L'agitation sur le port bat son plein. Du monde à l'embarcadère; du beau principalement. Tout en costume, en air suffisant et en conversations niaises. Le bourdonnement incessant d'abeilles gorgées de nectar. Un raffut irritant. Mais il faut l'endurer. C'est le prix de la traversée. En plus de celui en argent comptant. J'ai voulu aller me renseigner du tarif d'un aller simple vers Reverse Mountain auprès du contremaître de la Translinéenne. Ossoï m'a devancé. Après avoir avancé sa courtoisie comme prétexte. Grand bien lui en a pris. Un geste déplacé aurait pu partir par pur réflexe si le collet monté m'avait craché solennel comme il se doit de l'être face aux gens de marque le montant à la face. 3 Millions Berrys, cher Monsieur. Rien que ça. Un par tête.
La mienne, celle de Ossoï, et celle de la gosse. Lui me suit par allégeance. Je lui ai sauvé la mise, il m'estime digne de placer sa fidélité et sa lame entre mes mains. Raisonnement stupide, je lui en ai maintes fois fait la remarque. Il est le premier à m'avoir secouru. Nous sommes quittes. Mais arrivé un certain âge, les gens comme lui n'en font plus qu'à leur tête. Alors il me suit. Et Lina. Elle est là. À défaut d'être ailleurs. Sème les turbulences sur son passage, impertinente, impétueuse. Mais on fait avec. Au cours des six derniers mois, le trio a appris à vivre ensemble. Et se rend maintenant sur Grand Line. J'y ai pris rendez-vous avec le flûtiste. Le seul gibier à toujours me filer entre les pattes. Un curieux gibier. Motivations inconnues, caractère changeant. Raison de plus pour ne pas lâcher l'affaire. Seulement, un problème de taille se pose. Comment atteindre la Route des Périls.
J'avais en tête de prendre un rafiot par la force à une bande d'apprentis pirates comme il y en a plein. Le vieux samouraï a émis des réserves. Je l'ai écouté. Son avis est digne d'attention. Lina a suggéré de détrousser quelques gras bourgeois. Ossoï a tiqué à nouveau, moi avec lui. Seulement, les solutions à disposition s'épuisent. Et on se retrouve avec les relances de la môme qui nous balance trois fois par heure la même réplique.
Alors, qu'est qu'on va faire ?
J'en sais rien, qu'est ce que tu veux faire ?
Moi je te dis, qu'est ce que tu veux faire et tu me réponds je n'en sais rien que veux-tu faire; alors je dis faisons quelque chose.
Ok. Qu'est ce que tu veux faire ?
Rhaa !
Mais Lina a pas tort. On est dans une impasse. J'aime pas les impasses. Heureusement, je sais comment en sortir. Il suffit de trouver les idées. Il faut creuser. Creuser là où le doré s'effrite. J'avise Ossoï que je pars en quête de la solution miracle et que je veux pas de la petite dans les pattes. Elle réplique déjà qu'elle est pas petite, je l'ignore; le ronin prend le relai et la raisonne, je file vers les quartiers moins huppés de la ville. J'y trouverai bien une réponse à notre problème. On doit pas être les seuls sans le sou à chercher à poser le pied sur un navire en partance pour Grand Line. J'ai encore trois heures avant que le Fortuna ne file vers le grand large. Ça devrait suffire.
Première heure, premier tripot. Pas plus de lumière que dans des catacombes, même en plein jour. Un coin à pouilleux, des vrais. Deux trois client moins crades que la moyenne, rien qui ne soit vraiment intéressant. Une bière pour la forme, à guetter l'improbable. Et c'est tout. Deuxième heure, deuxième tripot. C'est mieux. Un petit air de musique juste ce qu'il faut entrainant. Pas suffisamment pour faire danser les clients mais quand même assez pour en voir certains taper dans leurs mains. Ça discute paisiblement, ça consomme gentiment. Trop gentiment. Pas de pirates dignes de ce nom ici. Mais j'ai glané le nom du troisième tripot, qu'on me dit plus dans le ton de ce que je cherche. Troisième heure. J'y débarque. On m'a bien renseigné. Ça pullule de crapules, ça pue la coquinerie. Parfait. Y'a plus qu'à repérer qui parmi tous ces forbans sont les gros poissons de l'aquarium. Les oreilles trainent sur les conversations, habitude oblige. Les plus saouls jouent déjà à se mesurer l'entrejambe. Et quand sortir le sabre ne suffit plus, on balance des noms. Jusqu'à prononcer celui qui clôt les débats. Mandrin. Luiz Mandrin.
Inutile de demander, les ragots circulent déjà. Un voleur. Le plus formidable du coin. Un expert. Avec une prime rondelette sur la tête. Il doit rejoindre Grand Line bientôt. Plus d'or à s'y faire. Autrement dit plus de renom à la clef. Il va quitter les Blues sur un coup d'éclat, affirme la grande gueule. Son plus grand chef-d'œuvre.
