Un chaudron en guise de sac et les mains chargées de fioles aux contenus suspects, Lisa Scoumoune se craquaient les rotules en suivant le groupe, son parapluie servant d’appui. La sorcière de la compagnie des chats noirs pestait à mesure qu’ils avalaient les mètres de pontons en direction de l’embarcadère de la Translinèenne. Le tintement métallique de son baluchon mystique ricochait sur les caillasses du second phare du Cap des Jumeaux. Félixia, la chatte aux allures de caniche, se dandinait en slalomant entre les badauds, véhiculant mauvais œil et coup du sort à ceux qui croisaient sa route. Une porte-poisse sur patte travestie en petite peluche pour vieux.
Les mains bien agrippées à la lanière de cuir qui composait la selle de sa monture, Lucky Garou sifflotait avec un zozotement musical. Le centenaire aux ailes et à l’auréole angélique lançait des regards coquins aux jeunes femmes qui se trémoussaient à l’embarquement des Drakkars marqués du sablier et de l’hippocampe de la compagnie de transport. Les voyageuses avaient des allures de pirates et de femmes de joies, un ensemble de petits culs et de jarretelles en tissus brodés qui n’étaient pas pour lui déplaire. Rabb, quant à lui, avançait sur ses quatre membres de rongeur en boulotant une corde de chanvre fraichement arrachée à la coque d’un navire. Le lapin géant des neiges transportait sur son dos son vieil ami ainsi qu’une armada de livres et pansements qui serviront à n’en pas douter sur ces mers hostiles.
Faisant fi des regards jetés par les touristes et autres voyageurs aux mines peu engageantes, Donor Jinx se mordait ses lèvres gercées. Il marmonnait dans sa presque barbe de retraité une série de chiffres qui le faisait frémir. En soixante-dix années d’existence, jamais il ne se serait figuré qu’il dilapiderait autant d’argent en une journée. Son portefeuille avait beau déborder de fraiche, il n’en demeurait pas moins soucieux. Radin ? Diable non ! Mais tout de même, il avait réuni une jolie tribu de collègues et les frais de transports de la Translinèenne ne favorisaient pas les familles nombreuses. C’était d’ailleurs sans compter l’escargot rose aux allures de guimauve transgénique dont il s’était entiché sur le Royaume de la Veine qui allait réduire le cout des billets. Peuleu Peuleu glissait aux côtés du professeur en laissant une immonde trainasse bulleuse dont les espadrilles des badauds se serait volontiers dérobées.
« Trois cent mille par tête de pipe ! Trois cent mille ! »
« Z’ur que z’a fait cher la fellation ! Zahaha ! »
« ‘Spèce de vieille fripouille ! C’est toi qu’a choisi d’bouger sur la route des soucis !! Qu’la peste t’accompagne dans tes choix ! »
« Me faire ça à moi ! Un retraité ! Un pauvre homme qui cotise pour l’état ! Confier une mission de capture aussi onéreuse au fleuron du troisième âge ! A quand la retraite à soixante-trois ans, je vous le dit mes amis… »
« Qui cotise, qui cotise… Z’est pas toi qui a trois cent z’inquante millions de dettes Jinx ? »
« C’est différent ! »
Le panneau annonçant le bureau de paiement de la compagnie de Marc Trans approchait tout doucement, la face de Jinx passait du blanc au livide et du livide au blanc, ses mains variqueuses serraient avec force la poche intérieur de son veston d’enseignant où dormait paisiblement l’argent de la compagnie.
« Vieux bout d’peau, t’as la liste des chenapans qu’on doit s’payer ? »
Donor balança au-dessus de son épaule une boule de papiers chiffonnée vers les ongles pointus de Scoumoune, la sorcière défripa avec un sourire, bien dissimulé sous les rides, l’étrange papelard. Sur celui-ci y était représentée la trogne de cinquante-et-un primés que la compagnie se devait de capturer, mission personnelle tombait sur leur nouille par excès de déveine.
C’est alors que Jinx arriva à hauteur du bureau d’accueil. Les mains sur le veston et le regard assassin, il dévisagea le petit bigleux aux cernes marquées qui pianotait sur sa caisse.
