de m’avancer vers la jeune personne immobilisée au sol. Tout autour, la foule s’était mobilisée massivement. Les souffles étaient retenus, les regards étaient braqués sur nous et le silence était soudainement tombé sur les lieux. Je fis signe à mes hommes de s’écarter avant de m’assoir sans scrupule sur les fesses de la donzelle en lui imposant tout mon poids assez considérable. Être galant sur le coup et comme à mon habitude ? Non, j’pouvais pas.

    • Troubles à l’ordre public, atteinte à la vie d’un officier… J’me demande ce que je vais bien faire de t…

    Blanc. Gros blanc. Et c’est la que je vis ce visage… Ce visage familier… Ce visage qui me rappela moult péripéties sur Shell Town en une seule seconde seulement… Ce visage que je reconnus sur le champ ! L’ingénieur naval qui m’avait tapé dans l’œil et qui m’avait rejeté comme un vulgaire mouchoir avec lequel on venait à peine de se torcher le cul. Comment elle s’appelait déjà… ? Loli… Nan… Lula… Nan plus. Lilou non ? Ouaip. C’est ça. Lilou. ‘Tain… Comment qu’elle était devenue femme... Belle… Très belle même. Limite j’aurais eu une érection. Ce qui n’aurait pas été approprié vu comment j’étais confortablement assit sur son postérieur. Et puis il n’y avait qu’elle qui pouvait se fourrer dans des situations foireuses comme celle que nous vivions. De sa position, il était bien difficile pour elle de me reconnaitre, sans compter la casquette que j’avais porté et qui cachait une bonne moitié de ma face. La suite allait promettre moi j’dis. Sous quelques mines inquiètes, j’me mis à étirer un sourire bien vache avant de sortir mes menottes de l’intérieur de ma chemise. Je les passais solidement aux poignets de la jeune femme avant de me redresser et de la relever par les cheveux. « Bon bah, c’est la prison pour un moment hein… On n’discute pas la dessus » Avais-je dit d’une voix goguenarde et assez méconnaissable. Les gens qui s’attendaient plutôt à une bastonnade se remirent à vaquer à leurs occupations comme si de rien était. C’était pas comme s’ils n’étaient pas habitués à ce genre de scène, vu que les pirates affluaient en grand nombre dans cette ville pour aller à Grand Line.

    • L’colonel Chouchou te gardera seulement un an ou deux au frais avec un peu d’chance… Et vous, continuez les recherches et prévenez moi par escargophone, j’m’occupe de cette fille.

    Les marines acquiescèrent avant de continuer immédiatement leur route. Quand à Marone, il resta quelques secondes à m’observer, l’air sceptique, avant de s’en aller par la suite en remuant sa tête pour y ôter toute idée saugrenue. Je savais à quoi il pensait, mais c’était pas comme si j’pouvais faire « ça » à la fille que je tenais plutôt gentiment par les cheveux. J’la connaissais un minimum et je savais à quoi m’attendre avec. Même si sur le coup, j’avais envie de savoir ce qui lui était arrivée pour satisfaire ma petite curiosité. « Bon bah, on y va ma jolie… » J’la soulevais à l’aide d’une seule main, avant de la poser sur l'une de mes épaules façon « sac à patates ». Un autre air de déjà vu nan ? P’être bien, héhé ! Qu’elle bouge dans tous les sens ou qu’elle crie, c’était du pareil au même. Je l’embarquais avec moi et prenais la direction de la prison de la ville ; Mais à peine avais-je fait deux trois pas, que des voix derrière moi se firent entendre bruyamment... « C’est qu’un seul marine ! On l’dégomme et on récupère la fille ». Elles semblaient même parler de nous. J’entendis des bruits de pas de course. Deux ou trois lascars fonçaient vers nous et sans doute que Lilou de sa position pouvait bien les voir. Mais à peine avaient-ils parcouru la moitié du chemin qui nous séparait que j’avais tourné mon visage vers mon épaule libre avant de redresser un peu la casquette que j’avais. Là sur le coup, blocage. Les gars s’étaient immédiatement immobilisés. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’ils avaient vu mon visage, parce qu’ils avaient reconnu le colonel que j’étais…

    • Tssss… Colonel ou pas, on va récupérer cette sale voleuse et lui faire la peau !

    Un « OUAIS » tonitruant s’en suivit et les voilà qui nous chargeaient comme des chiens enragés. A croire qu’ils ne connaissaient pas la notion du danger. Brusquement, j’empoignais Lilou et la projetais à quelques mètres de hauteur avant de me retourner rapidement pour leur faire face. Le premier prit de l’élan et sauta vers moi pour m’infliger une sacré bonne droite à la figure. Malheureusement pour lui, je disparus de son champ de vision avant de réapparaitre soudainement derrière lui en lui assenant un coup de pied au dos. Le pauvre fila façon missile sur l’un de ses sbires avant que tous deux ne partent percuter le mur de ce qui semblait être un hôtel avec une véhémence inouïe. Déjà deux de moins. Alors que je me retournais pour réceptionner Lilou, c’que je fis avec brio, le dernier après avoir constaté la défaite cuisante de ses compères, préféra quitter rapidement les lieux en courant comme un dératé à l’autre bout de l’avenue. Le pauvre avait prit peur et fallait avouer qu’il avait fait le bon choix en battant en retraite. J’le regardais décamper avant de reposer Lilou sur mon épaule, tout en continuant mon chemin et non sans dire : « P’tain… T’as vraiment l’chic pour te fourrer dans des pétrins toi… Après la Chèvre, maintenant ça… » Ma phrase devait p’être lui mettre la puce à l’oreille. P’être. Pour lui rappeler définitivement qui j’étais, je pris la direction d’une petite ruelle sombre et pas forcement fréquentable. On était loin de se diriger à la prison comme je l’avais si bien dit et elle pouvait donc être tranquille…

    Après cinq à six minutes de marche tranquille à l’abri des regards et en silence, j’débouchais pépère dans un faubourg, tout juste devant un bar plutôt bien entretenu à première vue. « Chez Tom » que ça s’appelait. Je souriais en posant enfin la jeune fille sur ses pieds et en lui retirant ses menottes que je rangeais dans ma poche. « T’as oublié ça… C’est sans doute pour Bee non ? » Puis, j’lui balançais un objet bizarre qu’elle avait fait tomber et que j’avais ramassé incognito lorsque je m’étais relevé de ma lourde chute. Ledit objet ressemblait vraiment à une pièce mécanique, ce pourquoi j’avais deviné qu’il s’agissait sans doute d’un p’tit truc qu’elle voulait probablement monter sur son robot adoré que je n’avais pas non plus oublié. Contrairement à elle, j’avais plutôt une mémoire éléphantesque. Et j’en étais fier. J’lui fis signe de me suivre à l’intérieur du bar. Peut être qu’elle le ferait, ou pas. Aucun des deux cas ne m’étonnerait. J’m’attendais à tout avec cette fille. Même à ce qu’elle me saute au cou pour m’étrangler vu ce que je lui avais fait. C’qui serait bien marrant en soi, tout compte fait. Hormis cinq personnes présentes, le bar était quasiment vide. Fait normal puisqu’on était encore en pleine matinée. Par la suite, j’arrivais au comptoir et saluait Tom, le propriétaire de l’établissement et l’un de mes amis de longue date. Et ce n’est que lorsque je m’assis au comptoir que je retirais enfin ma casquette et mon manteau de colonel. Là et comme à l’habitude que mes proches me connaissaient, j’me mis à ébouriffer ma chevelure tout en levant ma voix nonchalamment…

    • Deux bières siteuplait !

    • Tout d’suite Alheïri !

    Et Tom s’en alla prendre ma commande, tout sourire.
    Putain, putain, putain. Qu’est-ce que j’avais fait ? Mais qu’est-ce que j’avais fait ? J’échappai à un guêpier pour tomber droit dans un autre. C’était affreux, affreux. J’avais vraiment la poisse. Impossible de m’en tirer sans retourner dans d’autres histoires. Pourquoi avait-il fallut que j’atterrisse sur ce gars ? Et quel gars ! Il m’avait drôlement bien rattrapé. Et me voilà maintenant, face contre terre à me demander comment est-ce que j’allai m’en tirer pour le coup. Ouais, ok, plus de problèmes avec les gus à qui j’avais volé l’outil, mais les prisons de la marine m’attendait. Et impatiemment, en plus.
    Et ces abrutis qu’appuyait sur mes côtes fragilisées. J’le sentais mal, terriblement mal. Une douleur aigue piquée sur mon flanc, vive et intense. Ça allait céder, surtout s’ils continuaient à me maintenir comme ça. On n’avait pas idée d’faire des gus aussi mal habile. Ils allaient me tuer, je jure qu’ils allaient le faire. Et puis, un bras ne se plie pas autant, pas dans ce sens, en tout cas. Mon épaule me lançait, c’était de plus en plus douloureux. Putain, mais dans quel merdier m’étais-je fourré ? Et l’abruti que j’avais percuté, c’était qui pour qu’on me traite comme une criminelle ?

    «Fuuuuhmph ! »

    Seul réaction possible lorsque je sentis la pression sur mon bassin. Et le gars faisait son poids. Un bon 80 kilos, au bas mot. J’avais mal, très mal, surtout que de l’autre côté, y’a le bitume qui faisait pression. J’allai mourir, il me tuait les hanches. Et voilà qu’il se mettait à déblatérer pour dire ce que j’avais fait. Si peu de chose, en fait. Ce n’était pas un drame, coco, t’étais en vie, que j’sache. Et surtout, t’avais rien de casser ! Donc, tu n’étais pas à plaindre. Mais non, question de fierté, comprenez : on fait pas tomber un représentant de la marine de la sorte, voyez. A Logue Town, on fait respecter la loi, surtout lorsqu’on s’en prend (par inadvertance, hein) à un gars comme lui. Et même pas il se présentait, le gars. Non, il parlait, il parlait, et… Ah tiens, enfin il la bouclait. J’allai peut être pouvoir en placer une.

    « Je n’ai pas fait exprès, bordel de chien ! Genre ça me fait plaisir de tomber sur des gus ! Et retire-toi d’là, tu vas me tuer ! »

    J’avais le dos cambré, je ne pouvais pas voir son visage. Et pas dit qu’il m’écoutait. Il n’en avait pas l’air. Lui, il me regardait, je sentais ses yeux qui me brulaient la nuque. J’allai finir ma vie en prison, tout ça pour un putain de lance-flamme. Et c’est que j’étais vulgaire, en plus. Intenable. Qui se faisait insolente. J’allai me faire fouetter, avec ces bêtises. Et pas possible de compter sur Bee, c’était un coup à vraiment s’attirer des problèmes. Fallait que je baisse d’un ton. Au moins. Et puis là, d’un coup, lui prenant comme une envie soudaine de pisser, il me plaçait les bras en arrière et me menotta. Le truc sordide, qui me fit bondir :

    « NON MAIS C’EST UNE BLAGUE ??! DETACHE MOI !!!! »

    Non, ce n’était pas une blague. Je voulus me défaire, mais pas moyen. J’étais vraiment attachée, menottée. C’était trop sordide pour moi. Je me mis à gigoter, déjà pour virer le gars de son trône (mes fesses donc), ensuite pour m’enfuir. Je ne réussis aucun des deux. Et vu le sourire pervers qu’il portait, ça sentait sérieusement le pâté. Putain, ça craignait vraiment. J’étais tombée sur un vicieux, un vrai. Et tomber, au sens propre comme au figuré. Bordel, bordel, bordel. De quoi me ronger les ongles jusqu’au sang, je n’avais pas envie de me faire violer par un vieux vicieux. Bee, au secours !
    Pour la suite, je n’écoutais pas. J’étais vraiment trop inquiète quand à mon sort. Qu’est-ce qu’il me faisait ? Ce n’était quand même pas si grave ? Si ? Oh, ça va mec, t’es quand même un grand garçon, j’fais quinze kilos toute mouillée, tu ne vas quand même pas me dire qu’une fille comme moi terrasse un gaillard comme toi. Tu déconnes, gars, relâche moi. Rien à faire, pas de négociation. Connard, que j’pensais très fort, en espérant qu’il l’entende. Rien, pas de réaction. Il m’attrapa par les cheveux et me redressa. Ce n’était pas un bourrin, il me ménageait pas mal. Mais c’était surprenant, surtout de voir sa poigne et sa force s’exerçait. Boarf, j’étais vraiment dans la merde. Et paf, il me posa sur son épaule façon sac à patate.

    Bordel, de vieux souvenirs.

    Y’en avait pas beaucoup qui me portait comme ça. En tout cas, dans mes souvenirs y’en avait qu’un. Ouais, un seul. Que j’aimais bien. Et avec qui j’avais vécu une drôle d’aventure. La probabilité pour que je le recroise ici ? Elle n’était pas bien grande, alors je n’allai pas m’axer là-dessus pour me libérer. Je relevai la tête et m’agitai dans tous les sens pour m’en sortir, au moins tomber. J’avais les côtes qui me faisaient souffrir, mais pas envie d’y penser. Et mon paquet ? Il le tenait dans une de ses grandes mains. Bordel ! Il me faisait suer, celui-là ! Je voulais juste me tirer de l’île, j’étais déjà assez dans la panade pour rajouter la marine. Mais bordel de bordel.

    Et paf, encore, je relevai la tête pour voir les trois gus de tout à l’heure, les rigolos qu’en avaient après moi. Faisais chier, encore. J’en avais marre. Hurlant à mon porteur qu’y’avait des ennemis pour qu’il réagisse à l’assaut. Il se tourna et souleva sa casquette. Impossible de voir sa tronche. Grreuh. Colonel ? Mouais, vraiment pas de chance pour moi. Et puis, je sentis une forte poigne m’attrapait et fut soudainement lancé en l’air. J’vous jure que ça vous débouche les voies respiratoires tant ça surprends. Et le cœur qui se mit à battre à tout rompre, à vous bondir en dehors du corps tellement ce n’était pas supportable pour lui. Je voulais hurler, mais ma voix s’étouffa dans ma gorge tant la surprise fut grande. Le truc, c’était que quand on lançait quelqu’un en l’air, il retombait forcément à un moment. Et ce fut à la chute que je me mis clairement à hurler. Genre pour de bon, à vous percer les tympans tellement j’avais la trouille.

    Les mains dans le dos, retombant dans les bras du colonel, je relevai à peine les yeux ronds vers lui. Complètement hébétée, choquée, tremblante à cause du bond que j’avais fait, et du vertige que je craignais par-dessus tout. Je le maudissais, là. Enfin, j’étais pour l’instant trop choquée pour pouvoir dire quoique ce soit. Et les autres gus avaient décampé. Et je ne comprenais pas grand-chose. En tout cas, je tremblais comme une feuille. Il me remit sur son épaule, sans que je ne puisse dire quoique ce soit. Pas moyen de protester.

    « P’tain… T’as vraiment l’chic pour te fourrer dans des pétrins toi… Après la Chèvre, maintenant ça…
    - Alh ?! »

    Ouais, bordel. Alh’. C’était lui. C’était probablement lui. Et dire qu’il était sur le point de me boucler pour de bon. Je ne me voyais pas négocier une libération, j’étais encore trop choquée pour pouvoir dire quoique ce soit de forcément évident. Et qu’est-ce que j’avais mal au flanc… Comment est-ce que j’allai m’en sortir, moi ? Mais comment est-ce que j’allai faire ? Surtout face à Alh, pas d’issus possible si ce n’est… Hinhin. C’est diabolique.

    Et même que je n’eu même pas besoin d’être perfide et fourbe pour obtenir la liberté tant espérer. On arriva devant un bar, « Chez Tom » comme le nom l’indiquait. Il me reposa et il me retira les menottes. J’attrapai mes poignets et les frottai pour m’enlever la sensation des bracelets.

    « T’as oublié ça… C’est sans doute pour Bee non ?
    - Putain, Alh’. T’es une perle. »

    Je rattrapai le colis avec un sourire ravi aux lèvres. C’était génial, vraiment génial. Je n’étais pas si poisseuse que ça, en fait.

    « Et oui, c’est pour Bee, ajoutai-je en relevant les yeux vers lui. C’est pour lui rajouter une arme. Ça va être bien chouette. »

    Et voilà que j’étais bien bavarde, hein. Il me proposa de le suivre à l’intérieur, je le fis sans hésiter. Bee m’attendait sur le port certainement, mais je pouvais bien le faire patienter encore un peu. On était en pleine journée, je n’avais plus de gus à mes trousses et tout se passait à merveille pour l’instant. Sur les talons de Alh’, j’allai jusqu’à la table en sa compagnie, posant mon popotin sur le tabouret en regardant sous tous les angles sur la pièce n’était pas abimée. Elle n’avait rien, c’était encore plus chouette. Il commanda deux bières, ce qui me fit réagir :

    « Je croyais que tu devais arrêter l’alcool. En tout cas, la dernière fois, tu ne voulais pas en boire. »

    Il m’avait suffi de le voir, pour me rappeler notre première rencontre. La chèvre, les chauves, le baiser… ah oui, le baiser. Et puis aussi, le final, particulièrement rocambolesque. Je me mis à rougir, un peu gêné. Il le remarquerait certainement, parce que je devins cramoisis, genre tomate trop mur qu’avait pris un coup de soleil. Le final. Ouais, le final. Sa longue déclaration, s’ajoutant au baiser, le ridicule de la scène…

    « Hm, tu as pu réparer ton mât, au fait ? »

    Quitte à trouver un sujet de conversation, fallait bien se lancer. J’avais bien souvenir de la destruction de ce mât, que Bee avait détaché du reste du navire pour me défendre. Je lui fis un regard doux et ajoutai d’une voix presque enfantine :

    « Parce que pour le coup, je te dois encore un service. A chaque fois que je te croise, tu me sauves la vie. Alors si pour une fois, je peux t’être utile, ça serait un bon retour des choses, tu ne crois pas ? Demande moi ce que tu veux, je le ferais ! »

    Naïve, ma grande. Fais gaffe à ce que tu dis, t’es quand même face à un vicieux.

    « Ou alors, on peut se fourrer dans une affaire sordide ! Tu me connais, ça va illuminer ta journée ! Parce que j’ai déjà de quoi te mettre l’eau à la bouche : Y’a trois gars sordides au bar près du port qui sont des pirates, j’ai croisé un gus étrange au centre-ville, près du fleuriste qu’avait un comportement ultra louche et je crois que les gars que j’ai volé voulait s’attaquer à une banque, ou un truc comme ça aujourd’hui et… Euh… »

    Pause. Qu’est-ce que j’ai dit ? Autant tendre les poignets pour qu’il me refoute les menottes. Vite, rattrape-toi, Lilou !

    « Voler, voler. J’ai dit voler ? Héhé… »
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      Une arme ? Chouette ? C’est du Lilou tout craché ça ! J’voyais vraiment pas c’qu’il y avait de chouette dans une arme sauf si elle servait à une bonne cause. Et concernant la jeune fille à mes côtés, j’savais pas vraiment quoi penser. Optimisait-elle les potentialités de son robot par pur caprice ou pour assurer sa propre sécurité quelque fois précaire ? Difficile à dire. Lilou était à la fois une énigme et un livre ouvert. Tout dépendait des situations quoi. J’commençai même à me ressasser les conditions de notre première rencontre quand elle m’parla de l’alcool et de mes déboires. Là, j’eus un sourire. A croire qu’elle n’avait pas forcement une mémoire de poisson rouge, celle-là. J’m’étais même mit à rougir, mais juste un petit instant de rien du tout. J’étais l’homme, l’mâle, et fierté oblige quand même ! J’allai même ajouter un petit mot sur cette histoire, quand elle vira rapidement sur un autre sujet. Plutôt épineux dans l’genre. Car l’une des choses que je n’avais pas digérées de notre rencontre, c’était mon mat bousillé. Qu’elle n’avait daigné réparer avant de s’en aller de l’île. La p’tite ingrate ! J’finis par soupirer longuement pour ne pas entrer en colère et éviter l’pire. Ca restait tout de même une jeune femme avec laquelle j’avais vécu pas mal de trucs plus ou moins intimes… Et puis j’étais capitaine d’un autre navire moi. Du célèbre Léviathan. Qui allait bientôt prendre la mer. Rien qu’à y penser, j’en avais des frissons. Voguer sur Grand Line, il n’y avait que ça de vrai. Même pour un flemmard dans mon genre…

      • Vos bières !

      Ah ! Enfin ! J’commençais à avoir l’gosier sec, moi ! Une p’tite bière en matinée n’pouvait pas m’faire de mal. J’aurai pu prendre quelque chose de plus raffiné surtout que Lilou m’accompagnait, mais c’était c’qui se faisait de mieux ici, dans ce bar ; sans compter que la bière en pleine journée, ça n’pouvait faire que du bien ! Automatiquement, j’me mis à boire et j’terminai la moitié de mon verre d’une seule traite ! L’bonheur. Ce n’est que lorsque j’déposai mon verre sur le comptoir que je daignais prêter une oreille attentive à Lilou qui n’cessait de parler. La p’tite pipelette ! Elle n’avait pas du tout changé. Et c’était pas pour mon déplaisir, vu que c’est de cette personnalité que j’étais tombé amoureux. Oui, amoureux. Et pour de vrai. Même si Lilou était mignonne à croquer, elle n’avait pas vraiment les attributs d’une gironde bien en chairs comme je les aime. Pour tout dire, elle était presque maigrichonne et sans exubérance mammaire. Malgré tout, elle avait réussi, fut un temps, à m’obnubiler. C’est vous dire comment cette gamine est merveille. Même si j’ne me faisais plus d’illusions. M’prendre un râteau une nouvelle fois ? Non, merci ! Façon, j’irai bien faire un tour chez l’une de mes maitresses pour passer du bon temps encore. Vu que j’avais réussi à échapper à mes hommes, il n’y avait pas d’raisons de n’pas en profiter. Suffisait d’faire une vingtaine de minutes avec Lilou et de la laisser rapidos… Sur et certain qu’elle m’en voudrait pas, surtout qu’elle avait à placer ce bidule sur…

      • Voler…

      Avais-je répété machinalement avant de retourner ma face d’ahuri vers la jeune femme. Elle avait osé… Elle avait osé… Dire que je l’avais défendu sans savoir qu’elle avait tort dans l’affaire… Mais qu’est ce que j’pouvais quand même être idiot quand il s’agissait dès lors de femmes… « Pfffff… Nan mais tu déconnes quoi ! » J’avais haussé d’un ton en prenant un air plus ou moins irrité, enflammé. Parce que là, elle me cherchait quand même ! Après m’être tombé dessus et après m’avoir ressassé le mauvais souvenir de mon mât, voilà qu’elle avait eu le toupet de m’avouer son délit. Il était p’être mineur vu qu’il y avait pire dans ce monde marqué par l’ère de la piraterie, mais son acte aurait pu causer moult dommages ! « Et comment t’veux que je réagisse sur le coup ? Que tu te fasses poursuivre par des gars pas louches passe encore, mais les voler… Nan mais faut l’faire quand même ! » BIM. Une vérité toute crachée. Rien qu’en quelques secondes, la jeune femme avait tout, mais vraiment tout gâché ! Mais merde quoi ! Elle aurait pu y passer s’ils l’avaient rattrapé ! Ses poursuivants auraient pu y passer si j’avais décidé bon de les tuer ! Ne grandissait-elle pas ? Ne comprenait-elle pas ?! J’ai beau me rappeler de son histoire pas aussi folichonne qu’on puisse l’penser, mais quand même ! S’abaisser à voler, c’est petit. Mais vraiment… Il y a tout un tas de métier dans ce monde pourtant. N’pouvait-elle pas faire l’effort de s’en dégoter un tout en vivant une vie tranquille ? C’est trop demander à mademoiselle…

      • Voler… A croire que tu ne respectes même pas mon métier de marine en faisant ça. J’me casse. J’pense que si j’fais une seconde de plus avec toi, j’serai capable de te coffrer rien que pour ça ! Tu m’déçois là…

      J’lançai deux billets de berrys à l’égard de Tom qui eut un air désolé, avant de me lever en tournant les talons. Intérieurement, j’avais mal. Affreusement mal. J’ne pouvais comprendre que Lilou soit une grande aventurière. La preuve en était qu’elle m’avait même proposé d’aller coffrer quelques personnes près du port qu’elle n’trouvait pas nets. Mais après, si l’on voulait bien considérer les choses, la personne pas nette, c’était elle. J’savais pas qu’elle était capable de voler. C’était un acte bénin et j’n’avais p’être pas besoin d’en faire des montagnes, mais un peu d’amour propre, que diable ! En même temps, j’ne pouvais réagir que de cette façon vu mon appartenance à la marine. Mon sang de justicier avait bouillonné. Et j’n’avais pas cautionné l’acte tout simplement. Mais peut être était ce le cumul de ses bêtises qui m’avait irrité. Supposition à prendre sérieusement en compte, une fois que j’me serai calmé loin d’elle. J’ne pouvais pas la coffrer, oh que non ! Je n’en avais pas la foi. J’ne pouvais pas non plus la forcer à aller rendre l’objet étant donné que les gars qu’elle avait volés sans scrupules voulaient sa peau. La seule option était de partir et de la laisser dans son coin. C’était mieux ainsi et ça m’éviterait p’être une journée de déboires. Mais à peine effectuais-je ma sortie, que quelque chose de très dur vint fracasser ma tête avec véhémence ! J’poussai un cri de douleur et totalement surpris j’tombai à moitié dans les pommes… Qu’avais-je fais ? Qui était la pourriture qui avait osé ? Aucune idée sur le coup…

      • Il est K.O ! Emparez vous d’la fille ! Grouillez !

