>> Physique
Le monde de One piece est à la fois complexe et simple. S'il est strictement lié à un Cahier des charges poétiquement chargé et plus fournit que la barbe d'un bucheron, les règles qui le composent sont elles, tellement simple que leur application semble aller de soit. Dans la catégorie "Champ Morphique et Condiments" par exemple (oui. On y a annexé les règles relatives aux condiments pour remplir la dernière page et ne pas gâcher de papier) on trouve une règle "L'apparence ne trompe pas". C'est pourquoi les bonhommes au physique de monsieur-tout-le-monde sont le plus généralement des monsieur-tout-le-monde et que les types à la tronche gratinée et aux gouts vestimentaires excentriques font de très bons candidats pour les aventures rocambolesques. C'est bien connu : dans un monde poétique comme celui de One piece où les types qui écopent de titres aussi évocateurs que "L'homme le plus fort du monde" ou "Le héros de la marine"sont généralement de gros gaillards moustachus d'une demi-douzaine de mètres, les caractères qui sortent de l'ordinaire sont emballés le plus souvent dans un corps du même tonneau. __________________________________________________________ Munster est un gros bonhomme trapu charpenté comme un sac à patate dont on aurait trop serré le nœud. Il est grand mais franchement mal proportionné et donne l’impression d’avoir été compressé au niveau du torse. Son corps est en fait taillé comme s'il avait été soumis localement à des niveaux de gravités différents ce qui lui donne la silhouette d’une autruche ou d'une paire de jambes interminables et ténues sur laquelle on a greffé le buste d’un obèse ; ce qui donne généralement à ses interlocuteur la désagréable sensation de s’adresser à deux personnes à la fois. Quelques intrépides se sont même risqués à soulever la bure du bonhomme pour s’assurer qu’ils n’y trouveraient pas par hasard un petit malin gringalet portant un copain à califourchon sur ses épaules mais sont tous tombés avec stupeur sur un bassin reliant bel et bien deux parties du même corps en se heurtant au passage à la vision cauchemardesque d'un unique caleçon à motifs recouvrant le tout. Puis, ils se sont généralement heurtés à un poing relié au susdit buste par procuration d'un bras. Le corps de Munster tourne en fait comme un évier bouché : L’évacuation fonctionne mais rien ne coule dans la tuyauterie en dessous. Et lorsqu’on lui pose la question sur sa forme de louche, il fait preuve d’une mauvaise foi insondable en prétendant que ce sont les autres qui sont mal fichu puisque le système digestif ne descend pas en dessous de la ceinture. La montre qu’il porte au poignet est légèrement en retard sur son nombril puisqu’il subsiste un décalage horaire d’une bonne dizaine de secondes entre les deux. Sa démarche rappelle plus ou moins celle d’un échassier portant une marmite et lui donne la sensation d'être perpétuellement à cheval entre deux stades du diagramme de l’évolution. Lorsqu’il court ou charge, les différentes parties de son corps semblent fonctionner indépendamment les unes des autres en se gênant entre elles. Se faire foncer dessus par Munster Fonduslip est donc une expérience traumatisante qui donne subitement l’impression d’être en infériorité numérique. Le visage du bonhomme est savamment camouflé derrière une moustache parfaitement taillée (car oui, passé un certain stade, on abandonne l’emploi du verbe ‘couper’ au profit de la ‘taille’. Un coupe ongle coupe les ongles, un taille-haie, taille les haies) recouvrant une bouche pouvant parfois atteindre des proportions insoupçonnées (notamment lorsqu'il mange, hurle sur les autres ou, à plus forte raison, les deux à la fois). Globalement, Munster est flanqué du cas d'école de la tronche dite du "Brave gars", ce qui lui attire naturellement la sympathie des autres. Cependant, sa tendance à perpétuellement froncer les sourcils et à adopter un air bougon relativise généralement la bienveillance en magnanimité forcée. De son propre aveu, sourire lui fille d'horribles crampes. Quoique ça ne saute pas aux yeux aux premier abord, le bonhomme commence à avoir de la bouteille. Et malgré un corps relativement bien épargné par la rançon d'une soixantaine d'années de barouds plus ou moins mouvementés, son grand âge commence à le rattraper à petite foulées. Le crin de sa barbe tire dangereusement sur le blanc, sa peau se parchemine et son couvre chef cache un début de misère. Et quoiqu'il prétends ne pas s'en soucier, en aparté, il se surprend parfois à tenter de se compter les cheveux où à lorgner discrètement sur les vitrines de magasins de produits cosmétiques où autres flacons de lotions pour la peau. Ses tendances pantagruéliques ont fini par avoir raison de son visage initialement taillé au burin dans du granit et tirant de plus en plus vers le pot de patte à modeler malmené dans le coffre d'une voiture. Bref, Munster est un individu qu’on remarque de loin dans une foule. D’abord parceque son allure aimante les regards, ensuite parceque, de toute façon, il dépasse les autres de plusieurs têtes, enfin en raison des couleurs criardes de son accoutrement de carnaval. Car Munster Fonduslip n’est pas qu’un type mal fichu ; C’est un type mal fichu fagoté comme l’as de pique d’un jeu de carte fantaisiste du Vatican.
