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Une vie de mouette [Part 2]

Il y avait de l'alcool pour passer le temps. De l'alcool et des cartes. Mais pas de cigare, ni de thé. Mes trop grosses mains ne pouvaient empoigner les cartes sans les marquer. On m'a traité de « tricheur d'foiré de poiscaille » dès le premier tour. J'ai abandonné. Alors j'ai passé le temps à observer ces bandits. Mes narines ont réspiré leurs odeurs de sang, de poudre et de haine, mes oreilles ont écouté le cliquetis de leurs lames et armes à feu. Des bandits qui n'ont eu d'autre choix que de choisir le mauvais côté pour se payer une vie. Comme moi. Mais encore ici, je suis seul, banni des échanges et des discussions par mon physique.

Fichue mère qui m'a fait naître monstre.

Le temps a passé, les bouteilles se sont vidées et les cigarettes se sont consumées. Puis alors que la lune se mettait à briller de tout son éclat, les bateaux se sont mis en route. Trois grands navires déguisés de bleu de blanc et où un drapeau flotte encore dans le ciel avec comme effigie une belle mouette blanche.
Maintenant, le ciel noir brouillé par le vent et la pluie a fait place à une grand toile bleu. Chaque homme est sur le pont. Le Baratie en vue à trois ou quatre encablures. Les trois vaisseaux, cotes à cotes attendent patiemment, l'heure du combat.
Le temps continue sa longue marche. Les bandits s'impatientent. Les gestes se brusquent, les soupirs se multiplient et nombre de jambes ne peuvent s'empêcher de trembler. L'heure arrive enfin. Le vigie crie ce que l'on attendait. Trois mats transpercent l'océan à l'Ouest. Seuls bois déjà visibles des vaisseaux auxquels ils appartiennent.

Les bandits ont troqué leurs habits délavés contre des vêtements marinés. L’habit ne fait pas vraiment le moine sur cette terre. Les trois vaisseaux de la fausse mouette se mettent en route, les ordres ont été donné. Nous avançons lentement vers les cargots emplis de saké. Le capitaine du navire où je suis m'adresse alors la parole entre deux ordres hurlés.

_La poisc... Ishii Môsh, toi qui sait si bien nager, tu vas à l'abordage sur la coque de bâbord. Tu prépares le terrain et on te rejoint dès que nous sommes à portée.

M'envoyer, seul contre un navire entier ? Soit il me surestime soit il se fout de ma vie. J'opte pour la deuxième solution.

_Je n'irais pas seul. Il vient avec moi.

Je pointe le dénommé Tahar observant la scène d'un air amusé. L'uniforme marine lui va comme un gant. Lorsque je sors cette phrases, mes petits yeux fatigués ne peuvent observer sa réaction, trop discrète. Je me méfie toujours de lui, trop tranquille, trop souriant. Il vaut mieux avoir son ennemi près de soi.

_J’espère que tu as du souffle. Monte sur mon dos.

Sans un mot, je lui laisse quelques secondes, le temps d'enlever mon costume et de ne garder qu'un simple pantalon et un marcel blanc, ma lame toujours accrochée à ma ceinture. Le Tahar aura-t-il peur de toucher un monstre hideux comme moi ? Oui non ? Non. Un bon point pour cet étrange homme. Je remercie le ciel que ce ne soit pas l'un de ceux vivant dans la peur des contes et histoires bulleresques de monstres poisseux. Sans lui laisser le temps de comprendre ce qui lui arrive, je plonge d'un grand bond dans la mer. Mes poumons se taisent et mon cœur se calme aux palpations des vagues sur mon corps. L'homme sur mon dos se calme et fait preuve d'un immobilité presque parfaite. J'avance le plus rapidement possible, sautant de temps à autres pour laisser le Tahar reprendre son souffle un infime moment. Nous avançons si vite qu'à peine en posture de savourer ce moment aquatique, je dois déjà bondir sur le bateau. A peine le pied posé qu'une vingtaines d'armes sont déjà braqués sur moi et mon semblant d'acolyte. Un homme s'avance alors vers moi, un cigare fumant au bout des lèvres.

_En auriez vous un pour moi ?

Alors qu'il m'en tend un, surpris de cette demande vu notre situation, je me prépare au discours qui suit en l'allumant d'une allumette offerte généreusement le cigare aussi généreusement donné.