Et c'est pour ce soir !
Ce soir ??
Ce soir ? Brave homme. Un puis d'informations. Y'a pas à hésiter. Juste à agir. Filer le train au bavard, intercepter Mandrin, le cogner, fort. Et encaisser la prime. Facile. Une demi-heure et une pinte passent. On décolle. Surprise. Trois hommes quittent l'endroit avec celui qui m'intéresse. La garde rapprochée. Ils désertent la taverne en hâte, je leur emboite le pas, vingt mètres en retrait.
Le soleil décline déjà dans le ciel. L'embarcation devrait bientôt quitter le port. Il va falloir intervenir vite. Très vite. Au pire, je présenterai mon billet en la personne de Mandrin. Il couvre largement nos frais. Et si l'on en croit les rumeurs, la Translinéenne n'est pas symbole de probité. Je jetterai un œil plus attentif sur leurs affaires, à l'occasion. Dix minutes d'une filature sans accroc plus tard, on arrive sur les quais. Les quatre en rejoignent trois autres. Cible verrouillée. Perruque, tricorne, air noble. On le prendrait presque pour un vrai. Bref échange. Les uns invectivent les autres pour leur retard. Le ton baisse. On parle d'être prêt pour l'action. Difficile de tout saisir. La faute au bruit, dans mon dos. On vient.
Crr
Alors ?
T'as manqué de t'en prendre une gamine.
Il est où ton plan ?
J'y réfléchis encore.
Ah, bravo.
Ferme la.
La cloche sonne. Un matelot en bord de berge appelle les derniers passagers. C'est maintenant ou jamais.
Nous sommes à court de temps. Le plus sage serait d'attendre en ville jusqu'au prochain navire en partance pour Grand Line.
Non. Suivez-moi. À distance.
Mandrin et sa bande s'avance sur la berge. Je le suis. À découvert, pas le choix. Le temps presse. Le petit groupe arrive à hauteur de l'employé qui les dévisage, suspicieux. Je force l'allure. Serre les poings. S'il monte dans ce navire, c'est perdu. Le voleur gentilhomme lâche quelques mots, jovial. Et sort de son costume une bourse largement garnie. Le commis se détend, fais signe au groupe entier de monter à bord. Puis m'aperçoit.
Monsieur ?
Merde. Y'a plus guère d'alternatives.
On est avec eux.
Avec ces Messieurs ?
Un problème ?
Euh, n...non monsieur. La Translinéenne vous souhaite un agréable voyage, monsieur.
Bien.
C'est passé. Pas dit qu'on voit pas quelques contrôleurs nous rendre visite sous peu; on avisera au moment. On foule à notre tour le pont du Fortuna. L'ordre de lever l'ancre est donné. Le vent vient gonfler les voiles, on part. L'essentiel est acquis. Grand Line m'attend.
La mienne, celle de Ossoï, et celle de la gosse. Lui me suit par allégeance. Je lui ai sauvé la mise, il m'estime digne de placer sa fidélité et sa lame entre mes mains. Raisonnement stupide, je lui en ai maintes fois fait la remarque. Il est le premier à m'avoir secouru. Nous sommes quittes. Mais arrivé un certain âge, les gens comme lui n'en font plus qu'à leur tête. Alors il me suit. Et Lina. Elle est là. À défaut d'être ailleurs. Sème les turbulences sur son passage, impertinente, impétueuse. Mais on fait avec. Au cours des six derniers mois, le trio a appris à vivre ensemble. Et se rend maintenant sur Grand Line. J'y ai pris rendez-vous avec le flûtiste. Le seul gibier à toujours me filer entre les pattes. Un curieux gibier. Motivations inconnues, caractère changeant. Raison de plus pour ne pas lâcher l'affaire. Seulement, un problème de taille se pose. Comment atteindre la Route des Périls.
J'avais en tête de prendre un rafiot par la force à une bande d'apprentis pirates comme il y en a plein. Le vieux samouraï a émis des réserves. Je l'ai écouté. Son avis est digne d'attention. Lina a suggéré de détrousser quelques gras bourgeois. Ossoï a tiqué à nouveau, moi avec lui. Seulement, les solutions à disposition s'épuisent. Et on se retrouve avec les relances de la môme qui nous balance trois fois par heure la même réplique.
Alors, qu'est qu'on va faire ?
J'en sais rien, qu'est ce que tu veux faire ?
Moi je te dis, qu'est ce que tu veux faire et tu me réponds je n'en sais rien que veux-tu faire; alors je dis faisons quelque chose.
Ok. Qu'est ce que tu veux faire ?
Rhaa !