>> Psychologie
Si le physique de Munster est aussi gratiné, c'est parce que le caractère excentrique qu'il contient est tellement encombrant qu'il a fatalement finit par déborder sur l'enveloppe. Car Fonduslip a le genre de personnalité écrasante capable de siphonner l'attention simplement en rigolant à ses propres blagues. Généralement, le passage de la tornade Munster dans une taverne laisse la désagréable sensation aux clients d'être doté du charisme d'une palourde. Ce n'est pas tant que Munster soit lui même doté d'un très fort charisme. Simplement, c'est un homme de convictions. Traditionnellement, on associe ce genre de formule toute faite à des individus dotés d'un grand sens de l'honneur et résolument bons. C'est une erreur. Etre gonflé de convictions ne fait pas nécessairement de vous une personne pleine de morale et volontaire ; C'est ce qui fait de vous quelqu'un de borné, plein de préjugés, bavard et ayant tendance à interrompre les interlocuteurs lorsque ceux-ci formulent plus d'une phrase à la suite en leur reprochant dans la foulée de monopoliser le discours. Et c'est, par procuration, ce qui fait de vous quelqu'un de plus intéressant que l'interlocuteur en question. Munster est donc bourré de convictions. Techniquement, il en est bourré d'une seule. Mais elle prend tout simplement trop de place pour que le bonhomme ne puisse s'en encombrer d'une autre. Il s'agit là d'une forme de certitude proche de la tumeur : chronique, évolutive, particulièrement agressive et pourrissant la vie de l’hôte et de son entourage. S'il avait croisé un certain prince Hollandais de l'ère Victorienne se morfondant à coups de questions existentialo-philosophico-proutproutiènnes, Munster aurait sans doute agrippé le pauvre gus par le colback pour lui crier "NE PAS ÊTRE, BORDEL !!". Car Munster Fonduslip est persuadé de n'être qu'un personnage balancé comme les autres dans un monde inventé de toute pièce qu'il trouve, du reste, particulièrement grotesque. Et nonobstant les déploiements de bons sens parfois candides de ses contemporains pour le convaincre du contraire à coup de "Munster, mon vieux. Bien sur que t'existe. Sinon j'parlerai dans l'vide" ou de "Moi les gars, j'vous l'dis : Le coup d'la chope qu'existe pas, c'est encore une excuse pour pas payer sa bière !", le bonhomme n'en démord pas. La bizarrerie de cette idée a fait germer dans le cerveau du bonhomme un nombre faramineux de corollaires toutes plus farfelues les unes que les autres. Si le monde est fictif, c'est qu'il s'agit d'une histoire. Et s'il s'agit d'une histoire, elle est soumise à une série de codes narratifs et de nécessites scénaristiques que Munster tenait absolument à découvrir et cataloguer dans son "Encyclopédie de l'incohérence". Fonduslip est certes un illuminé. Mais un illuminé résolu et flanqué d'un cerveau bien irrigué et d'une imagination débridée. C'est le genre de recette qui donne des en-têtes de ce calibre : - L'existence de personnes sortant du lot se distinguant des autres par leur récurrence, c'est à dire leur lien à l'histoire dépend de l'abondance des autres, jouant le rôle de figurants et de faire valoir. Ces derniers arrivent, font ce pourquoi on les a mit là (la plupart du temps pour en prendre plein la tronche, sans que ce soit le point central de l'histoire) et repartent soit par leurs propres moyens soit traînés par d'autres figurants dans un meilleur état et ne sont là que pour les besoins de l'histoire gravitant autours de quelques privilégies. Il est facile de distinguer les héros des figurants : les premiers sont généralement du bon coté de l'épée et passent beaucoup moins de temps par terre. Les règles sont, pour eux, permissives plutôt que bêtement restrictives car
- sans histoire, un personnage ne devient rien de plus qu'un figurant, et sans personnage, une histoire n'en est plus une. En d'autres termes : tant que l'histoire existe, elle ne vous laissera pas mourir aussi facilement, quitte à raturer sauvagement le cahier des charges de la cohérence. Les interventions in extremis sauvant les individus d'une mort à priori assurée se concrétisent parfois car les contraintes qui les rendent impossible dans d'autres mondes moins bordéliques sont détendues, voire franchement molles