_Hmm... Vu l'article 7 du code de circulation maritime... Hmmm... Vu la trajectoire prise par votre vaisseaux. Vu la non conformité de votre équipage aux règles régies par les hautes instances Marines. Hmm... Vous êtes en état d'arrestation. Veuillez déposer vos armes.
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Soir tranquille, prise de connaissance. Joe la Fouine, Rick le Simple, Mash le Laid : les rebuts, ceux à qui on ne confiera pas sa vie mais qui sont prêts à tout. Blitz, Tue, Fist : les tueurs-nés, loyaux et asociaux. Mitch, Phin, Peal : les bon gars. Ceux qui peuvent servir.

Et les autres, les beaucoup d’autres. La troupe embarque, souque, manœuvre. Seule non-tache sous les voiles contrefaites de la Marine : moi, Tahar Tahgel, manteau de cuir d’officier sans épaulettes tombé pour des frusques blanches et une casquette marquée de la mouette qui gouverne tout.

Régression.

L’aube point, le Baratie apparaît, le silence tombe et l’ambiance se pose. La fatigue voudrait bien s’en mêler mais l’en empêchent les ordres du capitaine qui a l’air de savoir ce qu’il fait. Et le cri de la vigie. Ordres encore, surprise, adrénaline, course sous la mer et saut à bord.

Premier abordage à dos de dauphin pour le commandant Tahgel. C’est sympathique. Différent. Je juge, j’apprécie. Atterrissage de guingois, reprise d’appuis et priorité au submersible. Devant le mutisme atterré de nos proies du jour qui, donc, transforme en violet le ciel de l’est, de l’ouest… du côté. Devant ce mutisme, j’ai les nerfs qui s’effritent parce qu’il m’a manqué un verre de bon râpeux pendant la nuit. Et ce que certains déploient en virilité incontrôlée au réveil, je l’expurge en beuglant.

Z’avez pas entendu l’lieutenant les glandos ? Au pied les armes, et faites les beaux !

Je le dis pas, mais s’ils continuent à le fixer comme ça, en plus, ça va mal se passer avec l’impassible qui va plus l’être longtemps, et on dira encore que c’est de ma faute. Pas que j’y tienne à ces marins déguisés en civils innocents par le bon destin qui leur a pas souhaité bonne fortune, mais bon, moins y a de pertes chez les civils, mieux ce sera pour la partie finale. Mais toujours, le silence. Comme si je n’avais pas ouvert la bouche. Vexant. Eh, quoi ? Jamais vu un affreux fumer un cigare ? Tseuh, et ça se prétend capitaine ? Je reprends mon argumentaire, masquant la hargne sous un flot de compassion faussement inquiète.

’coutez les gars, c’est comme vous voulez, hein. Mais nous on est l’avant-garde. Les gentils.

Doigt avec lequel il ne faut pas qui pointe vers les trois navires grimés de l’EMM.

En approche, là, c’est la troupe. Vous voulez pas avoir à faire avec le commandant.

Mains posées l’une sur mon poitrail et l’autre sur l’épaule du récent promu lieutenant Môsh.

Alors comme on est des altruistes et qu’foi d’moi on veut que votre bien, soit vous faites les beaux, soit on vous passe par-dessus bord pour vous protéger de ce qui vous pend au nez. Allez, à trois : un, d

Réaction, enfin. Pas la bonne, mais tout de même. Réaction. Un cri. Un cri de furieux. Du genre « Aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaahhhhhhhhhhhhhhhhhh » avec probablement moins de a et plus de haches, mais je n’ai jamais été exceptionnel en calcul, même si je me défends.

Défendre, c’est une bonne idée. Le capitaine a rangé sa tabatière et sorti son sabre, alors du coup moi aussi, et Ishii reste à jauger la situation comme s’il était capable de changer le cours des choses. Ce qu’il ne sait pas c’est que rien ne peut arrêter une meute de douze hommes en colère à part une belle femme, une belle bouteille ou une énorme paire de noix. Il ne sait pas qu’il n’est pas dans la liste, lui, gros homme pas tout à fait homme, lisse et sans noix à poser sur la table.

