-27%
Le deal à ne pas rater :
-27% sur la machine à café Expresso Delonghi La Specialista Arte
399.99 € 549.99 €
Voir le deal

Un début velu

Un homme, son commerce et un fruit. Voilà qui résume au mieux la situation. Ils se scrutentd ans un ultime face à face entre l'homme et la végétation. Keichi le regarde avec minutie sans savoir ce que cette observation peut lui apporté de nouveau. Cet un acte posé à défaut de savoir que faire d'autre. FDD est l'abréviation la plus répandue pour parler des célèbres fruits du démon. Celui-ci lui appartient désormais. Sa forme excentrique et sa coloration étant les seuls obstacles visibles à son ingestion. Au-delà du visuel, se trouve néanmoins une autre forme de répulsion : la crainte. Manger l'un de ses aliments maudits assure à son propriétaire l'obtention d'impressionnants pouvoirs. En fonction du fruit, les pouvoirs divergent. Ils sont tout aussi nombreux, uniques et originaux de par leurs capacités que l'imagination peu le laisser croire. Toutefois, en contrepartie, ceux qui sombrent dans ce pêché perdent la faculté de nager. Une arme à double tranche qu'il faut savoir maîtriser avec précautions. Notre charpentier souhaite-il vivre une vie de minutie? Il n'en est pas certain. Il hésite. Il n'est jamais facile de faire un choix, et pourtant, il vient de dépenser la majeure partie de ces économies pour cet artéfact sur un coup de tête. Que faire?

~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
C'était une nuit comme tant d'autres à Logue Town. Une mince bruine, des rues quasi-désertées, et des tavernes pleines à craquer. Les hommes savaient toujours faire honneur à l'appel d'une bonne chopine et Keichi ne faisait pas exception. Cette rousse pétillante à la saveur mémorable, il en faisait la connaissance pour la troisième fois de la soirée. La journée avait été bonne, pour ne pas dire la semaine entière. Un gros contrat lui avait permis de lancer ses affaires de manière bien plus sérieuses et il profitait des retombées monétaires. Voilà longtemps que ça ne lui était plus arrivé. De simplement entrer dans un bar pour se laisser emporter par les joies de l'invresse. En cette douce réunion, une amertume étrangement chaleureuse refaisait surface. L'ambiance de ce genre d'endroit lui avait manqué et en même temps non. L'alcool ne rejoignait ses lèvres que dans deux moments particuliers de sa vie. Les grandes célébrations, ainsi que les grands tourments. Bière était donc devenue, à la fois, synonyme de joie et de tristesse.

Alors qu'il trempait une dois de plus ses lèvres dans le liquide porteur de son bonheur éphémère, plutôt que dans une déception amère, ses oreilles le titillaient. Conversations, discussions, animations... quoi de plus normal dans un tel lieu de rencontres? Pourtant, au milieu de se raffut enjoué et paroles entrechoquées, des mots avaient su se frayer un chemin jusqu'à ses tympans. Alignements de consonnes et voyelles mutaient en une suite de syllabes qui formaient des mots devenant phrases. Cette parole qui l'envoutait n'était autre que celle d'un autre d’ivrogne de l'endroit. Un habitué? Non, pas vraiment. Malgré qu'il ait fréquenté ce bar de nombreuses fois ses dernières années, le blondinet ne se rappelait pas cette tête. Seule une voix grognarde à l'intonation caverneuse avait survécu aux méandres de la mémoire. Qui était-il? Difficile de le dire avec précision. Ce n'était de toute manière, pas cela qui captivait l'auditoire assemblé à la même table que lui. "C'est un fruit du démon!" avait-il scandé à de nombreuses reprises. Parlait-il donc de ses malédictions de la nutrition? De ses fruits octroyant d'incroyables dons? Oui, cela semblait bien être la cause de se rassemblement. Berrys par dessus berrys étaient empilés. Ce qui avait semblé être comptine et vantardise était en fait une enchère.

-Ohlà! Je ne l'ai pas avec moi! Seul un idiot trimballe tout son or! Mais venez... demain, sur la place publique... le plus offrant repartira avec la cagnotte!