« Monsieur bonjour, heureux que vous choisissiez la Translinèenne pour votre déplacement sur Grand Line… Depuis ce point, il vous est possible de partir vers trois destinations. Whiskey Perk, Banaro ou Innocent Island. Le prix d’un billet est de trois cent mille par personne à bord des Drakkars de la compagnie, assurance comprise. En cas de vol ou de perte, la Translinèenne décline toute responsabilité. »
Accusant une nouvelle fois le tarif, Jinx inspira profondément en dévisageant le fonctionnaire à l’entrain déconcertant.
« Je suis le Professeur Donor Jinx, chercheur pour la marine, en cet état, vous vous devez de nous laisser accès à vos bateaux sans que nous souffrions de vos tarifs assassins. »
Et paf dans les dents, mains sur le veston et menton digne, la carte « gouvernemental » venait de faire sa sortie du jeu.
« La Translinèenne est une compagnie privée monsieur, de ce fait, vos qualités de chercheur ne vous donne le droit qu’à un cocktail de bienvenu. Quelle destination ? »
Et bim dans le dentier.
« Espèce de petit con, tu vas… »
Zieutant d’un gros œil la tripotée de gros bras au logo de la compagnie qui campaient aux quatre coins de l’embarcadère et tendant l'oreille pour entendre les ricanements de la petite troupe de derrière, Jinx ne put que mettre la main au larfeuille en soupirant.
« Pfff… Il y a une époque où j’aurais aimé vous avoir en élève jeune homme… Trois billets pour celle que vous voudrez... »
« Vous êtes six monsieur, même les animaux payent. »
« QUE ?! MAIS C’EST UNE ARNAQUE HONTEUSE ! »
« Ce sont bien un lapin, un caniche et une limace ? Vous m’envoyez désolé monsieur, mais ils payent comme tout le monde, trois cent mille. »
« Z’e n’est pas un lapin, z’est ma grande tante ! Vous n’avez pas honte petit foncz’ionnaire ! Allons, allons, ne pleure pas tata ! »
« Groumpf…Groumpfouin ! »
Pleurant comme le plus savant des lapins comédiens, Rabb tapait du pied en lâchant des larmes grosses comme des noix que Garou s’empressait d’essuyer avec la manche de son imper.
« Je… Toutes mes excuses madame… Je… La compagnie vous offre la place en vous reformulant ses excuses… »
Et d’une.
«... Cependant, la limace et le caniche payent ! »
« UNE LIMACE ?! MON NEVEU ATTEINT DE ROSICEMIE AIGUË ?! QUEL MONSTRE ÊTES-VOUS ?! oh, mon pauvre enfant, viens dans les bras de ton oncle ! »
Ouvrant sa gueule comme un nouveau-né qui perdrait le sein qui l’allaitait, Peuleu se jeta dans les bras de Jinx, bavant tout le mucus dont il disposait sur la redingote du professeur.
« Ma foi… La Rosicémie aiguë… Diable, je ne connaissais pas… S’il est malade alors oui, c’est différent… La compagnie lui offre évidemment sa place… »
Et de deux.
« Mais pour le caniche, il paye comme vous. »
« C’nest pas un caniche, c’t’un chat ! »
…
« … Ça ne change rien. »
Epic Fail.
« Ça vous fera donc un million deux-cent mille à payer de suite. Vous payez en cash ? »
Reposant sur les lattes de l’embarcadère la frimousse rosée, Jinx déballa de sa poche intérieure une liasse de biftons qui aurait donné le mal du fric à pas mal de civil et compta soigneusement la somme juste. Après trois comptages minutieux, quinze minutes plus tard, les billets verts filèrent dans la caisse enregistreuse et six billets estampillés « Passagers » en ressortirent.
« Et donc pour la destination ? »
Les mots tombèrent donc les mires de sourds, Jinx réunissait méticuleusement les biftons dans sa poche. Scoumoune et Lucky regardaient avec la mine plissée le départ d’un Drakkars, les doigts fourchus de la sorcière pointaient la foule de passagers sous les hochements de tête de Garou.
« Z’e z’uis tout à fait d’accord ma chère Z’coumoune ! »
« Par l’graine du Diable ! C’est qu’j’ai encore une bonne vision ! Gihihi ! »
« Qu’est-ce qu’il y a ? »
« Eh bien, notre jolie compagne de compagnie me faisait remarquer que z’ur z’e Drakkars qui vient de partir z’e trouver deux des têtes primées que nous recherchons… »
« Ah ?... Oui, en effet. »
…
Long Temps.