      J’entendis des bruits de pas. Beaucoup de bruits de pas. A bien y réfléchir, ils devaient être plus de trois sur le coup. C’est dire qu’ils nous avaient donc suivi en appelant des renforts et en attendant patiemment l’bon moment pour passer à l’attaque ! Les fourbes ! A moitié dans les vapes, j’perçus des bruits sourds et même un cri. Était-ce Lilou qui avait hurlé ? Impossible de le savoir. Ma tête m’faisait un mal de chien et c’est à peine si j’pouvais voir clair. A même le sol, difficile en même temps d’vouloir observer quoi que ce soit. J’sentais mes forces revenir peu à peu et mon corps bouger quelque peu. Les cris s’intensifièrent. J’passai difficilement une main sur ma nuque avant d’toucher quelque chose de chaud, de fluide… Il m’avait troué la caboche, ces connards ! J’leur ferai payer ça très cher ! D’ailleurs, ces salopards semblaient vouloir prendre la tangente vu que l’un d’entre eux éleva la voix : « Allez, on s’casse ! » Était-ce par c’qu’ils avaient échoué vu que Tom était un ancien marine ? Était-ce parce qu’ils avaient réussi à avoir Lilou après avoir maitrisé tout l’monde ? Encore une fois, j’ne savais pas. J’dus me faire violence pour retrouver toutes mes facultés mentales avant d’retrouver sitôt, mes capacités physiques. C’est ainsi que je me relevai tant bien que mal en claudiquant vers l’intérieur du bar. Et quelle ne fut pas ma surprise d’constater l’bar sens dessus dessous. Les tables étaient renversées, les bouteilles et verres cassées… Bref, l’beau bordel. J’m’avançai encore un peu avant de constater que Tom était littéralement K.O, étalé à même le ventre sur une table à moitié bousillée…

      • TOM !!!

      J’courus vers mon ami avant de le soulever dans mes bras. Il était juste sonné tout comme moi et mis à part une bosse naissante au milieu de son crane, il n’y avait rien d’alarmant à signaler. J’allais même souffler, lorsque je m’aperçus qu’il n’y avait plus personne. Et par personne, j’voulais en majeure partie parler de Lilou. J’grognai imperceptiblement et me hâtai dans tout le local sans apercevoir la moindre trace de la jeune femme. Elle avait disparue. Comme envolée. Et mon cœur ne fit qu’un bon ! J’commençai automatiquement à regretter ma colère envers elle. J’n’aurai vraiment pas dû. La culpabilité commençait à me peser parce que j’avais été l’homme qui l’avait emmené ici. Et si elle avait été kidnappée comme je le pensais, il me fallait aller à sa recherche avant qu’il ne soit trop tard ! J’tournai en rond pendant un bon moment avant d’voir que Tom reprenait conscience peu à peu. J’lui lançai un torchon remplie de glaces que je m’étais confectionné pour apaiser ma douleur, histoire qu’il s’en remette et m’fournisse des indices. Malheureusement, tout s’était passé si rapidement qu’il n’avait pas eu le temps d’enregistrer quoi que ce soit. J’soupirai avant d’apercevoir l’objet que Lilou avait dérobé. Souriant, j’le pris avec moi avant de le ranger dans l’une des mes poches. C’truc pourrait sans aucun doute servir à l’avenir. Alors que j’comptais sortir du local en me mettant à la poursuite des ravisseurs, deux callipyges firent soudainement son entrée. Et si on pouvait dire d’elle qu’elles étaient belles, les fouets qu’elles firent claquer m’fit grincer des dents…

      • Si vous ne faites rien, on vous promet d’être gentilles avec vous…

      C’était définitif, nous étions dans une belle merde.
      Tom (c’était son nom) arriva et posa devant nous nos deux bières. J’étais prise dans une diarrhée verbale hallucinante. Pour dire, l’euphorie que j’éprouvais d’avoir recroiser Alheïri par un heureux hasard était palpable. C’était vraiment une chouette journée, du genre qui promettait vraiment. Je parlais donc, sans m’arrêter, expliquant et décrivant mon arrivée et les types louches que j’avais croisés durant celle-ci. Et puis, un mot plus haut que l’autre, me voilà à avouer au marine à mes côtés que j’avais dérobé l’outil qu’il m’avait rendu tantôt.
      L’homme répéta mes mots, me regardant avec des yeux ronds. C’était certain, j’avais fait une bourde, et pour me rattraper, ça n’allait pas être facile. Pas envie d’être fâché avec le gus, pas envie de me faire enguirlander non plus, je tentais vainement de prendre la parole, en lâchant un petit glapissement qui s’accompagna d’une petite moue désolée :

      « Mais Aaalh’ ! »

      Mais la suite de ses mots me fit très vite comprendre que je n’étais pas en position de discuter quoique ce soit. A un tel point que l’homme ne manqua pas de me balancer ses quatre vérités. Et voilà qu’il me semblait étrangement dur, pour le coup. Je me renfrognai et le regardai fixement, prenant du recul sur la situation : Oui, j’étais fautive. Oui, j’avais fait une bêtise. Mais je n’étais pas non plus un monstre d’insensibilité irrespectueuse et absolument horrible. A l’écouter, on aurait dit que j’avais tué quelqu’un. Tentant encore une fois de reprendre la parole, il se contenta de se lever en lâchant un « j’me casse » froid et ferme, qui laissait penser que nos relations s’arrêtaient-là. Et cela, définitivement. Pas le temps de réagir pour tenter de rattraper la situation, il m’avait mis aussi en colère qu’il ne l’était.
      Je croisai les bras sur ma poitrine, fronçant les sourcils en le regardant tourner les talons. J’avais l’impression de m’être fait enguirlander, d’être une gamine de six ans qui venait d’être prise en train de faire une bêtise et qu’on disputait violemment. Et que la punition pour lui faire payer sa bêtise était de couper court à la conversation et de partir.
      Pas très engageant.
      Peut être légèrement abusé.
      Même si je pouvais comprendre son comportement, j’avais du mal à avaler la pilule. Il était gonflé. J’étais quand même assez grande pour me gérer, et venant d’un type qui ne manquait jamais de bouffes dans son assiette ni de dormir dans un lit douillé, je ne pensais pas avoir de leçon à recevoir. Lui, il avait la belle vie, le luxe et la compagnie qui allait avec, pour le travail qu’il faisait. Moi, je vivais de petits boulots, devais attendre des mois pour obtenir une pièce - alors que lui avait ce qu’il voulait en claquant des doigts -, faire en sorte de ne jamais me faire avoir avec mes petits moyens… Et il se permettait de me faire la morale ? Bon dieu… Ouais, il était sérieusement gonflé. Et tous ces beaux discours sur le bien et le mal m’importaient bien peu, au vu de la colère qui montait progressivement en moi.

      « Je te déçois ?! Bah putain, t’es franchement gonf- Alh ! »

      Je me levai, le regardant tourner le dos et prête à lui expliquer ma façon de penser sur la chose, mais je fus alors très vite interrompu. Un gars avait surgit de nulle part et était venu fracassé sur le crâne du marine une batte en bois. Je le regardai effarée, mais repris très rapidement ma contenance. Ok, le grand musclé mis hors d’état de nuire, c’était visiblement après moi qu’ils en avaient. D’ailleurs, les regards qu’ils me lancèrent en disaient long sur ce qu’ils avaient l’intention de me faire.
      Bordel, Lilou, tu ne pouvais pas trouver un autre jour, non ? Fallait absolument que tu te foutes dans la merde au pire moment ! Alh’ ne pouvait pas te défendre (et le fait qu’il soit gisant par terre ne me rassura pas sur son état de santé), Bee n’était pas là (même si le port n’était pas loin), t’étais vraiment dans un sacré bordel.
      Réagissant presque instantanément, j’attrapai le siège devant moi, assenant le premier coup au bonhomme qui s’approchait de moi. Il se reçut le tabouret dans la figure, ce dernier éclata en morceau, avant que le suivant de se rue sur moi et ne tente d’enfoncer un sac sur ma tête. Je me mis à crier, me débattant en collant des coups de poing à gauche et à droite, histoire de me défendre un minimum :

      « LACHEZ-MOI BANDE DE *** ET DE *** ! ***** ! (à ce tarif, vaut mieux censurer)
      - Mais tenez-là ! Aie ! elle m’a mordu ! Putain, elle m’a mordu !
      - VA TE FAIRE ******* !
      - Elle arrête pas de bouger, on arrive pas à la ligot- AIE !
      - BIEN FAIT ! AAAAAAAAH !
      - QU’ON L’ASSOME PUTAIN !
      - GNIIIII ! »

      Ils nouèrent mes mains derrière mon dos en me maintenant la tête contre le comptoir. Deux tenaient mes jambes alors que je gigotai dans tous les sens pour qu’ils lâchent prises. Ils passèrent un bras et m’immobilisèrent avant de m’attacher, puis l’un d’eux me jeta sur son épaule tandis que je continuai d’hurler à la mort pour qu’il me lâche. Je ne voyais plus rien, je ne savais plus ou on allait, je ne savais plus quoi faire, et alors que je tentais une énième fois de me sortir de là, on m’assena un violent coup, proche de mon oreille, qui me fit perdre conscience.





      Des bruits me parvenaient, étouffés.

      « …u veux qu’on fasse d’elle ? Elle va compromettre tous nos plans, à tous les coups, elle a parlé à son pote le marine.
      - C’n’est pas un rigolo, lui. C’est le Colonel Fenyang. Je suis sûre qu’elle a tout entendu, tout à l’heure.
      - Alors quoi ? On la tue ?
      - C’est l’idée. Marco, tu t’en occupe ?
      - Très peu pour moi les gars, j’n’ai pas signé pour tuer des gens.
      - On n’a pas le choix mon grand. Alors tu le fais, ou je le fais ?
      - Fais-le.
      - Tsss… Ok… Il faut avant qu’elle nous dise ou est le lance-flamme qu’elle nous a volés. »

      La discussion semblait tendue. J’ouvris un œil, laissant ma tête pendre comme si je dormais. Ils avaient retirés le sac. Je ne savais pas où j’étais, ni ce que je faisais là. Jetant un regard à droite, je remarquai une valise ouverte, pleine d’armes en tout genre. De celle-ci dépassée un bâton de dynamite, ainsi qu’un fusil. J’étais au centre d’une pièce miteuse et poussiéreuse, assise et ligotée sur une chaise. D’un petit mouvement, j’estimai à quel point mes liens étaient noués. Pas très solidement attachés, plutôt faits à l’arrache, un petit sourire perça mon visage.

      « Tu comptes t’en débarrasser comment ?
      - La faire sauter, ou alors la jeter en mer. Dans le port avec du plomb sur les pieds. Bien lestée, elle s’en sortira pas.
      - Vous êtes dingue, c’est trop dingue.
      - Tss… trouillard. Réveillons-la. »

      Pas besoin, j’étais déjà réveillée. Et j’avais entendu plein de jolies choses. Le chef s’approcha de moi et me secouât brutalement. Prise dans mon jeu, je fus contrainte de faire comme-ci je me tirais de mon sommeil :

      « Hmm.. Aie ! Ma tête… Gnuh ? »

      Une pause. Je relevais la tête vers eux. Ils me regardaient tous les trois. Le chef avait les cheveux coupés court et l’air dur, des yeux bleus pénétrant et l’allure d’un vieux vétéran reconverti en mercenaire. Celui que je suspectai être comme son second était plus fin, mais le faciès aussi ferme que son chef, des cheveux longs remontés en une queue de cheval ainsi qu’une vilaine cicatrice sur sa joue. Marco, lui, en retrait, avait l’air d’un mec frêle, un peu en surpoids et toujours sur le point de tomber dans les pommes.

      « Allez, la belle au bois dormant, met-toi à table… »

      Le vétéran m’attrapa les cheveux et me tira violemment la tête en arrière. Je fis un rictus, le regardant droit dans les yeux. A bien le détailler, il me faisait vaguement penser à l’un des collègues que Yumen ramenait régulièrement chez lui, qui s’amusait à me martyriser. Un vicieux, ce gars-là.

      « Où est le dispositif que tu nous as volé ?
      - Où quoi que quoi ? Dis-je avec le regard vide et la bouche pâteuse.
      - Le DIS-PO-SI-TIF. Le lance-flamme quoi ! »

      Je fis mine de réfléchir, fermant les yeux pour appuyer mon jeu. Vrai, ou est-ce que j’avais mis le fichu colis ?

      « Ah, ça… »

      Sur le bar, voilà où il était. Et ils ne l’avaient pas pris en partant ?

      « Hinhinhin. »

      Ils me regardaient, accrochés à mes lèvres.

      « Quoi ?!
      - Vous l’avez laissé au bar, bande de couillon. »

      Silence. Vrai, des couillons.
      Le chef m’envoya un violent coup dans la pommette, me faisant tomber à la renverse. La chaise fut embarquer dans ma chute et je m’écrasai sur le sol. Même pas mal. Enfin, si un peu. Un peu beaucoup. Ce couillon m’avait probablement cassé la pommette. Connard.

      « Marco, reste avec elle. On appelle les autres au passage et on se retrouve devant la Banque. Les filles doivent s’occuper du colonel, ou au moins être en train de le distraire. »

      Les filles ? Non, ils ont sérieusement envoyé des filles se battre contre Alheiri ? Et merde.
      Le second attrapa le sac d’arme et prit le pas vers la trappe. Marco fit un signe à son chef en jetant un regard ensuite vers moi. Je profitai de ma chute pour tirer sur le bout d’un de mes liens. Le nœud était tellement mal fait que j’eus l’impression de le sentir couler sur mes poignets. On ne vit pas mon manège. Les deux autres hommes sortirent, ne laissant que le fameux Marco dans la petite pièce en ma compagnie. Il s’approcha de moi, se penchant au-dessus de mon corps… Je n’attendais pas mieux.
      J’envoyais mon pied s’écraser violemment contre son facies, il partit en arrière et heurta un meuble. Je me relevai précipitamment, une main tenant la corde qui m’avait ligoté un peu plus tôt. D’un mouvement fluide, j’envoyai l’outil se saisir du cou de mon ennemi, comme un lasso qu’on lance sur une vache, et le tirai à moi avec violence. Il tomba a genoux, le souffle coupé non seulement par le coup de pied mais aussi par la corde qui enserrait son cou. Une droite pour le rendre un peu plus docile, il tremblait comme une feuille en me suppliant du regard. Avec un sourire qu’en disait long sur ma pensée, je lui fis d’une voix douce :

      « Allez Marco… Raconte-moi tout. »

      ***

      Bee avait parcouru plusieurs rues à la recherche de son amie. Elle était en retard, ce qui n’était pas dans ses habitudes. Quelque chose avait dû lui arriver. Il s’était inquiété et était parti à sa recherche, comme ils avaient prévu de faire si jamais les choses s’envenimaient. Des bruits avaient attiré son attention, dans une rue adjacente à la place principale de Logue Town. Il s’y était aventuré et avait vu la silhouette d’un homme qu’il connaissait en compagnie de deux jeunes femmes qui tenaient des fouets.
      Alheïri Fenyang, à son souvenir, ne donnait ni dans le sadomasochisme, ni l’exhibitionnisme.
      En conclusion : Il était en danger, attaqué par deux créatures mal attentionnées.
      N’écoutant que son courage, il fonça vers les protagonistes et arma son canon à air, envoyant dans leur direction un coup violent et destructeur, happant au passage l’une de deux jeunes femmes qui ne manqua pas de rencontrer le mur le plus proche et même de le traverser. Et arrivant au niveau de son compagnon d’armes du passé, il ne put s’empêcher de lui faire un signe amicale, lâchant pour accompagner son geste :


      « Coin coin. »

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        Dix bonnes minutes avant que Lilou n’réussisse à prendre l’ascendant…

        Okaaaay ! Ça s’complique de plus en plus cette histoire là. Et c’est pas bon pour mon cul. Ni pour celui d’Tom d’ailleurs. Nous étions de grands hommes, forts, beaux et bien bâtis, d’accord. Mais l’éthique nous interdisait de toucher une femme, sauf en cas d’extrême nécessité. Là… Il n’y avait rien qui urgeait… J’m’étais mis à rougir et à sourire comme un pauvre puceau devant ces belles femmes. Deux belles brunes bien gaulées avec des bikinis échancrés qui allaient avec. C’est ti pas beau tout ça ? Pour moi, ça l’était vraiment. J’m’étais même mis à baver en m’approchant d’une de ces filles en pose pin-up, mais par la suite, l’fouet que j’avais évité in-extremis en m’penchant instinctivement en arrière m’fit comprendre qu’elles n’étaient pas là pour m’faire plaisir. J’fronçai mes sourcils en reculant d’un ou deux bonds, mais l’beau sourire de l’une m’fit fondre une énième fois comme du sucre sous l’eau. J’pouvais rien faire et je n’avais pas la foi de dégainer Kashuu, mon meitou. C’est dire que ces femmes étaient incroyablement époustouflantes. J’allai une fois encore m’avancer vers elles, quand Tom me retint par l’épaule. S’il n’aimait pas non plus porter main à une femme, il n’était pas obsédé comme moi, heureusement. J’revins à moi-même quand il mentionna Lilou par « la maigrichonne qui n’était nulle part. » Et là, mon sang n’fit qu’un tour. A l’ouïe des fouets qui claquaient dans l’vide encore et encore, j’m’étais mis à sourire de manière un peu carnassière. Ok, j’n’étais pas masochiste. Mais rechercher Lilou valait largement la peine d’se faire fouetter…

        J’allai foncer. Sur l’une des fouetteuses. Et l’enlever de force pour lui soutirer des informations, quelque part, dans un coin d’la ville. L’but était tout simplement de séparer l’groupe de ces dominatrices, histoire d’avoir au moins un indice sur ces gens qui nous avaient attaqués. Elles étaient de mèche avec eux et ça coulait d’source. Ce à quoi je n’arrêtais pas d’penser d’ailleurs. J’allai m’lancer quand des martellements de pas m’immobilisèrent net. Quelqu’un venait vers nous et c’était vraiment, mais alors vraiment pas l’moment ! J’grognai en m’disant qu’il pouvait s’agir d’un autre nuisible. C’qui n’me plaisait pas. De ce fait, j’bondis d’un seul coup vers nos ennemis, histoire de gagner du temps. Mais alors que j’étais en plein impulsion, l’une de nos adversaires suite à une attaque venue de nulle part, fit un sacré vol plané avant d’aller s’encastrer dans l’un des murs du bar façon hiéroglyphe. J’freinai ma course, avant de regarder les yeux ronds la jeune femme qui avait même fini par traverser ledit mur. Et ce n’est qu’à ce moment là que je sentis une présence juste derrière moi. Croyant à un autre adversaire, j’voulus dégainer et en finir vite fait bien fait, mais ce n’est qu’en ayant entendu le fameux « Coin coin » que je m’immobilisai une nouvelle fois. J’me retournai lentement avant de lever un peu la tête. Et quelle n’fut pas ma surprise de le voir… « Bee ! » J’eus immédiatement un sourire. Un gros sourire même. La dernière fille et Tom étaient étonnés, mais j’fis vite de faire un clin d’œil à mon ami, avant que celui-ci n’verse dans un sourire paisible…

        • Bee ! Tu peux t’occuper de la dernière ?

        • Coin coin !

        J’pris son nasillement pour un oui. Et nous nous retournâmes au même moment vers la dernière femme à fouet. Celle-ci commença à trembler sur elle-même, prise de panique. Sûre qu’elle n’avait pas peur de moi, vu qu’elle savait pertinemment que j’ne tapais pas les femmes. Par contre, l’immense robot jaune qui m’surplombait d’un mètre et des poussières, c’était autre chose ! Lâchant son fouet sous l’effet de la peur, la brune s’mit à reculer maladroitement pendant que Bee et moi avançâmes tranquillement vers elle. Au bout de quelques secondes, la sexy girl vacilla tellement, qu’elle tomba sur son gros derrière bien ferme. Même qu’elle commençait à pleurer en nous voyant approcher. C’est au bord de l’évanouissement que j’fis signe à Bee de s’arrêter, c’qu’il fit automatiquement. Prise de spasmes violents, notre proie finit par renifler bruyamment en m’regardant avec des yeux de chiens battus. Comment qu’elle était mignonne ! Même si c’était p’être pas l’moment d’reluquer ses cuisses pleines et laiteuses et ses gros lolos. J’regardai autour de moi pendant qu’elle était encore sous l’effet d’la peur, quand Tom m’balança une longue corde bien solide. A l’aide de l’objet, j’ligotai solidement la jeune femme, tant et si bien qu’elle avait décrit une pose de sadomasochisme. Sur le coup, deux grosses gouttes d’eau apparurent derrière les nuques de Bee et de Tom, avant que le dernier n’vienne attacher normalement notre victime. J’décrivis une mine boudeuse avant que la grande main de fer de Bee n’vienne me tapoter l’épaule. En l’sentant, j’repensai immédiatement à Lilou, avant d’me pencher rapidement sur la pleurnicheuse qui regardait vers le mur endommagé par l’voyage forcé de sa p’tite copine…

        • Dis moi ma belle… Tu bosses pour qui et où est ce qu’ils ont emmené mon amie ?

        • Je… Je…

        Cinq minutes avant que Lilou n’réussisse à prendre l’ascendant…

        • Plus vite Bee ! Lilou est p’être en danger !

        • Coin coin !

        C’était donc vrai… Lilou avait eu raison concernant l’histoire de banque. Dire que j’avais totalement ignoré ses paroles rien que pour me focaliser sur sa faute à elle… C’était à en mourir de honte ! J’comprenais mieux pourquoi ces gars avaient tant besoin du dispositif de lance-flamme que j’avais sur moi heureusement. Ca promettait d’être chaud tout ça ! C’qui n’était pas pour m’faire plaisir, j’vous jure. D’mon côté, j’avais même été confronté à un véritable dilemme. Protéger la banque ou sauver Lilou ? Un casse tête qui n’dura que quelques secondes avant d’me souvenir qu’il ne s’agissait pas de ma circonscription ! C’qui m’permit de trancher en faveur de Lilou… « DEGAGEZ LE PASSAGE !!!! » Et de courir comme un dératé dans les rues bondées de Logue Town, vers le lieu ou elle était prisonnière. J’bondissais comme un fou avec Bee derrière moi qui tenait fermement la jeune femme sur l’une de ses épaules métalliques. Concernant l’affaire de la banque, j’avais laissé à Tom l’soin de prévenir la caserne de la ville pour une meilleure intervention. Il était vrai que j’étais p’être un bon guerrier, mais seul contre un groupe de cette envergure -Rappelons qu’ils sont très rares sont ceux qui peuvent m’assommer d’un seul coup d’batte- c’était pas gérable ! En bon nombre, les marines du coin pouvaient s’en occuper. C’qui m’donnait aussi bonne conscience. Nous contournâmes une grande avenue, avant de continuer à courir dans une énième allée plus ou moins sinistre pendant une trentaine de secondes, c’qui ne nous incommodait pas le moins du monde ; quand au bout de ladite allée, nous débouchâmes sur…

        • Bordel…

        Un hangar. Un immense hangar. Bondé de brigands de tous horizons. De petites frappes apparemment. Une centaine de personnes ? Ouaip, une bonne centaine ! Ça craignait vraiment ! L’un d’eux tourna instinctivement son visage vers nous. Il avait les yeux bridés et son crane luisait sans l’soleil, tant il était parfaitement rasé. Un chauve dans toute sa splendeur. Rien à dire. Il renifla une dernière fois sa poudre avant de nous pointer du doigt. D’autres hommes suivirent du regard la direction pointée avant d’nous voir. Et tous se mirent à étirer leurs lèvres. Si certains nous souriaient malicieusement, d’autres éclataient tout simplement de rire. Notre arrivée faisait plaisir à la grande assemblée. Si bien que j’eus moi-même à me décontracter en m’permettant de curer grassement l’une de mes narines, comme si de rien était. Brusquement, les visages commençaient à s’assombrir. J’décrivis une mine interrogatrice en penchant ma tête vers l’une de mes épaules. Qu’est ce qu’ils avaient soudainement… ? J’les narguais en m’curant le nez ? Mwouais. Sans doute. J’me mis à sourire à mon tour pendant qu’ils se levaient et s’avançaient lentement vers moi, ayant toutes sortes d’armes en mains. Bon, apparemment, j’avais pas tellement l’choix. Fallait encore que j’m’adonne à une petite baston, histoire d’infliger quelques corrections. L’avait finalement réussit à m’trainer dans l’une de ses fameuses affaires sordides, la p’tite Lilou. Et rien qu’à cette pensée, j’eus un petit rire avant de dégainer mon meitou. Au final, j’fus l’premier à m’jeter à corps perdu dans la bataille, tranchant tout c’qui se trouvait devant moi sans trop faire dans les sentiments. Du boucan, faut dire que j’en provoquai. Énormément même.