Alors il ouvre la bouche. Et dit sans doute quelque chose de très profond pour tenter d’apaiser les choses. Lui qu’on a pas encore insulté. Mais je n’entends pas, un nouveau cri me déchire le tympan gauche, la gauche étant le côté par lequel m’arrive un « ta gueule le poiscaille, aaaaahhhhhh », à nouveau avec plein de haches et beaucoup de sang chaud. Sang chaud qui me coule sur le bras, à mesure que mon sabre s’enfonce dans la blessure, dans la profonde elle aussi blessure. Premier sang pour Bibi, toujours.

Oups.

Regard désolé au monstre. Style c’est pas moi j’ai rien fait il s’est embroché tout seul.

Le prochain mien est pour toi mon pote. Faudra que je t’apprenne le code de circulation maritime un jour.

Baston en approche dans cinq, quatre, trois, deux, un.


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Dernière édition par Tahar Tahgel le Lun 16 Juil 2012, 20:16, édité 1 fois
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_Si on me frappe la joue gauche, je réponds par l'épée. Mais pas avant.

Je laisse une chance, une dernière. Pale espoir de calme. Mais au fond, je n'y crois déjà plus. Ça n'avait aucune chance. Le sourire mesquin du Tahar lorsque sa lame s'enfonce dans de la chaire confirme mes mauvaises pensées.

L'homme est mauvais. Mais c'est la vie que j'ai choisi, non ? Si ? Peut être. Mon cerveau tente de répondre à cette question. Et c'est toujours la même réponse qui vient. Non. Ce n'était pas un choix. Mais une obligation. Vivre riche et mauvais plutôt que bon et pauvre. Deux seules solutions pour le monstre que je suis. Un homme confirme encore.

« Tuez le monstre !!! » que j'entends.
_ Le monstre n'est pas celui que l'on croit. que je réponds.

Mais personne ne m'entend. Et je me trouve vite entouré. La moitié du navire rien que pour moi. Quelle gentillesse. Alors tous mes sens aux aguets, je sors ma lame et je pourfends.

Les boulets de canon s’immiscent maintenant dans le combat. Ils frappent haut et fort. Leur but n'est pas d’abîmer la coque du navire, juste de réussir à toucher les mats, les voiles, pour empêcher toute fuite. Ce serait quand même bête que l'on détruise le navire et sa cargaison en tentant de le voler. Puis, lorsque les navires sont à porté, les griffes sortent. Et l'abordage commence. Heureusement, je commençais à être envahis. Mes adversaires trouvent d'autres adversaires, le sang trouve d'autre sang. Un seul homme reste tenter vainement de me frapper. Jusqu'à ce que sa pauvre tête viennent s'écraser contre la coque. C'est pas moi. C'est main.

Mais si c'était déjà fini, ce serait trop simple.


Trois hommes, petits, chétifs mais armés, foncent maintenant vers moi. Le cœur en arrière, l'arme en avant. Le premier tente de me trancher. Le deuxième aussi. Le dernier, lui, reste en retrait. Le sale boulot pour les autres sûrement. Ma lame sort encore et je réponds aux regards de haine par le plat de mon épée. Je ne ferai pas couler de sang. Le bleu jaunis de l’hématome étant bien plus beau que le rouge carmin. Les épées se croisent et les chocs se font. La force d'un homme est faible face aux convictions d'une bête et lorsque leurs armes volent sur mon laid visage, j'esquive, je bloque et je réplique. Jusqu'à ce que les deux adversaires volent loin au dessus de la coque. Jusqu'à ce que deux « PLOUF » se fassent entendre au milieu du vacarme de la bataille.

Le dernier s'avance alors. Le sale boulot sera aussi pour lui finalement. La barbe mal rasée, les cheveux en bataille et le regard morne de celui qui a de trop l'habitude de ce genre de chose, il sort son épée comme le charpentier sort son marteau. Naturellement et avec lassitude. Puis il vient frapper un coup latéral avec toute la force qu'il a et il me faut toute la mienne pour parer.

_ « Une poiscaille, ça se bouffe en entrée » me sort il alors que ses lèvres sont à quelques centimètres de mon visage, me faisant inhaler son haleine empli d'alcool.

_ "Hmmm navré. Mais aujourd'hui ce sera risotto d'homme au plat du jour ."