…
Silence gêné.
…
« Banaro, le prochain part dans trois heures »
Les mains bien agrippées à la lanière de cuir qui composait la selle de sa monture, Lucky Garou sifflotait avec un zozotement musical. Le centenaire aux ailes et à l’auréole angélique lançait des regards coquins aux jeunes femmes qui se trémoussaient à l’embarquement des Drakkars marqués du sablier et de l’hippocampe de la compagnie de transport. Les voyageuses avaient des allures de pirates et de femmes de joies, un ensemble de petits culs et de jarretelles en tissus brodés qui n’étaient pas pour lui déplaire. Rabb, quant à lui, avançait sur ses quatre membres de rongeur en boulotant une corde de chanvre fraichement arrachée à la coque d’un navire. Le lapin géant des neiges transportait sur son dos son vieil ami ainsi qu’une armada de livres et pansements qui serviront à n’en pas douter sur ces mers hostiles.
Faisant fi des regards jetés par les touristes et autres voyageurs aux mines peu engageantes, Donor Jinx se mordait ses lèvres gercées. Il marmonnait dans sa presque barbe de retraité une série de chiffres qui le faisait frémir. En soixante-dix années d’existence, jamais il ne se serait figuré qu’il dilapiderait autant d’argent en une journée. Son portefeuille avait beau déborder de fraiche, il n’en demeurait pas moins soucieux. Radin ? Diable non ! Mais tout de même, il avait réuni une jolie tribu de collègues et les frais de transports de la Translinèenne ne favorisaient pas les familles nombreuses. C’était d’ailleurs sans compter l’escargot rose aux allures de guimauve transgénique dont il s’était entiché sur le Royaume de la Veine qui allait réduire le cout des billets. Peuleu Peuleu glissait aux côtés du professeur en laissant une immonde trainasse bulleuse dont les espadrilles des badauds se serait volontiers dérobées.
« Trois cent mille par tête de pipe ! Trois cent mille ! »
« Z’ur que z’a fait cher la fellation ! Zahaha ! »
« ‘Spèce de vieille fripouille ! C’est toi qu’a choisi d’bouger sur la route des soucis !! Qu’la peste t’accompagne dans tes choix ! »
« Me faire ça à moi ! Un retraité ! Un pauvre homme qui cotise pour l’état ! Confier une mission de capture aussi onéreuse au fleuron du troisième âge ! A quand la retraite à soixante-trois ans, je vous le dit mes amis… »
« Qui cotise, qui cotise… Z’est pas toi qui a trois cent z’inquante millions de dettes Jinx ? »
« C’est différent ! »
Le panneau annonçant le bureau de paiement de la compagnie de Marc Trans approchait tout doucement, la face de Jinx passait du blanc au livide et du livide au blanc, ses mains variqueuses serraient avec force la poche intérieur de son veston d’enseignant où dormait paisiblement l’argent de la compagnie.
« Vieux bout d’peau, t’as la liste des chenapans qu’on doit s’payer ? »
Donor balança au-dessus de son épaule une boule de papiers chiffonnée vers les ongles pointus de Scoumoune, la sorcière défripa avec un sourire, bien dissimulé sous les rides, l’étrange papelard. Sur celui-ci y était représentée la trogne de cinquante-et-un primés que la compagnie se devait de capturer, mission personnelle tombait sur leur nouille par excès de déveine.
C’est alors que Jinx arriva à hauteur du bureau d’accueil. Les mains sur le veston et le regard assassin, il dévisagea le petit bigleux aux cernes marquées qui pianotait sur sa caisse.
« Monsieur bonjour, heureux que vous choisissiez la Translinèenne pour votre déplacement sur Grand Line… Depuis ce point, il vous est possible de partir vers trois destinations. Whiskey Perk, Banaro ou Innocent Island. Le prix d’un billet est de trois cent mille par personne à bord des Drakkars de la compagnie, assurance comprise. En cas de vol ou de perte, la Translinèenne décline toute responsabilité. »
Accusant une nouvelle fois le tarif, Jinx inspira profondément en dévisageant le fonctionnaire à l’entrain déconcertant.
