Arbre, fougère, buisson, re-arbre, lapin...
C'est qu'elle a un bon sprint cette petite. Pas de chance pour elle, son poursuivant est du genre tenace et avait l'habitude de courser les poulets qui tentaient de se faire la belle. Les deux sprinters ont plus ou moins la même cadence mais deux styles de courses bien différents. Celle de devant esquive avec beaucoup d'agilité les différents obstacles alors que celui qui la suit, et qui se rapproche doucement d'ailleurs, a plutôt tendance à passer à travers (sauf pour le lapin, mais je vous laisse imaginer comment le rongeur a fini). Elle s'en inquiète un peu de voir ce grand borgne la courser avec autant de ferveur. À chaque fois qu'elle tourne la tête elle a la juste impression qu'il est un peu plus proche, et donc, elle en jette de plus en plus, des coups d’œils.
De son côté, Walters, qui avait laissé sa masse derrière lui pour courir plus vite (sans pour autant se séparer de sa pelle, faut pas non plus exagérer), est bien décidé à ne pas laisser cette jeune fille s'échapper. Pas qu'il lui veut du mal, ou lui poser des questions ou n'importe quoi. Non, il a juste décidé que ça ne se faisait pas de fuir ainsi des honnêtes gens, même s'ils viennent de ratatiner un pigeon géant et que ça fout les jetons. Non, c'est pas des manières, et du coup faut le faire remarquer, parce que sinon eh bien les manières ne s'améliorent pas.
Seulement voilà, à force de regarder derrière elle, la jeune fugitive ne voit pas ce qu'il se passe devant elle. Elle a juste le temps de s'arrêter devant les planches rongées par la pourriture qui bouchent presque le trou dans lequel elle a bien failli tomber. Heureusement qu'elle n'est pas seulement agile et qu'elle a de bon reflex n'est-ce pas ?
Seulement voilà, elle ne pense plus à ce qui arrive derrière elle.
Une vingtaine de minutes plus tard, la gamine se réveille dans ce qui semble être un puits de mine bouché occupé par un grand bonhomme portant un long manteau pourpre et un cache œil. Pas banal comme situation n'est-ce pas ? Premier reflex pour la gamine, c'est de se recroqueviller dans un coin histoire de s'abriter du type qui la coursait tout à l'heure. Une puissante douleur jaillit alors de sa jambe. Nouveau reflex, elle pose sa main à l'endroit d'où vient la douleur. À sa grande surprise, elle y découvre une attelle de fortune fabriquée avec des planches et un morceau de tissu pourpre.
Walters, de son côté, semble ne pas la remarquer. Il manque une manche à son manteau et il cherche désormais un moyen de sortir de là. C'est pas vraiment évident de se tirer d'un trou profond de sept mètres avec une estropiée inconsciente. Remarquant que ce dernier détail est incorrect, le bosco se tourne vers la fugitive, toujours apeurée. Ce n'avait pas été difficile de remettre sa jambe en place et de la bander, il s'était déjà occupé de plusieurs dizaines de cas similaire lorsque du bétail se blessait. C'est vraiment con, un bovin, des fois...
"T'es réveillée ? C'est bien."
La jeune fille tente de s'écarter lorsque le borgne s'assit à côté d'elle, mais sa jambe lui fait trop mal. Remarquant qu'elle a peur de lui, Walters ôta son manteau et recouvrit les épaules des la gamine avant de prendre place juste à sa droite. Il fait froid au fond d'un puits, et le vêtement du grand bonhomme la réchauffe. Elle se blottit à l'intérieur, ce qui arrache un sourire au pirate. C'est qu'il aurait pu s'y attacher si elle y avait mis un peu du sien, la gamine.
"Bon, j'te résume l'affaire: on est les deux tombés à travers le planché qu'il y avait là haut, tu t'es fracassé le tibia contre ce caillou là et t'es tombé dans les choux tout de suite après. T'as même pas crié, j't'assure."
La jeune fille n'a pas compris un piètre mot que cet homme avait prononcé.
"Faut pas qu'on moisisse ici, si la nuit tombe, on va crever gelés à tous les coups. J'pense pouvoir grimper en haut histoire de trouver un truc pour t'aider à monter et on ira retrouver ta smala ou j'sais pas quoi pour mieux te soigner... Dis voir, t'écoute un peu ce que j'dis ? Bon, pas grave, mieux vaut qu'j'm'active si on veut pas y passer la journée..."
Alors qu'il se relève, Walters sent la jeune fille lui agripper le bras. Elle ne veut pas qu'il la laisse toute seule, c'est ça hein. Mais il va y être obligé s'il voulait sauver la... mignonne ? Voilà qu'il la trouve mignonne maintenant. Il est debout, elle le retient par le bras... Il la regarde dans les yeux...
