« Yumen n’a jamais été un chic type. Il n’en est pas pour autant un monstre, tu sais ?
- Mh ?
- Tu étais absorbée dans tes pensées. Je ne sais jamais à quoi tu songes, Lilou. Alors je voulais te dire ça.
- D’accord.
- Tu n’en as rien à faire ?
- Pas vraiment. Ça ne me regarde plus.
- A quoi tu penses ?
- Mes parents. Mes amis. Ce que j’étais avant lui.
- Et s’il avait des réponses à tes questions ?
- Je n’ai pas de questions.
- Vraiment ?
- … Bon, si, j’en ai. Comme tout le monde. Je n’ai pas besoin de lui pour y répondre. Voilà tout.
- Mais s’il avait des réponses quand même ? Qu’il était le seul à pouvoir t’aider… Tu ne voudrais pas savoir ? Tu ne t’adresserais pas à lui ?
- Je n’ai pas envie de dépendre d’un gars comme lui. Ou si je devais le faire, en dernier recours, ça serait avec un bazooka à l’appui pour qu’il arrête de me faire du mal. Je ne veux pas dépendre de lui.
- Tu dépends déjà de lui.
- Non.
- Si.
- Ah oui ? Et pourquoi ?
- Parce que tu ne fréquentes que des gens dont il t’a parlé. Tu ne vas à leurs rencontres que parce que tu sais qu’ils existent. Et c’est grâce à lui. Sans le savoir, tu lui dois énormément. Après tout, je suis bien sa petite amie, non ? Et tu t’es adressée à moi. Il a forgé tes souvenirs et ton univers. Ta mentalité aussi. Il a été un peu… ton père.
- Et alors ? Il ne m’a jamais considéré comme sa fille, que je sache ? Ce que moi, j’ai pu ressentir vis-à-vis de lui, en tant qu'une gosse, ça n’a plus d’importance ! Il est juste un moyen de parvenir à mes fins.
- Mh… Qu’importe comment tu t’y prends, tu auras toujours un lien avec ce mec. Même si tu trouves que c’est un sale type et qu’il ne mérite pas de vivre. Il t’a aimé quand même.
- Tsss. Tu parles. Harry m’a aimé comme sa fille. Yumen m’a aimé comme son chien.
- Tu lui en veux ?
- Je ne devrais pas ?
- Sais pas. A toi de me dire. Yumen a toujours trempé dans un monde très malsain, il n’en est pas pour autant qu’un con. Tu ne crois pas qu’il puisse aimer quelqu’un à sa juste valeur ?
- Non, je ne crois pas. Il m’a choisi à la base pour récurer sa maison et comme souffre-douleur.
- Alors pourquoi voudrait-il te retrouver ?
- Pour récupérer Bee.
- Il pourrait en refaire un, non ?
- … C’est son investissement. Il est têtu.
- Oui. Il l’est. Mais il a toujours tes anciens plans, il t’a vu faire, il saura comment recréer un Robot comme Bee. Pourtant, il ne l’a jamais fait alors qu’il a eu dix ans pour s’y mettre.
- Ou veux-tu en venir ?
- Tu ne voudrais pas le revoir ?
- Non.
- Pourquoi ?
- Parce qu’il a fait de moi ce que je suis. Et ce n’est pas joli à voir.
- Moi j’aime bien ce que je vois.
- …
- Bref... Alors c’est vrai, tu n’avais pas de famille avant Yumen ?
- Je ne m’en souviens pas.
- Pas de mère, pas de père ?
- Je ne m’en souviens pas, je t’ai dit.
- C’est un peu facile de dire ça.
- Ce n’est pas facile. C’est la vérité, Savanah. Je n’en sais rien. Je ne m’en souviens plus. Quand je suis arrivée chez Yumen, j’ai tout oublié. J’en ai oublié ma propre identité. Je n’ai été qu’un matricule. Yumen ne m’a jamais donné de nom lorsqu’il m’a pris avec lui. J’ai été « la gamine », « sale gosse », « récure-moi ça ». Comment je m’appelais avant ? Qu’est-ce que j’en sais ? Et qu’est-ce que j’en ai à foutre maintenant ?
- Mh…
- De toute façon, si ç'avait eu une quelconque importance pour quelqu’un, qui j’étais, je ne me serais jamais retrouvée chez Yumen. Pour la bonne et simple raison que ma mère m’aurait gardée auprès d’elle. Et je n’avais pas de mère avant d’arriver. Pas à mon souvenir. Alors, à qui ça importe, tout ça ?
- A toi.
- Non. Je te l’ai dit, je m’en fou.
- Alors, pourquoi tu y penses ?
- Tout le monde pense à ce genre de choses. Je n’ai pas à me justifier. J’aurais préféré être une gamine comme les autres, avec un père et une mère.
- Tu veux savoir qui sont tes parents ?
- J’aimerais bien.
- Je peux t’aider.
- … Comment ?
- Je vais aller voir Yumen la semaine prochaine, et te laisser à un ami à moi pour ton entrainement. Je reviendrai avec des réponses.
- Ce n’est pas une bonne idée.
- Pourquoi donc ? C’est tout bénef pour toi, Lilou ! Tu n’auras pas à voir Yumen, et tu sauras peut être qui t’as mis au monde ! Qu’est-ce qui te dérange ?
- Tu crois que Yumen te donnera des réponses comme ça ? Il voudra me retrouver, il te menacera, il te fera chanter, il te torturera s’il le faut, il ne te dira rien. Et une fois qu’il en aura fini avec toi, il me retrouvera et il s’occupera de moi. Alors, non. Ce n’est pas une bonne idée. C'est qu'une idée de merde.
- Fais-moi confiance. Tente ta chance.
- La chance, j'en ai jamais vraiment eu jusqu'ici. Qu’est-ce que ça t’apporte à toi ?
- Moi ? Je m’en vais juste revoir mon aimé. Ça fait tellement longtemps, il me manque.
- C’est dégoutant.
- C’est l’amour.
- C’est de la connerie.
- Mon dieu, quelle névrosée. Tu comprendras quand tu tomberas amoureuse de quelqu’un, à un tel point ou tu voudras faire ta vie avec lui.
- Plutôt mourir.
- Hahaha, c’est presque mignon.
- Mh…
- Donc, je partirai demain matin, d’accord ?
- D’accord.
- Je reviendrai avec des informations. Tout ce que tu voudras savoir. Absolument tout. Et une fois cela fait, on repartira, toi et moi. Je te laisserai à mon ami. Il saura prendre soin de toi et t’entrainer. Ça te va ?
- Mouais. Ça me va.
- Alors, c’est parfait. »
Dernière édition par Lilou B. Jacob le Mer 18 Avr 2012 - 16:02, édité 1 fois