        Cinq minutes plus tard, au moment même où Lilou prit l’ascendant sur le dénommé Marco…


        • Pffff… Qu’est ce que j’fous maintenant… ?

        J’étais sur une montagne. Une énorme montagne humaine. Formée par des corps inertes, entassés les uns sur les autres. Et ça m’rappelait très vaguement la mission que j’eue avec Rachel Blacrow, l’une de mes petites protégées dans les rangs de la marine. J’avais fini par battre tous ces gugusses en moins de cinq minutes seulement et sans la moindre égratignure. Faut croire que j’appréhendais leur nombre pour rien. Ces bâtards n’valaient même pas mes lieutenants. J’me grattai l’une de mes tempes avant de saisir la chevelure d’une de mes victimes. J’voulus lui poser la question de savoir si son patron était dans les parages, mais à voir ses yeux vitreux, sa bouche béante et les multiples ecchymoses qui gonflaient horriblement son visage, j’en conclus qu’il n’y avait rien à faire. Pffff ! J’laissai sa tête et prit un air songeur. J’me sentais un peu inutile là, sérieux ! De toute façon, leur big boss devrait être bien plus costaud que ça, puisqu’aucun n’avait réussi à m’tenir tête, sauf l’autre chauve qu’avait presque réussi à m’foutre un coup d’boule. Presque j’dis bien. M’enfin bon… Toujours est-il que le chef n’était pas là. Et ça m’faisait un peu chier. Mais avec un peu de chance, la marine locale allait réussir à l’coincer. Si Tom avait vite fait de les prévenir. J’regardai autour de moi et constatai l’absence de Bee et d’la fille. Où étaient-ils ? Gros point d’interrogation. Finalement, je ne m’inquiétai pas tellement pour lui. Sa prisonnière avait bien trop peur de lui pour oser quelque chose, sans compter qu’elle était solidement ligotée. Il devait sans doute rechercher Lilou… Et j’pensai moi-même à faire la même chose… Bien que sur l’moment, la flemme s’était emparée d’moi…

        Un peu plus loin, dans une petite pièce...

        « BOUUUUUM !!! »

        L’un des murs de la petite pièce dans laquelle se tenait Lilou et Marco, avait volé en éclats. L’coup avait été d’une véhémence inouïe. Après avoir entendu des voix dont celle de sa maitresse en passant par hasard vers l’endroit, Bee n’s’était pas posé de questions et avait détruit l’mur qui lui faisait face. La poussière se fit effective et brusquement, une silhouette s’dessinait à l’horizon. Ce n’est que lorsqu’il fit deux trois pas, qu’il reconnut sa créatrice bien aimée. Et sans se poser de questions, le robot-canard se débarrassa du corps qu’il chargeait sur son épaule depuis, avant de courir joyeusement vers Lilou qui l’avait abandonné depuis plusieurs heures déjà !

        • Coin coin !
        « Me faites pas de maaaaal !
        - Oh arrête de couiner et cause, Marco…
        - Mais ils vont me tuer si je paaaarle !
        - Tu préfères eux tout à l’heure ou moi maintenant ? »

        Un petit glapissement perça la salle. Il me regardait avec des yeux brillants d’une horreur nouvelle.

        « Vous… vous allez me tuer ?
        - Ecoute Marco, soit tu me dis ce qu’ils ont prévu et on aura le temps de les arrêter et donc de sauver tes grosses miches, soit tu dis rien et je te pète la gueule. »

        Je fis craquer mes phalanges d’une pression sèche qui fit tressaillir l’autre gars avec moi. Il avait très bien compris que je ne plaisantais pas là-dessus et que j’avais fermement l’intention de lui refaire le portrait s’il ne se décidait pas à se mettre à table. Et à croire que le courage n’était pas son fort, il se mit immédiatement à parler.



        Il y eut un bruit tonitruant, puissant, un coup qui suffit à défoncer le mur. La silhouette massive d’un robot jaune apparut dans le trou récent, quand deux yeux turquoises percèrent la fumée produit dans l’écroulement des briques. Sa grande main d’acier s’approcha de notre emplacement, suivant son corps de géant. Marco se mit à trembler comme une feuille et à hurler comme une fillette de cinq ans devant un film d’horreur. Moi, mes yeux se mirent à pétiller de bonheur : il avait, encore une fois, remué ciel et terre pour me retrouver, et ça prouvait ô combien l’on pouvait tenir l’un à l’autre.

        « Bee ! »

        Marco en profita pour se planquer sous une table. J’enserrai mon ami, avant de me défaire de son étreinte. Je ne connaissais pas Bee aussi entreprenant, mais il était sincèrement rassurer de me savoir en bon état. Il me lâcha et me regarda ligoter Marco à la table ou il venait de se cacher. Après avoir fini mon travail, je me tournai vers lui avec la mine sérieuse :

        « Alh est avec toi ? »

        Bee hocha la tête et se baissa pour être à mon niveau. Pas le temps d’en dire plus pour l’instant, nous devions nous presser de rejoindre le Marin qui avait, lui aussi, fait le déplacement pour me sauver. Avec ce que je savais, j’avais l’occasion de lui rendre définitivement la pareille. Il allait voir ce qu’une voleuse savait faire pour débusquer des vrais voleurs :

        « Ne restons pas plus longtemps dans le coin, on a des gentils gens à sauver de vilains bonhommes ! »

        Il caqueta bruyamment et me posa sur son épaule avant de sortir de la pièce. Il parcourut les quelques mètres qui nous séparaient de Alh, à vive allure, m’attrapant ensuite par la taille pour me poser près du bonhomme. Il était conscient de l’enjeu du temps, des informations que j’avais à donner au marin, aussi de l’importance de chaque seconde qui s’écouler pour sauver des vies en danger.

        « Alh ! »

        J’avais escaladé les corps sur lesquels il trônait fièrement, arrivant à son niveau pour l’attraper par le col de sa veste et le secouer vivement. Si le geste pouvait paraitre de trop, il me semblait important de le mettre immédiatement dans le bain :

        « Je suis de très mauvaise humeur et j’ai bien envie de te casser deux ou trois molaires… Mais on n’a pas le temps pour ça ! Écoute-moi bien, c’est super sérieux ! »

        Je plantai mes yeux dans les siens, nos visages à quelques centimètres, la mine on ne peut plus sérieuse. Il devait entendre tout ce que j’avais à dire, car les prochaines réactions qu’il aurait seraient déterminantes :

        « Ils ne sont partis qu’à 4 pour aller piller la banque principale de Logue Town, mais ceux sont quatre gars plutôt balèzes qu’ont de quoi faire exploser un quart de l’île. Ils sont armés, jusqu’aux dents, et plutôt décidés à repartir les poches pleines ! Et crois-moi que ceux ne sont pas des enfants de chœurs ! Ils ont piégé les entrées et sorties de la banque avec de la dynamite, ce qui fait que ceux qui essayeront de rentrer ou sortir se verront tout droit rejoindre les apôtres du Bon Dieu ! Ceux que tu viens d’abattre ne sont que des petits malfrats de bas étages qu’étaient très secondaires dans le plan de ces gus ! Ils n’avaient même pas prévu de vraiment les payer ! Il faut absolument aller à la banque et les arrêter avec Tom et… »

        Je marquai une pause soudaine, fronçant les sourcils. Il manquait quelque chose, ou du moins, quelqu’un. Le gentil barman, il était passé ou ?

        « Euh, tiens… Tom n’est pas avec toi ? »

        Je regardai autour de moi pour essayer de trouver le bonhomme du bar, mais rien à faire, il n’était pas avec nous visiblement. Soudainement prise d’un doute, fixant le Colonel en face de moi, je lui fis avec le plus grand sérieux du monde :

        « Est-ce que tu as envoyé Tom prévenir la Marine pour le cambriolage ? »

        Son regard, presque absent, en disait long sur la situation. Et vu les ricanements sous nos pieds (qui s’étouffèrent après un coup de talon dans les dents), Alh n’était même pas au courant du quart de la moitié du tiers du problème. Et ça s’annonçait plutôt mal. Surtout si Tom était allé prévenir la marine du cambriolage en question, qu’ils intervenaient… C’était des morts à la une pour le journal de demain matin. Mon sang ne fit qu’un tour, j’attrapai la main du Colonel et le tirai à moi avec véhémence. Pas question de rester là à ne pas réagir et d’envoyer des gens à l’abattoir.
        Les malfrats avaient pris soin de mettre cinq personnes dans la confidence, dont Marco. Mais il fallait se douter que Marco ne savait pas la totalité de leurs petites affaires, et qu’à tous les coups, d’autres surprises étaient à prévoir. Logue Town était un point crucial, autant d’un point de vue économique que touristique, de la carte du monde. Il y avait du passage, de l’influence et surtout, du rendement. Voilà pourquoi ils avaient choisi l’île. Et même si les lieux étaient truffés de marine, de gens pour faire respecter la loi, ils avaient probablement prévu une issue de secours, un truc dont personne ne penserait.
        Putain, de putain, de putain.

        « Ils ont eu des semaines pour piéger les rues au tour de la banque selon les dires de Marco. Il y a un rayon de 50 mètres autour de l'immeuble qui n’est pas humainement accessible sans risquer de sauter. Qu’est-ce qu’on fait ?! »

        Je réfléchissais à haute voix, je lâchai un peu plus ce que Marco m’avait balancé plus tôt. Parait qu’il m’avait tout dit, absolument tout. Qu’il ne savait pas comment les gars allaient se tirer de là, mais sans doute qu’ils avaient un plan bien millimétré. Je me passai une main sur le visage, soudainement beaucoup plus anxieuse. Bee sentait que ça ne tournait pas rond, qu’on s’était encore fourré dans un sacré pétrin. C’était un peu de ma faute, certes… Bon sang de bois de foutre dieu !
        Bee attira mon attention soudainement, me disant qu’il avait une idée. Il se mit à mimer tout plein de choses, à se transformer en canard directement, à voler, à atterrir sur le sommet du toit du hangar. Ok. Je comprenais ou il voulait en venir : Une intervention directe de gus comme nous quoi… C’était bon à prendre, non ? Me tournant vers Alh pour avoir son avis sur la question, je me dis quelques secondes plus tard que son avis, on en avait rien à faire, le tout était maintenant d’agir.
        Je levai mon pouce vers le canard, lui assurant que j’étais d’accord avec ce qu’il disait. Bee s’envola vers nous. J’attrapai le bras de Alh’ et bondis avec lui sur les plumes de mon ami lorsqu’il passa près de nous. Bee était assez grand et fort pour transporter deux personnes, même si Alheïri pesait son poids, il y arrivait sans trop de problèmes. Nous prenions de la hauteur, nous éloignant en vitesse du hangar pour nous approcher de la ville.

        Mais alors que nous approchions toujours, volant en direction de la banque…

        BANG BOOOOM.

        Deux explosions retentirent dans le centre-ville. Au loin, de la fumée montait vers le ciel bleu, une fumée noire et angoissante, tandis que des flammes commençaient à ronger les bâtiments autour. Des cris nous parvenaient sur les ailes du vent, ainsi qu’une odeur de brulé. Une injure m’échappa au nouveau, tandis que je me protégeai le nez des vapeurs toxiques de l’explosion.

        Bee piqua en direction de la fumée, battant des ailes de plus en plus vite. Il perça à travers l’épais nuage noirâtre et accéléra encore pour éviter que l’on ne se mette à suffoquer. En quelques secondes, l’air devint plus respirable. Doucement, il se mit à tournoyer autour du bâtiment principal avant de se poser sur le sommet du toit. Qui nous avez vu ? Personne. Du moins, personne susceptible de nous embêter là où nous étions.
        D’un mouvement habile, Bee fit glisser Alh’ et moi-même en direction du sol. Je me redressai et me tournai vers le colonel. De là où nous étions, nous entendions les marins fermer la rue, éloignant les civiles de la banque, tentant d’évacuer les blessés. Je n’avais pas envie de regarder ce spectacle funèbre. Mais cette violence me mettait en colère et me donnait envie de faire ce que je faisais le mieux : foutre en l’air les plans si bien ajustés.

        « Ce n’est pas ta juridiction, Alh’. Mais ça ne t’empêche pas d’intervenir, n’est-ce pas ? T’es probablement le seul dans le coin à pouvoir sérieusement leur tenir tête… »

        Pour moi, ce n’était pas la peine de réfléchir plus loin. Pourtant, peut-être que le gus n’avait pas la tête à casser des dents. Surtout si l’on songeait à Tom. Le Barman avait suivi ses ordres, envoyé des gars à l’abattoir sans savoir que ça serait à ce point dangereux. Peut-être même avait-il suivi le mouvement… Non, stop. Surtout, ne pas y penser.

        « En fait, je t’ai encore embarqué dans une histoire pas possible. T’as bien raison, j’suis qu’une petite voleuse-attire-emmerdes-qu’a-que-des-plans-galères… T’es pas obligé de suivre. Mais je crois qu’on a les moyens de les arrêter. »

        En disant ça, j’avais tiré de sa poche le colis de tantôt avant de me tourner vers Bee et d’ouvrir son avant-bras d’une pression adéquate. Il ne me fallut que quelques minutes pour fixer le mécanisme. Le réservoir était plutôt petit, mais ça aiderait pour un premier essai.

        « ça serait peut-être un moyen de dire « 1 partout, balle au centre » ? »

        Un petit sourire. Bee nous fixait intensément, impatient d’intervenir. Mais alors, quelque chose nous sorti de notre torpeur. Deux voix, semblables et pourtant distinctes, qui attirèrent notre attention. Mes yeux se posèrent sur les silhouettes massives de deux hommes. Jumeaux, identiques, différentiables par leurs coiffures.

        « Valklimer nous avait dit…
        - …Qu’on risquait d’être embêter…
        - …Par un marin…
        - …Et une rouquine ! »

        Valklimer, le chauve, devait parler de nous. Flute, nous voilà repérer.

        « Il a dit que le toit serait…
        - …Le seul accès…
        - …Et qu’on devait le protéger. »

        Ce dialogue me donnait le tournis. Mais pas le temps de réfléchir, Bee tendit son bras en avant et envoya un jet de flamme qui fit grimper la température et bouscula l’enchainement parfait des deux jumeaux.

        « Tu peux t’occuper de l’intérieur ? Je me charge des danseuses ! »
        • https://www.onepiece-requiem.net/t3945-fiche-technique-de-lilou#4
        • https://www.onepiece-requiem.net/t2202-
          J’m’étais presque assoupi. C’est vous dire que la flemme m’avait totalement envahi, sans que je ne puisse y faire grand-chose. J’avais donc relâché ma garde, sans sentir Bee et Lilou arriver vers moi. Une vaine qu’ils aient été de mon côté, sans quoi j’aurais p’être pu y passer sur l’coup. En effet, la belle demoiselle vint m’extirper de mon léger sommeil en m’empoignant les cols et en m’secouant comme on l’ferait avec un cocotier tenace. A peine éveillé qu’elle m’assaillit une nouvelle fois d’un flot d’paroles que j’comprenais à peine. A croire que les femmes, ça n’sait faire que ça. Bavarder, bavarder et… Bavarder. Sur l’coup donc, j’pensais finalement que j’faisais bien d’ne pas me remarier une nouvelle fois. Si c’était pour subir ça tous les jours, mieux valait que j’continue sur ma vie de célibataire tranquille. J’comptais lui dire de stopper son blablatage, histoire que j’reprenne un peu mes esprits, mais elle continuait inlassablement d’parler, sans me laisser l’occasion d’en placer une. J’remuai imperceptiblement mes lèvres avant d’entendre « Tom ». Tiens… Qu’est ce qu’il faisait dans l’histoire celui-là ? Et pourquoi elle m’regardait d’un air incrédule ? J’avais un horrible furoncle sur le visage ? Voulait-elle m’avouer qu’elle m’aimait, hein ? Oh bah, c’était trop tard ! Fallait qu’elle y pense avant quand j’lui avais avoué mon amour pour elle à Shell. Hu… ? Mais pourquoi elle m’tire avec tant d’violence ? J’capte plus rien là ? Et elle parle encore ? Bon Dieu que j’vais plus m’retrouver là. J’sens que j’prends d’la hauteur ? Hein… ? On est sur un drôle d’canard, tiens ! Et c’était quoi ces explosions ? Ces fumées noirâtres ? Cet immeuble ? Et finalement, ces deux gus devant nous ?

          • Areuh ?!

          Tout s’était passé vite. Bien trop vite pour mon cerveau encore endormi. Je n’avais pas tout assimilé. Et ça s’empirait. Comme dans un état second. Physiquement j’étais bel et bien aux côtés de Lilou, mais mentalement, c’était autre chose. J’oscillai lamentablement entre l’monde réel et le royaume d’Morphée. Car tout c’que j’avais envie de faire, c’était d’me coucher, d’enlacer Lilou dans mes bras et de dormir comme une marmotte. Mes yeux étaient vides, comme dénués de volonté similaire à celle de la jeune scientifique : Faire face à l’adversité. De toute façon, c’n’était pas comme si j’avais vraiment conscience de ce qui s’passait autour de moi. C’était flou… Bien trop flou. Pour la première fois, on pouvait bien avouer que j’portais vraiment mon nom : Le Fenyang dans toute sa splendeur. Tu peux pas test ! Et puis il eut une déflagration. Pas tellement forte, mais assez pour m’déranger puisqu’elle fut assez proche. Mon esprit sur l’point de s’évader dans l’royaume du doux Morphée revint brutalement sur Terre. Mes sens se reconnectèrent immédiatement à mon corps qui eut un spasme assez violent. Mes pupilles décolorés reprirent leurs teintes habituelles. J’émergeais. La dernière phrase d’Lilou n’passa point dans l’oreille d’un sourd. Car j’étais revenu à moi. Et ça risquait de chauffer ! Mes prunelles de jades s’plantèrent soudainement sur deux drôles de saltimbanques qui faisaient des pirouettes façon Okama pour éviter les flammes que Bee leur lançait avec tout l’bon cœur du monde. Sur les deux loustics, j’vis un tatouage identique à ceux des mecs que j’avais tatané tout à l’heure. Et sur un mur en face de nous, j’vis également l’insigne de la banque de Logue Town… Sans compter quelques autres explosions un peu plus loin…

          • J’ai rien compris… Juste que tu m’as encore foutu dans une merde… Et que ça m’manquait presque !

          Sans trop plus réfléchir, j’fonçai comme une bourrasque devant le seul accès qui menait à l’intérieur de la banque. Les jumeaux voulurent m’en empêcher, mais j’fus bien trop rapide, sans compter que je tranchais la porte en acier comme du beurre, seul accès à l’intérieur de la banque, c’qui avait dû les intimider. J’dévalai les escaliers qui menaient aux étages plus bas, en m’posant tout d’même des questions : Lilou pourrait-elle s’en sortir toute seule ? Bee serait-il assez efficace pour arrêter ces deux hommes qui semblaient plus forts que ceux que j’avais mis au tapis ? Mystère et boule de gomme. Mais toujours est-il qu’il m’fallait que je leur fasse confiance. Elle s’en était toujours sortit jusqu’ici et c’était pas maintenant que ça allait finir. Surtout pas par des cons qui s’la jouaient majorettes. Rien qu’en pensant à ces gens d’ailleurs, j’eus un frisson de dégout. Limite, on pourrait les considérer comme des Okamas. Même si c’était pas l’plus important actuellement. L’plus important, c’était d’aller voir c’qui s’passait à l’intérieur des locaux de cette banque… Et cette obscurité inquiétante d’la première salle que j’pénétrai rapidement. A partir de ce niveau, j’arrêtai de courir et m’avançai prudemment en regardant de gauche à droite. Mes sens étaient plus que jamais aux aguets. Même un moustique ne saurait m’échapper. J’avais tout d’même l’trac puisque j’ne savais pas à qui j’avais affaire. Si Lilou m’avait plongé en plein dedans, c’qu’il avait de sérieux adversaires capables d’me donner du fil à retordre. Et ça promettait d’être mouvementé tout ça. J’mordis ma lèvre en dépassant l’premier local. Il n’y avait rien à l’horizon. D’même pour un deuxième, et pour un troisième… Jusqu’à ce que j’arrive au premier étage cinq minutes plus tard…

          FRIIIZZZZZOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOUUUUUUUUU !!!!

          J’savais pas vraiment c’que c’était, mais ça fonçait sur moi. Et vu que nous étions dans l’obscurité, j’n’eus d’autre choix que de placer le plat de ma lame devant moi. J’sentis un choc amorti par mon meitou qui fit office de bouclier, avant de filer façon missile sur un mur que je percutai avec véhémence. C’est dire que s’en aurait été fini de moi, si j’n’avais pas eu le reflexe de m’protéger. « Fiat Lux ! » Et la lumière fut dans la salle. A terre, j’utilisai mon avant-bras pour me protéger de la forte luminosité de l’endroit, avant de cligner plusieurs fois des yeux. Et c’est à ce moment là que j’aperçus une silhouette lointaine. « Tsss… J’aurai du m’en douter et j’aurai du te buter dès que j’eus l’occasion de t’assommer. ‘Êtes vraiment collants la rousse et toi ! » Pendant l’fameux discours de celui qui m’propulsa sur l’mur, j’eus le temps de rétablir ma vision. Et c’est dès lors qu’il s’tut que j’pus l’voir. Les traits de son visage étaient durs et ce durcissement était ponctué par la grosse balafre qui lui barrait la joue gauche. Il avait un front dégarni et une queue de cheval qui m’évoquait quelqu’un. Sans compter son air maigrichon plutôt surprenant. J’zappai bien vite les descriptions de sa physionomie pour jeter un coup d’œil inquiet à son arme. L’était grossière. A s’demander comment il la maniait. On n’aurait même pas dit une épée, mais elle présentait un tranchant non négligeable. Et c’était sans doute l’plat de sa lame qui lui avait permit de m’assommer sans bruit. Car s’il avait tenté de m’trancher la tête comme tout à l’heure, certainement que tout aurait été différent au bar. Et qu’on aurait pu tout régler sur place, efficacement…

          Spoiler:

          • Mike Nampf, mecton ! Et ton chemin s’arrête ici !

          • Pffff… Si tu savais combien de fois on m’a déjà dit ça… Lui fis-je savoir presque d’un ton las.

