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Un certain dégât des os

Journal de bord : 27 juin 1624
Ça faisait un petit moment qu’on avait franchement pas grand-chose à foutre et je commençais franchement à m’ennuyer. Mon équipage commençait à grandir quelques peu, depuis l’arrivée de Sam le dépressif et d’Alphonse le débile. C’était les petits surnoms que je leur avais donné, mais c’était affectueux, je les aimais bien dans le fond. Avec cette petite troupe, on s’était construit un radeau qui avait plutôt fier allure quand on sait que notre charpentier cloue les planches avec sa tête ! On arrivait à voguer et on arrivait, la plupart du temps, là où on voulait aller. Et justement, aujourd’hui, on était au royaume de Bliss ! C’était la classe quand même ! J’avais jamais entendu parler de cette île, mais si ça commence par « royaume », c’est forcément la classe. C’est Sören qui avait décidé de s’y rendre parce qu’apparemment, ils fabriquent des beaux bateaux. J’avais un peu de mal à imaginer plus beau que le notre, mais après tout on verra bien.

Depuis qu’on avait accosté, que j’avais finit de vomir mes entrailles et de me nourrir pour combler le manque, on s’était tous séparé pour aller faire nos emplettes, chacun de notre coté. J’espérais juste qu’Alphonse n’allait pas casser trop de trucs avec sa tête. Un chantier de construction était une tentation énorme pour un mec comme lui. Moi, je voulais voir ces fameux bateaux, un équipage aussi classe que le mien se devait de posséder un bateau qui en jette ! Je regardais autour de moi et ne trouvais rien de bien folichon quand une enseigne attira mon regard. C’était une chope d’alcool barrée par un os ! J’avais bien besoin de me rafraîchir le gosier.

-Patron ! Un truc fort comme vous savez le faire !

Ça, il y a pas à tortiller, les humains ne faisaient pas que des trucs nazes. L’alcool en faisait partie ! Quand j’habitais sur les nuages, on avait pas de terre, pas de fruits et donc pas d’alcool. Je savais même pas que ça existait, et maintenant que je l’avais découvert, je ne regrettais plus d’être tombé sur Terre. On m’apporta une grande choppe d’un truc transparent. Rien qu’en le reniflant, la tête commença à me tourner. Ouais, je ne tenais pas bien par contre, mais ça, faut pas le dire. Le serveur me regardait avec curiosité. Je bus une gorgée et fit comme s’il n’était pas là, mais après quelques minutes, je me sentis obligé de le rembarrer.

-Hey ! Qu’est ce qu’il y a ? T’as jamais vu un ange boire un coup ou quoi ?

L’homme se mit à rougir, se sentant idiot.

-Ben..euh...non. Jamais...

Ha oui, c’est vrai que les anges, on en croisait pas à chaque coin de rue sur les Blues. Je m’y ferais jamais à ça, je crois. Il me demanda alors si je participais à une sorte de jeu, de carnaval ou quelque chose dans ce genre. Je ne comprenais pas pourquoi, et il m’informa alors que quelques minutes plus tôt, il avait vu passer un squelette avec de longs doigts pointus. J’ai cru que j’allais m’étrangler, à la fois parce que c’était hyper fort cette merde, mais surtout parce que si un squelette se baladait dans les parages, il fallait absolument que je le trouve. Je frappai ma chope sur la table, éclaboussant un peu partout et attrapai le mec par le col.

-Où ça ? Il est où ?

Il m’indiqua la direction qu’il avait prise et je me précipitai à sa suite. Le problème, c’est qu’en dix minutes, il avait pu partir n’importe où. Heureusement, les gens l’avaient tous remarqué et les passants m’indiquèrent facilement le chemin à suivre. Après seulement deux ou trois minutes, je vis une tête blanche dépasser de la foule qui s’écartait légèrement sur son chemin. C’était vrai en plus !

Mes yeux s’écarquillèrent et je me mis à courir encore plus vite ! Un vrai squelette ! Il devait absolument rejoindre mon équipage, c’était trop cool ! Je crois avoir bousculé pas mal de monde sur mon chemin, mais je m’en souviens même pas. Je me mis devant lui et lui sourit avec un air surement idiot. C’était pas un vrai squelette en fait, il avait de la peau, mais son visage était trop bizarre ! Il était tout blanc, tout rond, avec des yeux tout noirs et très gros ! Il était... étrange ! Peu importe, je le voulais avec moi ! Je lui tendis une main franche et directe.

-Salut ! T’es un gentil ou un méchant ?

Après tout, si c’était un pirate, je pourrais pas lui demander de devenir un chasseur de prime de mon groupe. Je devrais peut-être même me battre avec lui. Mais si c’était un gentil, ce serait trop de la balle !


Dernière édition par James Fermal le Lun 2 Juil 2012 - 11:57, édité 1 fois
    Voilà maintenant quelques semaines que Skyle parcourait les mers à bord d'une barque en bien mauvais état. Sa dernière "aventure" - une bataille face à un banc de poissons qui emportaient l'embarcation dans leur courant migratoire - était celle qui avait le plus abîmé sa barque, au point que le misérable poids des deux-trois poissons étaient des grammes en trop pour celle-ci, pouvant l'amener à couler. Chose empêchée, car l'esclave les avait balancés avant de se voir sombrer en vitesse ; maintenant, il allait couler plus lentement, lui laissant - du moins, il l'espérait - au moins le temps d'atteindre l'île au loin. La barque, sans voile, sans rame, sans moyen de la diriger se faisait simplement emporter par le courant qui, par chance, se dirigeait dans la bonne direction. L'homme était rassuré, car, n'aimant pas l'eau de mer, pensant que cela nuit à la flore, il trouvait embêtant de devoir continuer le trajet sous l'eau. Si le courant ne changeait pas, il avait estimé arriver à terre peu avant que le bateau ne coule, au pire, il aurait les pieds un peu dans l'eau. Quelle chance.

    Finalement, pas de chance, alors qu'il se rapprochait de l'île, un premier oiseau blanc venait de se poser sur la barque, fixant Skyle en plein dans les yeux. Craignant de couler, il l'avait chassé, mais à peine l'oiseau parti, un autre était venu et avant même qu'il puisse faire quoi que ce soit, un troisième, puis un quatrième s'étaient posés, suivi d'un nuage de mouettes et de goéland volants au-dessus. L'homme l'avait appris à ses dépens. Il puait le poisson et le poisson attirait ces oiseaux, bien plus présents aux alentours d'une île, qu'en pleine mer. Craignant de couler, il s'était mis à les attaquer pour les faire fuir, mais, voyant que c'était inutile, il avait réussi, par un coup rapide, à attraper un oiseau - aussi étonnant que ça puisse paraitre, bien que ne possédant pas de doigts, mais que des lames, il l'avait attrapé sans la tuer - pour l'utiliser en tant que rame. Sous un cri de goéland buvant la tasse, la technique marchait, le bateau avançait, ou du moins, tournait en rond - bah oui, ramer que d'un côté n'aide pas spécialement à avancer droit - laissant croire qu'il avait un espoir d'atteindre le sable. C'était sans compter l'attaque de becs venant défendre leur ami à l'eau, mais Skyle était motivé, il y croyait, en se contenant de subir les attaques et continuant à ramer en espérant atteindre la terre au plus vite - bien sûr, il n'avançait pas, ne tournant qu'en rond, mais l'espoir fait vivre dira-t-on.

