Grand Line, 4ème voie.
A quelques miles nautiques de Kikai No Shima
A quelques miles nautiques de Kikai No Shima
- S'cusez du dérang'ment patron.
- Hum ?
- Nous sommes en vue du port.
- Hum ? Bien. Lancez la manœuvre d’appontage. Et qu'on n'me dérange pas d'ici là.
- A vos ordres patron !
Tout en oubliant le salut réglementaire qui n'est plus de mise depuis longtemps dans l'équipage, le Vice-lieutenant Karl s'empressa de ressortir de la cabine de son supérieur, afin de lancer l'approche du Fenrir, à l'aide des officiers de quart. Déjà, la cloche du navire sonnait pour battre la manœuvre. Comme une mécanique bien huilée, l'ensemble des marines s'activèrent dans une coordination quasi-parfaite, née des longues années passées ensembles en mer.
De nouveau seul dans sa cabine, Toji pu se replonger dans l'étude des innombrables cartes et rapports de la marine qui inondaient alors son bureau. Perdus entre un épais cigare "SW" et un verre de rhum "Santiago Excellence", les yeux de l'officier scrutaient tour à tour l'ensemble des données recueillies par ses hommes et le QG en liaison. Bien qu'impulsif notoire, l'homme-poisson savait qu'on ne vivait pas vieux sans un minimum de préparation et de renseignement. Le savoir étant le pouvoir, Toji mettait toujours un point d'honneur à savoir. Les minutes passèrent, au grès des sons de l'équipage en pleine effervescence et du balancement du roulis...
Kikai No Shima... une ile emplie de ripoux, de truands et d'escrocs... Mais rien qui n'vaille la peine de freiner la course d'un équipage en pleine chasse. Drake était l'objectif, et rares étaient les malheureux qui -comme Potemkin- sauraient attirer leurs foudres durant le trajet. Même ce fameux King Bradley -qui faisait tant parler de lui sur cette île- ne méritait pas qu'on s'y attarde plus que ça... De toutes façons, la nouvelle du combat sur les Allods et d'la défaite du terrible Potemkin avait mis en fuite tout c'que la voie comptait comme pirate et hors-la-loi, qui feraient probablement tout pour jouer les profils-bas sur le passage des Sea Wolves. Hors de question donc, d'aller débusquer tous les cafards qui se terrent, perte de temps sans promesses de gloire ou de plaisir. Le passage sur Kikai No Shima sera donc plus une occasion de fêter leurs derniers exploits en attendant que le log pose se charge, plutôt qu'autre chose. Quoiqu'il serait idiot de n'pas en profiter pour vider les caisses de certains casions après tout...
Pulupulu ! Pululu ! L'arrachant à sa méditation, l'escargophone du QG se mit à s'activer comme un diable. Enfin ! Marine-Ford devait avoir reçu son rapport de mission sur les Allods, ainsi que son lot de prisonniers.
- Mouallo ?
- Commodore Arashibourei ? Officier de liaison Noh Kia à l'appareil.
- Yep, c'est bien moi. Aboule ton message p'tite tête.
- Euh.. oui Commodore. Un message écrit de l’amirauté pour vous. Je vous le transmet immédiatement.
Krrr krrr krrr... quelques secondes plus tard, l'escargo-fax régurgitait plusieurs feuilles de papiers, à peine sèche. Sans un mot de plus, Toji reposa le combiné tout en se saisissant de la fine liasse, laissant en attente l'officier de liaison qui ne savait déjà plus où se mettre. Ses yeux se mirent à pétiller au fil des lignes qu'il lisait. Finalement, un sourire éclatant d'autosatisfaction et de fierté emplissait son visage, encore couvert des sparadraps de sa dernière bataille. La victoire des Sea Wolves contre Potemkin et les révolutionnaires des Allods avait été rude, mais visiblement les fruits de la réussite en valaient le prix. "Aux vues des services rendus, blablabla... nous vous transmettons à vous et à votre équi-blablabla... Le grade effectif de Contre-Amiral, ainsi que l'ensemble des décora-blablabla..." Contre-Amiral... Mwouahahah, enfin les portes de l'amirauté venaient de lui être ouvertes ! Ces foutus planqués de Marine-Ford n'avaient pas eu d'autre choix que de reconnaitre la valeur de son équipage, même emplis de crapules et mené par l'officier le plus détesté de l'histoire d'la marine. Huhuhu, le plan de carrière de Toji venait de passer un nouveau cap, et bientôt plus rien ne saurait l'arreter. Relisant plusieurs fois certains passages le concernant, le tout nouvel amiral jubilait intérieurement. Le reste des lettres ne stipulait que de menus détails le concernant, ainsi que de ridicules reproches quant-à la destruction complète d'un des trois Allods. Broutilles que l'homme-poisson égocentrique ne pu que mettre de côté dans ce moment de liesse.
- Commodore ? Allo ? Commodore !
- Hum quoi ?!
- Et bien commodore Arashibour*...
- Contre-amiral Arashibourei soldat !