          C’qui l’énerva sans doute, puisqu’il reprit l’initiative de l’attaque. Encore au sol, j’ne dus mon salut qu’à une roulade sur l’flanc gauche. L’épée dudit Mike poursuivit son chemin et s’encastra avec fracas dans l’mur sur lequel j’m’étais appuyé tout à l’heure. J’me relevai, mais à peine étais-je debout que j’entendis une nouvelle fois sa grosse épée brasser l’air dans l’but de m’égorger net. L’était un boucher, ma parole ! Là encore, j’esquivai l’attaque surprise en m’abaissant, avant que mon adversaire n’en profite pour m’envoyer un coup d’pied véhément dans l’bide. L’coup m’propulsa sur un bureau et des chaises que j’bousillai dans ma chute. Toujours sans relâcher mon meitou. Et c’est là qu’j’me suis dit qu’il fallait que j’prenne ce combat à mon compte. Même s’il maniait son sabre géant avec une dextérité remarquable, il n’en demeurait pas moins qu’il avait un désavantage flagrant : Son arme faisait trop de bruits lorsqu’il utilisait l’tranchant ; sans compter mon ouïe de bretteur aguerri qui m’sauvait la mise. C’est d’ailleurs tous ces points qui m’aidèrent une énième fois. Puisqu’il revenait inlassablement vers moi en faisant du bruit. Effectuant un relevé carpé j'utilisai mon sabre par la suite pour le contrer. Ledit contre le déséquilibra un instant et j’en profitai pour lui déchirer l’épaule bien profond. Du sang jaillit, mais aucun son n’sortit de sa bouche. C’fait m’étonna puisqu’j’écarquillai grand les yeux en l’observant. D’un air moqueur, Mike n’se priva pas de contre-attaquer en m’tranchant la poitrine verticalement. Nouvelle effusion de sang. Recul d’ma part par petits bonds. Grognement qui signifiait que la douleur m’lançait. La blessure était certes peu profonde, mais elle barrait tout mon torse. Un peu plus de force et il m’aurait découpé…

          • A force d’me doper, j’ne sens presque plus la douleur, c’est dommage pour toi.

          • Ah ouais ?

          Mike s’agrippa soudainement l’épaule en ouvrant grand ses yeux et grognant comme un sale clébard. J’m’étais mis à sourire à mon tour. Substance dopante ou pas, j’avais un meitou en ma possession. Et c’était pas l’genre d’épées à prendre à la légère. L’bonhomme perdait plus de sang que moi et la douleur lui remontait lentement à la tête. Il relâcha légèrement sa garde en continuant de serrer les dents. Et c’est à c’moment que j’sentis que le vent commençait à tourner en ma faveur. Sans plus me poser de questions, j’fonçai sur mon ennemi qui reprit contenance. Il avait par contre une défense qui présentait moult failles. C’qui agrandit mon sourire. J’me mis à l’assaillir de coups. Le pauvre avait du mal à m’suivre. Mes offensives étaient véhémentes et complètement rapides. J’ne lui laissais même pas l’temps de reprendre son souffle. Si la plupart de mes attaques étaient stoppées, certaines venaient réussissaient tout d’même à le toucher. Son corps se recouvra petit à petit d’estafilades. J’n’avais pas de temps à perdre avec un amateur de ce genre. Au bord d’la perdition, le dénommé Nampf voulut m’porter un coup fatal sur l’flanc gauche, mais j’usai de toutes mes forces pour briser son arme en milles morceaux et ce, en une seule coupe fougueuse. Déséquilibré et plongé dans le désespoir, l’homme n’eut que ses yeux pour voir la lame qui filait vers son crâne avant d’crier une dernière fois. Son corps chuta dans un bruit sourd au sol. « Il était out. » Bien avant que j’ne fasse quoi que ce soit, mon adversaire avait perdu connaissance. Il baignait dorénavant dans une mare de sang. Et contrairement à c’qu’on pourrait croire, je n’avais pas fendu son crane. J’ne l’avais même pas touché en fin d’compte. Son évanouissement m’avait stoppé et l’voilà qui s’vidait de son sang, vu son épaule sérieusement atteinte…

          • Bon… Étape suivante…

          La jeune fille que nous avions capturée au bar m’avait parlé de deux têtes pensantes. C’gars devait être l’un d’eux. J’caressai ma chevelure en regardant les lieux saccagés comme jamais et en m’rendant compte que j’étais loin d’mon objectif. L’étais temps d’se casser d’ici. C’que j’fis illico presto. J’me remis à courir à travers le deuxième étage éclairée contrairement au troisième plongé dans l’obscurité totale. Était-ce fait exprès ? Là encore, je n’en savais rien. J’ne pris même pas la peine d’essayer de masquer ma venue. L’big boss de toute cette machination devait bien savoir que j’arrivais. L’tout était de faire vite avant qu’il n’se fasse la malle avec tout l’fric en butant un maximum de personnes. J’arrivai à un long couloir que je traversai au pas de course, avant d’couper la porte comme à mon habitude en débouchant soudainement au hall d’entrée. Toutes les portes étaient closes et masquées. De l’extérieur donc, personne ne pouvait voir quoi que ce soit. J’me retrouvais donc au beau milieu d’un lieu retourné dans tous les sens. C’était un beau bordel, pour sur. Et puis j’avais soudainement lâché mon arme qui tomba à terre dans un bruit métallique. Entre les multiples débris qui jonchaient le sol –Verres brisées, sièges cassés et j’en passe-, plusieurs femmes étaient ligotées et pleuraient à chaudes larmes. L’image m’émut automatiquement. Mais très vite, j’dus reprendre ma concentration, quand j’eus l’ouïe d’une détonation semblable à celle de Bee. Et ça venait de derrière. Laissant mon meitou au sol, j’fis un bond périlleux en avant d’me protéger des flammes qui menaçaient d’me bruler le derche. Et c’est là que j’le vis… Armé d’une lance flamme et d’un sourire particulièrement carnassier…

          • Héééé. L’colonel en personne ! Moi qui m’attendait à la p’tite de Yumen… C’est pas gagné, héhé.

          La p’tite de Yumen ? Encore un ami d’ce type ? Putain. Ça sentait les emmerdes de très loin.
          Et c’était pas bon, tout ça.
          « J’ai rien compris… Juste que tu m’as encore foutu dans une merde… Et que ça m’manquait presque ! »

          J’en étais sûre !
          Autant pour le « j’ai rien compris » et le « ça m’manquait presque » que je le mette dans le pétrin ! Haha, comment j’étais fière. Evitant soigneusement l’attaque d’un des loustics, je regardai Alh’ filait vers l’intérieur du bâtiment pour s’occuper des deux autres qui devaient l’attendre dans un coin. Qu’il soit prudent, les gus n’étaient pas des rigolos, loin de là. Pour avoir eu à faire avec eux un peu plus tôt et avoir pu les voir de près, le Colonel Fenyang allait avoir de quoi se dégourdir un peu.
          Et pour en revenir à moi, je n’étais pas forcément plus tirée d’affaire ni plus à mon aise. J’avais, en face de moi, deux montagnes de muscles, massives, décidées à me faire la peau selon les ordres qu’on leur avait donné. Pas de bol. Et je n’avais vraiment pas la carrure pour lutter face à deux mecs comme eux, fallait se rendre à l’évidence. L’aide de Bee n’était jamais de trop dans ce genre de situation, et le robot le savait pertinemment. Il était derrière moi et me couvrait lorsque j’en avais besoin, me permettant d’éviter les plus gros assauts de mes adversaires. Ces derniers étaient étrangement souples et vifs pour leurs carrures. Ils frôlaient le mètre quatre-vingt-quinze, les cent kilos, mais possédaient pourtant une légèreté étonnante. Je n’y étais pas habituée, ayant par le passé des types d’à peu près de la même stature mais aussi malléable qu’un bout de bois, le contraste était saisissant et surtout, particulièrement efficace. Inattendu ! Comme quoi, se fier aux apparences n’était pas jouable dans ces circonstances.

          Gni !
          Ouf !
          Ce n’était pas passé loin. Leurs coups étaient puissants, sûr que si j’en prenais un de plein fouet, il ne resterait pas grand-chose à ramasser de la Lilou après ça. Bee m’attrapa par la taille et me monta sur son épaule. Il m’y posa et fit face à nos adversaires qui s’étaient réunis en face en un petit bond gracieux. Ils nous regardaient avec des sourires parfaits, dignes des mannequins sur des photos et des publicités. Bee se tourna vers moi et m’interrogea du regard, lui aussi avait beaucoup de mal avec les deux individus en face de nous, et pas seulement parce qu’ils étaient adroits et puissants. Leurs comportements nous laissaient… pantois. Complètement déconcerté.
          Tantôt, Alh avait l’air du même avis que nous. Et c’était peu dire si je disais que notre avis était… Mitigé. C’était quoi leur problème ? Non pas que j’avais un problème avec les tenues moulantes et ultra-voyantes (non, non, le rouge et le jaune fluo sont vraiment trop sex, hein), ni avec les coiffures types vieux groupe de rock glam, ni avec les hommes qui portaient ces coiffures et ces tenues, hein. Non. Disons que c’était particulièrement… étrange, de devoir affronter des gus comme eux.

          « C’est quoi votre problème ? »

          Ça m’avait échappé. Complètement. Le sourcil froncé, ils me regardèrent avec une lueur dans les yeux étincelante. Ils étaient motivés, bouillonnant, complètement en feu. Ils se mirent à beugler devant moi, les poings fermés. Celui aux cheveux longs pointa le doigt vers moi et me cria dessus avec une violence inouïe :

          « On a pas de problème ! C’est toi qui a un problème ! »

          Euh… ?

          « Beh non. Je crois pas. »

          L’autre brandit son poing en l’air et reprit comme son jumeau :

          « Si, c’est toi ! Nous, nous n’avons qu’un rêve ! »

          Oh mon dieu. Pitié.

          « Et c’est ce rêve qui nous rend si puissant ! »

          Je n’en doutais pas.
          Une moue boudeuse, l’air ennuyé, fatiguée, je poussais un long soupir agacé. Ça n’arrêta pas le duo en face de moi, qui s’était mis à déblatérer sur ce soi-disant rêve qui les faisait « vivre et gagner ».

          « Nous luttons contre cette injustice criante que nous avons subi ! Parce que nous avons le droit, nous aussi, d’exercer notre passion, même en tant qu’Homme !
          - Euh ?
          - Ne nous interromps pas ! Vois-tu, nous nous battons pour que nous, les Hommes, puissions aussi danser comme nous l’entendons, sans passer pour des Okamas !
          - Parfaitement, Nii-sama ! Et la danse aquatique, la natation synchronisée, peut aussi être un rêve pour les Hommes, comme nous !
          - Malheureusement, personne ne nous comprend, personne ne veut admettre que les Hommes sont aussi capables que les Femmes, d’être de fabuleux danseurs aquatiques !
          - Mais nous prouverons, oui, nous le prouverons ! Nii-sama et moi-même sommes ultra-motivés et prêt à tous pour accomplir notre rêve !
          - WEEEEEESH !
          - WOOOOOSH ! »

          Je plissai les yeux, les regardant en essayant de garder le plus de contenance possible. Non mais… ils étaient sérieux ? Ok, je devais donc SERIEUSEMENT me battre contre deux énergumènes obsédés par la natation synchronisé qui avait comme objectif dans la vie de prouver que les Hommes étaient tout à fait capables de pratiquer ce sport avec autant de charme et de classe qu’une femme.
          Ok.
          Soit.
          Certes.
          Pourquoi pas.
          Mais qu’est-ce qu’ils fichaient dans une organisation criminelle de cette envergure avec des gus comme les deux loustics dans la banque ? Ça n’avait absolument aucun sens. Comment pouvaient-ils expliquer aux gens leur rêve avec des lances flammes et des bombes dans une banque ? C’était de la connerie, non ? Bee afficha le même air contrarié comme moi. Contrarié de ne pas suivre les idées des Hommes devant nous. Ça n’avait ni queue ni tête, encore moins une quelconque forme de logique.

          « Et maintenant, nous allons t’éliminer pour te prouver que les hommes peuvent faire de la natation synchronisée ! »

          Celui aux cheveux longs fonça sur Bee et moi-même. Bee me posa à terre et réceptionna le blond dans sa grande main en métal. De cette main, il attrapa la tête de l’homme en l’enfonça dans le sol avec violence. Il ferma le poing de son autre main et termina son œuvre en y plongeant l’intégralité du corps qui passa à l’étage inférieur. La réaction de l’autre se traduisit par un hurlement strident, empli d’un désespoir nouveau :

          « NII-SAMAAAAAAAAAAAAAAAAAAA ! NAOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOON ! »

          Nous plongeant tous dans un Sitcom ridicule digne des feux de l’amour épisode 24954. Son jumeau s’effondra à genoux devant nous, les mains tendues vers le ciel en hurlant à plein poumon la perte de son frère envoyé à l’étage du dessous. Bee se tourna vers moi en m’interrogeant du regard, essayant de comprendre quoi faire. J’haussai les épaules en signe de réponse, ne comprenant pas non plus cette tragédie soudaine. Son frère n’était probablement pas mort, de toute façon.

          « VOUS ALLEZ ME LE PAYER ! »

          Euh… Ok.

          « Bee, arme ton canon. On abrège, ça commence à être vraiment chiant. »

          Le robot haussa les épaules et tendit son bras en direction du jumeau toujours présent qui le chargeait, les bras tendus au-dessus de sa tête en faisant des pas chassés souples et aériens. Bee tira, et l’homme se prit le coup de plein milieu, pourtant, il l’arrêta en emprisonnant la boule de canon entre ses bras, avant de nous la renvoyer en un mouvement gracieux.
          C’était le summum du ridicule.
          J’en avais plus que marre.
          A tous les coups, Alh se payait probablement un combat qui frôlait la classe à l’état pure contre un mec réellement dangereux et top cool de la vie pendant que je me farcissais des dégénérés du slip. Putain. Y’avait vraiment que moi pour me taper les pauvres cons de cette foutue terre. Le boulet de canon renvoyé fonçait vers moi. Je l’évitai de justesse, sautant sur le côté pour esquiver. Mais l’homme ne s’arrêta pas là et prit son élan, tournoyant sur lui-même en un grand écart parfait pour me porter un coup puissant et tourbillonnant. Bee s’interposa entre le gus et moi, ses avant-bras en avant pour stopper l’assaut. Il encaissa le sol mais fut bien surpris de devoir reculer devant une telle offensive.
          Le jumeau profita de sa surprise pour assener plusieurs séries de coup particulièrement élégant, déformant le métal qui recouvrait le bras de Bee. Le robot posa son autre bras à côté, cherchant à tâtons à quoi se raccrocher. Contre le bord, il attrapa un morceau de la barrière et l’envoya rencontrer la tête de son adversaire. L’homme vola quelques mètres plus loin, atterris sur ses jambes, tituba un instant et tomba dans le trou rejoindre son frère.

          « Non mais putain ! C’est vraiment du grand n’importe quoi ! »

          Bee acquiesça simplement.

          « Pas la peine de me suivre à l’intérieur, tu rentreras pas. Redescends et attends-nous en bas, d’accord ? »

          Pas franchement motivé, il accepta quand même et descendit en sautant du toit. Je fonçai vers la porte, descendant les escaliers quatre à quatre. Alh avait laissé les portes entrouvertes là où il était passé. Je ne m’engageai qu’à l’étage ou j’entendis du bruit, poussant l’entrée doucement en y passant la tête pour vérifier ce qu’il y avait et ou est-ce que je m’engageai. J’y découvris alors le combat sous mes yeux : Alheïri S. Fenyang contre un psychopathe chauve qui avait un lance-flamme. Alh’ était désarmé, à ma grande surprise. Qu’est-ce qui se passait ici ? Oh… Et la petite déclaration du chauve ne me plaisait pas des masses.

          « Yumen ?! »

          Ah, et merde.
          Ce grand con était aussi connu que ça, alors. Un mercenaire. Un putain de mercenaire qu’avait eu à faire à mon « paternel » et qui me connaissait, alors. C’était donc pour ça, ces sourires carnassiers.
          Pfffeuh.
          Genre. Même pas peur. Juste les nerfs pour le coup.
          Mais mon intervention attira son attention, il se tourna vers moi en activant le mécanisme de son lance-flamme. Je vis arrivé vers moi une gerbe de flamme, une chaleur ahurissante. Bordel de chien. Sautant sur le côté et plongeant à terre, j’évitai de justesse l’assaut de mon adversaire, qui par cette intervention, avait tourné le dos à Alheïri. Dans mon saut, j’atterris juste à côté de l’arme du colonel. Je m’en saisis et me trainai sur plusieurs mètres pour me planquer sous un bureau.
          J’osai croire qu’avoir détourné l’attention du vilain avait aidé Alh. Maintenant, je devais lui rendre son arme pour qu’ils puissent se battre sur un pied d’égalité.
          Passant la tête, je profitai d’un instant de répit pour foncer vers Alh’, son arme en main, j’arrivai à son niveau et lui filai son arme en un lancer adroit.

          « T’as fait tomber ça, mec ! »

          Héhé. Et botte-lui les fesses, fais-moi plaisir.
          • https://www.onepiece-requiem.net/t3945-fiche-technique-de-lilou#4
          • https://www.onepiece-requiem.net/t2202-
            • Mer…

            • IL EST TROOOP TOOOOT POUR LA REMERCIER ! DRAGOOON FIIIIRE !!!

            Spoiler:

            Un dragon de flammes. Un vrai. Non pas un dragon en chair et en os, mais un dragon quand même ! Lorsque mon adversaire cria le nom de son attaque haut et fort en ricanant machiavéliquement, une espèce de monstre flamboyant sortit de son lance-flamme. Sa taille était vraiment gigantesque et plus des flammes sortaient de son arme, plus son dragon prenait encore de l’ampleur. Bientôt, ce dernier pencha sa tête vers moi en m’regardant aussi méchamment que son maitre. C’est à ce moment précis que j’décochai une lame de vent conséquente vers le chauve qui fut déconcentré et qui fut obligé de sauter pour éviter mon attaque. L’initiative eut du bon puisque le dragon se désagrégea de lui-même avant que les flammes ne se dissipent lentement mais surement. Il semblerait que son attaque requière beaucoup de temps. Et c’était pas c’que j’allais lui offrir, ça, c’est sur et certain ! J’me mis tout d’même à froncer mes sourcils sous le rire maladif de l’énergumène qui se redressait doucement après avoir fait une série de roulades. J’ne savais pas ce qu’il me mijotait, mais le mieux pour moi était de changer d’arène. Entre les femmes qui étaient ligotées et entassés dans un coin, Lilou d’un autre et les bombes placées sur portes et fenêtres de ce vaste hall, ça promettait d’être dangereux et… explosif ! Le tout était à la fois de sauver la banque, son argent, et les gens qui y étaient toujours à l’intérieur. S’il s’avérait que j’venais à échouer, c’est tout le bâtiment qui allait partir en fumée. Et tel que j’voyais mon adversaire, celui-ci était capable de jouer au kamikaze…

            • Quoi ? Tu réfléchis à un plan d’attaque, hm ? C’est dommage. Parce que j’compte tous vous liquider avant de tracer ma route avec l’argent !

            L’homme était sûr de lui, beaucoup trop sûr de lui, même. Cette sureté m’inquiétait réellement. Sans compter le nombre ahurissant de questions qui se bousculaient dans ma petite tête. Avait-il vraiment prévu la défaite de son bras droit et notre arrivée jusqu’ici ? Pourquoi il y avait-il des femmes ligotées ? Qui était cet homme au regard glacial et fort déplaisant ? J’me mis à grogner tout en me mettant sur mes gardes. J’ne savais comment l’expliquer, mais ce gars avait l’art de m’intimider, de me mettre mal à l’aise. Et vu comme ça, c’était plutôt mal parti. Subitement, le chauve bondit et se mit à courir vers moi à vive allure. Il était rapide ! J’eus à peine le temps d’esquisser le moindre geste qu’il m’envoya une gerbe de flammes qui fondit rapidement vers moi. Encore une fois, j’eus été obligé à la dernière seconde d’engendrer une lame de vent qui stoppa l’avancée des flammèches, tout en faisant un bond en arrière. Et là encore, rire sonore de la part de mon ennemi. C’était à croire qu’il n’en finissait jamais ! J’soufflai un bon coup avant ressentir brusquement une forte douleur au niveau de mon bras gauche. Une brulure. Une saleté de brulure causé par son attaque précédente ! Le bougre m’avait eu ! Et ce n’était pas pour m’faire plaisir, j’vous jure. J’hésitai toujours autant à l’affronter. Les pleurs des quelques femmes présentes n’arrangeaient rien. Et mes lames de vent n’allaient pas toujours m’aider, d’autant plus qu’il était su de tous que le vent n’atténuait pas forcement la puissance dévastatrice du feu. Ça s’annonçait mal. Très mal.

            • Tiens ! Puisque tu es si hésitant à m’attaquer, on va faire un jeu ! Héhéhé !

            Sa nouvelle envie ne m’enchantait guère, d’autant plus que son petit rire sinistre pour clore sa phrase énigmatique ne me rassurait pas. Ce type avait l’chic de vous foutre les jetons, c’est pas croyable ! Et c’est bien la première fois que j’me sentais aussi… mou. J’me mis tout d’même à sourire pour faire genre. ; c’qui ne surprit point mon adversaire qui agrandit son propre sourire, au point qu’il devienne carnassier. Il finit alors par pointer le bout de son lance-flamme vers Lilou en personne ! Et cette fois là, j’n’eus tellement pas le temps d’être désagréablement surpris puisque j’fonçai vers lui sans trop réfléchir. Soudainement, mon ennemi changea de direction et produisit une quantité importante de feu vers moi. Il se mit même à rire aux éclats, mais ce rire s’estompa aussitôt lorsqu’il me vit disparaitre soudainement de son champ de vision. Il se retourna par reflexe, mais décrivit une mine apeurée quand il vit mon poing remonter rapidement vers son faciès. Le coup résonna fort, tant et si bien que son corps décolla du sol, avant d’aller créer un grand trou au plafond dans un fracas assourdissant. Quelques morceaux dudit plafond tombèrent au sol tandis que la poussière se fit effective dans les airs. J’repris peu à peu mon souffle avant de jeter un dernier coup d’œil furtif aux femmes que je trouvais moins effrayées qu’auparavant. Ma venue et celle de Lilou avait dû les réconforter un tant soi peu. J’aurai voulu les libérer, mais il me fallait tout d’abord régler le cas de l’autre malade qui devait sans doute reprendre conscience là haut… Encore du boulot en perspective…

            • S’il te plait Lilou… Dis-je tranquillement avant de me retourner vers la jeune femme, détache ces femmes et essaye de les regrouper dans un coin du hall… Il te faudra après désamorcer les bombes. D’entre nous d’eux, tu es certainement la mieux placée pour faire ce job. Pendant ce temps, je m’occupe de l’autre fou furieux… Arguais-je en prenant de l’élan. Ah, et encore une chose… Essaye de ne pas nous faire exploser.

            Petit sourire sincère vers la jeune femme, puis grand bond vers le trou béant que j’avais occasionné au plafond, en faisant valser le chauve par un uppercut bien exécuté. J’pouvais remercier les Dieux d’avoir remis la jeune femme sur ma route. Elle était notre seule espoir. L’autre, j’en faisais mon affaire. Il avait beau être un dangereux pyromane, il n’en demeurait pas moins faible, niveau combat rapproché. Avec un peu de chance, j’avais peut être brisé sa mâchoire. C’qui allait bien m’arranger quant à la suite de la bataille. Par mon bond périlleux, j’avais réussi à atterrir au premier étage avant de poser mon sabre sur mon épaule en regardant aux alentours. La poussière se dissipa peu à peu et bientôt, les environs devenaient plus clairs. J’comptais faire un pas en arrière, quand j’sentis vite fait une immense vague de chaleur venir derrière moi. Lorsque j’fis rapidement volte face, j’vis une sorte de gros serpent fait de flammes qui filait vers moi. Et c’est là que j’me rendis compte que je n’avais plus de temps pour l’esquiver correctement. Le serpent ouvrit sa grande gueule de sorte à me happer, mais j’eus la bonne idée de générer une énième lame d’air qui divisa l’attaque en deux vagues enflammées. Lesdites vagues prirent aussitôt des directions éloignées mais leur intensité désintégra les manches de ma chemise. On pouvait distinguer quelques taches noirâtres sur mes bras musclés. D’quoi gâcher mon charme. C’était peur être pas l’bon moment pour penser à ma plastique, mais j’n’étais pas non plus prêt à m’choper une importante brulure. Ça l’ferait sans doute pas et adieu la drague. Vivre sans sexe, moi ? Pas possible…

            • ENFOIRÉ !!!