    Sans surprise, sous le poids des oiseaux, le bateau avait coulé, mais ce n'était pas grave, car Skeleton, voyant que la plage n'était plus très loin, avait décidé de continuer à pied, sous l'eau. C'est donc après avoir lâché la bête, qu'il tentait de marcher dans l'eau, tout en coulant. Évidemment, ça ne fonctionnait pas, et contre toutes les attentes de l'homme aux mains cisaillées, il ne parvenait pas à respirer une fois dans l'eau. Oui, Skyle était ignorant et ne savait pas qu'un homme ne pouvait pas respirer dans l'eau. Il pensait simplement qu'on se déplaçait en bateau pour aller plus vite, comme avec un cheval sur terre.
    Ne sachant comment gérer la situation, il tentait de se débattre et de couper l'eau ; en vain. Ses poumons se remplissait d'eau, il avait perdu connaissance.

    Un peu plus tard qu'il commençait à se réveiller, un poisson remuant dans la bouche, quelques crottes d'oiseaux réparties sur son corps et bien évidemment, ses meilleurs amis du moment, les volatiles, qui tournaient autour de lui, avec certains qui tentaient de lui prendre ce qu'il avait en bouche. Reprenant ses esprits, Skyle s'était soudainement mis sur le côté pour recracher la poiscaille et une grande quantité d'eau qu'il avait avalé, faisant ainsi fuir ces satanées rapias - qui ne manquaient cependant pas de partir avec le poisson.

    L'homme aux cisailles s'était échoué sur la plage, certainement porté par les vagues. Par contre, comment il avait pour fait pour se retrouver plus loin que le niveau de la mer, cela, il ne le savait pas. Peut-être que les mouettes l'avaient amené là ? Non, c'est peu probable, mais les enfants en pleurs au loin, criants au zombie étaient peut-être ceux qui l'avaient tiré avant que les parents ne les écartes et qu'il ne se réveille. Quoi qu'il en soit, il ne s'intéressait pas trop à la chose, car devant lui se trouvait une ville semblant bien étrange. En s'y enfonçant, il voyait de partout de drôles de plantes ne semblant pas en être, de drôles de décorations, comme si les gens vivants ici se plaisaient d'avoir des plantes uniquement de bois, sans la moindre feuille. Le paysagiste trouvait le goût des habitants bien triste, manquant de vie, car une décoration avec la seule couleur de bois n'en est pas vraiment, c'est le mélange d'un tas de coloris qui créent le charme. Skyle espérait trouver un maître, mais ce qui était sûr, c'est que, même s'il en trouvait un très bon ici, il ne choisirait personne vivant sur cette île et ayant un goût si déplorable.

    Ainsi, il avait déjà décidé de reprendre au plus vite la mer, pour fuir ce manque de beauté et de potentiel. Alors que les habitants se poussaient lors de son passage, répugnés par l'odeur – et accessoirement toujours suivi des oiseaux – un homme qui était sorti du lot, semblant différents des autres, plus « verdoyant », mais ne collant pas du tout avec le paysage des alentours, avait pris la parole en tendant la main :

    -Salut ! T’es un gentil ou un méchant ?


    Skyle pensait alors :

    * Pourquoi il dit ça ? Pourquoi il me tend la main ? À cause des mouettes ? Lui aussi il veut du poisson ? *

    Comme à son habitude, certains mots étaient sortis à l'oral :

    - Pour... tend la ... cause... veut du poisson ?


    Pris alors d'une soudaine crainte comme quoi l'homme aurait tendu la main pour attendre un poisson ou pire, pour le fouiller afin de voir s'il en avait, Skyle était parti se cacher en vitesse. Il avait trouvé une très bonne cachette : mettre un chapeau - qu'il avait pris avec grande subtilité à une passante - devant sa tête. Un chapeau plus petit que sa tête, qu'il tenait de par ses griffes. Ainsi « caché », il attendait, sans bouger, comme un poteau, que l'homme daigne partir.
      Apparemment, c’était pas un méchant… Enfin, je crois… Disons que sa réaction fut on ne peut plus neutre, vu que j’ai rien compris à ce qu’il a dit, ni à ce qu’il à fait. Il m’a parlé de cause, de poisson.. Très bizarre. Et juste après, il a piqué un chapeau à une vioque qui passait et l’a mis devant son visage, pas sur sa tête, mais bel et bien devant. Ce chapeau était affreux en plus, il était rose, avec un morceau de tissu jaune fluo qui en faisait le tour et orné de petits animaux empaillés, de l’oiseau à l’écureuil. Les humains n’avaient vraiment aucun goût… Peut-être était-ce ce qu’il voulait montrer en piquant à cette dame son calbute. C’est un passant qui m’a dit que ce qu’on mettait sur la tête s’appelait un calbute. Expression humaine surement. Bref. Le squelette ne bougeait pas d’un pouce, mais je vis qu’il tenait le chapeau avec des lames. Ce n’est qu’alors que je remarquai que ses doigts étaient en réalité des lames effilées, visiblement très tranchantes vu les petites entailles qui s’étaient formée à la base du chapeau, là où il le tenait.

      C’est surement pour cette raison qu’il n’avait pas voulu me serrer la main ! Il m’aurait découpé les phalanges à la vitesse grand V ! Après ce petit constat, je ressentis une bouffée d’affection pour ce squelette découpeur et voleur de chapeau moche. Je cherchais à capter son regard, mais il ne bougeait pas, peu importe où je me plaçais. Je me mis à lui tourner autour, à le regarder sous toutes les coutures, mais il s’était visiblement transformé en poteau. Hummm… Situation difficile… Du bout des doigts, je fis descendre la bordure du chapeau, très lentement, pour éviter qu’il ne sursaute et ne me tranche l’index. Ce serait dommage… J’en ai besoin de mon index. Pour montrer des trucs, pour me moquer des gens en les pointant du doigt, pour me gratter, pour… pour… enfin pour plein de trucs quoi !
      Après avoir suffisamment baissé le chapeau pour apercevoir une de ses orbites, je parvins, je crois, à capter son regard.

      -Hey, mais te caches pas ! Je veux pas te manger ! Laisse tomber ce calbute !

      La pensée me traversa alors l’esprit. Quel goût ça avait un squelette ? Je chassais cette idée débile de ma tête et lui retirai totalement le couvre-chef ridicule du visage. Franchement, je faisais pas si peur que ça quand même !

      -Je m’appelle James ! Tu sais faire des trucs marrants ? Ressusciter les morts, faire apparaître des petites chauves-souris, ou un truc comme ça ?

      Je n’eus pas le temps d’avoir une réponse, un craquement se fit entendre juste derrière moi et un échafaud s’effondra, laissant un grand nuage de poussière nous recouvrir, tandis que des cris fusaient de partout. Je me retournai et vis que c’était le poids d’un bateau en construction qui venait de faire céder les poteaux de bois qui le soutenaient. Le bateau s’était brisé en tombant et restait mollement sur le coté. Je pris le squelette par le poignet et l’attirait avec moi.