...
Et voilà, c'est fait, il la kiffe, c'est pas plus dur que ça. Et du coup, eh bien il repose ses fesses à côté d'elle et l'enveloppe de son bras. Elle se rapproche contre lui, histoire d'avoir un peu plus chaud. Elle se sent plutôt bien avec ce type, même si sa dégaine fout vraiment les jetons. Il sent sa main prendre son menton...
"T'es un peu p'tite pour qu'on finisse ensemble tu sais... Et y'a aussi cette Michaela qui nous fait la tambouille sur le rafiot... J'peux pas l'oublier celle-là, t'sais... Mais bon..."
...Ce qu'elle ne sent pas, en revanche, c'est son cou qui se tord d'un coup.
"Tu s'ra plutôt pas mal quand tu s'ra plus grande... 'fin j'imagine."
Le grand borgne se relève à côté du corps sans vie de la gamine et essaie de se retrousser les manches... Il se demande ce qu'il en a fait, d'ailleurs, cet idiot. Mais pas le temps de se poser plus de question, c'est le moment de reprendre du service pour le fossoyeur. Il attrape sa pelle, celle qu'il ne quitte jamais, sauf pour dormir, et encore.
"D'ici là, j'vais t'm'et' là où personne ne te dérangera et où j'suis certain d'te r'trouver..."
Un coup de pelle sur le sol...
Des fissures...
Il a pris du niveau dans le secteur de creusage dites voir ! Un putain de trou tout partout tout autours alors qu'il a même pas sorti la pelle du sol, ça c'est dingue ! Enfin, ce qui est dingue, c'est qu'il est en train de se casser la gueule, pour la deuxième fois et en moins d'une heure. Quelques cinq mètres plus bas, il retrouve le sol, et devant lui, il voit deux points lumineux dans les ténèbres qui l'entourent.
Deux.
Puis quatre... Huit...
"Eh merde"
Une belle dizaine de paires d'yeux flamboyants, toutes fixées sur l'intrus qui siégeait là, comme un con, dans cette insupportable lumière venant du plafond, avec sa pelle et son cadavre. Un intrus, qui avait apporté la lumière dans les ténèbres. Il ne restait pas trente-six choses à faire...
Un grand cri retentit dans la caverne, et ce n'était pas pour souhaiter la bienvenue à Walters.
C'est qu'elle a un bon sprint cette petite. Pas de chance pour elle, son poursuivant est du genre tenace et avait l'habitude de courser les poulets qui tentaient de se faire la belle. Les deux sprinters ont plus ou moins la même cadence mais deux styles de courses bien différents. Celle de devant esquive avec beaucoup d'agilité les différents obstacles alors que celui qui la suit, et qui se rapproche doucement d'ailleurs, a plutôt tendance à passer à travers (sauf pour le lapin, mais je vous laisse imaginer comment le rongeur a fini). Elle s'en inquiète un peu de voir ce grand borgne la courser avec autant de ferveur. À chaque fois qu'elle tourne la tête elle a la juste impression qu'il est un peu plus proche, et donc, elle en jette de plus en plus, des coups d’œils.
De son côté, Walters, qui avait laissé sa masse derrière lui pour courir plus vite (sans pour autant se séparer de sa pelle, faut pas non plus exagérer), est bien décidé à ne pas laisser cette jeune fille s'échapper. Pas qu'il lui veut du mal, ou lui poser des questions ou n'importe quoi. Non, il a juste décidé que ça ne se faisait pas de fuir ainsi des honnêtes gens, même s'ils viennent de ratatiner un pigeon géant et que ça fout les jetons. Non, c'est pas des manières, et du coup faut le faire remarquer, parce que sinon eh bien les manières ne s'améliorent pas.
Seulement voilà, à force de regarder derrière elle, la jeune fugitive ne voit pas ce qu'il se passe devant elle. Elle a juste le temps de s'arrêter devant les planches rongées par la pourriture qui bouchent presque le trou dans lequel elle a bien failli tomber. Heureusement qu'elle n'est pas seulement agile et qu'elle a de bon reflex n'est-ce pas ?
Seulement voilà, elle ne pense plus à ce qui arrive derrière elle.
Une vingtaine de minutes plus tard, la gamine se réveille dans ce qui semble être un puits de mine bouché occupé par un grand bonhomme portant un long manteau pourpre et un cache œil. Pas banal comme situation n'est-ce pas ? Premier reflex pour la gamine, c'est de se recroqueviller dans un coin histoire de s'abriter du type qui la coursait tout à l'heure. Une puissante douleur jaillit alors de sa jambe. Nouveau reflex, elle pose sa main à l'endroit d'où vient la douleur. À sa grande surprise, elle y découvre une attelle de fortune fabriquée avec des planches et un morceau de tissu pourpre.