            Oh ? L’homme commencerait-il à perdre son calme ? C’était bon pour moi. J’prenais l’ascendant psychologique et je n’en étais pas peu fier. J’le vis à quelques mètres de moi, armé d’une sorte de fouet. Il avait posé son lance-flamme dans un coin et ce dernier produisait quelques gerbes plutôt inquiétantes. J’y attardai mon regard pendant un bon moment, avant de me concentrer une nouvelle fois sur lui, lorsqu’il fit claquer son fouet. En serrant la manche de son nouveau joujou, l’gros méchant produisit de l’électricité statique. Ça promettait d’être vraiment électrique s’il venait à m’avoir. Mais il n’était dit qu’il allait réussir. Trop confiant sur le moment, j’me mis à courir très rapidement vers lui. Le gros méchant agita son fouet que j’évitai habilement, mais alors que je m’apprêtais à lui administrer une entaille à l’épaule après avoir réduit la distance qui nous séparait, il tira sur la manche et son objet de cuir vint fouetter à mon dos avec véhémence. Une flagellation comme on en faisait plus. Il m’avait laissé une marque sur le dos et j’en étais certain. J’allais malgré tout serrer mes dents et continuer à avancer vers lui, lorsque sa lanière s’enroula autour de moi comme un serpent avant de décharger une énergie de j’ne sais combien de volts. « AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAHHHHHHHH !!!! » Mon cri fit trembler tout le bâtiment. Ce fut horrible. Mais pour une seule personne, elle fut source de joie : Valklimer. Tout en étant victime de son attaque, je l’avais enfin reconnu. Dire que j’avais idolâtré ce salopard dans les compétions internationales de natation, fut un temps. Elle est bien belle la vie…

            • HAHAHA HAHAHAHAHAHAHAHAHA ! CONNARD ! VAS Y PRENDS ÇA !

            Valklimer agita son fouet et écrasa mon corps au sol, sans arrêter de m’électrocuter comme le logia de la foudre. Pour ma part, j’étais entrain de perdre connaissance, les yeux vitreux, la bouche béante et les cheveux dans tous les sens. Mon corps était couvert de spasmes abominables. Et la mort me guettait de très près. L’ex nageur me fit souffrir pendant une bonne minute avant de lâcher son fouet au sol. Le supplice prit fin, mais mon corps avait pris gros de son unique attaque qui eut du succès. L’homme en me voyant baver comme un malade mental, se mit à rire bêtement, avant de se diriger vers son sempiternel lance-flamme. Il comptait en finir en rééditant son attaque la plus destructrice. Sur le coup, j’étais pathétique. Allongé sur le sol comme un pitoyable ver de terre, je n’arrivais plus à bouger correctement. De ma bouche sortait un mélange de fumée et de salive aux commissures de mes lèvres. C’est sur, ce type, il m’avait eu comme un débutant. Alors que ma vue se floutait de plus en plus et que j’étais à deux doigts de perdre tomber dans les pommes, j’me ressassai des femmes en bas qui devait sans doute mourir d’inquiétude… Sans oublier la belle Lilou. Ce bâtard... S’il réussissait à me tuer, il n’aurait aucun mal à régler le cas des survivants du coin. Animé par une volonté de fer à protéger toutes ces femmes innocentes, j’recommençai à bouger doucement. Ça avait commencé par mes doigts, et ensuite mes mains, puis mes jambes… Jusqu’à ce que j’réussisse à me hisser tout doucement sur mes deux pieds. Pendant ce temps, l’homme avait réussi à finaliser son sale dragon de flammes. Et il était prêt à le projeter sur moi…

            • TU VAS CREVER FENYANG ! TOI, LA PETITE PESTE DE YUMEN ET CES FEMMES ALLEZ TOUS CREVER !!!

            • Si tu savais combien de fois on m’a déjà dit ça, lui fis-je comprendre, sourire presqu’aux lèvres.

            • VA AU DIABLE ! DRAGOOOOON FIIIIIRE !!!

            L’immense dragon enflammé fila vers moi façon missile. Et déjà, l’intensité de sa température qui se rapprochait de plus en plus consuma complètement ma chemise et une partie de mon pantalon. L’attaque détruisait tout sur son passage et j’eus la pensée selon laquelle, la banque aurait fort à faire pour tout retaper. A quelques secondes de la combustion certaine, je levai mon meitou que j’avais depuis au dessus de ma tête et ce avec les deux mains plaquées sur la garde. Plus le dragon approchait et plus des brulures apparaissaient sur ma peau. J’contractai mes muscles comme jamais, y misant toute mon énergie restante avant d’écarquiller grand mes yeux en tranchant le vide devant avec une force inouïe « MANGES TOI ÇA ! » Une gigantesque onde tranchante orangée se forma et partit entrer en collision avec le monstre enflammé. Si le feu avait un ascendant naturel sur le vent, il n’en demeurait pas moins que la puissance de mon attaque fut notable. Les deux entités naturelles firent un boucan incroyable et ce n’est qu’à partir d’une vingtaine de secondes après que j’compris que tout allait sauter à l’intérieur de cet étage. J’usai de mes dernières forces pour me jeter dans le trou que j’avais engendré en envoyant Valklimer ici. Et dès que je sautai, un énorme « BOOOOOOOUUUUM » se fit entendre depuis l’étage dans lequel je livrais précédemment bataille. Le souffle de l’explosion s’engouffra dans le hall et précipita ma chute, à un tel point que je m’encastrai dans le sol. J’perdis automatiquement connaissance, entre les fractures que je venais d’me faire et les volts que mon corps avait du supporter tant bien que mal. J’étais fini…

            Mais les quelques secondes qui suivirent marquèrent un tournant décisif : Le corps de Valklimer tomba près du mien, totalement carbonisé. Il avait été moins rapide que moi. Son propre pouvoir l’aura emporté dans les flammes de l’enfer… Et tout ça était de bon augure.
            Outch.
            C’était juste ! Et très chaud ! J’esquivai en bondissant sur le côté, tandis qu’Alh réagit en envoyant une lame d’air sur le dragon. Bon dieu de bois ! C’était un combat plein de rebondissement, extrêmement dangereux !... Pas comme celui que j’avais plus ou moins mené tantôt. Et comme déjà dit, Alh, au moins, se battait vraiment contre un mec hyper méchant et charismatique… J’en étais sûre : y’avait que moi pour attirer les gros timbrés. Encore que celui que le colonel affronté sur le moment avait quelques grosses cases en moins. Un pyromane assumé, un psychopathe en puissance. Normal, s’il était une connaissance de Yumen. Rien d’étonnant alors à ce qu’il se revendique « rebus de la société et fier de l’être ».
            Pourquoi fallait-il que je tombe toujours sur des gus comme ça ou même que je les attire ?
            Et pourquoi est-ce que le hasard, ou le destin, ou je ne sais quoi d’autre, s’acharnait sur moi ? Yumen n’avait sans doute jamais connu une personne acceptable, humainement parlant. A part moi, bien entendu, hinhinhin. Moi qui pensais que mon « père » adoptif n’était qu’une petite frappe sans véritable réputation, je découvrais qu’il avait réussi à se forger une petite renommée dans le milieu. Une renommée de gros violent, psychopathe, sadique, pervers et j’en passe, mais renommée quand même.
            Enfin bref, restait à savoir si Yumen m’avait parlé de ce gars qu’affrontait Alheïri actuellement, durant les cinq ans en sa compagnie. Sa tête ne me disait rien. Et son nom ? Valklimer ? Mh. Non, rien du tout, non plus. Mais ma mémoire me jouait des tours et était particulièrement sélective lorsqu’il s’agissait de souvenir. Ce Valklimer n’avait rien d’intéressant, rien à m’apprendre. Même s’il était assez malin, qu’il avait élaboré un véritable piège destructeur, il n’était pas ingénieur.
            Autrement, je m’en serais souvenue.

            Bref.
            Pour résumer, Alh se lança dans la bataille, tentant de repousser les attaques de son assaillant sans que personne ne soit blessé. Il était handicapé, parce qu’il veillait à protéger tout le monde, se limitant dans ses mouvements pour n’avoir que le bandit, se sacrifiant parfois pour éviter aux otages d’être tuer par les offensives flambante du Valklimer. Le colonel prit l’ascendant sur son ennemi et s’adressa à moi :

            « S’il te plait Lilou… Détache ces femmes et essaye de les regrouper dans un coin du hall… Il te faudra après désamorcer les bombes. D’entre nous d’eux, tu es certainement la mieux placée pour faire ce job. Pendant ce temps, je m’occupe de l’autre fou furieux… »

            Je m’apprêtai à lui répondre, un sourire qui se voulait rassurant pour l’encourager, lui dire qu’il pouvait avoir confiance en moi, que j’allai gérer le steak.

            « Ah, et encore une chose… Essaye de ne pas nous faire exploser. »

            Je fronçai un sourcil. C’était une bonne idée. Oui, ne pas tous nous faire exploser, j’y pensais plus tiens.
            Non mais, pour qui est-ce qu’il me prenait, ce goujat ? Merci d’avoir confiance en mes capacités, hein ! C’était trop aimable de ta part ! Oh et puis tu sais quoi, Alh ? Occupe-toi de tes affaires, moi j’ai une bombe à désamorcé, MOI !

            Un poil boudeuse, je le regardai s’enfuir vers l’étage supérieur pour retourner au combat. Je me tournai alors vers les otages et en libéra une, celle qui me semblait la plus calme dans la situation et m’adressai à elle d’une voix sereine et confiante :

            « Aidez-moi à libérer les autres otages, s’il vous plait. Je vous demanderai de ne pas essayer de quitter le bâtiment, au risque de nous faire tous sauter. »

            Elle hocha la tête et une fois libérer de ses liens, elle s’attela à détacher les autres. Contente d’avoir une alliée fiable dans mes rangs, je fonçai vers les bombes posées aux fenêtres et portes de l’établissement. C’était de simples charges de dynamites reliées entre elles par des fils, pour la détonation. Un fil principal menait vers une pièce adjacente, vers laquelle j’allai d’un pas serein. Pas question de perdre son calme dans cette situation.
            J’étais tendue, mais comme Alh l’avait finement souligné, notre sortie de cet enfer ne dépendait que de moi, de mon adresse, de mes connaissances. Visiblement, Valklimer avait fait en sorte qu’il n’y ai qu’un mécanisme principale pour déclencher la mise à feu de tous les dispositifs, histoire de ne pas rater son coup pour tout faire sauter. Dans son idée, raser la banque après l’avoir piller, c’était s’assurer une porte de sortie et surtout, effacer son existence. Pas de témoin, pas de trace, ils n’étaient plus personnes après ce coup du siècle.
            C’était habile, très malin. Il devait être très frustré de voir qu’un marine et une rouquine pouvaient chambouler ses plans en si peu de temps. Finalement, le lance flamme que je lui avais dérobé était pour venir en renfort de sa propre machine. Suivant toujours le long fil, j’arrivai dans la pièce pour me retrouver face à une malle fermée dans laquelle le lien allait se cachait. Je m’installai devant la caisse, l’ouvrant avec précaution pour me retrouver face à une boite noire. A nouveau, j’ouvris celle-ci pour être face à une petite charge de dynamite qui devait être allumé grâce à une mise à feu à distance.

            Analysons.
            Valklimer devait pouvoir être sûr de se tirer d’ici et de tout faire sauter après. Faire attention de ne pas se faire exploser avec la banque. Mais la mise à feu devait pouvoir s’effectuer au cas où quelqu’un essayerait de s’échapper. Avec le grabuge dehors, il avait une petite chance de pouvoir s’enfuir avec le magot sans se faire avoir. Mais une toute petite chance, parce que les marines encerclés la zone et ne l’auraient probablement pas laissé s’enfuir facilement. Il aurait été remarqué, son identité connu, il aurait été traqué jusqu’à la fin de ses jours.
            Alors, comment ?
            Il n’y avait qu’un chemin qui n’était pas endommagé, parce que trop enterré pour l’explosion, c’était les égouts. Et s’il passait en effet par là pour s’en tirer, le mécanisme de déclenchement devait se trouver à trente mètres à côté de la banque, pour être suffisamment loin lorsque ça sauterait. Astucieux. Très astucieux. Il devait alors y avoir un transmetteur en bas, qui devait provoquer l’allumage de celui-ci, à la condition qu’il se trouve à trente mètres de la banque, pour sa propre sécurité. Alors, si j’arrivai à désamorcé l’arme que j’avais sous les yeux, et s’il arrivait à s’en sortir (même si Alh allait sauvagement lui botter le cul), les bombes n’exploseraient pas, et il ne me resterait qu’à les débrancher une à une pour permettre aux otages de sortir. Il y avait aussi comme dernière solution de prendre le chemin que comptait emprunter Valklimer, au cas où il ne me serait pas possible d’arriver à bout du mécanisme que j’avais sous le nez, dans l’idée qu’il ne m’exploserait pas entre les mains si je venais à un peu trop le bidouiller.

            Bon, j’avais beau avoir l’air vachement calme et détendue, dans ma tête, il y avait comme un véritable volcan en irruption. Un truc horrible, je bouillonnai. J’étais angoissée. Pour résumer, j’avais entre mes mains une bombe qui pouvait péter sur un coup de tête si ça lui chantait. Et bordel, ça me faisait chier. Il n’y avait pas de mécanisme de sécurité, sûrement parce qu’ils avaient envisagé la possibilité de devoir la désamorcée s’ils n’arrivaient pas à sortir de la banque à temps. Voleur, oui. Mais pas suicidaire. Leur plan était pourtant très fin, ils avaient imaginé quasiment toutes les possibilités.
            J’allai sur le bureau adjacent et attrapai un crayon bien taillé. Revenant vers la bombe, je dévissai un petit cran pour permettre de détacher la bombe et son dispositif d’allumage de son socle et avoir plus de liberté de mouvement. Finalement, l’engin était assez simpliste. Il n’y avait pas de fil rouge ou de fil bleu à couper, seulement une mise à feu à distance, qui était habile. Il me fallait rompre le lien entre la dynamite et le déclencheur. Revenant sur mes pas, j’attrapai un petit coupe-papier et me réinstallai sur ma chaise. Ma respiration était sifflante, bruyante. J’étais stressée. Si je venais à faire une erreur sur mes déductions et si Valklimer avait été plus malin qu’il n’en avait l’air, je risquai la vie de tout le monde. Une goute de sueur perlant le long de ma joue, je me décidai à agir.
            Si Alh se décarcassait pour nous sauver, je devais en faire autant. Alors, d’un mouvement sec, je coupai le lien, fermant les yeux juste après, sans savoir…

            Si j’allai exploser, si ça allait marché. Il me fallait attendre. Attendre et découvrir. Le cœur battant à tout rompre, je m’arrêtai de respirer en priant le ciel. Et…

            Rien.

            Rouvrant les yeux, reprenant mon souffle, il n’y avait rien. La bombe était désamorcée. Me levant, courant vers les bombes aux portes, je débranchai une à une les autres, pour être sûre d’isoler les charges de dynamite. Puis, j’ouvris l'entrée en grand, sous les yeux ronds de tous les autres otages qui avaient retenus leurs souffles avec moi.
            Un sourire victorieux et fier, je lâchai :

            « Allez y, sortez ! »

            Les otages ne se firent pas prier. La première que j’avais libérée vint me voir :

            « Votre ami, le colonel. Il… »

            BOUM.

            « Sortez d’ici ! »

            Une explosion au-dessus. J’attrapai la femme par le bras et refermai derrière elle, pour être sûr qu’elle serait en sécurité. Je me tournai et vis une masse tomber du trou fait par Alh il y a quelques minutes. Je reconnus la silhouette massive du colonel. Sans réfléchir, je fonçai dessus, bondissant de derrière un bureau pour m’accroupir près de lui :

            « AHL ! CA VA ?! »

            Gnh ! J’étais folle d’inquiétude maintenant. Je n’avais rien entendu de leurs combats, j’étais tellement concentrée que je l’avais totalement oublié. Et il était là, ses vêtements brulés, ses avants bras aussi. Gnh ! Je l’attrapai dans mes bras et me blottis contre lui en sanglotant à moitié.
            Non, c’était beaucoup trop d’émotion pour moi, c’était trop ! Maintenant que je n’avais plus de raisons que ma vie soit en danger, comme celle des otages, c’était mes nerfs qui craquaient. L'adrénaline, la pression, retombaient progressivement. L'aventure avec la chèvre était amusante. Celle-ci avait sincèrement mis mes nerfs à l'épreuve. Bon dieu, j'avais risqué la vie de tout le monde avec mes bêtises... Je m'en mordais les doigts.

            « Je suis désolée de t’avoir mis autant en danger, je me rendais pas compte… désolée, désolée, désolée ! »

            Toujours contre lui, cherchant à lui enlever sa douleur en le serrant fort contre moi. Je m’en voulais terriblement. Difficile de réaliser l’ampleur d’une histoire lorsqu’on la vit. Après coup, c’était considérable.

            « Laisse-moi te conduire à un médecin ! dis-je en me redressant. »
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              Entaillé… Électrocuté… Brulé… J’peux dire que j’avais fait le tour aujourd’hui. Et c’était pas de bol ! D’ailleurs, les douleurs me firent tellement mal que je repris aussitôt connaissance. Pas totalement mais un peu quand même. Au point où j’eus l’ouïe de mon prénom… Sans plus. Quelqu’un dans ce bas monde se souciait de moi… Et c’était bon à savoir. J’voulus former un sourire, mais c’était peine perdu. Mon visage qui avait été presque écrabouillé dans la chute refusait de m’octroyer ce droit. Intérieurement, c’était le désarroi total. Parce que c’était bien la première fois que j’étais dans un état aussi moche, aussi lamentable depuis la mort de ma femme, il y a trois ans. Une larme coula le long de ma joue gauche pour aller s’écraser sur le sol sale et poussiéreux. Recouvrirais-je finalement ma beauté d’antan ? Ouais ouais. Même dans les pires moments, j’pensais un peu à ma plastique. Celle qui faisait un peu mon authenticité. Même si après moult années dans ce monde, j’savais que ça n’faisait pas tout. Même que j’eus même de la fierté à avoir employé ce si beau morceau pour sauver ces demoiselles en détresse. L’une de mes récompenses ne tarda point puisque l’une d’elles vint me prendre dans ses bras. A en juger par la voix floue que j’entendais et le peu de chose que je sentais, il s’agissait irrémédiablement d’une femme. Peut être était-ce Lilou avec un peu de chance. Avec un peu de chance ouais. Ma tête se nichait dans des nichons. Dommage que la paralysie m’ait gagné… Ça aurait été intéressant si j’avais été en plus meilleure forme…

              Puis il me semblait distinguer des couleurs. Plusieurs couleurs. Du blanc notamment. Ma sensibilité n’était presque plus et du coup, je ne su s’il s’agissait des rayons obliques du soleil ou de la lumière de la salle. Puis j’sentis qu’on me redressait, tant bien que mal, bien que ce fut peine perdue puisque je ne pouvais presque plus bouger le moindre pouce. J’étais tout simplement une larve, pour ainsi dire. Un truc amorphe qui n’servait plus à grand-chose sur le coup. Si quelqu’un voulait me tuer, c’était bel et bien le moment. J’ne titubais pas, je ne vacillais pas, mais je m’effondrais complètement sur celle qui tentait de me hisser, de sorte à ce que nous tombâmes au sol dans un bruit sourd. J’ne perdais pas beaucoup de sang, mais j’avais beaucoup de blessures internes. Ma chair le sentait, mon âme en souffrait. Serais-je encore une fois au bord du gouffre ? Presque six pieds sous terre ? J’ne savais pas… je ne savais plus. Et c’était peut être mieux ainsi. Finir ma carrière sur un sauvetage de haute envergure… Avec beaucoup d’efforts, mes lèvres finirent par m’obéir et s’étirèrent pour former un large sourire. Sourire ensanglanté, mais sourire quand même qui en disait long sur la fierté qui m’avait empli le cœur. J’étais en paix avec moi-même et c’était bon comme ça. Et c’est à ce moment là que mes paupières se fermaient lentement mais surement pour un long moment… Temps qui coïncida avec l’entrée des secours dans le hall de la banque où je m’étais évanoui dans les bras de Lilou…

              Quelques semaines plus tard…

              Dans la ville, l’on ne parla que de ça durant les semaines qui suivirent. L’affaire alimenta les petits ragots entre familles, dans les tavernes et même dans les rangs de la marine. Elle avait été médiatisée par les journalistes qui étaient présents lors du jour fatidique et par les femmes initialement prises en otages qui purent raconter leur petite mésaventure à leurs proches. Si j’étais déjà sur un piédestal, ici à Logue Town, tout comme à l’île de Shell, la renommée de Lilou en prit un sacré coup. Mais en bien surtout. Elle était devenue l’héroïne de la ville si bien qu’elle avait même éclipsé mon image de vaillant colonel pendant un très bon moment. De bon augure pour ce petit bout de femme. Pour ce qui était de la banque elle-même, elle avait reprit des couleurs et avait été rebâtie à la vitesse de la lumière. Mis à part les dégâts occasionnés par la prise d’otage et les différents combats qui eurent lieux dans la bâtisse, la société n’eut enregistré aucun autre problème, perte et autres… Au grand soulagement de la plupart des habitants de la région qui avaient leurs fonds placés en son sein. L’activité reprit de plus belle dans cette ville. Mais la sécurité fut renforcée par la marine en place et surtout par le colonel Chouchou, un okama comme on en voyait plus, qui faisait plutôt bien son travail. L’on ne badinait plus à ce sujet là. Même s’il s’agissait d’un robot, d’une civile et d’un colonel de la marine, les forces locales eurent fort à faire pour réparer leurs erreurs et regagner la confiance des populations…

              Je revins enfin à moi après deux grosses semaines de coma où j’avais été sur la pente raide d’après les toubibs qui m’avaient traité avec ardeur et professionnalisme. Ici comme à l’île de Shell, l’on fut heureux d’accueillir la nouvelle de mon réveil. Mon père avait même déployé tous les fonds nécessaires à la guérison. Comme si j’étais encore un gamin sans le sou. La nouvelle me fit très plaisir en tout cas. La semaine suivante, je pus enfin parler correctement, marcher et même descendre les escaliers tout seul, comme un grand. Ma rééducation était très rapide car parait-il, les Fenyang avait une grande capacité de régénération. Les médecins en furent complètement bluffés. Une semaine plus tard, soit un mois après l’attentat, j’avais entièrement récupéré à la surprise générale. Mon visage ne portait plus quelques cicatrices, mais c’était tout bon. Je n’avais plus aucune fracture. Mais le revers de ces régénérations à peine croyables comme toutes les choses qui peuplaient ce monde, était le raccourcissement de mon espérance de vie. L’on ne me donnait pas plus 80 ans, encore fallait-il que j’arrive à cet âge vu mon métier hyper dangereux. J’souriais à l’entente de cette nouvelle en me disant qu’il me restait globalement 40 ans pour encore changer la face de ce monde. Étendre ma justice était ce qui m’importait le plus. Changer la mentalité de la marine était ce qui m’importait le plus également. 40 ans, c’était à la fois long et court. Il me fallait donc me hisser au sommet de la hiérarchie de ma faction le plus vite possible ! Le désir de devenir amiral devenait de plus en plus croissant…

              Lors de ma sortie, je m’étais attelé à prendre des nouvelles de Shell Town que je devais rejoindre très bientôt pour la bonne surveillance du Léviathan ; et à mon grand soulagement il n’eut rien d’autres que de petites attaques de forbans de pacotilles ; forbans que mes lieutenants purent mettre aux arrêts sans trop de problèmes. Pour ce qui était des affaires de Logue Town, l’on m’avait confirmé la mort de Valklimer. Il avait succombé à sa carbonisation et je n’essayai même pas d’imaginer l’image. Quelques hommes voulurent me montrer les photos de son autopsie, mais je refusai automatiquement. Mike Nampf et les jumeaux avaient survécu par contre. Ils étaient mêmes en partance pour Impel Down, et la nouvelle me fit bien marrer. Des soucis en moins pour cette région. Mes propres hommes avaient aussi nettoyé le trou de Valklimer des mercenaires que j’avais tabassé sans trop de problèmes. Un travail de fond sans aucune bavure de la part de la marine qui avait réussi à se racheter. Une fois toutes ces formalités passées, j’me mis à la recherche de Lilou. J’espérai véritablement qu’elle se trouvât encore ici dans les environs. Son précédent départ m’avait laissé un gout plutôt amer. J’n'en pinçais plus pour elle, mais il me fallait la remercier et m’excuser pour ce que je lui avais dis précédant toutes nos folles péripéties à la banque. Je remuai ciel et terre pour la retrouver, mais elle n’était trouvable nulle part. Et puis j’avais fini par abandonner à l’orée de la sixième semaine suivant la prise d’otage. Peut être était-elle partie vers d’autres aventures, encore…