      -Viens ! Ca peut être marrant ! Et si on les aide, on aura peut-être une récompense !

      Zigzagant entre les passants effrayés et les badauds qui se contentaient de regarder, on arriva à l’intérieur du chantier. La poussière était encore trop dense et c’était un véritable brouillard qui se tenait entre nous et l’accident. Après quelques instants, je finis par distinguer un groupe d’homme qui s’échinait à soulever des planches brisées, sans doute à la recherche de compagnons sous les décombres. D'ailleurs, on pouvait entendre des cris qui ne laissaient aucun doute quand à la présence de quelqu'un là dessous.


      Dernière édition par James Fermal le Mar 14 Aoû 2012 - 21:41, édité 1 fois
        Caché derrière son chapeau, Skyle pensait simplement qu'il ne fallait plus bouger pour ne pas être vu. Mais le bougre d'andouille ne voulait pas partir ; au lieu de ça, il tournait autour du chapeau. Est-ce qu'il avait découvert la cachette de la face de squelette ? Non, ce n'était pas possible, il devait certainement rechercher un coin pour se soulager ou un truc du genre, comme le faisaient souvent les animaux. Après tout, il avait des ailes dans le dos, donc ça ne pouvait être qu'une bête recherchant à uriner. Le jardinier pensait qu'il avait, lui aussi, été attiré par son odeur de poisson et préférait le fuir, plutôt que de le combattre, de crainte que l'attaquer le fasse se multiplier comme cela avait été le cas avec les mouettes.

        Ayant légèrement déplacé le chapeau, l'animal semblait ne pas avoir trouvé l'homme aux cisailles. Une chance pour ce dernier qui avait cru, l'espace d'un instant, qu'il allait devoir se battre. À la place, l'oiseau avait employé une ruse d'enfant jouant à cache-cache : demander de sortir de la cachette, feintant savoir où il se trouvait. Skyle était persuadé qu'il n'avait pas été vu, puisque le zigoto avait parlé de culotte. Seulement il n'était pas si bête – ah bon ? -, il n'allait pas se faire avoir si facilement ! Il lui restait donc, plus qu'à ne pas répondre en attendant son départ. Mais au lieu de ça, la chose ailée, s'était accaparée la cachette, l'avait prise entre ses mains et s'était mis à lui parler. Skeleton ne savait pas comment réagir sur le coup ; est-ce que le type bizarre, demandant à un chapeau de ressusciter les morts, l'avait repéré ? Il en doutait, car si ça avait été le cas, il aurait certainement tenté de le manger. À moins qu'il ait employé une diversion en parlant à un chapeau ?

        Pas le temps de trouver une solution qu'un événement vint sauver l'homme caché ! L'une des décorations de la ville venait de s'effondrer, causant de beaux dégâts. Étrange si c'était le pouvoir du chapeau, mais pas le temps d'y penser car le paysagiste allait pouvoir s'enfuir tranquillement. Du moins, c'est ce qu'il croyait, car la poussière s'était vite estompée et l'homme aux ailes semblait l'avoir trouvé. Mais, au lieu de le manger, il lui avait proposé d'aller aider à répandre la poussière. Ou alors c'était pour aider à se débarrasser de cette mauvaise décoration ? Skyle n'était pas sûr, mais quoi qu'il en soit, cet étrange inconnu semblait, lui aussi, content que l'une des structures immondes, qui enlaidissait la ville, soit tombée. Finalement, il n'était peut-être pas l'animal qu'il semblait être.

        Ce dernier avait pris le jardinier par le poignet pour l'emmener au centre de la poussière. Pourquoi faire ? Skyle n'en avait pas la moindre idée, mais le trouvant finalement intéressant, il avait accepté de le suivre sans un mot. Au centre du nuage, on pouvait y entendre des cris. Ceux-ci semblaient attirer certains hommes qui tentaient de souler les planches, comme s'ils étaient à la recherche d'un trésor.

        - Bah... Ils sont bêtes, y'a pas de trésors là-dessous, c'est une femme qui fait ce bruit. Rien de bien intéressant.

        Après ces paroles, Skyle avait repéré quelque chose de bien plus intéressant au travers des décombres et ce, malgré l'épaisse poussière qui se dispersait avec difficulté. C'était juste à côté de ceux qui cherchaient la femme, mais ce n'était pas grave. Bien qu'il gênait, il tentait, seul, de dégager ce qu'il avait vu.

        Ça avait quelque peu énervé l'un des hommes dégageant le bois :

        - Oh, Ducon, y'a personne là-dessous, vient plutôt nous aider !

        Préférant ne pas répondre, le jardinier pensait simplement :

        * Pfff, il y comprend rien lui ! Y'a une seule plante dans ce coin et elle se trouve sous ces trucs. J'vais certainement pas la laisser mourir, surtout qu'elles sont rares ici ! *

        Mais certains mots avaient été dit à l'oral :

        - Pfff, il ... plante ... ces trucs. J'vais certainement ... mourir ... ici !

        Ce qui avait été dit, laissait l'homme perplexe, le laissant penser à quelque chose de flippant. Mais avant même qu'il puisse retourner à sa tâche, un énorme vacarme s'était fait entendre ; c'était une autre construction qui était tombée un peu plus loin. Chose qui n'intéressait nullement le paysagiste, attaché à secourir la fleur sous les décombres. Mais, manque de chance, pour libérer la femme, l'un des hommes avait pris appuis sur une planche qui était tombée, directement sur la plante à peine dégagée.

        C'est dans une grande tristesse que Skyle se relevait en criant :

        - NOOOOON, elle est morte !

        Laissant entendre juste après, le bruit d'une autre construction démolie.
          Le squelette n’avait pas l’air très concerné parce qui venait de se produire. En fait, il n’avait pas l’air concerné par grand-chose, il semblait amorphe, shooté, peut-être était-il mort tout simplement. Si ca se trouve ça faisait dix minutes que je parlais à un cadavre. Nooon, ce serait vraiment trop con. C’était pas possible, je l’avais entendu parler. J’avais rien compris, certes, mais j’avais entendu des sons sortir de sa bouche. Il parlait de...poissons, si j’avais bien entendu. Mais au moins, il m’avait suivit sur le chantier. Il n’avait pas l’air trop difficile.

          Arrivé sur place, on voyait une bande de gros bras en train de soulever des planches. Il y avait apparemment une femme en dessous. Mais les planches étaient entrecroisées comme des mikados et cela semblait vraiment difficile de les soulever. Ils s’y prenaient très mal, moi, à leur place, j’aurais tout pété et j’aurais viré les morceaux après. Ca aurait été tellement plus simple !

          - Bah... Ils sont bêtes, y'a pas de trésors là-dessous, c'est une femme qui fait ce bruit. Rien de bien intéressant.