- Cela dit, le statut privilégié de héros est une épée de Damoclès. Car s'il assure à l’intéressé de ne pas mourir avant que l'intrigue ne le lui permette (soit au terme d'une saga trépidante et après l'annonce de certaines signes avants-coureurs qui ne trompent pas ; la sonate au violon étant sans aucun doute le plus récurant du tas), cette fonction implique aussi que le personnage en prenne plein la tronche entre temps, même (et SURTOUT) s'il tente d'échapper à cette corollaire. Le héros doit mener une vie trépidante, ce qui, en termes moins fleuries signifie "dangereuse, haletante, et très douloureuse". Traditionnelement, pour y parvenir, le héros doit avoir une motivation, un but ou une mission (de préférence très dure à atteindre. "Jean Christophe le fermier souhaitant cultiver les meilleurs tomates du village" ne fait pas une bonne histoire) pour aiguiller ses aventures plus loin que le village voisin.
- Les histoires sont comme des adolescents puceaux. Dès qu'elles entrent en contact les unes avec les autres, elle ne veulent plus se lâcher et feront tout, même en dépit du bon sens, pour se recroiser tôt ou tard. Et par procuration de celles-ci, les héros qui se croisent finiront immanquablement par se mettre sur la gueule ou devenir compagnons d'aventures - voir dans certains cas, les deux à la fois. Évitez donc de croiser la route de gros balèzes aux envies d'homicides. Car même si vous arrivez à leur échapper une fois, vous pourriez y parier votre caleçon que vos histoire vont se donner rancard sur un champ de bataille un jour ou l'autre.
Si son allure tient de la louche, sa personnalité, elle, tire sur la cocotte minute. Malgré son volume, Munster donne l'impression d'être tout simplement trop petit pour toute l'énergie qu'il contient. Du coup, celle-ci s'est condensée, un peu comme de la vapeur mise sous haute pression dans un contenant prêt à péter à la première secousse venue. Comme la cocotte-minute, le bonhomme doit donc régulièrement lever la soupape pour relâcher la pression faute d'exploser. Ce processus peut se traduire par un soudain accès de mauvaise humeur épidermique ou par une série de flatulences MAC-3. Dans les deux cas, mieux vaut se mettre à l'abris. Munster peut donc se révéler quelqu'un de détestable. Lorsqu'on ne le lance pas sur ses sujets favoris en faisant preuve d'une grande déférence à son égard, il n'est en revanche que passablement désagréable. C' est, en outre, un personnage entier, plutôt prompt à crier ordres et menaces à des gens se trouvant pourtant à quelques centimères de lui, et surtout totalement hermétique à l'arrivage de nouvelles suggestions, estimant souvent qu'il est le seul à détenir la bonne solution face à une difficulté. Ce n'est certainement pas un idiot, mais son intelligence fonctionne à la manière d'une locomotive, c'est à dire qui avance sur des rails et qu'on ne peut donc guère diriger. Munster traîne une solide réputation de Cuisinomancien Saucier accomplit*. Cette notoriété n'est en fait que le résultat insoupçonné d'une combine visant à déguiser ses travers Pantagruéliques pour que ceux-ci ne se heurtent pas à la doctrine qu'il martèle à tout bout de champs. Car s'il est mal perçu pour un Prêcheur de son calibre d'apprécier une gamelle de rôtis de porc aux lentilles que l'on prétendait fictif juste avant de se faire servir (et donc incapable de réveiller le moindre appétit), il l'est encore plus de demander du rab' après avoir léché l'assiette. Outre cette réputation de Cuisinomancien, notre bonhomme est (plus modestement) reconnu comme l'auteur d'une série de livres publiés en saga sous le nom de l' "Effet vache qui rie de la fiction". En fait de livre, il s'agit plutôt d'une forme saugrenue de défouloir dont on pourrait résumer le contenu à "un personnage, des enclumes, la gravité". Si la maxime "les enfants battus battent leur enfants à leurs tour" peut parfois se révéler exacte, dans