Walters, de son côté, semble ne pas la remarquer. Il manque une manche à son manteau et il cherche désormais un moyen de sortir de là. C'est pas vraiment évident de se tirer d'un trou profond de sept mètres avec une estropiée inconsciente. Remarquant que ce dernier détail est incorrect, le bosco se tourne vers la fugitive, toujours apeurée. Ce n'avait pas été difficile de remettre sa jambe en place et de la bander, il s'était déjà occupé de plusieurs dizaines de cas similaire lorsque du bétail se blessait. C'est vraiment con, un bovin, des fois...
"T'es réveillée ? C'est bien."
La jeune fille tente de s'écarter lorsque le borgne s'assit à côté d'elle, mais sa jambe lui fait trop mal. Remarquant qu'elle a peur de lui, Walters ôta son manteau et recouvrit les épaules des la gamine avant de prendre place juste à sa droite. Il fait froid au fond d'un puits, et le vêtement du grand bonhomme la réchauffe. Elle se blottit à l'intérieur, ce qui arrache un sourire au pirate. C'est qu'il aurait pu s'y attacher si elle y avait mis un peu du sien, la gamine.
"Bon, j'te résume l'affaire: on est les deux tombés à travers le planché qu'il y avait là haut, tu t'es fracassé le tibia contre ce caillou là et t'es tombé dans les choux tout de suite après. T'as même pas crié, j't'assure."
La jeune fille n'a pas compris un piètre mot que cet homme avait prononcé.
"Faut pas qu'on moisisse ici, si la nuit tombe, on va crever gelés à tous les coups. J'pense pouvoir grimper en haut histoire de trouver un truc pour t'aider à monter et on ira retrouver ta smala ou j'sais pas quoi pour mieux te soigner... Dis voir, t'écoute un peu ce que j'dis ? Bon, pas grave, mieux vaut qu'j'm'active si on veut pas y passer la journée..."
Alors qu'il se relève, Walters sent la jeune fille lui agripper le bras. Elle ne veut pas qu'il la laisse toute seule, c'est ça hein. Mais il va y être obligé s'il voulait sauver la... mignonne ? Voilà qu'il la trouve mignonne maintenant. Il est debout, elle le retient par le bras... Il la regarde dans les yeux...
...
Et voilà, c'est fait, il la kiffe, c'est pas plus dur que ça. Et du coup, eh bien il repose ses fesses à côté d'elle et l'enveloppe de son bras. Elle se rapproche contre lui, histoire d'avoir un peu plus chaud. Elle se sent plutôt bien avec ce type, même si sa dégaine fout vraiment les jetons. Il sent sa main prendre son menton...
"T'es un peu p'tite pour qu'on finisse ensemble tu sais... Et y'a aussi cette Michaela qui nous fait la tambouille sur le rafiot... J'peux pas l'oublier celle-là, t'sais... Mais bon..."
...Ce qu'elle ne sent pas, en revanche, c'est son cou qui se tord d'un coup.
"Tu s'ra plutôt pas mal quand tu s'ra plus grande... 'fin j'imagine."
Le grand borgne se relève à côté du corps sans vie de la gamine et essaie de se retrousser les manches... Il se demande ce qu'il en a fait, d'ailleurs, cet idiot. Mais pas le temps de se poser plus de question, c'est le moment de reprendre du service pour le fossoyeur. Il attrape sa pelle, celle qu'il ne quitte jamais, sauf pour dormir, et encore.
"D'ici là, j'vais t'm'et' là où personne ne te dérangera et où j'suis certain d'te r'trouver..."
Un coup de pelle sur le sol...
Des fissures...
Il a pris du niveau dans le secteur de creusage dites voir ! Un putain de trou tout partout tout autours alors qu'il a même pas sorti la pelle du sol, ça c'est dingue ! Enfin, ce qui est dingue, c'est qu'il est en train de se casser la gueule, pour la deuxième fois et en moins d'une heure. Quelques cinq mètres plus bas, il retrouve le sol, et devant lui, il voit deux points lumineux dans les ténèbres qui l'entourent.
Deux.
Puis quatre... Huit...
"Eh merde"
Une belle dizaine de paires d'yeux flamboyants, toutes fixées sur l'intrus qui siégeait là, comme un con, dans cette insupportable lumière venant du plafond, avec sa pelle et son cadavre. Un intrus, qui avait apporté la lumière dans les ténèbres. Il ne restait pas trente-six choses à faire...
Un grand cri retentit dans la caverne, et ce n'était pas pour souhaiter la bienvenue à Walters.