          Ha ! Enfin une phrase intelligible de la part du grand maigrichon. Je le regardai étrangement. Il se dirigea vers un tas de planches différent et se mit à farfouiller dans le tas. Mais... Il y avait personne à cet endroit. Mais en y repensant, il avait parlé de trésors. Si ca se trouve, il était à la recherche d’un méga trésor. C’était peut-être le fantôme d’un ancien grand pirate qui avait laissé là son ancienne fortune avant d’être maudit par un puissant sorcier. Ou alors il avait reçu une carte dont la croix était pile ici. En tout cas, j’allais pas rater une telle occasion. Je me mis à l’aider à soulever tout ce bordel, mais une fois fini, il n’y avait rien. On était arrivé jusqu’au sol, je commençais à me niquer les ongles sur les pavés, et il y avait juste une pauvre plante plantée en plein milieu.

          Déçu, je me relevai et m’approchai vers les mecs du chantier. Ils avaient l’air d’être pauvres. Il n’y aurait surement pas de récompenses si on les aidait. Autant se concentrer sur autre chose. Ce bateau qui venait de s’exploser, je pourrais surement essayer de le racheter à un bon prix. Alphonse saurait surement le retaper. Le taper, en tout cas, c’est certain. Mais soudain, un autre grondement se fit entendre derrière. Un deuxième bateau qui s’effondre ? Ça ne pouvait pas être une coïncidence... Je m’approchais de l’endroit où les fondations avaient lâchés et je vis un truc bizarre.

          - NOOOOON, elle est morte !

          Je fis volte-face rapidement et me précipitai vers le personnage tiré d’un cauchemar. Il était en trin de pleurer face à une planche. Je ne compris pas de quoi il s’agissait avant que ses lames ne caressent les feuilles de la plante, écrabouillée sous la planche. Il pleurait parce que ce végétal avait été écrasé ? Mais... Mais on s’en fout ! Je posai la main sur son épaule et tentai comme je le pouvais de le réconforter.

          -C’est pas grave, je t’en donnerai d’autres si tu veux. Doit bien y avoir un fleuriste dans le coin.

          Une troisième construction commença à grincer avant de finir par toucher le sol dans un grand fracas. Mais c’était du délire !! Il y avait forcément un responsable ! Les planches qui soutenaient le premier bateau étaient déchiquetées, comme rongées, ou dissoutes. Difficile à dire, je n’étais pas un expert en animaux. Mais j’étais sûr qu’une bestiole rongeait les planches et provoquait ces accidents. C’était génial ! Il fallait qu’il explose suffisamment de bateaux pour que je puisse récupérer plein de pièces détachées. Je pourrais obtenir des réductions de prix géniales! Il suffirait ensuite de les réassembler pour obtenir un beau bateau pour notre team de chasseurs de primes ! J’avais besoin de ce squelette. Mais il fallait déjà le rattraper, cet animal. Si je ne les aidait pas, pourquoi me feraient-ils une ristourne?

          -Hey ! Tu pourrais découper les planches avec tes doigts tout coupant ? Il y a un truc qui bouffe les planches. Si tu m'aides, je te filerais une belle fleur. Ou une plante. Comme tu préfères.

          S'il pouvait découper les planches pour en faire des petits morceaux, on pourrait en semer dans la rue pour l'attirer dans un piège.
            -Hey ! Tu pourrais découper les planches avec tes doigts tout coupant ? Il y a un truc qui bouffe les planches. Si tu m'aides, je te filerais une belle fleur. Ou une plante. Comme tu préfères.

            Offrir une plante ? Skyle était bien surpris de cette proposition. Il trouvait que les gens étaient parfois bien étrange. Ça s'offre pas une plante. Ça sert à embellir le monde, à rendre heureux, à... À moins que ? Bien sûr, après avoir regardé l'individu ça paraissait évident aux yeux du jardinier, l'animal ne proposait pas d'offrir une simple fleur qu'il trouverait au coin de rue, mais probablement qu'il possédait un jardin à lui et qu'il proposait de lui céder une part ou au moins quelques graines ! Comme il proposait plusieurs options, ça ne pouvait qu'être ça ! De plus, il dégageait quelque chose de bien différent de toute la population croisée sur cette île, une certaine harmonie qui ne collait pas ; un peu comme une tulipe qui serait entourée de pissenlits.

            - Ça me va ! Sisissiiiii

            Par contre, il ne comprenait pas trop l'utilité de la main posée sur l'épaule, donc, dans le doute d'une coutume inconnue, il avait décidé de faire pareil, en tentant de poser sa main, ou plutôt sa griffe sur l'épaule, manquant de lui écorcher un oeil au passage.

            Juste après, pour satisfaire la demande, il avait coupé diverses planches en différentes tailles, en différentes formes, allant du cure-dent à la version de la planche originale presque pas réduite, passant par diverses formes pouvant représenter des animaux, des aliments, voire même des humains presque reconnaissables. Le tout, il l'avait fait grâce à des mouvements rapides de coups de lames, presque impossible à suivre à l'oeil nu.

            Voyant le travail et surtout la facilité avec laquelle il s'était débarrassé des débris, les hommes lui avait demandés de faire de même pour aider la dame. Chose qui ne dérangeait pas à Skyle. Après avoir travaillé le bois, pourquoi ne pas continuer en aidant une femme ! Cette dernière avait la tête libérée ; seul le bas de son corps semblait encore coincé ; elle portait une veste beige assez fade et surtout, abîmée par l'accident. Le paysagiste s'était alors placé devant elle, bloquant la vue des observateurs, pour ensuite continuer son coup de griffe. Taillant avec précision et rapidité, il s'en est éloigné, quelques secondes plus tard, avec la fierté d'avoir pu se rendre utile de par son talent. La femme avait subis un relooking. Sa coupe était à nouveau sans défauts, avec une petite frange supplémentaire, parfaitement coupée. Le manteau avait été revisité en petit débardeur à dos nu, pouvant aller avec n'importe quelle jupe. Le seul problème, c'est qu'elle était toujours coincée. Chose que Skeleton n'avait même pas compris. En fait, il n'avait pas réfléchi à la chose. Il avait "juste" vu qu'elle manquait de classe et l'avait aidé, comme demandé - enfin, le croyait-il - en arrangeant la chose, comme il avait pu le faire avec le bois.

            Sans laisser le temps de réagir, Skyle avait pris quelques morceaux de planches découpées, pour les emmener en appât afin, d'au moins, percevoir la chose qui causait les dégâts. Ne sachant quoi chercher, le découpeur de bois, qui en avait taillé en forme d'os, de poissons, de poteaux, de pièces et autres choses appréciées des animaux, comme des humains, les balançait de parts et d'autres, afin de tenter de faire sortir le « truc » de sa cachette. En vain. Seules les mouettes, lui tournant toujours autour, s'étaient laissées avoir par la forme de poisson.

            Pensant qu'il suffisait d'être patient, l'homme à la tête de squelette avait décidé de se cacher derrière un rondin en forme de pomme « pour ne plus être vu », afin de voir si la chose allait se montrer.
              Il était on ne peut plus efficace le mister Nightmare ! En quelques coups, il agita ses doigts et se mit à tout trancher avec une rapidité et une dextérité que même moi, j’aurai eu du mal à faire. En tout cas, pas avec mes doigts, ça c’est clair ! Mais j’aurais surement réussit à le faire si j’avais des lames accrochées aux mains moi aussi. Il m’avait fait des planches toutes petites, énormes, moyennes, rondes, plates, en forme de poisson, d’animaux, je cru reconnaître la tête du célèbre chanteur Brook, même si ça faisait un peu vieillot. J’avais déjà vu son visage sur des affiches, en vitrine de magasins. C’était juste génial. Si le grignoteur ne trouvait pas son bonheur parmi tout ça, il y avait un gros problème. Je pris le tas de bois en faisant un clin d’œil à l’artiste.