le cas de Munster, elle donnerait plutôt : "les personnages malmenés malmènent leurs personnages à leur tour". Sa nature teigneuse le pousse régulièrement à agir de façon expansive et inconsidérée et il peut se montrer violemment expéditif lorsqu'on aborde avec lui certaines questions épineuses sur les bizarreries naturelles du globe. La crédulité de ses contemporain (à qui les ragots sur une tripotée de fruits donnant des pouvoirs surnaturel à qui les mange MAIS SURTOUT PAS PAR DEUX, ne fait pas hausser un sourcil) l'exaspère et déclenche généralement l'une des réactions biliaire, épidermique ou flatulente évoquées plus haut. Naturellement, Munster est d'un scepticisme à toutes épreuves et peut s'enflammer plus facilement qu'une brindille de paille sur un barbecue pour des brouettes. Il est flanqué d'une forme atrophiée de sens moral largement nourrit par son manque total d'empathie. En combat, il peut s'avérer particulièrement vicieux et n'hésitera pas à taper D'ABORD là ou ça fait le plus mal, voir à sortir la fameuse technique du "Oh-mais-c'est-pas-le-pape-derrière-toi-?" lorsqu'il se sent réellement en danger. Ses convictions farfelues l'imperméabilisent à toute forme de remords, fussent-ils les plus légitimes puisque, dit-il "J'vois pas pourquoi j'me billerai pour avoir fictivement tapé un mec fictif avec un pied qu'existe pas dans des roustons imaginaires."* Nota : La cuisinomancie est une pratique divinatoire, variante de l'astrologie ou de la cristallomancie, et selon laquelle d'ordinaire la contemplation de la nourriture ou de la boisson, ou plus précisément de l'interprétation des motifs qu'elles forment permet (selon les ragots de mégères) de lire l'avenir dans une certaines mesure (une idée que Munster savait en théorie impossible à moins d'être l'auteur). Et si la plupart des cuisinomanciens ont une nette faiblesse pour les feuilles de thé, notre prophète, lui, prétend pouvoir lire n'importe quel plat, en particulier ceux qui auraient macérés dans du beurre (d'ou le "saucier" dans "Cuisinomancien saucier") et si possible en grande quantité. Une fois l'/les assiette(s) sous le nez, Munster pretexte un bref accès de conjonctivite et assure aux témoins qu'il arriverai finalement beaucoup mieux à lire le plat à l'aide de son palais, de sa langue et de son estomac plutôt qu'avec ses yeux.
>> Biographie
- Spoiler:
[Bon, vous pourriez me reprocher d'avoir été chiche sur le déroulement de la vie du bonhomme que vous n'auriez finalement pas tord. Cela dit, j'ai deux excuses en poche pour expliquer que cette section n'ai de biographique que le nom (ou presque) : Premièrement : J'ai bien comprit que les histoires trop longues vous enchantaient pas (et c'est tant mieux parceque moi non plus). Or Munster étant un bonhomme d'une soixantaine d'année, si j'veux me monter exhaustif sur son parcours, ça va me prendre facilement le double en ligne. D'où les flashforward réguliers qui plombent un peu le rythme de la narration mais me permettent de raccourcir le récit (et vous faciliter la lecture d'une traite). Deuxièmement : J'ai mit plus d’emphase que d'ordinaire sur certaines parties isolées de sa vie (notamment le tout début) puisqu'outre le fait de simplement décrire le parcours du bonhomme, l'exercice du background me permet surtout d'expliquer les tenants de ses travers psychologiques gratinés ("le monde fictif" et tout ce qui en découle) pour conserver une certaine cohérence - La psycho décrit les convictions de Munster ; l'histoire en établie les causes. Et pour ça, il a fallu que je passe deux trois détails à priori anecdotique de son existence à la loupe - au dépend d'autres passages sur lesquels j'me suis montré plus évasifs ou d'autres que j'ai carrément tenté d'éluder. Bref, dans l'ensemble tout ce bloubi-boulga est un partit prit. A la reflexion, j'suis pas sur de l'avoir négocié le mieux du monde mais le caractère gratiné du gus autant que son grand âge m'ont rendu l'exercice du background plus laborieux que je l'aurai crû.] Les facteurs qui ont, peu à peu, conduit Munster Fonduslip à devenir