              • C’est bizarre. L'une de mes serveuses l’avait vu trainer dans le coin…

              Pile à la sixième semaine, j’étais parti chez Tom. Histoire de papoter un peu. J’lui devais également une fière chandelle. Mes hommes l’avaient aidé à retaper son bar qui était devenu plus somptueux que jamais. On était loin des tavernes miteuses qui se situaient en plein cœur de lieux peu fréquentables. J’sirotais tranquillement une bière en pensant à la jeune femme et à Bee. Avait-elle reçu les honneurs qui lui étaient dus et l’affection du peuple qui contait un peu ses aventures ? Nul ne put me répondre correctement, comme il le faut. La marine avait été trop occupée à rétablir l’ordre me disait-on. La banque avait également été occupée à reconstruire ses locaux qu’on m’avait dit. C’qui provoqua en moi une certaine colère, au point même que je fus à deux doigts de lever la main sur le directeur de la banque qui se confondit en excuses d’un ton presque larmoyant. J’finis par lâcher l’affaire tout en me disant qu’elle était définitivement partie. Jusqu’à organiser mon départ pour ma propre île dans les jours à venir. « C’est peut être mieux pour elle qu’elle soit partie… » Qu’avais-je fini par dire en souriant et regardant le fond de mon verre que Tom resservit de pur saké. Une fois qu’il fut plein, j’trinquai au nom de Lilou et de Bee et j’me mis à boire mon verre d’une seule traite. Pour finir, j’avais trente minutes plus tard les joues un peu rosies et un sourire béat aux lèvres. J’étais un peu éméché et c’était l’cas de le dire. Et même que je me mis à tripatouiller le derrière bien rebondie d’une des serveuses qui se mit à rougir violemment. Jusqu’à ce que la clochette de la porte du bar, sonna…


            Dernière édition par Alheïri S. Fenyang le Lun 9 Avr 2012 - 17:09, édité 1 fois
              Je m’étais blottie contre lui, avec l’espoir de le voir se réveiller. Alh se laissait mener, inerte, inconscient, embrouillé, incapable de quoique ce soit. Les larmes aux yeux et de plus en plus inquiète de son sort, j’en étais venue à prier pour qu’il revienne à la vie, à le mettre sur mes épaules pour le conduire dehors. Mais son poids couplé à ma force physique ne donna rien de bon. Je m’effondrai purement et simplement à terre, sous cette masse de muscles, manquant de m’étouffer sans pouvoir me relever. L’on vint très rapidement, franchissant les portes en les défonçant, accourant vers nous pour nous aider. Les hommes attrapèrent le colonel pour l’écarter de là où il était, les médecins arrivèrent en renfort pour le stabiliser. L’on sortit les compresses, les bandages, les aiguilles pour la morphine en hurlant à tout va des délires médicaux qui n’avaient aucun sens pour moi. L’on voulut m’aider aussi, mais je me libérai de l’étreinte de l’un des toubibs qui souhaitait m’examiner, parce que c’était la procédure.
              J’avais autre chose à foutre, lui-même avait du pain sur la planche. Ma vie n’était pas en danger, contrairement à celle du Colonel Fenyang qui n’était plus aussi vaillant qu’avant. Ce fut au tour du service de déminage de se joindre à la foule qui s’agitait au tour, ils s’avancèrent vers moi en me demandant un topo exact de la situation, ayant été orienté vers moi grâce à la jeune femme que j’avais libérée. Le temps de retrouver mes esprits, de me remettre de mes émotions, de leurs expliquer ce que j’avais fait, ce que j’avais suspecté, ce qui était réellement encore dangereux ici, la banque fut au bout de trois longues heures complètement vidée des explosifs qu’elle contenait.

              Lorsque je sortis de la banque, il y avait des moustiques partout, qui s’agitaient, courraient dans tous les sens, tournant autour de Bee qui trônait toujours au milieu en espérant apercevoir l’un de ses deux compagnons d’aventures. Alh, ou moi. Il vit Alh sur son brancard, me vit moi peu après. Il se rua dans ma direction, poussant d’un geste de main tous ceux qui se trouvaient sur son passage, sans ménagement, sans chercher à comprendre plus loin.

              « On s’en va d’ici. »

              Il hocha la tête, se transforma en Canard et décolla sans rien dire d’autre.



              Les sorties à Logue Town furent particulièrement compliquées dans les semaines qui suivirent. Journalistes, Marines, Civils en tout genre cherchèrent à nous approcher, Bee et moi-même, avec l’optique de nous questionner sur les évènements de la banque, nous remercier pour notre aide, ou simplement garder un souvenir impérissable de notre présence sur l’île. J’avais le triomphe modeste. Ce n’était pas mon genre de me pavaner dans les rues pour attirer l’attention des autres, j’espérai au moins que la nouvelle arriverait aux oreilles d’Harry et Jerronimo, pour qu’ils sachent que j’allai bien et que je faisais des choses plus ou moins bien.

              Les deux premières semaines après l’attentat furent rythmées donc entre fuite des rues pour semer ceux qui me cherchaient et nuit en compagnie du colonel comateux. J’avais passé la totalité de mes soirées au chevet de mon ami, sans qu’il n’en sache rien et sans que personne ne me remarque. Bee me déposait à sa fenêtre et repartait en ma compagnie lorsque le soleil commençait à pointer le bout de son nez et que les passages dans les couloirs se faisaient plus fréquents. Lorsque j’arrivai plus tôt et que les visites n’étaient toujours pas fini, j’attendais au coin de son balcon, à l’abri des regards, mais aux aguets, à l’écoute des conversations.
              Infirmières, proches, amis, Tom… Tous y passèrent, même le père d’Alh qui fit une brève apparition avant de repartir quelques heures après en exigeant que son fils reçoive les soins qui lui étaient dûs. Le Colonel était un homme chanceux, que j’enviai bien malgré moi. Il avait une famille et des amis qui auraient tout fait pour lui, quitte à se saigner aux quatre veines pour le satisfaire. J’avais la fierté d’être de ces gens-là, car malgré les mots houleux que nous nous étions adressés avant l’incident, il n’avait pas hésité à mettre la main dans la merde et m’avait accordée sa confiance.
              Et sa confiance était un bien précieux.

              Il sortit du coma. Je ne vins pas le voir, non sans regrets, pour la bonne et simple raison que je n’avais pas envie de le voir diminué, surtout parce que je me sentais responsable de son état actuel. Mais les nouvelles allaient vites, et lorsqu’il s’en alla de l’hôpital, complètement remis de son combat contre Valklimer, prêt à reprendre du service, j’en fus réellement soulagée. Fenyang était un homme qui guérissait vite, notai-je comme pour moi-même. Encore quelque chose de très différent chez nous.
              Lorsque la nouvelle de son rétablissement fut confirmée par les journaux locaux, je pris la décision d’aller le voir avant de partir, pour pouvoir lui dire au revoir. J’avais reporté mon départ d’un mois presque pour pouvoir féliciter son courage et son dévouement, mais suite à cela, impossible de remettre la main dessus. L’homme était occupé de toute part, je m’adressai même à sa lieutenante qui refusa catégoriquement de me dire ou est-ce qu’il se trouvait, par jalousie, pour veiller sur lui, pour être sûr que je ne lui attire pas d’autres ennuis. Elle me culpabilisa un peu, mais je m’en remis rapidement, gardant en tête l’idée de le revoir.
              J’eus envie d’aller voir Tom, mais voulais aussi me faire discrète. Je trainai tous les jours pendant plus de deux semaines près de son nouveau bar, remis à neuf et mieux encore que ce qu’il était avant sa quasi-destruction, pour espérer croiser le nouveau Capitaine du Leviathan. Attendre, discuter par moment avec les serveuses en pause pour avoir quelques bribes d’informations. On ne l’avait pas vu depuis plus d’un mois et demi dans le coin, mais Alh était un homme sympathique qui venait toujours saluer ses compagnons, il ferait sans apparition dans le coin sous peu. Je repartis à mes occupations, passant rapidement de temps à autres avec l’espoir de le croiser.
              Mais Rien.

              Jusqu’à aujourd’hui.

              En plein milieu de l’après-midi, j’avais laissé Bee à notre chambre d’hôtel en faisant l’allé jusqu’au bar de Tom. Je poussai la lourde porte en bois et verre. La clochette teinta à mon entrée, je pénétrai dans la pièce en regardant autour de moi pour apercevoir la tête du Colonel. Les glapissements gênés d’une des serveuses attirèrent mon attention immédiatement, la présence derrière elle d’un grand brun musclé qui lui tripotait les miches me fit sourire. Enfin, le voilà.
              Tom leva le regard vers moi et eut un regard malicieux, il ne dit rien à Alh au sujet de mon arrivée. Ce pourquoi je me glissai derrière lui pour arriver à son niveau et lui attraper la joue entre deux doigts. Sous le pincement et sous la surprise probablement, la serveuse eut le temps de s’extirper des pattes du pervers et s’enfuit à toutes jambes vers les cuisines. Moi, je lâchai d’une voix mielleuse :

              « T’es infernal, à peine remis et déjà en train de faire des bêtises. »

              L’odeur de saké qui s’échappait de sa bouche et ses yeux vitreux me dirent qu’il devait être complètement pompette. Hinhinhin, comme dirait l’autre.

              « J’ai bien galéré pour te retrouver, p’tite tête ! Malgré ta célébrité, tu te fonds plutôt bien dans la masse. Même ta lieutenante a refusé de me dire ou tu étais. T’es pire qu’une star dis-donc ! »

              Je lâchai sa joue et me glissai sur le tabouret juste à côté de lui. Faisant un signe à Tom, je lui commandai un diabolo fraise ainsi qu’un récipient d’eau pour rafraichir les idées du colonel si elles venaient à ne plus être très claires. Que dire d’autre ? J’étais un peu gênée, déjà d’avoué l’avoir cherché partout. Heureusement qu’il n’était pas au courant pour mes veillées nocturnes près de lui, sinon, ça serait la honte assuré et un mauvais coup dans mon égo surdimensionné.

              « Tu as du temps à m’accorder ? On a sûrement des tas de choses à se dire… »

              Principalement, sur la discussion houleuse de la dernière fois. Ensuite, sur tout le reste. Qu’il était sur le départ lui aussi, comme moi, comme toujours. Qu’on ne se verrait pas encore pendant un petit bout de temps. Sur ce que Valklimer avait éventuellement pu lui dire sur Yumen ?

              « Enfin… Si t’es assez frais pour suivre une conversation… »

              Je dis cela en voyant Tom ramener son bocal plein d’eau et le poser devant Alh’. Il me posa ma boisson et reparti s’occuper d’un client.

              « Merci, murmurai-je à mi-voix. Pour ce que tu as fait. »
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                Personnellement, j’m’en foutais un peu de la personne qui était rentré dans le bar. Sans aucun doute un client comme tous les autres déjà présents. J’étais entrain d’agrandir mon sourire en continuant de tripatouiller la jeune serveuse près de moi, lorsque des doigts sortis de nulle part, virent me pincer la joue. Sous l’effet de la surprise et d’un petit rôt, j’lâchai ma pauvre proie du jour avant d’entendre une voix. Suave et complètement captivante. Autant dire que j’fus pris d’un petit spasme, complètement conquis. Un peu groggy, mais véritablement conquis. Ne l’ayant pas discerné sur le champ, j’me mis à m’imaginer des trucs pervers en une deux secondes, mais lorsque la voix prit parole pour la deuxième fois, tous mes fantasmes ardemment nourris se brisèrent d’un seul coup. Vu sous cet angle, on aurait pu vite conclure que j’serais entrain de tirer la tronche, complètement déçu, mais non. J’étais content. Puisque j’l’avais reconnu malgré mon état. Même si m’aura fallu quelques secondes de plus pour, c’qui n’était pas si glorieux de ma part. Mon sourire redevint sain, beau, tranquille. J’me rendis compte d’ailleurs, qu’on était revenu à la case départ. Et là, les souvenirs du jour où j’l’avais embarqué avec moi sur mon épaule m’revenaient rapidement. C’est même d’une oreille attentive que j’écoutais la véritable petite pipelette qu’elle était. Je vis Tom revenir avec les commandes de la jeune Lilou alors que je regardais toujours le fond de mon verre de saké. Ça faisait vraiment bizarre de la voir là, avec moi. Mais rudement plaisir en même temps.

                • T’as pas à me remercier… J’suppose que c’est mon boulot. C’est plutôt à moi de te dire merci. De nous deux, t’es la plus grande star et cette ville te doit beaucoup.

                Sans la regarder, j’pris le récipient d’eau que j’observai d’un air bizarre. Boire ça ? Avec tout l’alcool que j’ai ingurgité ? Pas possible. Contre toute attente donc, j’me mis à renverser l’eau sur ma tête de sorte à mieux reprendre mes esprits. Et j’devais avouer que ça m’faisait un bien fou. Tom voulut rouspéter, mais la mine soulagée que j’arborai le fit marrer. Il aurait dû s’en douter en même temps. L’eau dégoulinait lentement sur mes cheveux et mon visage. Mes yeux devenaient plus clairs. Et c’était tout bon. J’posai le récipient d’eau à moitié vide devant moi avant que le barman ne me jette une sorte de petite serviette propre. J’la posai également cette dernière sur mes cheveux et regardait à présent mon verre de saké. Après la joie, venait la gêne. J’commençais effectivement à devenir un peu honteux là. De l’avoir traité de voleuse. Maintenant que tout était on ne peut plus clair dans ma caboche, j’me rappelais de toute la scène. J’eus même à rougir, mais heureusement encore que la serviette cachait un peu mes joues. Et puis, c’est d’une voix légèrement timide que je repris parole : « Désolé… Pour l’autre fois… Tu sais… Quand je me suis emporté à propos de la pièce… » La pièce. Le fameux lance-flamme. Si jamais Valklimer l’avait eu en sa possession, sans doute que nous serions mort à l’heure qu’il est. Et rien qu’à repenser à ses attaques tout d’même dévastatrices, ça m’faisait un peu froid dans le dos. Pour c’qui était d’ailleurs « des choses à se dire, » j’avais même saisi le sous-entendu. Sûr qu’on avait des choses à se dire.

                • C’est pas facile d’être marine tu sais. On est constamment tiraillé par des choix difficiles. Suivre les convictions de notre faction ? Ou bien se fier à notre propre jugement ? Parfois j’envie Tom… Me caser dans un coin sans plus m’occuper des affaires des autres…

                J’eus un regard mélancolique. L’amertume me gagnait vu ma bourde précédente, il y a de cela un mois, sur ces mêmes lieux. Ce jour là, c’était surtout le marine qui avait parlé. Qui s’était emporté. Qui avait été à la limite de gueuler. Et qui avait voulu sortir avant d’être assommé par un salopard. Non pas le Salem qu’on connaissait. Le type qu’on disait laxiste et complaisant. L’type qui plaisait bien aux gens. L’type qui aurait pu faire confiance à Lilou même si elle devait devenir pirate un jour. Je levai enfin ma tête vers elle avant de plonger mes prunelles d’un vert étincelant sur son minois. Et je puis vous dire que c’est sa beauté qui m’refit sourire. Sourire sobre, mais sourire tout d’même. Avant que j’ne reprenne un autre verre de saké cul sec ! J’m’essuyai les lèvres du revers de la main droite et lui offrit un sourire plus épanoui cette fois. L’alcool réchauffait mon cœur, me rendant moins pusillanime. D’bon augure. J’fis signe à Tom de m’apporter une bouteille de saké, c’qu’il fit, non sans un regard plus ou moins sceptique. J’m’arrangeai à décapsuler mon nouveau bien, tout sourire. L’alcool et moi ? Une véritable histoire d’amour. « J’me doute aussi que tu viens m’demander des trucs à propos de l’autre mort… » C’était clair comme de l’eau de roche, hein. Lilou ne m’a pas attendu un long mois pour m’dire simplement merci, c’qu’elle aurait pu faire lors de ma convalescence. En tout cas, c’est c’que je pensais et à mes yeux, cette hypothèse était cohérente et se tenait. J’laissais donc un petit moment passer, puis je continuai…

                • Il ne m’a rien dit en fin de compte. On a passé notre temps à se taper dessus. Ça devait être une coïncidence, un peu comme l’idiot que j’ai enfermé à Shell Town. Mais j’pense bien qu’il a du te reconnaitre lorsqu’il t’avait prise en otage.

                J’étais sincèrement navré de ne pas avoir plus d’infos, mais bon, la situation n’avait pas vraiment été adéquate pour poser des questions. Il était bien trop émerveillé par le fric qu’il allait se faire pour rester tranquille et nous regarder comme un gentil garçon. J’me mis à boire au goulot en m’posant certaines questions sur ce Yumen. De ce que j’avais compris, c’était l’paternel de Lilou. Et à voir ses « potes » c’était certainement pas un gars commode ; c’qui m’confortait dans l’idée que la brune était une merveilleuse personne puisqu’elle aurait pu finir comme son vieux. Lorsque je finis de prendre une lampée d’mon breuvage frais, j’voulus la questionner, mais j’refoulai bien vite cette idée dans ma petite caboche. Il n’était pas question de lui ressasser de mauvais souvenirs, ni de la rendre triste. C’est dans cette optique des choses que je me rappelais que j’avais toujours cette enveloppe sur moi, à l’intérieur d’une poche. Je la prenais souvent sur moi en espérant le remettre à Lilou quand je la croiserais, mais ces derniers jours, ça avait plus été des reflexes qu’autre chose quand je la fourrais dans ma poche, n’croyant tellement plus à cette rencontre. Lorsque je la sortis, elle était toute froissée, mais toujours pleine de berrys. « Voilà pour toi. Trois millions de berrys. C’est pas grand-chose comparé à ce que tu as fait pour la ville, mais ça te permettra d’acheter c’que tu veux pendant un bon moment. Ou pourquoi pas de mettre en place un petit commerce, tiens ! » J’lui tendis l’enveloppe avec un clin d’œil malicieux, avant de me remettre à boire. Et la façon dont j’m’envoyais la bouteille était plutôt inquiétante.

                • Pis… J’dois reconnaitre que tu t’es bonifiée avec le temps. Ta poitrine a prit plus de… De…

                Et c’est reparti. Le saké avait encore fait son effet, si bien que j’avais les joues complètement rouges. Mon sourire perdit de sa superbe. Il était devenu vicieux, voire même pervers. Puis j’me rapprochai de Lilou en passant mon bras gauche sur ses épaules, la serrant tout contre moi. La pauvre devait être entrain de subir ma forte odeur. P’être pas écœurante, mais sans aucun doute désagréable. C’était dès lors définitif : J’étais presqu’en état d’ébriété, pour ne pas dire à deux doigts même. Encore une bonne gorgée et c’était la catastrophe. J’voulus porter la bouteille à ma bouche tout en tenant Lilou, mais elle glissa malencontreusement de ma main et tomba au sol avant de voler en éclats. Les quelques serveuses plantureuses du bar sursautèrent, et Tom eut même une mine dépitée en constatant mon état désespérant. Mais tout ça, c’était vraiment plus mon problème, pour ne pas dire que j’ignorai royalement leurs réactions. J’me retournai alors vers la propriétaire de Bee, passant ma main gauche de ses épaules à la raie de ses fesses. « Y’a pas à dire Lilou, t’as pris… DES FORMES ! » Le haussement de ma voix interpela les autres clients qui se mirent à nous regarder avec curiosité, pendant que j’enroulai la fine taille de ma nouvelle proie de sorte à ce qu’elle ne s’échappe point, l’étreignant contre moi. Nous n’avions jamais été aussi proches depuis l’incident de Shell Town. J’approchai mon visage du sien dans l’espoir de pouvoir l’embrasser, mais j’me stoppai net à un centimètre de ses lèvres, avant de m’écrouler d’un seul coup sur le comptoir…

                Plus ivre que jamais.
                « N’exagérons rien. Tu t’es occupé des plus dangereux, j’ai fait ce que j’avais à faire pour te filer un coup de main. »

                J’étais modeste. Peut-être trop. Mais Alh méritait amplement tous les lauriers. Et de toute façon, moins ce que je faisais s’ébruitait, moins j’aurais de chance de recroiser la route de mon « père ». Il s’était vidé l’eau sur la tête, conscient qu’il n’était pas assez frais pour tenir une conversation avec quelqu’un. Puis, il s’excusa auprès de moi, pour la dernière fois, notre pseudo-dispute, notre désaccord. Le regardant fixement, je voulus le rassurer mais il enchaina pour m’expliquer les causes de sa colère :

                « T’en fais pas. Je comprends très bien ce que tu veux dire : On a tous les deux des obligations et des points de vus divergeant sur plusieurs choses. Désolée aussi… Ça ne devrait pas nous empêcher de bien nous entendre. Je ne t’en veux pas pour ça, tu faisais ton job. Et j’avais vraiment fait une bêtise : voler, c’est mal. Je sais. Je tacherai de ne plus le refaire, ou tout du moins de ne plus me faire prendre. Héhé. »

                Un petit peu d’humour ne faisait de mal à personne. Il se remit à boire et reprit la conversation sur le Valklimer et les autres gus emprisonnés. Il n’avait pas grand-chose à m’apprendre, parce qu’ils n’avaient que se battre ensemble, et les autres gars ne me connaissaient pas à la base. Finalement, il n’y avait que le mort qui aurait pu m’apprendre quelque chose sur Yumen et compagnie, et il se trouvait que maintenant qu’il était mort, ce n’était plus possible.

                « Mh. Je ne sais toujours pas qui c’est. J’ai probablement dû le croiser une fois ou deux, mais sa tête ne me revient pas du tout. Pourtant, une gueule comme la sienne ne s’oublie pas… »

                A peine eu-je le temps de terminer cela qu’Alh sortit de sa poche une enveloppe plutôt pleine et me la tendit en m’expliquant qu’elle contenait trois millions de berries, pour me remercier de ce que j’avais fait et aussi pour me permettre d’acheter ce que je voulais pour quelques temps. Je regardai l’enveloppe et Alh comme s’il se moquait de moi et qu’il cherchait à me faire marcher. Il me fourra le machin dans les mains avec un sourire bienveillant :

                « Tro… Trois millions ?! Attends, t’es sérieux ?! »

                Je ne réalisai pas. Cette charité soudaine, cette sympathie… Alh était un garçon génial. Ouvrir un commerce ? Pourquoi pas. Enfin, je serais à vadrouiller partout et je ne pourrais pas le gérer, mais c’était une bonne idée pour mes vieux jours…

                « Je… Je euh… »

                J’étais prête à le remercier, à lui bondir dessus et à l’embrasser sauvagement, à lui faire l’amour sur le plancher du bar s’il le fallait tant j’étais contente (même si toujours sous le choc de son généreux don). Mais la phrase qui suivit me refroidit immédiatement parce qu’il se mit à parler de ma poitrine, tâtonnant, encore plus ivre que tout à l’heure en fixant mon petit bonnet, les joues rougies par l’alcool…

                « Hein ? »

                Et puis, voilà que le colonel m’attrapa par les épaules pour me rapprocher de lui, me soufflant son haleine dans les narines avec un sourire vicieux qui ne m’inspirait pas confiance du tout. J’avais libéré tantôt une des serveuses des griffes de ce monstre pervers, me voilà prise dans ses filets en essayant de comprendre ce qui ne tournait pas rond chez ce mec. Y’avait pas à dire, c’était un sacré obsédé. L’alcool faisait péter ses limites et la bienséance qu’on lui avait inculqué étant jeune, le vrai Alh’ se dévoilait brutalement comme un assoiffé de chair. Et là, le comble : sa main descendit dans mon dos pour aller jusqu’à mon popotin, sans gêne, sans se douter de quoique ce soit. Une veine à ma tempe se mit à battre plus forte que les autres, signe d’un agacement soudain.
                En fait, il me donnait de l’argent et avait la ferme attention de profiter de moi juste après ? Non mais quel goujat celui-là ! J’étais prête à lui coller une mornifle digne de ce nom, à lui arracher quelques dents à coup de poings, à lui refaire le portrait de sorte qu’il ne puisse plus jamais profiter des demoiselles innocentes… Il se rapprochait de moi sans me laisser l’opportunité de m’échapper, tel un traqueur qui avait trouvé sa proie, prêt à m’embrasser comme la dernière fois, avec moins de préparation, de spontanéité et beaucoup plus d’alcool… Mais alors, il s’effondra net sur le comptoir, ivre mort, comateux, un sourire d’imbécile heureux sur ses lèvres. Tom poussa un long soupir tandis que je me défaisais doucement de sa prise pour ne pas le réveiller. Me tournant vers le barman, je lui adressai la parole :

                « Tu aurais un chariot ? Je vais le ramener chez lui. »

                Tom hocha la tête et parti vers l’arrière-boutique pour revenir quelques minutes après avec le dit-chariot. Il m’aida à poser le corps du colonel dessus. Je pris l’initiative de le couvrir d’une nappe pour lui épargner une exhibition en public. Le Barman m’aida à le sortir de sa boutique et me salua.
                Moi, je pris la direction des quartiers d’Alh, ou j’aurais l’occasion d’aller le refoutre dans son lit, endroit qu’il n’aurait jamais dû quitter pour aller picoler.