              -Nickel, t’auras tes plantes comme promis !

              Je savais pas où j’allais en trouver, mais une fois que j’aurais mon navire, je pourrais y mettre un endroit avec des plantes. Ce serait utile d’avoir un potager si on n’arrive pas à pêcher de poissons. Et comme j’avais toujours l’intention de prendre le grand squelette qui parle dans mon équipe, il pourrait s’en occuper. Ca avait l’air de le passionner au point d’en pleurer. Enfin, pleurer c’est un bien grand mot, je me demandai s’il pouvait avoir des larmes avec ce genre d’yeux. Pendant que je m’occupais de ça, les hommes du chantier avaient demandé au sculpteur de découper les planches qui retenaient leur camarade prisonnière.

              Il s’y attela, la dégageant très rapidement avant de lui faire un changement de look complet. Il fallait admettre qu’elle était beaucoup mieux comme ça. Ca la rajeunissait un peu. Dommage qu’elle soit toujours coincée, je me rendais pas vraiment compte de l’ensemble. Je déposai des morceaux de bois dans tous les coins de rue, n’ayant pas la moindre idée d’où se terrait la bestiole. Un morceau de bois s’envola, gobé par une mouette, mais je me doutais que c’était une coïncidence. C’était pas un piaf qui avait fait s’effondrer tous ces navires quand même !

              On a attendu une bonne demi-heure, le squelette examinait un morceau de bois en forme de pomme de très près et ne semblait pas s’en lasser. J’étais sûr qu’il pouvait rester comme ça pendant des journées entières si aucun évènement ne venait le perturber. Moi, par contre, c’était sûr que non, j’allais vite en avoir marre. D’ailleurs j’en avais déjà marre ! Je me penchai et pris un morceau de bois que je jetai rageusement dans la vitre de la maison la plus proche de moi. Mais avant l’impact, une boule de poil orange l’attrapa en l’air et se mit à frétiller de la queue en me regardant avec de grands yeux ronds.

              -Putain, c’est quoi ce truc ?

              C’était une bestiole avec deux grandes dents rectangulaires qui se plantaient dans le bois, une grande queue marron et toute plate à l’arrière et des petites moustaches noires. D’un coup, il ferma la bouche et avala le morceau de bois. C’était lui qui bouffait tout ! Je pris un autre morceau et essaya de le faire s’approcher. Il était mignon ce petit truc ! Mais je pouvais pas l’emmener avec moi, il boufferait mon bateau en quelques minutes.

              Je lançai le morceau de bois en direction du squelette et la bestiole se mit à courir après et fonçait droit vers mon accolyte. Mais celui-ci ne semblait pas suivre l’action, toujours en train de regarder sa pomme de bois.

              -Hey, machin ! Attrape le, vite !
                Lorsque Jean arriva au Royaume de Bliss, il constata rapidement que celui-ci ne semblait pas très bien entretenu. Même le bateau marchand qu'il avait emprunté pour venir jusque ici et dont il venait d'être expulsé car, paraît-il, les passagers clandestins sont interdits, était en meilleur état. Il est vrai qu'il avait tendance à grincer, que certaines planches étaient mal clouées et qu'il y avait des trous sur le pont, mais au moins il avait l'allure d'un navire, alors que ceux que Jean voyait ici ressemblaient plutôt à des monticules de planches. Il y avait peu de chances qu'il trouve un autre bateau ici pour retourner à la recherche de Saphotis mais après tout, ça n'avait que peu d'importance car il n'avait toujours pas trouvé le moindre indice quant à la localisation de ce dernier si ce n'est : "Qu'est-ce que j'en sais moi ? T'as qu'à aller sur Grand Line, c'est rempli de mariolles comme lui là-bas !". Indication qui le laissait suspicieux car s'il était sûr que Saphotis était vil et peu respectueux, il n'avait en tout cas jamais eu l'impression qu'il était un mariolle, ce qui le faisait se demander si cet informateur avait bien compris toute l'histoire. Mais ne disposant que de cela, Jean suivit tout de même cet indice et se décida à partir sur Grand Line même si, à présent qu'il était dépourvu d'embarcation, ce serait bien plus difficile. Il avait bien pensé à la nage mais il émettait de sérieux doutes quant à l'efficacité de cette méthode. Il ne lui restait plus alors qu'à trouver des personne susceptibles de l'aider, que ce soit en lui offrant un bateau, en lui livrant Saphotis, ou bien les deux à la fois, c'était égal à Jean, il n'était pas très difficile.

                C'était donc sur la plage, après qu'on l'ait lancé du bateau, que Jean se tenait la jambe en scrutant les environs. La chute avait été rude et il espérait ne rien s'être brisé. Il voulait avancer en direction des gens qui s'affairaient à en sortir d'autres des débris mais il s'aperçut rapidement qu'il ne pouvait pas forcer sur cette même jambe gauche qu'il se tenait encore avec vigueur quelques instants auparavant : il titubait plus qu'il ne marchait. Qu'à cela ne tienne, il était bien décidé à rejoindre les habitants de cette île qui pourraient, il l'espèrait, l'épauler dans sa quête, et il fit donc le chemin à quatre pattes au lieu de deux et se demanda en cours de route pourquoi il n'allait pas deux fois plus vite dans cette posture. Peut-être était-il gêné par le seau qu'il tenait dans la main gauche ? Il décida de garder cette interrogation pour plus tard et arriva enfin près des ruines. Il ne mit pas beaucoup de temps avant de repérer l'homme ailé qui venait de lancer un bout de bois. Jean réfléchit quelques instants et conclut rapidement que si cet homme était ailé, il savait sûrement beaucoup de choses, en particulier des rumeurs, qu'il aurait récoltées au cours de ses voyages d'île en île à la simple force de ses ailes. Il avait beaucoup de chance, cet homme aux ailes : si Saphotis lui volait sa canne à pêche il pourrait sûrement le rattraper très vite. Jean tenta à nouveau de se lever mais il n'était pas sûr de pouvoir marcher convenablement. Tant pis, il devait faire bonne impression : si l'autre le voyait arriver à quatre pattes, il le prendrait sûrement pour un fou et ne voudrait pas l'aider. C'est ainsi que Jean avança vers James Fermal, boitant tellement qu'on eut presque dit qu'il n'avait qu'une seule jambe si cela était possible, semblant sur le point de se casser la figure après chaque pas. Afin de se faire remarquer et, peut-être, raccourcir son trajet, Jean tenta d'appeler celui qu'il cherchait à atteindre


                Hého ! Toi avec des ailes ! Tu m'entends ?