Tels furent ses mots avant de disparaitre par l'entrée principale de la taverne. Son pas chancelant et son rire tonitruant étaient sa signature de départ pour plusieurs ce soir-là. Keichi, désormais intéressé, ne se contentait toutefois pas du peu qu'il avait entendu. Toujours suffisamment fringant pour assurer une démarche convenable, il s'élançait donc à la poursuite du leveur de foule. Coup de coude à droite, poussée sur la gauche, frappe de la hanche au centre, tout était bon pour lui permettre de passer. Disposer des milles et un grognards encombrant l'entrée avait été une tâche plus ardue que de retrouver le vieil homme dans les rues de la ville. Sa vitesse de déplacement par rapport à cette vieille branche tremblante avait été un sacré atout. Une fois à la hauteur du marchandeur, il l'abordait sans plus de façon.

-Excusez-moi. C'est bien vous qui parliez d'un Fruit du Démon?

-Un nouvel acheteur? Je l'ai déjà dit, la vente sera pour demain. Veuillez m'excusez...

-Attendez! J'aimerais quelques informations...

-Alors, commencez par me parlez de vous pardi!

-Hum... si vous y tenez... Je suis Tachibana Keichi. Je suis ingénieur naval ici à Logue Town.
-Et vous vouliez voir si ce fruit pouvait vous être utile?

-En fait, oui...

-Hé bien, cher Keichi, laissez-moi vous donner "quelques détails exclusifs".


Le résumé des paroles qui suivirent entre armoire à glace et sac d'os rebutant furent les suivants : moku moku no mi. C'était donc le nom du fruit. Inutile de faire des recherches. Ce paramecia devait être le plus connu de l'histoire de la charpentrie. Quel homme, travaillant le bois, ne serait pas séduit par le fruit arboricole? Personne ne savait réellement où pouvait s'arrêter les possibilités d'un tel fruit... Certains prétendaient même qu'il était possible que ce dernier puisse permettre, aux plus habiles, de faire pousser les arbres! Pour un charpentier naval, le rêve était tout tracé. Faire pousser de lui-même un arbre d'Adam! C'était une possibilité de fructification incommensurable! Pouvoir créer des navires sans jamais avoir de frais de matériaux à payer! Lorsque le rêve éveillé avait finalement connu un terme, l'odeur âcre de la chair putride et vieillissante avait disparue... L'ancêtre l'avait délaissé au cours de son absence... Salive à la bouche et projets pleins la tête, sir Tachibana ne fermerait pas l'oeil de la nuit.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~

Voilà comment on se retrouve à la situation d'aujourd'hui : Un grand gaillard avec un aliment, lui ayant coûté les économies d'une vie, en main. Keichi n'est pas bon nageur, perdre la faculté de nager ne le dérange pas réellement. Pourtant, quelque chose, comme un petit voix au fond de son crâne, le pousse à prendre le temps de réfléchir. Ces artéfacts répandus sont reconnus pour changer la vie de leur possesseur du tout au tout. Une fois que se fruit aurait passé son palet, plus rien ne serait jamais comme avant et aucune marche-arrière ne serait envisageable. Profits et perturbations ou dépense inutile et vie sans soucis. En une croquée, la question est finalement réglée. Alors que le goût infâme de cet objet infernal envahie sa gorge, il revoit ce sourire édenté que lui a offert le vieux crouton au moment de la vente. Au moins, il a fait un heureux... Quelques semaines plus tard, ils seraient peut-être bien deux... ou pas.

Un heureux serait le chiffre terminal, puisque les premières manifestations du pouvoir de l'artisan ne serait pas l'apparition de feuilles sur la tête ou de pousses dans l'atelier, mais plutôt le développement d'une truffe énorme à la place de son nez! De paramecia à zoan, et d'arbres à canidé, la marge était grande... Le blondinet l'apprendrait à ses dépends. C'est ainsi que prendrait place, à l'échoppe de notre jeune ami, une immense peluche à deux pattes, vous accueillant d'un grand sourire forcé, tout en prononçant dans un grondement sourd :

-Bienvenu au Wooden Gates!