                « J’ai un cadeau pour le colonel Fenyang. Puis-je avoir accès à sa chambre ? »

                Je tapotai le chariot derrière moi avec un sourire, regardant les deux marines devant moi qui me reconnurent et acceptèrent de me guider jusqu’à l’endroit que je voulais. Durant le trajet, m’aidant à gravir les marches avec le chariot et le colonel qui pesait son poids, ils me causèrent de nos exploits à la banque de Logue Town, me félicitant au passage de l’adresse dont j’avais fait preuve pour désamorcer les bombes, ajoutant qu’une ingénieure de ma trempe serait probablement la bienvenue dans les rangs de la marine.
                Nous arrivâmes rapidement devant la porte, ils m’y laissèrent en me prévenant que sa lieutenante devait s’y trouver aussi pour rattraper le retard dans l’administratif. Je les remerciai, tapant à la porte après qu’ils aient disparu à une jonction. Une voix chaude retentit derrière, signifiant qu’elle arrivait. Lorsqu’elle ouvrit, la jeune femme avait les yeux papillonnant et la bouche en cœur mais perdit rapidement son sourire en me voyant dans le cadre de la porte.

                « Que faites-vous là ? »

                Un accueil chaleureux comme on les aimait.

                « Mh, je ramène le colonel. »

                Elle fronça un sourcil et se moqua de moi, jusqu’à ce que j’enlève la nappe qui recouvrait Alh complètement bourré qui dormait encore, une grosse bulle au nez. Elle se précipita sur lui pour le réveiller mais je l’en empêchai d’un signe de main :

                « Mieux vaut le laisser se reposer. Il a pris une sacrée cuite. Sa chambre ? »

                Elle m’indiqua la porte du fond, voulant me prendre le chariot des mains pour le conduire elle-même jusqu’à son lit. Je l’arrêtai à nouveau d’un regard froid :

                « Lâchez-lui la grappe, pour une fois. Et ne vous inquiétez pas, je ne vais pas le violer. »

                La jeune femme fronça le nez et m’aida à passer le chariot dans la chambre, refermant derrière nous. Je l’entendis râler derrière la porte, pestant contre moi et me nommant par plusieurs noms d’oiseaux. Poussant toujours le caddie jusqu’au lit. C’est là que je remarquai le luxe de la salle, une bien belle chambre bien agencée et décorée avec gout. Lorsque j’effleurai les draps, je compris qu’ils étaient en soie, le lit à baldaquin. En fait, un endroit digne d’un colonel comme lui, semblait-il. Ça valait presque le coup de s’engager pour une pièce comme celle-ci.
                J’attrapai le colonel par le bras et tentai de le soulever à plusieurs reprises, sans succès. Je le tins alors par les bras pour le sortir du caddie et au moins le rapprocher du lit, ou, avec le plus de force possible, je le hissai et le tirai pour l’y installer. Essoufflée, épuisée par la manœuvre et alors qu’il n’était toujours pas bien installé dessus, je pris l’initiative de simplement le réveiller pour qu’il ne se couche lui-même. Me penchant au-dessus de lui, je lui pinçai le nez, les joues, lui fis des chatouilles, le griffai jusqu’à ce qu’il ouvre les yeux difficilement :

                « Aide-moi à te mettre au pieu, p’tite tête ! T’es vachement lourd dans ton genre ! »

                Marquant une pause et me tournant vers la pièce pour l’admirer un peu, je revins vers lui avec un sourire :

                « Je crois que ta lieutenante ne m’aime pas du tout ! Qu’est-ce que tu lui as raconté sur moi pour qu’elle ne me supporte pas ? Elle doit sacrément t’aimer pour être aussi jalouse d’une fille comme moi ! C’est pas comme si ça risquait grand-chose, haha ! »

                Je lâchai un petit rire complice. Le pauvre devait être complètement dans le cirage, mais ça me faisait marrer.
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                  Quelqu’un me tripotait. C’était clair dans mon esprit, malgré l’fait qu’il était encore embrumé par l’alcool. Et j’n’aimais pas ça. L’tripoteur tripoté. C’était pas cool ! Mais alors pas du tout. J’grognai pendant quelques secondes en essayant d’me débattre. Rien à faire. Mon corps n’voulait pas m’répondre tellement j’avais sommeil. J’aurai pu tout donner à la personne qui m’pinçait et qui m’griffait, mais pas de bol, elle n’arrêtait pas. J’avais l’impression d’avoir dormi quelques secondes seulement. D’ailleurs, où me trouvais-je et pourquoi étais-je dans cet état ? A l’énième grognement et à l’odorat d’mon haleine monstrueuse, j’n’essayai même plus de chercher trop loin : Semblerait que j’avais un peu trop poussé sur la bouteille et que quelqu’un tentait d’me réveiller. J’finis par gigoter un peu, fronçant mes sourcils. L’objet sur lequel j’étais, était dur. Très dur. On aurait dit du bois. Pis c’était étroit, aussi… Hohé ! Un cercueil ?! On voulait ma peau ?! Sans plus tarder, j’commençai à ouvrir difficilement les yeux, complètement paniqué, et le cœur battant à la chamade. Mais lorsque j’entendis la phrase comme quoi j’étais lourd, j’eus un sourire au coin des lèvres. C’était une femme. Sans doute une jolie femme avec qui j’avais passé la nuit. A cette perspective, mon sourire s’fit plus lubrique, avant que j’n’essaye de m’extirper du machin où j’étais couché. Battant plusieurs fois mes paupières, j’arrivais plus ou moins à rétablir ma vue. C’était un peu sombre, mais bon, j’n’allais pas m’plaindre. Lorsqu’en appuyant mes mains, j’réussis à redresser mon torse, j’vis devant moi et gros lit. Un lit douillet et moelleux qui n’attendait que moi…

                  • Ma lieutchenantche ? Quel lieutchena… BLUURP ! Tchè qui d’abord ?

                  Qu’avait-je dis, lorsque j’étais enfin sorti du chariot en rampant comme un lombric pathétique vers mon lit. Encore qu’arrivé vers ce dernier, j’eus beaucoup d’mal à l’escalader. Un bras ici… l’autre là… L’pied qu’essayait de passer par-dessus… La première chute. Lourde et sourde. Ma nuque en avait prit pour son grade, tant et si bien que j’me l’agrippais en gigotant sur le dallage froid, et en marmonnant des jurons complètement incompréhensibles. J’finis une minute plus tard par me calmer en soufflant. Mes yeux étaient rougis par l’alcool et larmoyants à cause de ma récente chute. Les larmes finirent par nettoyer mes yeux et rétablir ma vue alors que j’sentais ma bouche complètement pâteuse, moi qui n’aimait pas cette sensation. Et c’est là que j’reconnus la chambre qu’on m’avait prêté lors d’mon arrivée ici. Mon ancienne chambre en fait, vu que j’avais officié ici par le passé. M’enfin, c’n’était pas l’moment d’se remémorer du bon vieux temps, d’autant plus que ma tête m’faisait mal au fur et à mesure que les secondes s’égrenaient. Mini-gueule de bois et chute de tout à l’heure en étaient les causes. M’apprendra à abuser tant de l’alcool. Prenant donc mon courage à deux mains malgré la douleur lancinante qui m’fendait le crane, j’réussis à redresser doucement mon torse, avant d’agripper mon lit. D’un seul coup, j’lançai mon pied dessus, c’qui fut un premier succès. J’poussai ensuite mon corps lourd et engourdi en prenant appui sur mon deuxième pied encore au sol. J’me sentis malencontreusement glisser avec le couvre-lit, mais cette fois là, j’réussis à me hisser complètement sur le lit dans un dernier effort titanesque qui fit glisser mon pantalon jusqu’au bas d’mes fesses.

                  • I WIN ! YEEAAAAAH !

                  L’cri victorieux de la mort qui tue. J’avais réussi à monter sur l’lit, ok. J’avais réussi à reconnaitre l’coin où j’étais, ok. N’empêche que j’étais encore sous l’effet de l’alcool et que j’ne remarquai même pas que mon boxer rose bonbon était à découvert. Bave aux commissures des lèvres, j’caressai ma joue sur l’un des gros coussins, un peu comme pour marquer mon territoire. Avec un peu de foi même, j’réussis à me retourner sur le dos, sourire béat et yeux plissés. L’bonheur total. J’comptai jeter un dernier regard autour de moi avant de somber dans le sommeil, c’que j’fis, quand j’distinguai une silhouette tout près de moi. C’est dès lors que j’me rappelai vaguement de la voix qui m’avait adressé parole. « Shaïness-chwan ? » Évidemment, quand on est saoul, on n’est pas vraiment au top d’sa forme et on pas forcement l’esprit bien placé... Si vous voyez c’que j’veux dire. C’qui expliquait un peu pourquoi j’voyais tout d’un coup la femme qui m’avait fait flasher en lieu et place de la belle Lilou. Sortie de nulle part, une force surnaturelle naquit dans mon corps, avant que j’ne prolonge soudainement une main vers la jeune femme pour la tirer à moi. J’ne savais pas c’que j’avais agrippé (Peut être un de ses seins, va savoir) mais toujours est-il que j’l’avais eu et qu’elle était dorénavant sur moi. Sa chute avait été plutôt véhémente mon, corps, mais j’m’en contrefichais un peu. C’était ça, la force de l’amour ! Et c’était sans doute cette passion foudroyante pour Shaï qui m’avait permis de pouvoir l’amener à moi sans problèmes. Et sans perdre de temps donc, j’inversai les positions. Elle en dessous et moi en dessous. Comme un vrai mâle qui s’respectait !

                  • Shaïness-chwan ! Z’te l’ai jamais avouééééééé, mais ze t’aimeuuh ! C’est pas à cause de ton gros cul, nan nan ! Ni même à cause de tes gros nichons… BLEUUURP !! ENFIN SI ! Un peu quand même… Mais ON Z’EN FOUT ! ON VA ZE MARIER… PIS ON VA FAIRE DES GOZZES… DIX GOZZES !!!

                  Cette fois là, c’n’fut pas un sourire d’imbécile heureux que j’arborai, mais bien celui du sex symbol qui savait sa proie capturée. Il était malsain, il était pervers… Presque conscient même… Quoique pas du tout en fait. Mon esprit voyait toujours en Lilou, une Shaïness totalement souriante et prête à m’accueillir comme il se doit. Un violent rougissement m’prit avant que j’ne me mette à tripatouiller grassement la mademoiselle. Comme jouer avec ses lolos par exemple… Ou même caresser ses cuisses. M’enfin, j’ne vous donne pas plus de détails, puisque l’affaire dura plusieurs minutes quand même. De plus, autant dire que j’avais l’ascendant physique puisque si elle s’débattait, moi j’ne sentais presque rien. Mon esprit encore décalé et particulièrement salace m’faisait toujours voir une Shaï rougissante, sourire intéressé et fin prête à passer à l’acte. Mais au moment même où j’commençais à dégrafer mon pantalon, j’me sentis nauséeux. Mes pupilles commençaient à se dilater, tandis que mon visage devint tout rouge. C’était pas bon. A ce rythme, j’allais dégueuler sur ma bien aimée. C’est dès lors que l’image de Shai se brisa soudainement, avant que j’ne reconnaisse immédiatement la jeune fille dont j’abusais sans vergognes. « Lilou ?! ARRRGHHH !!! » J’me précipitai hors du lit, non sans tomber au sol. Mais j’me relevai bien vite avant de courir aux chiottes où j’me mis à vomir comme si j’avais la gueule d’bois alors que j’m’étais enfilé plusieurs bouteilles il n’y a pas une heure. La brume se dissipa un peu autour d’mon esprit, et mon cerveau rembobina un peu l’film de la matinée que j’avais passé. C’est donc en rendant mon petit déjeuner que j’commençai à me souvenir de tout…

                  • …

                  Douleurs et honte étaient confus dans ma tête, alors que j’étais toujours assis à côté des W.C. J’avais le visage en sueurs, et les yeux toujours rouges. Des nerfs étaient apparents sur mon front et le reste de mon vomi dégoulinait sur mon menton. Sur le moment, j’étais pitoyable… Encore un peu et j’aurai été prêt de la… Non… Non ! j’ne devais pas penser à ça. Et puis sans doute qu’elle aurait trouvé une solution pour se tirer d’affaire, pour m’arrêter au moment de commettre l’irréparable. J’peux vous dire que j’n’avais plus la foi, ni le courage d’aller encore au devant de cette jeune femme. C’est pas pour dire, mais j’venais de commettre une erreur que j’ne serais pas prêt d’oublier de sitôt. Histoire d’arrêter l’alcool. Et parce que ça m’détruisait. J’eus du mal à retrouver ma respiration. Principalement à cause de mon vomissement, mais aussi à cause de c’que j’venais de réaliser. J’avais couillé grave. Et j’me demandais en c’moment même ce qu’elle pensait… J’essayai d’me calmer en respirant tout doucement. J’tirai la chasse d’eau par la suite, et me relevai en me précipitant vers un lavabo. Là, j’déboutonnai ma chemise, et j’me rinçai convenablement, m’débarrassant ainsi de toute saleté. Pendant ce petit laps de temps, j’espérai avec toute la volonté du monde que Lilou s’en aille. La situation quelque peu drôle s’était carrément transformée en calvaire pour moi. Ça aurait été une serveuse de Tom, pas grave… Mais elle… Elle. Pfff… La mouise ! C’est alors que j’partis m’asseoir contre un mur à même le sol, en attendant que la porte s’ouvre et se referme… M’confronter une nouvelle fois à la propriétaire de Bee, même pour m’excuser ? J’n’y avais plus la force…
                  Sans compter que les effets de l’alcool persistaient encore et toujours.

                  Mes anciens démons de Shell Town refaisaient surface…
                  « PUTAIN ! »

                  Alh s’était réveillé, plus ou moins, la bave aux lèvres et l’air lubrique, le caleçon à découvert. Ça ne sentait pas bon pour moi. Son regard en disait long sur ses intentions, et allez savoir ce qu’il s’imaginait quant à notre situation actuelle. Il tendit vers moi une main qui m’attrapa par la taille et me tira vers lui avec une force que je ne lui connaissais pas. Outre le fait qu’il ne m’appela pas par mon nom, j’étais à peu près certaine que naissait en lui un désir grandissant et dangereux pour mon intégrité physique. Sa poigne forte me lançait sur mon flanc, je tentais de me retirer de sa prise, mais en vain. Le nez quasiment plaqué dans son cou, cherchant à me défaire de lui et de partir en courant, il inversa les positions en m’écrasant de tout son poids.
                  J’étais cuite. Faite. Au secours !
                  Sa force ne m’aidait pas à me dégager, ses mains parcourant mon corps encore moins. Et vas-y qu’il commençait à me parler de mes lolos qui n’étaient pas si gros, ou de mes fesses… D’où j’avais des énormes fesses ? J’avais beau me mettre en colère en lui hurlant de me lâcher, en criant à la mort (en étant à peu près certaine que tout le bâtiment avait dû m’entendre), il continuait toujours à aventurer ses mains virils sans prendre en compte mon désir. Je n’avais qu’une envie : être ailleurs qu’ici. Je me voyais déjà abusé, en gardant espoir qu’il reprenne rapidement conscience et qu’il comprenne qu’il ne tenait pas la bonne personne. ARG ! Et voilà qu’il en rajoutait en disant qu’il allait me faire dix gosses. J’avais envie d’avaler ma langue et de me suicider, avec ses conneries !

                  « Lâche-moi, sale pervers ! »

                  Ma main s’écrasa contre son nez pour le repousser, mais même toute ma force concentrée dans cette pression ne servit à rien. Il allait me dévorer toute crue, c’était fini pour moi. Adieu, chers amis, chers confrères, Bee… Je vous aimais plus que tout.
                  Il déboutonna son pantalon tandis que je luttai toujours pour l’en empêchait, faire en sorte qu’il se rhabille, qu’il m’oublie, qu’il se rende compte de sa bêtise (ceux-ci allant des morsures, aux griffures, qui laisseraient des marques, mais qu’il ne sentait pas, sans doute anesthésié par l’alcool) mais rien à faire, il ne réagissait pas, prêt à passer à l’action et à tout me donner, même sans mon consentement. Fermant les yeux, priant tous les dieux qu’un marteau lui tombe sur la tête et le ramène avec moi sur terre, l’impossible se réalisa alors que son haleine fétide emplissait mes naseaux, signe qu’il allait bientôt rendre ses boyaux :

                  « Lilou ?! ARRRGHHH !!! »

                  Il se leva en courant, se cassa la figure, se rua vers la salle de bain et fit ce qu’il avait à faire. Moi, je restais inerte sur le lit, cherchant à retrouver mes esprits. Cette lutte acharnée pour conserver ma dignité m’avait vidé de toutes mes forces. Le plus incroyable étant qu’il n’avait strictement rien senti des coups que je lui avais assenés. J’avais du mal à me dire que malgré tout mon acharnement à vouloir me défaire de lui, j’avais failli y passer. A deux secondes près… Qui était cette Shaïness aux gros lolos et grosses miches ? Je plaçai une main sur mon visage et respirai un grand coup pour reprendre mes esprits.
                  Ce n’était pas la première fois que je manquai d’y passer. J’avais risqué ma vie, encore et encore, contre des hommes qui ne valaient rien. Jamie, par exemple, illustrait parfaitement ce que je disais : violeur, tueur, à qui je m’étais frottée sans le savoir et qui avait failli me découper en petit morceau pour le plaisir. Encore que lui, le simple fait qu’il soit dérangé de naissance, bercé trop près du mur en étant gamin, expliqué bien des choses. Et puis, je pensais… Si ç’avait été Alh, s’il n’avait pas repris conscience ? Qu’est-ce que j’aurais fait ? Qu’est-ce que j’aurais pu faire ? Contre lui ? Sa force ? Son désir ? Ce n’était pas moi qu’il voulait, à l’instant, mais cette Shaïness. Certes. Mais c’était moi, là, sur ce lit, qui avait du mal à réaliser. Pas Shaïness.

                  « Mh… »

                  Qu’est-ce qui tournait pas rond, dans ce monde ? Je me relevai et m’avançai doucement vers la salle de bain ou il était, et d’où il n’était pas sorti. Combien de temps avais-je réfléchis sur le lit ? Les secondes ne s’écoulaient plus normalement. Il fallait… parler. Un peu. Admettre. Mettre les choses à plat, surtout. Il fallait que j’en parle pour me détacher de l’instant.
                  Alors, je parlai :

                  « Bon, écoute Alh, t’es pas obligé de rester cacher dans ses chiottes, après tout, y’a pire. Tu ne m’as pas violé, un peu trop tripoté, mais je m’en remettrai. Je ne t’en veux pas. T’es bourré, un peu bête, probablement obsédé par le sexe… Mais je t’aime bien comme type, et ça m’embêterait de garder de mauvaises relations avec toi. Alors, ce n’est vraiment pas grave. »

                  Est-ce que j’essayais de le convaincre ou de m’en convaincre ? Encore un peu tremblante, adossée au mur, la respiration à peine contrôlé… C’était dur de se remettre de ça. Très dur. L’adrénaline qui s’écoulait encore, le cœur qui ne voulait pas ralentir. Bordel, j’avais affronté le Jamie sans soucis, fait face au Tahar Tahgel sans sourciller… Alors, pourquoi ? Si, c’était grave. Très grave. Pour lui. Pour moi. Pour tout. En arriver là, même avec de l’alcool, c’était grave. Et il fallait des solutions, pas des constatations.

                  « Mais je vais me permettre un conseil : trouve-toi une femme. Une vraie. Avec qui faire ta vie, avec qui vieillir. Peut-être cette Shaïness dont tu me parlais. Fais lui ses dix gosses et arrête d’être cet enfoiré coureur de jupons invétéré et accro au sexe, réputation qui te porte plus préjudice qu’elle ne t’avantage vraiment. T’es un chic type, ça m’embêterait que tu finisses seul, tu mérites au moins une femme qui t’aime et qui prendra soin de toi jusqu’à ta mort. Fais-toi soigner. »

                  Une pointe de colère dans la voix, je tapai nerveusement contre le mur qui nous séparait tous les deux. J’avais envie de l’affronter, en face. De lui dire ça, en face. Droit dans les yeux. De lui coller des gifles pour faire passer ce que je ressentais. Ce n’était pas contre lui, après tout. Pas spécifiquement. Il n’était pas entièrement responsable de ce qu’il avait vu, inconsciemment, il en avait désiré une autre et c’était retombé sur moi. Inconsciemment, il avait failli me violer et j’avais besoin de lui faire face pour comprendre. Il n’y avait rien à comprendre, il n’y avait pas d’excuse à donner, mais j’avais besoin de parler plutôt que de me murer dans un silence de plomb.
                  Ce silence qui m’avait trop de fois tué plutôt que soulagé. Et pour notre relation, pour l’affection que je lui portais, je devais lui dire ce que je pensais.

                  « T’es beau, t’es intelligent, un valeureux guerrier, un exemple pour notre population et pour tous ces gosses que t’admirent. Ne gâche pas tout ça pour des écarts de ce genre. Tu vaux bien mieux. »

                  Il n’était pas le colonel Fenyang pour rien. Ses vices devaient être, d’une façon ou d’une autre, changés, pour faire une force supplémentaire, non une faiblesse ou un fardeau.