                Probablement déconcentré par sa phrase, par la vue du squelette entouré de mouettes ou par le caillou sur lequel il venait de cogner son pied, Jean perdit l'équilibre et tomba à nouveau. La chute était néanmoins beaucoup moins haute que depuis le bateau, et cette fois il n'avait pas l'impression de s'être blessé. Il tenta encore de se relever, mais plus il forçait sur sa jambe et plus elle lui faisait mal, à tel point qu'il resta sur le sol, espérant qu'on vienne vers lui. Contrarié, il se surprit même à souhaiter que les marchands qui lui avaient fait subir cela se fassent attaquer par des pirates. Il chassa rapidement cette pensée de son esprit, ne voulant pas leur porter malheur, et s'allongea par terre, pensant aux folles journées de pêche qu'il pourrait faire sitôt sa canne remboursée, et à la satisfaction qu'il éprouvera quand Saphotis lui remboursera son bien, tout humilié qu'il sera d'avoir été rattrapé par ses mauvaises actions. Jean se mit alors à sourir et oublia pour un court moment qu'il était en réalité là, allongé par terre, la jambe en piteux état, bloqué sur une île inconnue, à attendre qu'une personne étrange avec des ailes daigne s'occuper de lui afin qu'il puisse lui demander de l'aide, situation qui, s'il y avait donné un certain temps de réflexion, l'aurait probablement inquiété.
                  Aussi bien caché que ça, Skyle ne pouvait être vu par la cause des dégâts, ce qui n'était pas le cas du type ailé. Il bougeait partout, lançait les planches tailladées ; à croire qu'il jouait, comme si ça l'amusait de balancer des bouts de bois pour courir ailleurs et en lancer à nouveau. N'avait-il pas compris que c'était pour attraper la chose qui cassait tout ? Bon, après tout, c'était normal, ce n'était qu'un animal, on ne pouvait pas lui en vouloir, mais l'idée venant de lui, il aurait pu faire un effort.

                  Autour, les gens semblaient bien choqués. Ce qui était compréhensible : des constructions s'écroulaient à la chaine, les habitants se réunissaient pour aider les gens coincés sous les décombres, certains tentaient de voler dans les magasins, augmentant la vigilance de quelques commerçants sortis pour aider, et deux hurluberlus faisaient un spectacle, avec une perche qui lançait des bouts de bois avant de rester immobile, suivi d'un blondinet se prenant pour un oiseau, courant, semblant parfois sautiller, qui lançait du bois taillé de différentes formes, tout en tournant autour du gringalet. Chose assez déconcertante. Les habitants devaient soit les prendre pour responsables, créant ainsi une diversion pour que des complices puissent cambrioler tranquillement, soit ils pensaient qu'ils faisaient une sorte d'incantation, comme on peut le faire pour invoquer la pluie.

                  C'est donc sous les regards emplis d'incompréhension que le blond s’apprêtait à casser une vitre. Pendant une micro seconde, Skyle le pensait en avoir marre de courir partout, qu'il voulait se désaltérer en se servant de la boisson posée proche de la fenêtre, alors que les spectateurs pensaient qu'il s'était décidé à cambrioler. Mais, ne laissant pas le temps de réagir, tout autre chose s'était produit : il avait réussi à attirer la bestiole.

                  Skyle ne connaissait pas la bête, mais d'après les habitants, il s'agirait d'un casse fort, d'un casse croute, d'un cas tord, d'un casse porc... Bref. D'un rat orange. L'oiseau avait lancé un second rondin pour attirer le truc aux longues dents proche de l'homme caché. C'était bien joué ; ainsi, il pouvait sortir par surprise pour l'attraper. Du moins, c'est ce que ce dernier pensait sur le coup. Une fois le castor à ses pieds, il pouvait l'observer. L'animal se présentait avec prestance pour faire disparaitre petit à petit le bout de bois. Il semblait tellement différent de tous les autres ; il ne se contentait pas de détruire la décoration, il la faisait totalement disparaitre - du moins, ses joues grossissaient au fur et à mesure qu'il rongeait. Cette race castor faisait des réserves de bois en ingurgitant la poudre de bois et en en stockant dans ses joues. Pas n'importe quel bois, mais un bois de qualité, expliquant pourquoi il ne se contentait pas d'une seule et unique structure.

                  Voyant cela, le paysagiste était entré en grande admiration. Il n'avait pas compris le réel objectif de l'animal ; il croyait qu'il s'occupait de la décoration de la ville, en tentant de la faire disparaitre dans sa totalité. Quelle classe pensait Skyle, car lui-même, s'il avait dû décorer la ville, il n'aurait pas pensé à la détruire en intégralité, voire à se sacrifier, en mangeant le bois afin d'être sûr qu'il ne repousse plus - car oui, il pensait que sur cette île, le bois était une plante décorative pour les villageois, chose qu'il prenait simplement pour une mauvaise herbe. L'homme aux cisailles avait, après cette réflexion, totalement oublié l'objectif de base, envisageant, à la place, de demander à l'animal d'accepter d'être son maître.

                  Ainsi, il s'était baissé petit à petit, la pomme de bois toujours en main, pour finalement avoir la tête au niveau de celle du castor, le regardant droit dans les yeux, pour venir croquer la pomme. Elle était dure à croquer, mais Slyle voulait impressionner son potentiel futur maitre, donc il s'efforçait à l'avaler. Pour la suite de la pomme, il avait préféré la cisailler en tout petit lambeau, afin que ça passe mieux. C'est ainsi que, sous un oeil intrigué, qu'il mangeait du bois. Mais ne lui laissant pas le temps de finir, l'animal se dirigeait déjà vers un autre bout de bois positionné à côté d'un homme coincé. Un homme bizarrement coincé, car celui-ci était immobile alors qu'aucune planche n'était sur lui.

                  Alors que l'animal grignotait un morceau de bois ayant la forme d'un squelette avec une coupe afro, le jardinier, l'avait suivi pour faire comme lui, afin d'espérer lui demander ensuite d'être son maître. Ainsi, il s'était mis à tenter de croquer un objet qui, finalement, n'était pas en bois, mais en plastique, il s'agissait d'un seau.
                    Mais où j’étais tombé moi ? Ce monde était décidément empli d’êtres étranges et inquiétants. Dans la même journée, j’avais découvert un squelette avec des lames à la place des doigts, une bestiole orange surexcitée qui bouffait du bois et maintenant un homme qui marchait de façon bizarre et s’écroulait dés qu’il parlait. A peine avait-il crié dans ma direction qu’il s’était effondré face contre terre. Les humains étaient décidément une race bien complexe et partiellement débile. Heureusement que j’étais arrivé pour remonter un petit peu le niveau des Blues. Ma seule présence offrait un certain prestige à l’île où je posai les pieds. Mais bon, là, à cet instant précis, je ne me sentais pas particulièrement prestigieux.

                    J’avais cet inconnu qui m’avait appelé d’un coté. Il devait forcément s’adresser à moi, puisqu’il avait parlé de « type avec des ailes » et aux dernières nouvelles, je suis le seul ange en circulation sur ces mers. C’était triste, mais réaliste. De l’autre coté, j’avais mon squelette qui n’avait absolument rien compris au plan et qui n’avait pas attrapé l’animal boisophile. Non seulement, il ne l’avait pas capturé, mais il s’était mis à l’imiter en bouffant du bois également. J’étais partagé, je ne savais pas de qui je devais m’occuper en premier lieu. Le choix fut vite fait lorsque le squelette se mit à bouffer le sceau du mec qui rampait par terre. Si on m’avait dit qu’un jour je prononcerais ce genre de phrase, je l’aurais jamais cru. Mais c’était bien ce qui était en train de se passer. Je m’approchai en soupirant, les bras ballants.

