- - Bordel... non mais qu'est-ce qui m'est arrivé... ?
Ce qu'il s'est passé, telle est la question à laquelle j'aimerais apporter une réponse au plus vite. J'me souviens plus de rien, l'trou noir, comme si l'on m'avait vidé de tous mes souvenirs de la veille. C'est frustrant, d'autant plus lorsque l'on se réveille au beau milieu de nulle part, affalé sur le sol crasseux de ce qui s'apparente à une ville. S'endormir en pleine rue et n'en avoir aucun souvenir, ne pas comprendre comment j'ai pu en arriver là, le cauchemar... Qu'est-ce que j'fous étalé sur la route, le crâne martelait par un horrible mal de tête, les vêtements en piteux état, la gorge sèche et être pris par une sensation de malaise ? Absolument aucune idée... la foule s'étant amassée tout autour de moi non plus ne semble pas être au courant ! Il n'y a qu'à voir les visages d'ahuris qu'ils affichent, ils sont visiblement surpris de me voir me relever... Attendez, ils n'ont quand même pas cru que j'étais mort ? Tseuh, j'suis pas l'genre de gars à crever dans un lieu aussi dégueulasse, d'une manière aussi minable ! Pourtant... j'dois avoir une tronche plus proche d'un mort-vivant que d'un gars en parfaite santé. Il vaudrait mieux que j'me tire avant que tout cela ne m’agace, j'pas envie de causer un massacre dans de telles conditions. Me relevant lentement, j'constate que ma vue flanche légèrement.
- - Non mais sérieusement... dans quoi est-ce que j'me suis encore foutu... ?
Prononçant ces quelques mots à voix basse, d'un air blasé, j'ôtais la poussière présente sur mon costume d'un revers de main avant de faire volte face, titubant pour m'éloigner d'ici. Retourner au Quartier Général, demander un rapport de mes actions d'hier soir à mes hommes afin de tirer tout cela au clair, cela semble le plus préoccupant. Néanmoins, je ne suis pas encore au courant de l'endroit où j'me trouve. En observant un plus attentivement l'coin, j'commence à douter que ce soit une île m'étant connue. Du moins, une île que j'ai l'habitude de fréquenter. Il y a d'abord ces espèces de murailles tout autour, tellement imposantes que même un aveugle pourrait les apercevoir. Je n'ai jamais eu l'occasion d'observer un truc pareil auparavant. Heureusement, j'trouve ces structures tellement minables et l'idée en elle-même de couper la ville par des murs pareils me déplaît. D'autant plus que le tout offre à la ville un aspect circulaire qui me donne envie de vomir... 'faut vraiment que j'me tire d'ici. Mais avant, satisfaire quelques besoins vitaux me semble indispensable pour y parvenir. J'ai mal au crâne... j'ai soif... et tellement faim que j'pourrais avaler un ours en entier. Levant les yeux dans l'espoir d’apercevoir un restaurant aux alentours, j'vois que des constructions à la con...
- - C'est quoi cette ville... pas de restaurant... pas de viande... pas de viande... pas de quoi se remplir la panse... c'est pourtant évident... non ?
Cela me semble parfaitement clair de mon côté, si je parviens à trouver de quoi retrouver de l'énergie, j'penserai à toucher deux mots à l'abruti qui a bâti cette ville. Et qu'il repose dans sa tombe ne m'en empêchera pas, vous pouvez en être assuré. J'vais lui arracher le couvercle de son cercueil, après avoir creusé au pied de sa stèle, une fois son cadavre entre mes mains, j'vais lui briser chacun de ses os et les disperser dans les moindres recoins de cette île merdique. L'esprit rempli de pensées machiavéliques, j'arpente les rues d'un air faiblard, la langue pendante, à la recherche du bonheur. Il ne me fallut pas loin de vingt longues minutes à marcher sous un soleil de plomb, avant de tomber nez à nez avec un bâtiment servant de la bouffe. Les derniers mètres avaient été les plus abominables de toute ma vie, la délicieuse odeur de viande grillée s'échappant de la cheminée et des fenêtres ouvertes de l'édifice, j'vous raconte pas la réaction que cela avait provoqué à l'intérieur de mon estomac lorsque cet arôme atteignit mes narines. Déjà que mon ventre hurlait famine depuis mon réveil... Je débarquais en trombe à l'intérieur de l'édifice, dégoulinant de sueur, crocs à découvert, sous les regards intrigués d'une centaine de personnes.
Un étrange bruit de planches se fracassant sur le sol se fit entendre tout proche de ma position, à l'endroit exact où les portes auraient dû se trouver. Se pourrait-il que mégarde, j'ai pu pénétrer à l'intérieur du restaurant un poil trop brusquement, faisant de moi l'auteur de ces fâcheux dommages ? J'ai bien peur que la réponse à mes interrogations se trouve au bout de mon nez... Remarquant à l'instant le bout de planche planté à l’extrémité de mon nez, je m'empressais de retirer le morceau de bois avant de le balancer loin derrière moi. Faire disparaître les preuves est une chose essentielle lorsque l'on se trouve dans une situation délicate. Tachant de paraître le plus naturel possible, je m'avance alors à une table, prenant place délicatement, attendant alors impatiemment qu'un serveur vienne prendre ma commande. Le soucis, c'est que les gens n'ont pas des yeux juste pour la déco' du faciès. Ils ont tous vu un dingue fracassé l'entrée des lieux, moi en l’occurrence. Les serveurs ne sont pas à exclure du lot. Aussi, lorsque je remarquais l'un d'eux semblant en pleine discussion avec ce qui s'annonçait comme le patron de la bâtisse, je sus que j'allais avoir de sérieux ennuis avant de pouvoir déguster une bonne côte de porc... Cette journée s'annonce chaotique...