ce qu'il est, sont légion ; comme autant de petits cailloux semés dans le sillage d'une vie chaussée des bottes de sept lieues. Son parcours est tout simplement trop accidenté pour qu'un Biographe ne s'y engage sans une troupe de Sherpas aguerris pour le guider et trop long pour permettre à une meute de loups de le pister à l'odeur - et pourtant le bonhomme fait honneur à son prénom. Dans le quarté gagnant des dits facteurs, on trouve notamment son lieu de naissance : Drama Island. Ce petit royaume est en fait coincé comme un vieux quignon de pain au fond d'un tiroir, sur une île n'apparaissant pas sur la majorité des cartes et n'ayant de nom accolé sur aucune d'entre celle qui la répertorient, ce qui lui a valu de n'être considéré que comme une simple tache de café par de nombreux navigateurs et cartographes. On pourrait tendre le ponpon à cette île tout en excès à l'égard de, disons, l'affinité de Munster pour son sens de la mise en scène théâtral ou son gout prononcé pour les costumes tendancieux puisqu'à Drama Island, le kitch est une constante. Enfin, on ne commence pas un livre par le milieu si on veut en comprendre l'intrigue. Et Munster Fonduslip est mine de rien quelqu'un de franchement intriguant. Commençons donc par situer le cadre : Les accouchements sont, d'ordinaire des évenements à forte teneur pleurnicharde et modestement dangereux. Bien évidement, à Drama, leur intensité est multipliée puisque, toute action sur l'île étant régit par les codes de la narration propres aux romans à l'eau de rose ou aux soap, ils ne peuvent se terminer que de deux manière : Soit, d'une part tout se passe pour le mieux dans le meilleurs des mondes ; Soit, d'autre part, la mère meurt tragiquement pour mettre son bébé au monde, non-sans-avoir-utilisé-son-dernier-souffle-pour-lui-donner-un-nom-avant-de-s'éteindre-définitivement-en-laissant-son-mari-éploré-seul-avec-son-bébé-alors-qu'une-demi-douzaine-de-violons-jouent-crescendo-dans-la-pièce-à-coté. La donne étant de 50/50, il va sans dire que le rôle de "Maman" n'est pas une situation stable ni n'offre de grandes perspectives d'avenir. Cela dit, les Dramaturges (les habitants du crû), sont généralement trop occupés à vivre leur vie de nigauds hyper-codés pour étudier les statistiques, même lorsqu'elles sont aussi alarmantes. Munster, lui, à eu droit à un traitement de défaveur (outre bien sur le fait d'être né dans un endroit aussi cauchemardesque) lorsqu'au moment de sa venue au monde, le code narratif de l'île se trompa de cible en faisant mourir le père plutôt que la mère. Enfin, pour couronner le tout, la sonate au violon fut remplacée à la dernière minute par un quartet de trompettistes. Déjà, la mère Fonduslip avait fait preuve d'un manque cruel de coopération en décidant subitement de se mettre à accoucher au beau milieu d'un pic-nic à la campagne. Mais leur isolement n’alerta pas le paternel qui s'improvisa sage femme en se contentant de dire "pousse chérie" à la cantonade (oui. les boulot de ce genre n'existent pas vraiment sur Drama Island puisque tout le monde peut en faire office pour l'occasion. D'ailleurs, il va sans dire que, comme dans n'importer quel soap, on ne trouve pas de cordon ombilical. Et n'allez pas chercher de liquide amniotique non plus. Dans ce coin, lors des accouchements, tout ce qui émerge du vagin, c'est un beau bébé recouvert de cristalline) Ce fut alors que Munster montrait le bout de son petit visage rougeâtre qu'un gros dysfonctionnement narratif intervint. Le père agrippa la main de sa femme, prit de spasmes aussi soudains que violent et lui hurla d'un air dramatique : "Aaah C'est trop dur mon amour. Je crois qu'il va me disloquer l’utérus ! Quand je serais parti, dis lui bien que je l'ai aimé tout ce temps où je l'ai porté en moi !" Puis, avant de s'en retourner vers le bébé braillant qui était finalement sortit : "Tu entends ? Je t'aimes ... Munster." Là dessus, le bonhomme tomba raide mort dans les bras de sa femme. Au loin, quatre trompettistes entonnaient un air de circonstance de leurs instruments qui l'étaient beaucoup