                    -Bon, qu’est ce que c’est que ce bordel ?

                    Je me penchai vers le mec à terre. Il avait un problème ? Un handicapé ? J’avais pas de sous sur moi, alors il pouvait toujours espérer m’apitoyer, ça marcherait pas. Je le palpai du bout du pied et attendit une réaction qui ne vint pas immédiatement. Il était à l’Ouest lui aussi. Y avait-il un humain qui ne soit pas à l’Ouest ? Je ne ferais pas de blague pourri avec le fait qu’on était sur West Blue, mais l’idée me traversa l’esprit.

                    -Bon, qu’est ce qui t’arrive ptit gars ?

                    Je fis un geste envers Skelettor pour qu’il se pousse avec un « pshittt ! » agressif comme je faisais avec Morgan quand il me saoulait. Je m’accroupis et jetai un bout de bois à la bestiole, bien que je ne savais pas qui d’elle ou du squelette ambulant allait se précipiter dessus en premier. Il était vraiment louche, mais je l’aimais bien ce maigrichon. Je pris le sceau mâchouillé et le tendis vers l’inconnu rampant. Je le pris par le bras et le retournai pour voir son visage.

                    Il avait l’air d’un gamin, mais quand même plus vieux que le petit Uriko si mes souvenirs étaient bons. Un chapeau de paille, pas de barbe et un air ahuri. Je comprenais vraiment pas ce que ce type que j’avais jamais vu de ma vie pouvait bien me vouloir. Après réflexion, ce sceau pourrait bien m’aider à choper la bestiole !


                    Dernière édition par James Fermal le Dim 15 Juil 2012 - 21:25, édité 1 fois
                      Jean se perdit assez rapidement dans ses pensées ce qui était excusable car il n'y allait pas très souvent. Il était toujours en train d'errer dans les méandres de son esprit lorsque James s'approcha de lui et lui demanda, littéralement, ce ce que c'était que ce bordel

                      Bon, qu'est-ce que c'est que ce bordel ?

                      Cela ne fit pas réagir Jean. Le mot "bordel" utilisé par James Fermak était cependant, par un hasard dont malheureusement aucun des deux n'aura jamais connaissance, fort approprié puisque notre pêcheur favori s'imaginait alors sauvant des prostituées des griffes de Saphotis. Jean en devenait alors le chef et se servait d'elles comme guerrières afin de vaincre l'odieux brigand une bonne fois pour toute. Sans que cela soit d'un intérêt quelconque pour la suite des évènements, il s'avérait que le nombre de prostituées était de 10, ce qui porta probablement malheur à l'adversaire onirique infortuné de Jean Talcmecz. Les divagations du narrateur eurent à peine le temps d'être remarquées que l'ange s'adressait à nouveau au jeune homme, cherchant à s'enquérir des histoires du pauvre humain.

                      Bon, qu'est-ce qui t'arrive p'tit gars ?

                      Si pendant ce temps Jean avait remarqué qu'on le prenait pour un fou, il se serait sûrement levé en vitesse. Il est fort probable qu'il aurait réagit de la même manière s'il savait qu'on tentait de manger son seau, ou encore s'il s'était rendu compte qu'on l'avait retourné. Mais parfois les choses ne se produisent pas comme on s'attend à ce qu'elles le fassent et c'est ainsi que, quand bien même il avait parfaitement conscience d’avoir été mis sur le dos, il ne se leva pas en vitesse. La fatigue du voyage en mer et sa blessure l'avait fatigué, ou bien était-ce simplement une manifestation anodine d'une certaine lenteur d'esprit ? Personne ne se posa alors la question, et personne de toute façon ne se la posera avant des années. Mais qu'il soit fatigué ou idiot, Jean n'en est pas moins un être humain conscient et il ne patienta pas une éternité avant de reprendre ses esprits. Lorsqu'il cessa de penser à des aventures qui n'arriveraient peut-être jamais, Jean observa autour de lui, sans se lever. Il vit l'ange, penché au-dessus de lui, son seau, qui semblait avoir été confondu par un bout de viande par une personne probablement peu futée, et un peu plus loin le squelette étrange. Il se mit sur ses fesses et dit, de façon monotone et peu naturelle :

                      Bonjour, je m'appelle Jean Talcmecz, et vous comment vous appelez-vous ?

                      Jean garda la bouche ouverte, prêt à demander à l'ange s'il pouvait lui offrir un bateau ou Saphotis mais il décida d'attendre la réponse à sa question. Afin de ne pas avoir l'air ridicule pour avoir gardé la bouche ouverte trop longtemps, il élabora rapidement un stratagème et décida de se forcer à rire quelques instants.

                      Haha ! Haha !

                      Puis, il referma rapidement la bouche. Il se demanda s'il avait bien fait, s'il n'avait pas eu l'air encore plus ridicule, mais se dit que rire n'était jamais vraiment ridicule. Cela montrait simplement la joie, et tout le monde aimait la joie. Rassuré, il en conclut que l'honneur bien était sauf pour cette fois-ci, mais qu'il faudrait faire attention à l'avenir. Il jeta un rapide coup d’œil à son seau : il avait vraiment l'air d’avoir était abimé. Qu'est-ce que les gens avaient tous contre son matériel de pêche ? Peut-être l'ange était-il un ami de Saphotis. Dans ce cas, il saurait sûrement lui indiquer où ce dernier se trouvait. Parfait ! Tout fonctionnait si facilement ! Il commença à réfléchir sur la façon dont les choses allaient se passer à présent mais s'arrêta rapidement. Il préférait écouter ce que l'ange allait lui dire, c'était pour cela qu'il l'avait appelé après tout, parler avec lui. Et de plus, il était assez rassurant. Il semblait blasé et les gens blasés savaient en général beaucoup de choses, du moins pensait-il, ce qui le confortait dans son idée de départ : cette ange lui serait d'une grande aide.
                        Ce qu'avait Skyle en bouche n'était pas bon. Le bois normal n'est déjà pas particulièrement gouteux, mais alors là, c'était bien pire. Seulement il ne fallait pas montrer le moindre signe de faiblesse au risque de vexer le futur maître ; alors le nouvel amateur de bois s'efforçait de - tenter de - le manger. Chose ne semblant pas plaire à son ami qui, probablement par jalousie, avait décidé de le bousculer, accompagné d'un bruit bizarre qui était certainement son cri de volatile pour le forcer à lâcher prise. Skeleton était surpris de sa réaction ; à croire qu'il voulait lui piquer sa place. Ce n'était pas grave, ça ne le dérangeait pas si l'oiseau voulait aussi être l'esclave du rongeur.

                        *Hey, soit pas jaloux ! Si tu veux être son esclave, y'a pas de soucis, mais pas besoin d'me jeter. On peut tous les deux appartenir au Captor, ça pourrait être marrant ! Tiens, pour preuve, j'te laisse ce bois puisque tu sembles y tenir ! Sisisisisiiiii.*

                        - Hey, ... me jeter ... au Captor ... marrant ! ... j'te ... bois ... tu sem... Sisisisisiiiii.