Ses lèvres se perdent dans une grimace sous la colère. C'est à ce moment que d'un pas sur le côté je me mets en position d'enfoncer mon coude dans son abdomen.
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Les phases combat sont toujours redondantes, c’est peu intéressant et je n’ai pas changé de mer pour enchaîner sur la même rengaine. Pas cette fois. Coups, coups bas, feintes, fentes, tierces et quartes et grosses tailles dans ta face. La routine déjà vue et revue. Pour changer, pour rendre le tour original, je tâche de ne blesser que le minimum d’adversaires, simples civils du même bord que le bibi en mode commandant grossièrement infiltré rappelons-le, et j’observe le monstre.

Par le monstre, je veux dire la guerre. Guerre des gangs, guerre plus tellement larvée. Déchaînement de violences gratuites ou pas, efficacité tout sauf garantie. Je prends des repères pour plus tard. J’en aurai besoin. Joe, Rick et Mash sont les plus sales. Pas les moins expérimentés mais les plus couards. Alors ils frappent vite et là où ça fait mal. Souvent en dessous de la ceinture, parfois au-dessus de la nuque, rarement là où un bon gentleman qui connaît son épée le ferait.

Comme prévu, Blitz, Tue et Fist ont leurs styles à eux et sont les plus efficaces. Le premier attaque à la dague éclair, c’est à se demander s’il est de ces culs bénis qui ont hérité du haki de leur papa ou un de ces sagouins maudits à avoir mangé cinq fruits et légumes par jour. Tue y va plus techniquement, maître ès clefs létales semble-t-il. Et Fist quant à lui porte bien son nom et ne fait pas dans la dentelle. Le chapelet de dents vole autour de lui comme les mouettes au-dessus du bateau.

On pourrait croire que l’heure matinale me rend poétique mais pas du tout. Les scènes sont baignées de glaviots lestés au sang qui m’empêchent de faire mon boulot tranquillement en sécurisant la zone au plus vite. Heureusement je peux compter sur Mitch, Phin et Peal pour m’épauler dans ma tâche de « on frappe, on immobilise mais on le fait en douceur ». Les bons gars ont l’air plutôt contents de ma propension à la douceur, croient dirait-on que ce n’était vraiment pas ma faute si j’ai eu le premier cadavre.

Attention mec, derrière-toi !

Ca c’est justement Phin. Phin, alias Phineas, trente-trois ans et deux gosses au compteur reconnus auprès de leur mère. Leurs mères. Je ne sais plus bien. Un amour de type pour qui sait aimer, et qui vient donc de me faire remarquer qu’un matelot m’approchait d’un peu trop près. Et de m’éviter une énième cicatrice dans le dos. Une esquive et un estoc dans l’épaule paralysent le sournois en un instant puis je retourne la faveur en envoyant Pulley dans la sale caboche aux longues moustaches fines et cruelles d’un ennemi un peu trop bridé pour être honnête et qui menaçait mon bienfaiteur de devant une porte. Il – Phin, pas le bridé qui s’effondre – me murmure alors sur le ton confident :

Pas courant ton style, bonhomme. T’as appris ça où ?

Une porte ? Je profite de cette découverte ô combien exceptionnelle – une porte sur un bateau ! on aura tout vu – pour m’abstenir de décliner mes états de service mirobolants et la fin d’un monstre rouge sur West aux côtés d’un ancien amiral en chef dont tout le monde aura entendu parler, même le commun des mortels, et peut-être même surtout eux. Avisant un mec moche pas loin et faisant le raccordement qui s’impose, je l’assomme proprement et j’interpelle Ishii qui fait fureur avec sa nouvelle toque rouge de cuistot en sous-chef depuis que notre bon maître du jour, j’ai nommé le faux-commandant, a abordé à son tour et pulvérise à tour de bras.

Prêt à récupérer la marchandise, mon lieutenant ?


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Mon coude part direction l'abdomen de l'ennemi. Sans transition. Violemment. Il part si vite que le pauvre petit homme ne peut que tenter d'esquiver en levant les genoux, n'encaissant que partiellement le coup. Mais le bougre est un connaisseur, un habitué des combats et l’hématome qui doit déjà se former alors que je commence seulement à reculer ne lui fait qu'à peine peur. Tordant son visage dans un sourire mi amusé, ses lèvres se montent vers le haut. Je lui rétorquerait bien qu'ainsi il me ressemble un peu mais le temps manque et je dois déjà parer son coup d'estoc visant mes rotules, enfonçant ma lame dans la coque du navire, fissurant le pauvre bateau sur quelques centimètres. Si nous continuons ainsi, le navire ne résistera pas, mais ça, l'homme semble éperdument s'en foutre, trop amusé de trouver quelqu'un à sa hauteur. Quoi qu'un peu plus grand. Beaucoup même.