Mais Lina a pas tort. On est dans une impasse. J'aime pas les impasses. Heureusement, je sais comment en sortir. Il suffit de trouver les idées. Il faut creuser. Creuser là où le doré s'effrite. J'avise Ossoï que je pars en quête de la solution miracle et que je veux pas de la petite dans les pattes. Elle réplique déjà qu'elle est pas petite, je l'ignore; le ronin prend le relai et la raisonne, je file vers les quartiers moins huppés de la ville. J'y trouverai bien une réponse à notre problème. On doit pas être les seuls sans le sou à chercher à poser le pied sur un navire en partance pour Grand Line. J'ai encore trois heures avant que le Fortuna ne file vers le grand large. Ça devrait suffire.
Première heure, premier tripot. Pas plus de lumière que dans des catacombes, même en plein jour. Un coin à pouilleux, des vrais. Deux trois client moins crades que la moyenne, rien qui ne soit vraiment intéressant. Une bière pour la forme, à guetter l'improbable. Et c'est tout. Deuxième heure, deuxième tripot. C'est mieux. Un petit air de musique juste ce qu'il faut entrainant. Pas suffisamment pour faire danser les clients mais quand même assez pour en voir certains taper dans leurs mains. Ça discute paisiblement, ça consomme gentiment. Trop gentiment. Pas de pirates dignes de ce nom ici. Mais j'ai glané le nom du troisième tripot, qu'on me dit plus dans le ton de ce que je cherche. Troisième heure. J'y débarque. On m'a bien renseigné. Ça pullule de crapules, ça pue la coquinerie. Parfait. Y'a plus qu'à repérer qui parmi tous ces forbans sont les gros poissons de l'aquarium. Les oreilles trainent sur les conversations, habitude oblige. Les plus saouls jouent déjà à se mesurer l'entrejambe. Et quand sortir le sabre ne suffit plus, on balance des noms. Jusqu'à prononcer celui qui clôt les débats. Mandrin. Luiz Mandrin.
Inutile de demander, les ragots circulent déjà. Un voleur. Le plus formidable du coin. Un expert. Avec une prime rondelette sur la tête. Il doit rejoindre Grand Line bientôt. Plus d'or à s'y faire. Autrement dit plus de renom à la clef. Il va quitter les Blues sur un coup d'éclat, affirme la grande gueule. Son plus grand chef-d'œuvre.
Et c'est pour ce soir !
Ce soir ??
Ce soir ? Brave homme. Un puis d'informations. Y'a pas à hésiter. Juste à agir. Filer le train au bavard, intercepter Mandrin, le cogner, fort. Et encaisser la prime. Facile. Une demi-heure et une pinte passent. On décolle. Surprise. Trois hommes quittent l'endroit avec celui qui m'intéresse. La garde rapprochée. Ils désertent la taverne en hâte, je leur emboite le pas, vingt mètres en retrait.
Le soleil décline déjà dans le ciel. L'embarcation devrait bientôt quitter le port. Il va falloir intervenir vite. Très vite. Au pire, je présenterai mon billet en la personne de Mandrin. Il couvre largement nos frais. Et si l'on en croit les rumeurs, la Translinéenne n'est pas symbole de probité. Je jetterai un œil plus attentif sur leurs affaires, à l'occasion. Dix minutes d'une filature sans accroc plus tard, on arrive sur les quais. Les quatre en rejoignent trois autres. Cible verrouillée. Perruque, tricorne, air noble. On le prendrait presque pour un vrai. Bref échange. Les uns invectivent les autres pour leur retard. Le ton baisse. On parle d'être prêt pour l'action. Difficile de tout saisir. La faute au bruit, dans mon dos. On vient.
Crr
Alors ?
T'as manqué de t'en prendre une gamine.
Il est où ton plan ?
J'y réfléchis encore.
Ah, bravo.
Ferme la.
La cloche sonne. Un matelot en bord de berge appelle les derniers passagers. C'est maintenant ou jamais.
Nous sommes à court de temps. Le plus sage serait d'attendre en ville jusqu'au prochain navire en partance pour Grand Line.
Non. Suivez-moi. À distance.
Mandrin et sa bande s'avance sur la berge. Je le suis. À découvert, pas le choix. Le temps presse. Le petit groupe arrive à hauteur de l'employé qui les dévisage, suspicieux. Je force l'allure. Serre les poings. S'il monte dans ce navire, c'est perdu. Le voleur gentilhomme lâche quelques mots, jovial. Et sort de son costume une bourse largement garnie. Le commis se détend, fais signe au groupe entier de monter à bord. Puis m'aperçoit.
Monsieur ?
Merde. Y'a plus guère d'alternatives.
On est avec eux.
Avec ces Messieurs ?
Un problème ?
Euh, n...non monsieur. La Translinéenne vous souhaite un agréable voyage, monsieur.
Bien.
C'est passé. Pas dit qu'on voit pas quelques contrôleurs nous rendre visite sous peu; on avisera au moment. On foule à notre tour le pont du Fortuna. L'ordre de lever l'ancre est donné. Le vent vient gonfler les voiles, on part. L'essentiel est acquis. Grand Line m'attend.
Dernière édition par Trinita le Mer 18 Avr 2012 - 21:44, édité 1 fois