« Je suis le Professeur Donor Jinx, chercheur pour la marine, en cet état, vous vous devez de nous laisser accès à vos bateaux sans que nous souffrions de vos tarifs assassins. »
Et paf dans les dents, mains sur le veston et menton digne, la carte « gouvernemental » venait de faire sa sortie du jeu.
« La Translinèenne est une compagnie privée monsieur, de ce fait, vos qualités de chercheur ne vous donne le droit qu’à un cocktail de bienvenu. Quelle destination ? »
Et bim dans le dentier.
« Espèce de petit con, tu vas… »
Zieutant d’un gros œil la tripotée de gros bras au logo de la compagnie qui campaient aux quatre coins de l’embarcadère et tendant l'oreille pour entendre les ricanements de la petite troupe de derrière, Jinx ne put que mettre la main au larfeuille en soupirant.
« Pfff… Il y a une époque où j’aurais aimé vous avoir en élève jeune homme… Trois billets pour celle que vous voudrez... »
« Vous êtes six monsieur, même les animaux payent. »
« QUE ?! MAIS C’EST UNE ARNAQUE HONTEUSE ! »
« Ce sont bien un lapin, un caniche et une limace ? Vous m’envoyez désolé monsieur, mais ils payent comme tout le monde, trois cent mille. »
« Z’e n’est pas un lapin, z’est ma grande tante ! Vous n’avez pas honte petit foncz’ionnaire ! Allons, allons, ne pleure pas tata ! »
« Groumpf…Groumpfouin ! »
Pleurant comme le plus savant des lapins comédiens, Rabb tapait du pied en lâchant des larmes grosses comme des noix que Garou s’empressait d’essuyer avec la manche de son imper.
« Je… Toutes mes excuses madame… Je… La compagnie vous offre la place en vous reformulant ses excuses… »
Et d’une.
«... Cependant, la limace et le caniche payent ! »
« UNE LIMACE ?! MON NEVEU ATTEINT DE ROSICEMIE AIGUË ?! QUEL MONSTRE ÊTES-VOUS ?! oh, mon pauvre enfant, viens dans les bras de ton oncle ! »
Ouvrant sa gueule comme un nouveau-né qui perdrait le sein qui l’allaitait, Peuleu se jeta dans les bras de Jinx, bavant tout le mucus dont il disposait sur la redingote du professeur.
« Ma foi… La Rosicémie aiguë… Diable, je ne connaissais pas… S’il est malade alors oui, c’est différent… La compagnie lui offre évidemment sa place… »
Et de deux.
« Mais pour le caniche, il paye comme vous. »
« C’nest pas un caniche, c’t’un chat ! »
…
« … Ça ne change rien. »
Epic Fail.
« Ça vous fera donc un million deux-cent mille à payer de suite. Vous payez en cash ? »
Reposant sur les lattes de l’embarcadère la frimousse rosée, Jinx déballa de sa poche intérieure une liasse de biftons qui aurait donné le mal du fric à pas mal de civil et compta soigneusement la somme juste. Après trois comptages minutieux, quinze minutes plus tard, les billets verts filèrent dans la caisse enregistreuse et six billets estampillés « Passagers » en ressortirent.
« Et donc pour la destination ? »
Les mots tombèrent donc les mires de sourds, Jinx réunissait méticuleusement les biftons dans sa poche. Scoumoune et Lucky regardaient avec la mine plissée le départ d’un Drakkars, les doigts fourchus de la sorcière pointaient la foule de passagers sous les hochements de tête de Garou.
« Z’e z’uis tout à fait d’accord ma chère Z’coumoune ! »
« Par l’graine du Diable ! C’est qu’j’ai encore une bonne vision ! Gihihi ! »
« Qu’est-ce qu’il y a ? »
« Eh bien, notre jolie compagne de compagnie me faisait remarquer que z’ur z’e Drakkars qui vient de partir z’e trouver deux des têtes primées que nous recherchons… »
« Ah ?... Oui, en effet. »
Long Temps.
…
Silence gêné.
…
« PAR LES COUILLES DE DIEU ! Z’EST QUOI COMME DEZ’TINATION C’TE COQUE D’NOIX VIPERE D’FONCTIONNAIRE ?!!! PEULEU GROMPF FRRR !!! »
« Banaro, le prochain part dans trois heures »