Mais encore une fois, le temps de la moquerie manque et le visage serré, je tente de ressortir ma lame de la coque alors que l'homme a déjà relevé la sienne pour l'enfoncer dans mon crane. Je n'ai plus trop de temps, là, peut être une demi seconde, un quart, un quart de quart. Quelques millimètres... Chaque muscle se crispe à tenter de sortir cette foutue lame qui se moque éperdument de moi en ne voulant pas se déloger avant de gicler au dernier moment claquant contre la lame adverse dans un geste que je ne saurais m'expliquer. Mais le geste était trop maladroit, trop faible et l'épée giclée ne peut parer l'autre, ne réussissant qu'à changer sa trajectoire de peu.

Mais ça suffit. Ça suffit à ne pas me faire perdre un œil et c'est déjà beaucoup.

Il y a bien un bout d'oreille qui part, se faisant arracher au passage de la lame. Il y a bien cette douleur qui commence au lobe pour finir par se répandre jusqu'à chaque orteil de mes deux gros pieds. Mais je suis vivant. Et là est le plus important.

_Héhéhé. Ca s'ra un steak de cachalot saignant pour moi.

Cette fois je ne réponds rien. Rien que par le plat de mon épée que je relance sur le moqueur. Je lui fait gagner de la vitesse en la faisant tournoyer au dessus de mon crâne, faisant gicler l'air autour avant de l'envoyer valdinguer vers le corps du moqueur. Cette fois la lame part plus vite, plus fort, plus précisément et le choc de la parade se fait si rude que je crois un moment que le défenseur va lâcher prise. Mais il tient bon, difficilement mais il tient toujours.

_Hmmm... Coup de chance... On ne joue pas dans la même cour.

Les gestes se multiplient, la rancœur aussi et plus la douleur monte plus ma violence s'accentue jusqu'à ce que mon arme se transforme en massue. Aussi puissante que la foudre et aussi légère que la plume. Enfin presque. Pas tout à fait. Loin d'en être. Mais les faits sont là. Rien n'empêche le petit homme pourtant si sûr de lui se rend peu à peu compte que les coups pleuvent trop vite pour lui, qu'il ne tiendra plus longtemps à parer et esquiver. Il tente vainement de tenir le choc aussi longtemps qu'il peu, usant de toute son energie. Puis il se rend. Il n'esquive pas l'un des coups qui vient percuter son thorax de plein fouet.
Et il vole. Loin.

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J’attends un, deux, trois lancers de nains. Mais le lieutenant Môsh ne me répond pas même au bout du quatrième. Il doit ne pas avoir bien intégré son grade du moment… Tant pis, s’il est absorbé au point de s’appesantir sur les crânes de ses copains du jour autant que sur la description du combat je ne vais pas le déranger plus longtemps. J’avance la main vers le bouton de la porte déjà plus très droite à force de se prendre des coups perdus. Simple porte en simple bois comme sur la plupart des navires de base, elle cède illico dès que le corps sans conscience du bon gars qu’Ishii gourmandait la traverse. Planches qui se fendent, marches qui gémissent et bruit sourd final annonciateur d’une fin de chute, la voie est ouverte et les cales n’attendent plus que nous.