                  « Prends ça pour ce que ça vaut. Je ne suis peut-être pas si bien placée pour me permettre de te juger, ou même de te conseiller mais… ça m’embêterait si tu devais finir seul un jour, ou qu’un matin tu te réveilles en te disant que t’as perdu ton temps pour des broutilles, que t’es passé à côté du plus important, que t’as gâché ta vie, que t’as pas pris le temps d’aimer sincèrement une femme et de construire quelque chose avec elle, ou que tu réalises que ton patrimoine va se perdre avec toi. »

                  Le silence toujours. Il n’avait pas l’air décidé à me répondre, à sortir. Comme si les mots ne suffisaient pas. Je pris le pas vers la porte, l’ouvris, la fis grincer et lâchai d’une voix forte :

                  « Je vais partir, plutôt. Ça vaut mieux pour nous. »

                  Je refermai sans sortir de la pièce. Et j’attendis qu’il tombe dans mon piège pour lui faire face.
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                    Ma honte s’accentuait au fur et à mesure que Lilou m’adressait parole. J’me sentais sale, inutile, indigne. Les effets de l’alcool s’estompèrent peu à peu, comme pour me forcer à affronter la réalité des choses. La situation qui aurait pu être drôle, s’était transformée en un gros problème. Et voilà que je fuyais ledit problème. J’aurai voulu que Lilou s’en aille. Qu’elle parte. Quelque part, cela m’aurait soulagé. Mais qu’en serait-il advenu de notre relation plutôt spéciale ? A cette pensée, je me mordis la lèvre. Le remord vint alors s’ajouter à la honte, à un tel point que j’commençai à transpirer en me recroquevillant sur moi-même. J’ai fauté. J’ai grave fauté. Pour n’pas dire que j’ai merdé tout court. Mon rythme cardiaque s’accéléra. Mes yeux devinrent tous rouges. Les larmes montaient doucement, tout doucement. Le valeureux Fenyang avait laissé place à une lopette qui avait honte de lui-même. Et j’étais pitoyable, mais à un point inimaginable. Il était beau, celui-là qui arborait toujours un sourire charmeur et une assurance inébranlable devant tout l’monde. Mais finalement, cette face de moi-même n’était que chimère, façade. Façade rapidement rattrapée par un trop plein d’émotions. Émotions qui allaient sans doute causer ma perte un beau jour. Une larme finit par rouler le long de ma joue. J’avais cédé. Le courage avait disparu. Pourtant, il n’aura suffit que d’une seule phrase et d’un seul bruit pour qu’une flammèche dudit courage revienne illuminer mon cœur. Lorsque Lilou m’affirma qu’elle allait partir, j’m’étais comme ressaisi, et j’m’étais levé d’un seul bond, avant de courir vers l’intérieur de ma chambre…

                    • LILOU ! ATT…

                    Et là, surprise ! La jeune femme était toujours présente dans ma chambre. Elle avait feint un départ, juste pour me faire réagir. Ce que je compris dès l’instant où nos yeux se croisèrent. Mais je fis vite de fuir son regard, en détournant tout bonnement le mien. Le rouge me monta aux joues. La honte revint avec la force d’une bourrasque prodigieuse, éteignant alors la flammèche de courage qui avait fait son apparition plus tôt dans mon cœur. Encore une fois, je me sentais indigne d’elle, de sa confiance, de son amitié. J’tressaillis brusquement, suite à une douleur vivace dans mon dos. Intérieurement, mon âme luttait contre les sentiments moroses qui m’envahissaient complètement, et les effets de l’alcool toujours aussi persistants. C’n’était peut être pas visible, mais je faisais un énorme effort pour me tenir debout, là, devant elle. Dans un dernier élan de bravoure, je m’avançai vers mon lit que je réussis à atteindre. J’me laissai tomber dessus, telle une lourde masse. Et c’est dans ce même dernier élan que je murmurai un « Pardon » presque inaudible. J’serrai alors les draps de mon lit dans mes mains, avant de commencer à pleurer silencieusement. J’avais craqué. Dans mon esprit, c’était un peu la rupture. Les précédents dires de Lilou étaient tellement emprunts de vérité, qu’ils m’avaient définitivement marqué. Peut être pour le restant de ma vie même. Soudain, j’eus un tournis fulgurant. J’décidai alors de ne plus bouger, jusqu’à ce que Morphée vienne définitivement m’emporter dans son royaume, et ce, pour un très long moment. L’alcool avait fini par prendre le dessus sur moi. Mais pour un temps seulement…

                    Quelques heures plus tard…

                    L’réveil avait été dur dur dur. La gueule d’bois, autant dire que ça ne pardonne pas tellement. Ça faisait, très, mais alors très longtemps que je n’en avais plus fait l’expérience. J’baillais grossièrement, en finissant par me tenir la tête, quand je sentis une présence dans la chambre. Alarmé, je tournai mes yeux dans tous les sens, avant d’apercevoir Lilou. Et d’un seul coup, les évènements de la matinée refirent surface dans mon esprit, avant que je n’me rappelle de tout c’qui s’était passé au bar et dans ma chambre, tout juste avant mon évanouissement –Si on peur dire ça comme ça. J’aurai voulu lui demander ce qu’elle faisait encore là, mais je n’en avais pas eu la force. Au lieu de ça, je fixai le plafond, et adoptai une position assise. Ma migraine s’estompait petit à petit et j’eus même un sourire. Un mince sourire qui disparut très vite cependant. L’heure n’était pas aux réjouissances après ce que j’avais fait… Ou ce que j’avais failli faire. Et rien que cette idée m’donnait l’impression d’une nausée prochaine. J’hésitai à lui donner les quelques raisons de mes problèmes, mais au point où nous étions, j’crois que je lui devais bien ça. J’me rappelais un peu de notre aventure commune à Shell Town, c’qui eut pour effet de me réchauffer légèrement le cœur. J’me rappelais aussi qu’elle s’était confiée à moi lorsque les problèmes l’accablaient. Peut être était-ce le moment d’échanger les rôles… Peut être était-ce à mon tour de vider mon sac et de compter sur quelque d’autres que mon père ou Tom… C’était décidé. J’allais tout lui dire…

                    • Je crois que je vais te raconter un peu mon vécu… Je te dois bien ça après tout. Et pour tout te dire, un seul évènement à complètement chamboulé ma vie.

                    J’avais souri faiblement à Lilou, avant de débuter mon récit. Il commençait à l’an 1607. Tout était parti de cette année. En ces temps là, j’étais comme tous les jeunes de mon âge. Un homme un peu insouciant, tête en l’air, mais qui gardait parfois la tête sur les épaules quand il s’agissait de remplir ses obligations. Un jeune sage, somme toute. Les femmes n’étaient pas encore l’un de mes soucis majeurs, et pour tout avouer, c’était plutôt suivre les traces de mon père qui m’importait le plus. Ce pourquoi, je mettais tout en œuvre pour ressembler à ce grand homme. Mais c’est lors d’une promenade au sein de MarineFord que je la vis. Sa beauté était tellement frappante que j’en étais resté bouche bée. Aisling qu’elle s’appelait. « Ça peut sembler difficile à croire, mais en sa présence, je devenais complètement timide et je perdais tous mes moyens. Même que Tom qui s’en était rendu compte, me charriait beaucoup sur ça. Le bon vieux temps comme on dit. » Je marquai une courte pause, tout sourire, les yeux presque pétillants. Puis je repris doucement mon récit en dressant un tableau plutôt reluisant de la fameuse Aisling. Elle était belle et très intelligente. A mes yeux, cette femme n’avait aucun défaut ; même si elle était plutôt… Tête brulée et bagarreuse dans son genre. Malgré son fort caractère, c’est d’elle dont je tombai follement amoureux pour la première fois, au point de ne plus daigner considérer celles qui me couraient après. Je n’avais d’yeux que pour elle et elle seule. Elle hantait mes rêves et mes pensées…

                    • Le bémol, c’est qu’en plus de m’intimider, elle ne me voyait que comme un fils à papa, un peu comme tous les autres jeunes de ma promotion. C’était marrant quand j’y repense.

                    Et vint un jour, en l’an 1608, où l’on nous confia une mission de haute envergure que nous devions mener à bien contre un équipage pirate. J’avais été assigné dans le groupe d’Aisling et nous devions capturer le second dudit équipage à arrêter. Malheureusement, tout ne se passa pas comme prévu et la femme de mes rêves fut enlevée par nos ennemis. « C’est à cette occasion que j’ai commencé doucement à me démarquer des autres jeunes de ma promotion. » C’était un comme dans un conte de fée. En plus d’avoir arrêté le fameux second, j’avais réussi à sauver Aisling. Le bonheur vous n’pouviez pas savoir. Car elle avait automatiquement changé d’avis sur mon compte, au point que nous étions devenus inséparables en un rien de temps. Et quelques mois après, naquit l’amour entre nous. Le vrai, le véritable, l’authentique. Si bien qu’après six longues années de vie commune, nous nous mariâmes. Là encore, je marquai une autre pause et posai mon regard vers les fenêtres. Les environs devenaient un peu sombres. Sans doute qu’on tirait vers la fin de l’après midi. Je me levai alors de mon lit, avant de dépasser Lilou et d’aller vers les fenêtres que je fis vite d’ouvrir. De mon emplacement, nous pouvions clairement observer le crépuscule qui était toujours aussi beau dans ces régions. J’me retournais alors vers ma compagne du jour, avant d’arborer un visage plutôt triste. J’allais maintenant aborder la partie de l’histoire la plus délicate, la moins joyeuse. Celle qui meurtrissait mon cœur depuis près de trois ans maintenant. Celle qui avait fait de moi, ce que je suis aujourd’hui…

                    • C’est après six autres années de mariage, que survint le drame… Ce drame qui cause ma souffrance perpétuelle…

                    Je portai une main sur ma poitrine, avant de recommencer à lui conter mon vécu. Et nous nous situions en 1620. Cette année fut riche en rebondissements et en émotions, car elle avait commencé d’une fort belle manière. Ma femme était enfin tombée enceinte. Mais l’autre surprise à laquelle nous ne nous attendions pas, fut qu’elle attendait des jumeaux. J’allais être enfin père ! La nouvelle fut bien accueillie autant dans nos familles, que chez mes hommes. J’étais tellement heureux que je le criais à qui voulait l’entendre. « Il était même prévu que Tom soit l’un des parrains de ces gosses et qu’elle accouche à MarineFord, dans les meilleures conditions possibles. Le bonheur était alors à son comble. Mais les choses ne se passèrent pas comme prévues, cependant. » Un beau jour, nous avions été conviés à une fête où les officiers devaient se présenter avec leur conjointe. Une rencontre annuelle où des promotions allaient être effectuées. Mais ladite soirée tourna au cauchemar quand nous fûmes attaqués par des révolutionnaires. La panique avait été générale, mais très vite, les officiers reprirent leur calme pour se défendre convenablement. Pour ma part, je préférai d’abord mettre ma femme en sécurité. Elle était prioritaire, surtout avec sa grossesse qui frisait presque les six mois. Mais alors que j’essayais de la faire évacuer, un groupe de révolutionnaires nous prit en embuscade. Avec mes hommes, nous engageâmes la lutte. Elle fut farouche et violente. Mais alors que j’étais à deux doigts d’en finir avec l’un d’eux, un autre révolutionnaire me visa avec son arme à feu et tira…

                    • Il aurait dû me tuer… Il aurait dû… Seulement qu’Aisling s’interposa… Et prit les balles à ma place…

                    Le vent s’engouffra avec force dans la pièce et ébouriffa ma chevelure. S’ils cachaient mes yeux, ils ne purent faire de même avec les quelques larmes qui roulèrent le long de mon visage, avant de finir sur le tapis. J’agrippai le rebord de la fenêtre, et serrai les dents. Et c’est à ce moment que je repris courage et que je continuai mon histoire. Personnellement, j’ne me souvenais plus de ce qui s’était passé. On m’avait juste raconté que j’étais rentré dans un état second… Avant de faire un carnage sans précédents dans le camp adversaire. En une seule nuit et par ma seule faute, j’avais perdu trois êtres qui m’étaient chers. « Après l’enterrement, j’fis une dépression tellement grave que mon propre père fut obligé de m’enchainer et parfois même, de se battre sérieusement contre moi. J’étais devenu… Une bête sauvage. » Et c’était rien de le dire. Il m’arrivait d’avoir des crises colériques et de balayer tout sur mon passage. Pendant ces moments là, je ne faisais aucune différence. Amis, ennemis, famille… J’attaquais tout le monde sans aucune exception. « J’ai même failli tuer Tom… » Ainsi que d’autres proches. Je touchais le fond. Mais grâce à l’aide continuelle de quelques uns de mes proches et même de la famille d’Aisling, j’finis par redevenir on ne peut plus normal. En fait, je le devais surtout à trois personnes : Mon père, Tom, mais aussi une jeune fille du nom de Blacrow Rachel. C’était grâce à eux que j’ai réussi à échapper à la folie. « Autrement, j’aurai sans été enfermé dans un hôpital psychiatrique… Ou même mort, qui sait. » Là encore, j’observai un moment de silence, et j’en profitai pour essuyer mes larmes.

                    • C’est un peu à partir de ce moment que je devins le Salem que tu connais. Le Salem qui te fait face.

                    Quand je repris du service dans les rangs, je n’avais plus d’engagement familial. C’est d’ailleurs pour oublier la mort de ma femme et de mes enfants que je m’acharnais au travail. En 1621, on fit vite de m’accorder le grade de lieutenant-colonel, tant j’étais bon sur le terrain. Il en allait de même en l’an 1622 où j’eus alors le grade de colonel et le commandement de la base de Shell Town. J’étais en constante évolution, et mon père me faisait de moins en moins de l’ombre. « Je n’étais plus le fils du vice-amiral Fenyang. J’étais devenu le colonel Salem. » Mes origines, ma renommée grandissante, ma bonté de cœur et ma belle plastique avaient rapidement fait de moi une icône de la marine. Si même marié, je tapais dans l’œil de certaines femmes qu’elles soient jeunes ou mûres, étant veuf, c’était devenu inimaginable. « C’est un peu à cette période que j'ai recommencé à fréquenter des femmes… » Au début, je recherchais l’amour, l’âme sœur. Surtout ça. Mais au fil du temps, je me suis rendu compte que je ne trouvais pas chaussures à mon pied. Toutes celles qui se targuaient d’avoir été dans mon lit n’étaient obnubilées que soit par ma richesse et ma renommée, soit par mon physique pas forcement désagréable. Là encore, ce ne fut qu’une autre désillusion, Aisling ayant été ma première femme pour tout. « C’est donc à ce moment que je décidai de fermer mon cœur à l’amour. Je ne voulais d’ailleurs plus souffrir. » La cigarette, l’alcool et le sexe étaient devenus mes refuges. Et c’est à partir de cette période que je n’avais plus de vergognes. Si les femmes voulaient se servir de moi, pourquoi ne devrais-je pas en faire autant, d’autant plus que l’amour ne causait que douleur, souffrance ?

                    • C’est la preuve même que la beauté, la renommée, et même la richesse ne font pas forcement le bonheur… Le Salem qui est devant toi, n’est que la résultante d’un lot de souffrances top atroces. J’aurai pu devenir un marine acariâtre, mais malgré tout, je reste un homme… Un homme qui à du cœur et qui ne l’hésite pas à le montrer. Cette qualité est à la fois une faiblesse. Un taon d’Achille si on veut. Lilou… Tu sais tout dorénavant… Crois-tu toujours que c’est de l’insouciance ? Ou qu’il me faille forcement un suivi médical ?

                    De grosses larmes étaient dorénavant visibles sur mon visage. Il ne s’agissait plus du colonel. Mais plutôt de l’enfant, du neveu, du frère, de l’oncle, de l’ami… De l’homme. D’Alheïri Salem Fenyang.

                    Spoiler:
                    Il s’était effondré comme une masse sur son lit et avait fermé les yeux. Le sommeil l’avait gagné en quelques minutes et j’avais décidé, qu’importait ce qu’on pourrait en dire, de me tenir à côté de cet homme, pour le panser. Des heures durant à attendre qu’il ouvre à nouveau les yeux et qu’il sache qu’une amie avait pris soin de lui. Combien de temps ? Aucune idée. Toutes ces minutes que j’avais envie de sacrifier pour demeurer cette épaule fiable, celle qui ne fuyait pas, qui surmontait tout. Inconsciemment, je lui devais bien ça.
                    Alheïri était une figure exalté, vénéré un peu partout sur les mers. Une statue de courage, un homme emplit de valeurs. De bonnes valeurs. Assez pour me voir rester auprès de lui, quoi qu’il m’en coute. Pour le protéger, le temps d’une sieste. Et même en sachant que je n’admettrais jamais l’admiration sans borne que je lui vouais, je voulais qu’il soit témoin de ce qu’il m’était possible d’accomplir pour ses beaux yeux.
                    Le regard lointain, regardant par la fenêtre les heures défilées, les voix me parvenir, le temps passé sans rien faire de plus que d’être là. Jusqu’à ce qu’il ouvre les yeux, embrumé, pas très frais, mais bien présent. Le contrecoup, l’alcool s’était dissipé mais laisser un vide à l’intérieur, un vide saisissant qui nous faisait tituber. Il me regarda, s’étonna de ma présence et alors, telle une masse s’abattant sur ses épaules, sa mine redevint piteuse, désolée. Il s’installa, se prit la tête entre les mains, et attendit.

                    En silence. Un silence pesant mais raccommodant, qui me semblait bénéfique. Seul le bruit de nos respirations qui se fiaient l’une à l’autre, qui se calquaient progressivement. Et puis, il prit la parole, d’un coup, pour me dire qu’il allait me parler de lui et qu’avec ça, il m’accordait le crédit que je méritais : celui d’une confidente, d’une amie.

                    Et sa langue se délia, immédiatement, commençant son récit en remontant très loin dans le temps. Le garçon qu’il était, l’homme qu’il devint, cette transition, des moments qu’il avait vécus et des rencontres qu’il avait faites. Dont une, la plus importante de toute, celle d’une certaine Aisling, une femme de caractère qui avait fait battre son cœur si fort qu’il avait appris ce qu’était l’amour. L’amour vrai. L’amour pur.
                    Tout parti de là, d’elle. Une grande part de son existence tournait autour de cette femme qui avait su lui faire voir les choses sous un autre angle. Il posa des mots sur ses doutes et ses attentes de l’époque, principalement d’être un homme aussi fort et sage que son père. Je lui fis un sourire, comme pour affirmait qu’il avait réussi, à sa manière. Il poursuivit, je me taisais toujours, écoutant avec intérêt, dévorant ses mots avec attention.

                    Cette femme d’exception, il l’épousa. Il lui jura fidélité, amour, et tout le tintouin. Alheïri fut un homme marié et épanoui pendant un temps. Admirable. Le mariage était une institution qui me semblait lointaine, voir intouchable et je n’espérai pas un jour me lier avec quelqu’un par amour. Aimer, c’était trop dur, trop compliqué. Et de toute façon, il ne me semblait n’attirer que les parfaits salauds. Si je devais énumérer mes conquêtes, Jerronimo avait la tête d’affiche, mais avec le temps, je sentais que quelques choses nous avait éloignées. Le fils Gyver, Mac, était le second à rentrer dans la liste, lui qui avait voulu m’épouser après seulement quelques jours de relations. Quelques autres échanges notables, comme Tahar Tahgel qui avait laissé, à sa manière, une marque indélébile. Enfin, Alheïri, que j’avais fait craquer d’une certaine manière, probablement parce que j’étais de la même trempe que sa femme…
                    Mieux valait oublier. Ne pas y penser. Les hommes, ce n’était pas pour moi, pas pour l’instant. J’avais le temps pour y songer, pour m’y faire, pour m’y préparer. Je n’avais pas envie de perdre des occasions pour des bêtises de ce genre. J’appelai cela « bêtises », parce que c’était, pour moi, un synonyme de « l’amour ». C’était ainsi. Peut-être trop jeune pour envisager des évènements de ce genre…

                    Il se leva et alla jusqu’à la fenêtre pour l’ouvrir. L’on voyait d’ici le soleil se coucher, passer de l’autre côté de la terre et illuminer la journée d’autres gens. Il reprit la parole, en vint au fait, à sa souffrance. Il m’annonça la grossesse de sa femme et de la présence de deux petits êtres qui allaient bousculer sa vie. Puis l’altercation lors de cette soirée, les révolutionnaires, la mort, le carnage. La bête.
                    Ce que la perte d’un être cher avait causé en lui, ce que la faucheuse avait pris ce soir-là et qui avait anéanti un homme de son espèce. Je déglutis, péniblement, retenant un soupir. Malgré moi, j’étais en colère. Je trouvais cela injuste. C’était injuste, qu’en une seule soirée, Alheïri perde la totalité de sa famille, de ce qu’il construisait avec une femme magnifique et qui l’aimait. Tellement injuste que j’en serrais les poings. Je retins une injure, tentai de rester calme, et attendit qu’il continue son récit pour me focaliser sur autre chose.
                    Et la descente aux enfers, de laquelle il ne remontait pas. Je me mordis la lèvre, écoutant toujours patiemment ce qu’il avait à me dire. De ces gens qui l’avaient aidé à sortir la tête de l’eau, à se remettre de ce désastre, de cette nuit. Une seule nuit pour tout bousculer, pour tout renverser. Une seule nuit pour détruire une vie entière. C’était incroyable, c’était dingue.

                    « C’est la preuve même que la beauté, la renommée, et même la richesse ne font pas forcement le bonheur… Le Salem qui est devant toi, n’est que la résultante d’un lot de souffrances trop atroces. J’aurai pu devenir un marine acariâtre, mais malgré tout, je reste un homme… Un homme qui a du cœur et qui n’hésite pas à le montrer. Cette qualité est à la fois une faiblesse. Un talon d’Achille si on veut. Lilou… Tu sais tout dorénavant… Crois-tu toujours que c’est de l’insouciance ? Ou qu’il me faille forcément un suivi médical ? »

                    Je me levai de mon siège et m’avançai vers lui. A son niveau, je passais les bras autour de sa taille et me blottis dans son dos, posant ma tête contre lui. Je le soutenais. Je ne savais pas quoi dire, je ne savais pas quoi répondre. Il y avait-il forcément quelque chose à répondre ?

                    Quelques heures encore, à passer ensemble. La nuit tombée.
                    Dans les bras l’un de l’autre, le sommeil l’ayant gagné, je le regardai en ruminant la colère que j’avais dans mon coeur. Et vint le temps de m’extirpai de son étreinte, de tenter de répondre à ce qu’il m’avait dit, de mettre des mots à mon tour sur ce que je ressentais pour lui. Je me relevai en douceur et avança jusqu’au bureau dans sa chambre. Je m’y installai et pris la plume et le papier…

                    Alheiri,

                    Tu t’es confié à moi, ce soir, et je t’ai écouté. J’ai compris. Tout ce que tu étais, tout ce que tu voulais me dévoiler. Tout. Je ne veux pas te juger, je ne me permettrai pas, je n’ai pas de réponse non plus à tes doutes et interrogations. Je ne suis que l’amie qui a été là, pour toi, ce soir et qui t’accepte avec toutes les cicatrices que tu arbores.
                    Tu es un homme magnifique, Salem, ne l’oublie jamais.

                    Si je t’écris, c’est parce que j’aurais été incapable de te dire ces mots en face, de les assumer. S’ouvrir aux autres, à un ami, c’est infiniment plus dur qu’on ne le pense. Je t’admire pour ce courage dont tu as fait preuve, parce que parler de sa souffrance est souvent plus dur que d’affronter une flotte entière de pirates.
                    Et j’ai beau essayer de te répondre, de dissiper tes interrogations, je ne sais pas quoi te dire. Je crois que tu n’es pas fou. Loin de là. Ou que tu n’as pas besoin d’être enfermé pour ce que tu es. Je crois qu’aujourd’hui, ta souffrance t’a appris à vivre ainsi et à supporter l’absence de ta femme. Tu as comblé son vide comme tu as pu, et on ne pourrait t’en blâmer. Alors, je comprends tout à fait tes agissements et je ne pourrais te les reprocher. Tout s’éclaire.
                    Mais, malgré tout ça, je pense surtout que cette souffrance fait de toi un homme. L’homme le plus humain que la terre n’ait jamais porté. Le plus humain, mais le meilleur aussi. Ta force même. Ce qui fait de toi le célèbre et adoré Salem, que les populations acclament, capable de soulever les foules à la simple évocation de son nom.

                    Avec le temps, tu t’es forgé ce personnage, cette figure d’autorité et de gentillesse, infaillible et parfait sous tout rapport, quelqu’un à qui l’on ne reproche que sa flemme et ses conquêtes, mais qui fait le boulot le plus parfait qui soit. Parce que son boulot, c’est tout ce qu’il lui reste. Et que ce personnage, ce masque que tu as adopté pour te guérir, fais de toi un homme bon, sympathique et protecteur, un homme dont on a besoin dans un monde comme le nôtre, mais un homme qui n’a pas le droit de craquer lorsqu’il en a besoin, ou qui n’en a pas le temps. Ce qui te soulageait avant de le fait plus aujourd’hui. L’alcool, le sexe, la cigarette, sont devenus des passe-temps, des écrans de fumées, et je pense que tu as compris aujourd’hui qu’ils ne te sauveraient pas de la souffrance.
                    Alors, je veux que tu saches, Salem, que si un jour tu as besoin de moi, je serais toujours là. Qu’importe la distance et le temps qu’il me faudra pour venir te secourir, mes petits bras et mes os fragiles. Pour un ami comme toi, je serais prête à soulever des montagnes, à affronter des tempêtes.
                    Pour Alheïri Salem Fenyang, je me battrai contre le monde entier. Quand tu auras besoin d’une pause, je prendrai ton relai. Quand tu plieras, je te relèverai. Quand tu seras fatiguée ou souffrant, je veillerai sur toi jusqu’à ce que tu sois sur pied.
                    Sans hésiter, sans peur, en toute amitié.

                    Je te fais la promesse de toujours te protéger.

                    Tendrement,
                    Lilou.


                    Je posai la plume. Pliai la lettre. La portai jusqu’au lit de Alh et la plaçai sur les draps. Me tournant, faisant un dernier sourire, j’entendis à la fenêtre le caquètement d’un autre de mes amis. Bee me regardait avec ses grands yeux noirs, la tête penchait sur le côté, m’attendant.
                    Il avait mis quelques heures à me retrouver, à savoir ou est-ce que j’étais. Je m’approchai de lui, montai sur son dos, m’accrochai à ses plumes.

                    Il prit de l’élan et s’envola.
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