- Euh, oui, pardonnez-moi Amiral. Euh...c'est aussi à propos de certains feuillets administratifs que j'ai sous les yeux...
- Hum ? Ouais et bien ? Qu'est- c'qu'il y a nom d'une moule à barbe ?Éructa presque l'officier, qui sentait dans la voix de son interlocuteur une intonation bien connue.
- Et bien c'est à propos des demandes de pensions pour les trois membres de votre équipage tombés au combat. Il est marqué que chacun d'entre eux était marié et avait huit enfants. C'est signé de votre main. Hors dans un autre rapport, tout indique que ces hommes n'ont jamais été *...
- Tin' ! C'est moi où t'es en train d'me traiter d'menteur ?!
- Non non c'est que je* ...
- Par les doudoux d'la sainte Dudulle ! Si jt'e dis qu'ils étaient mariés c'est qu'ils l'étaient ! Tu veux priver des veuves de guerre et leurs marmots d'une pension qui leur permettrait de vivre ? C'est ça ?!
- Non Amir*...
- Tu veux mettre sur la paille des femmes dont les maris ont été des héros ?! Des hommes morts au combat comme des braves, pour qu'des putains d'pleurnichards de planqués comme toi puissent s'la couler douce ! Tu veux p'tetre les remplasser ?! V'nir en stage chez les Sea Wolves pour voir par toi-même ?!
- Ohnonpitiéamiral ! PaschezlesSeaWolves !
- Bon alors tu signes ce foutu pap'lard et tu m'fous la paix, compris ?!
- Bien Amiral ! Tout d'suite amiral !
- Clang !
L'homme-poisson mettra fin en écrasant presque le combiné sur l'escargo-phone, alors en larme tant la menace d'une mutation semblait marquée au fer rouge chez l'officier de liaison. Huhuhu, il suffisait le plus souvent d'hausser un peu l'ton pour intimider toutes ces foutues couilles de pucelles du QG... Nan mais oh, manqu'rait plus qu'on l'prive des primes de ces morts.... Bon ok les trois Sea Wolves n'étaient pas officiell'ment mariés, et ils n'avaient pas non plus huits enfants chacun... mais bon c'était pas une raison de v'nir lui chercher des poux non plus quoi ! Comme si ça allait faire un trou dans l'budget d'armement du gouvernement... Nan mais sans dèc'... De plus, entuber l'amirauté en leurs noms, c'est sur'ment c'qu'ils auraient voulu ces p'tits gars, huhuhu. Une sorte d’ultime salut en pied d'nez, au nom des Sea Wolves.
Solennellement ,Toji se leva après s'être servi un grand verre de rhum. Il se rapprocha alors d'un petit bureau à l'écart, perdant à chaque pas son air réjoui pour arborer un masque des plus sérieux. Sur le pupitre, trois portraits trônaient, tous barrés du ruban noir funéraire. Encens mortuaires et offrandes païennes à leurs côtés, seuls leurs plaques miliaires -encore encroutées de sang séché- pouvaient permettre de savoir de qui il pouvait bien s'agir.
1ère classe Alzak, avalé par un dragon... 1ère classe Vasquez, tué par une balle de mousquet... 1ère classe Rankor, éventré par le sabre du révolutionnaire Sky. Tous trois morts au combat lors de l'assaut du QG révolutionnaire des Allods. Trois Sea Wolves pour un QG entier... Un prix bien lourd selon leur capitaine...
D'un air Grave et empli de solennité, Toji y médita en silence quelques secondes, priant pour que l'âme de ses précieux frères d'armes... Puis, il rouvrit lentement les yeux, avant de verser sur le parquet de la cabine trois gorgées de rhum, une pour chacun de ses hommes à jamais perdus. Enfin, il s'envoya le reste du verre cul sec, directement derrière la cravate ! Aaaaaah ! A votre santé les enfants, gardez-nous une place au chaud en enfer !
(...)
- Patron ?- Hum ? J'avais d'mandé qu'on ne m'dérange pas.
- On est arrivé patron. Les casinos nous attendent héhéhé.
- J'arrive les enfants.
Le lueur nostalgique qui habitait le regard de l'homme-poisson disparut instantanément lorsque la voix du sous-officier traversa la porte, afin de laisser place au regard dur et fier qu'il se devait de porter en permanence. Pas d'place pour toutes ces conn'ries sentimentalistes lorsqu'on est capitaine d'la pire bande de salopards d'la marine ! Mais bien que convaincu que les apparences devaient en être ainsi, Toji savait au plus profond de lui que pas un homme de l'équipage n'avait pas ressentit ce même pincement...
Mais au diable les morts et leur nostalgie, l'Aventure était encore loin d'être finie !
Kikai No Shima, Myriapolis... et ensuite la Gueule de Requin !
Rien n’arrêterait la course folle des Sea Wolves !
Kikai No Shima, Myriapolis... et ensuite la Gueule de Requin !
Rien n’arrêterait la course folle des Sea Wolves !