Bon…

Bon j’y vais. Escaliers, nœuds et fibres qui grincent, et mon talon touche le plancher de la cale en glissant sur la mâchoire du type d’en bas. Oups. Regard alentour éclairé par l’étoile de mes yeux et les deux lampes-tempête accrochées à la charpenterie qui tient le pont. Pas de coursives, rien, on est directement dans la grosse cale où s’empilent les marchandises, on voit qu’on est sur un navire marchand et pas sur un bateau de guerre avec dortoirs en enfilade pour les hommes. Hm, enfilade… Ouais, trop tard. M’avance un brin, précautionneux. Pas tellement parce que j’ai pas le pied marin, depuis le temps je l’aurais mal vécu, mais principalement à cause de ces cons de réflexe qui me font baisser la tête en regardant les planches du pont qui grognent sous les coups de tête, de corps, d’épée et parfois de balles qui les torturent tandis que le combat finit de faire rage là-haut…

Oh…

Mais ça se calme. Peu à peu. Et les deux ou trois qui sont descendus après moi découvrent en même temps la cave aux merveilles. J’entends leur souffle chaud briser l’air derrière moi. Leur haleine fétide de gars levés trop tôt par l’appel du devoir me caresse la nuque. De loin parce que sinon, mais quand même. Et les culs de bouteilles s’alignent là devant nous sur trois parois, comme des milliers d’œils qui nous fixeraient. Intrus, ouais, c’est un peu l’effet que ça fait. Toute une longueur de vaisseau de la proue à quasiment la poupe, ça fait du nombre. Entreposés soigneusement, précieusement même, et surtout arrimés solidement un par un, les crus s’allongent dans la pénombre comme une guirlande de fin de soirée… Le verre qui reflète la flamme des lampions. Je m’approche, en touche une.

Woh… Marr-Go 1587, plus jeune que moi mais pas de beaucoup… Gaffe les gars, vous êtes dans un temple désormais.

Et dans les temples… Hum, on procède à des libations, non ?

Trop de liquides autour de moi. Le bruit n’en doit pas être vraiment audible, car les autres n’y prêtent pas attention, ou sont trop demeurés pour ça. Mais moi ça me parle, toutes vagues dans les teilles qui résonnent du roulis de la mer, tous ces jus de raison qui claquent contre la cloison hermétique de leur contenant à mesure que les vagues claquent contre la coque du navire, et cette minuscule écume rouge ou transparente qui flotte en surface comme les restes de mousse après un rouleau d’eau de mer… J’en salive et sans me retenir attrape un goulot qui passait par là et l’ouvre au sabre.

Héhéhé, tournée d’O’brillon 99, qui n’en veut ? Bibi ? Ouais moi j’en veux…

Et glou.


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Question réthorique? Si, non? Le Tahar me voit pourtant occupé…

Ce n’était pas réthorique…

Alors quand le combat se termine, lorsque le sang finit de salir la coque, je pars rejoindre le petit homme. Lentement, en prenant le temps de reconnaitre les lieux. En reniflant bruyament, comme à mon habitude. Je fais grincer chaque marche de bois jusqu’à ne plus pouvoir, j’enjambe un corps jonchant là, puis j’inspecte, de mes deux grosses narines. Cette magnifique odeur d’alcool de riz bonifié par les âges. Ce magnifique mélange de liège, de bois, de verre froid et d’alcool. Si ces hommes n’étaient pas là, si leurs mains ensanglantées, leurs corps transpirants et leurs haleines petrides ne venaient pas tout embrûmer, alors j’aurais trouvé mon paradis.

Mais non. Et le Tahar qui se met à sabrer une bouteille pour la boire comme on boit de la gnole à bas prix me confirme la chose. Mon paradis sera pour plus tard.
Puis le capitaine arrive, sans un mot. Il observe les bouteilles, il admire le spéctacle avant que ses yeux ne se posent sur Tahar vidant gouleusement sa bouteille.

-On arrêtte les conneries maintenant, tout le monde sur le pont. Je veux le bateau prêt à repartir dans deux heures. Nettoyez moi tout le grabuge là haut et le prochain que je vois fouler la cale foulera ma lame. C’est compris? Quant à toi, le Tahar, cette bouteille sera retirée de ta paye. Maintenant au boulot.

Pas d’engueulade. Des mots ne volant pas trop haut. Et pourtant, tout le monde l’écoute. Plus personne ne dit mot et chaque homme court nettoyer le pont. Les morts sont jetés par dessus bord comme de vulgaires déchets. Les autres plus ou moins vivants sont empaquetés comme on serre des cornichons dans un bocal. Cloitrés dans une minuscule barque. S’ils ont de la chance, ils pourront survivre et rejoindre le Baratie. S’ils ont de la chance, un docteur s’y trouvera. Sinon ils mourront.

Une chance sur beaucoup. Une dizaine de vies placées sur un minuscule fil de nylon.