moins. De son coté, la narration se grattait la tête en se demandant ce qu'elle avait fait de travers. Le mode de vie des habitants de Drama n'est pas tant le fait d'une pression exercée sur leur existence par une puissance supérieur mais par une nécessité assez vieille et remontant assez loin pour s'être ancré dans leur patrimoine génétique à coups de burins Darwinistes. C'est par procuration de cet héritage encombrant que les Dramaturges manquent du recul nécessaire pour réaliser le caractère parfois ridicule de leurs habitudes (au même titre que, disons, la libido a réussit à convaincre les hommes qu'une paire de pis greffés sur le torse des femmes pouvait être vachement excitant.). Ces derniers siècles, les étrangers ayant accosté à Drama se sont fait trop rare et leurs escales trop brèves pour permettre à leur bon sens de se diluer dans le cerveau des autochtones si bien qu'au final, le mode de vie pourtant gratiné des Dramaturge n'a jamais souffert de la moindre forme de contestation ; qu'elle soit physique ou intellectuelle. Les gens continuent de vivre ainsi parce qu’ils ne savent pas faire autrement. Munster a catalysé à lui tout seul les siècles de cette contestation muette. Sa naissance dans des circonstances inédites en a fait un individu hors schéma sortant du carcan narratif restreignant ses contemporains de la pointe des cheveux à la plante des pieds. Si la venue au monde scénaristiquement opaque du bonhomme compose la charpente et l'ossature bancale de la métaphorique maison que représente Munster, alors le reste de son parcours n'en est finalement que la toiture puisque la vie de notre bonhomme est une perpétuelle succession de tuiles. Bon gré mal gré, Munster a passé (quoiqu'on pourrait confondre dans ce cas de figure l'emploi du passé composé avec celui du subi composé) une bonne partie de son enfance sur Drama Island en tentant dans la mesure du possible de s'isoler de ses concitoyens (généralement à coups de poings, de pieds ou de portes qui claquent). Cette morosité confinant à la misanthropie fut bien sûr interprétée de travers par ses pairs qui s'empressèrent de le cataloguer dans la catégorie (toujours typique du soap) privilégiée des "jeunes-hommes-ténébreux-et-distant-en-apparence-mais-cachant-sous-cette-couche-de-glace-un-grand-coeur", lui valant du même coup d'être courtisée par la tendance féminine de cette catégorie : "les jeunes-filles-ayant-un-gout-prononcé-pour-les-mauvais-romans-gothique". Bien sur, le jeune Munster eut vite fait de décourager les concernées (toujours à coups de poings, de pieds, de portes qui claquent ou d'un mélange des trois). Les années se succédant, ses espoirs de voir un bateau salvateur accoster sur l'île se réduisaient comme peau de chagrin. Puis, un jour, il comprit ce qui n'allait pas : Un monde fictif n'est régit ni par les probabilité ni par la chance. Les choses ne s'y passe pas parcequ'elles ont statistiquement une chance de s'y passer, ni n'existent parceque leur existence est probable et se goupille cohéremment avec le reste. Les choses s'y passent par nécéssité scénaristiques et ne s'y passent pas parceque l'histoire n'en a pas besoin. Elles existent maintenant et ici parcequ'elles doivent exister. La vitre bar-balle qui passe entre le héros et l'armada de fusils pointés vers lui au moment ou ceux qui les tiennent pressent la gachette n'est ni probable ni aiguillée par la chance. Elle est nécéssaire et n'existe qu'à ce moment précis pour prendre les balles à la place du héros. Elle n'existait pas avant et cessera d'exister une fois le héros sauvé puisque l'histoire n'en a tout simplement plus besoin. De même, le bateau salvateur n'arrive pas lorsque l'on attends qu'il arrive. Il arrive lorsque l'on a besoin qu'il arrive. Si quelque chose ne se produit pas lorsque on l'attends, il faut forcer le forcer à se réaliser. L'histoire ne sauve pas son héros parcequ'elle le peut ; Elle le sauve parcequ'elle n'a pas le choix. Et le plus important c'est que pour le faire, elle a carte blanche.
>> Test RP
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