Mais ca, les hommes présent semblent ne pas s’en préoccuper. Trop concentrés à gratter le sang, à repeindre le nom du bâteau, à lui redonner un aspect civil tout ce qu’il y a de plus normal. Moi, je fais comme les autre, reniflant bruyament jusqu’à ce que mes narines ne sentent plus que l’odeur de peinture, d’eau brûlante et de savon.

Enfin, la coque récupère un aspect respectable, les grandes voiles se lèvent et chaque homme présent se concentre à faire voguer le bateau contre les vagues. Bientôt, les survivants récupèreront leur salaire, deux bouteilles de grandes valeurs. Une paye en nature.
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Deux choses détestables dans la vie. Le beurre de cahuète, les femmes enceintes et les crasseux qui interrompent une dégustation en se prétendant roi de ton royaume. Ca fait plus que deux, tout juste, mais c’est pour ça que tout alcoolique boit. Pour ajuster les chiffres jusqu’à ce que la réalité soit moins déprimante. Chiffres de la vie, chiffres de ton salaire, chiffres des années qui te restent à vivre. De rouge, je deviens gris, comme la scène alentour à mesure que tout le monde décampe et que moi aussi pour ne pas faire de vague. Rêve toujours par contre, capitaine, pour que je récure ton pont à la place des vrais raclures criminelles nées pour servir le haut peuple de ce monde minable. Une inattention plus tard, je suis dans la cambuse entre deux sacs de farine et un de viande sèche qui suinte son huile jusque sur mes bottes. Et, maintenue fermée la porte par le solide loquet qu’est Narnak, j’épie en bon infiltré qui commence à se dire qu’il est temps de faire son boulot.

La parole est d’argent, le silence d’or, et les trous de vide. Le chef de toute cette poignée de futurs repris de justesse ahane ses ordres entre deux gaufrettes au tabac aussi contrebandé que l’alcool que me suis enfilé plus tôt. Retenue sur ma paie, la bouteille tombée ? Haha. Mec. Des bouteilles comme ça j’aurai l’occasion de m’en payer au moins… trois, allez, avec ta tête et celles des galeux que tu avoines. Et encore trois de plus avec celle de ton patron le binoclard esthète de la galerie d’art. Par les fentes de la charpenterie, je mire donc ce qui se passe dehors. Les allées et venues, les ordres, les contre-ordres, la chaîne de commandement. Un maillon pour le méchant capitaine.

Un maillon pour les deux jumeaux, chacun héritant d’un des navires attenant. Ca fait trois, le compte est bon, le reste est fait des larbins agglutinés contre les promesses de lendemains heureux. S’ils savaient, s’ils savaient… Si tu savais toi non plus tu ne récurerais pas, Ishii. De la pitié ? Oui, un peu. Et de l’incompréhension. Les monstres sont nés pour faire peur au peuple, l’ami, pas pour essayer de se fondre dans la masse des communs. Et plus tu essaieras, et plus tu dépasseras. Et du plus haut tu dépasseras, du plus haut tu tomberas quand tu leur feras trop peur. Alors montre les dents tout de suite. Les dents… Est-ce que les cachalots ont des ratiches ? Merde, j’ai un doute…

Le doute me fait manquer le départ, le retour à la base du grand chef. Pas la distribution cela dit. Je réapparais comme une fleur sur un tas de fumier au moment de recevoir les compliments du chef. Et la récompense en nature, celle qui a coûté un bras à certains. Un vrai bras avec la main au bout. A ceux-là, grand ponte magnanime, il laisse tomber une bouteille de plus. Toujours les chiffres à gommer. Bois mon gros, bois. Tu compteras moins bien, et tu regretteras moins de n’avoir plus qu’un membre. Ha, ce mauvais esprit. Et après on m’engueule quand j’en fais. La nuit tombe au milieu des caisses, les rires de ceux qui sont restés parce qu’ils n’ont nulle part où aller cramer leurs liquidités aussi au bout d’un moment. Mon litron à moi tient jusqu’aux premières étoiles du jour, après c’est l’apothéose et une nouvelle aube se lève, couleur jus de noix qui contraste avec la chique crachée sur le sol de l’entrepôt.

Et dire que je vais devoir me fader ces glands jusqu’à l’encore plus énorme coup promis par le boss.


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