                        C'est uniquement avec ces quelques mots audibles, déformants sa pensée originale, que Skyle tendait le seau au blond. Ce dernier s'était alors débarrassé du morceau de planche qu'il semblait s'apprêter à manger, pour le remplacer par la bassine. À peine l'avait-il lâchée, que l'homme aux cisailles s'était empressé de rejoindre l'animal en courant rapidement... trop rapidement. Ce n'était pas voulu, mais il avait fait fuir le rongeur. Ne renonçant pas à devenir son esclave, le jardinier s'était dépêchée de lui courir après. Ce serait con de rater l'occasion d'au moins lui demander.

                        Ainsi, une course poursuite s'était lancée ; d'abord seuls, le castor suivis de l'esclave, puis la population environnante qui avait compris que l'animal était la cause des dégâts, s'était rajoutée. Rapide et malin, le rongeur zigzaguait en évitant la foule, tout en restant dans la zone, comme si quelque chose le retenait. Chose étrange, car il aurait pu s'éloigner depuis un moment. Il courait dans les rues, évitant parfois la foule au dernier moment, les laissant foncer sur les vitres, avec parfois quelques-unes qui se brisaient soit ainsi, soit sous le choc des objets lancés, pour continuer sur les toits, retourner dans les rues et à nouveau sur les toits, comme s'il cherchait non pas à fuir, mais à épuiser la foule. Ce qui semblait marcher, puisque le nombre de poursuivants diminuait.

                        La course aurait put durer encore un moment, si Skyle n'avait pas malencontreusement coincé son pied dans le seau qu'il n'avait pas vu, l'empêchant ainsi de courir en le faisant tomber, la tête en première dans un trou, sous l'une des maisons. Il se retrouvait ainsi coincé, n'arrivant pas à se dégager, le trou étant plus petit que sa tête. Alors qu'il ne voyait rien dans l'obscurité, il sentait d'abord des moustaches s'approcher de son visage, pour ensuite commencer à se faire mordiller à la fois la tête par plusieurs choses non identifiées, ainsi que par les fesses. La castor qui, jusqu'à présent, fuyait, s'était attaqué à son postérieur, laissant l'esclave crier et gigoter dans tous les sens sans réussir à se dégager.
                          Oulala, il était encore plus taré que je ne le pensais celui-là ! Alors que je devais déjà gérer le mangeur de bois et son nouveau disciple sorti tout droit d’une histoire de zombies, cet homme m’intriguait mais ne semblait pas avoir connecté tous les neurones de son cerveau. Il restait là, les yeux dans le vague, sans la moindre activité cérébrale décelable dans le regard et il ne parlait pas. Pendant un moment, je me demandais s’il n’était pas tout simplement mort, ce qui expliquerait qu’il ait finit son parcours face contre terre. Du bout du doigt, je lui poussai la joue pour tenter de voir s’il y avait une quelconque réaction de sa part. Rien ne se passa, il restait inerte comme un nuage blanc. Soudain, sans crier gare, il se releva, me faisant sursauter. Bin non, il était vivant en fait. Il avait simplement la tête dans les planètes.

                          -Bonjour, je m'appelle Jean Talcmecz, et vous comment vous appelez-vous ?

                          Et bien, après une arrivée aussi surprenante, c’était très banal et formel comme entrée en matière. Je m’attendais à ce qu’il me dise quelque chose de très important ou simplement me poser une question. Pourquoi voulait-il savoir mon nom ? Et pensait-il vraiment que ça m’intéressait de connaître le sien ? Mais bon, peut-être était-ce simplement une manière d’amener son propos. Du coin de l’œil, je continuais à surveiller le squelette qui semblait définitivement avoir perdu la boule. Celui-ci avait prononcé quelques mots sans queue ni tête avant de me rendre le seau et c’était enfin mis à poursuivre l’animal. Cela aurait pu être une bonne nouvelle, mais la situation se mit à dégénérer quand les passants se lancèrent également dans la course. Essayant de ne pas me laisse distraire, je retournai à mon interlocuteur.

                          -Haha !

                          Pourquoi il riait ? Il se foutait de moi ou il était déjà retourné dans ses pensées et s’était raconté une blague qu’il ne connaissait pas ? Décidément, ce mec était vraiment louche. Je décidai de jouer le jeu, comme s’il était normal, afin de savoir où il voulait en venir.

                          -Moi c’est James Fermal. Pourquoi ? C’est juste pour savoir ça que tu m’as appelé ? Parce que si oui, je suis un peu occupé là. J’ai une bêbête qui court partout, suivie d’un squelette qui marche, suivit par une grosse dame avec un rouleau à pâtisserie, suivie par un charpentier en colère suivit par une foule d’au moins vingt personnes et visiblement, ils vont tout péter !

                          La course-poursuite se déroulait d’une manière si absurde que j’avais du mal à me dire que c’était un animal qui en constituait la tête. Il semblait connaître la ville comme sa poche, prenant des raccourcis, tournant au dernier moment, montant sur les toits... Il commençait à gagner mon respect ce truc orange, parce qu’il parvenait à tenir tête à toute une foule, malgré ses quelques cinquante centimètres de long. Franchement pas mal. Je tendis la main au fameux Jean pour l’aider à se relever. Chez moi, c’est assez malpoli de faire la connaissance de quelqu’un sans être debout.

                          A ce moment, l’éclair orange me passa juste à coté, me frôlant le tibia, immédiatement suivit par Skelettor. Le bipède n’avait pas la dextérité du truc à quatre pattes et ne put éviter le seau qui était resté posé à mes cotés. Il mit le pied dedans et trébucha pendant quelques mètres avant de s’éclater littéralement la tronche contre le bas d’un pan de mur d’une habitation. Tellement explosé que sa tête avait été désintégrée ! C’était incroyable ! Je m’approchai de lui et découvrit que ses épaules étaient directement collées au mur, sa tête n’était plus là. C’est con, je pouvais plus l’embarquer avec moi s’il était mort !

                          Mais ses jambes et ses fesses remuaient pourtant. Surtout depuis que les deux dents pointues du petit fuyard s’était planté dedans. C’était bizarre d’ailleurs, comment pouvait-on mordre un squelette ? On devrait en théorie se péter les dents dessus, même pour une fesse. Après cette réflexion, je me dit qu’il serait peut-être de bon ton de lui venir en aide, puisqu’apparemment il n’était pas encore mort. Sinon, il ne pourrait pas crier comme il le faisait. En tout cas, c’était une occasion en or, la chose à queue plate s’était enfin immobilisée. Je l’attrapai en passant mes bras autour de son ventre et tirai d’un coup sec. Une bonne partie du pantalon du squelette vint avec, laissant découvrir son postérieur à la vue de tous. Chose étrange, il saignait. Ce n’était donc pas véritablement un squelette, il avait un peu de chair autour quand même. Mais pas grand-chose...

                          La bestiole gigotait, mais je parvins à me la caler sous le bras, avant de poser le seau sur l’arrière-train du maigrichon. S’il devait faire partie de mon équipe, je ne voulais pas qu’on se souvienne uniquement de ses fesses, quand même ! Je récupérai une corde issue de la chute de l’échafaud et ligotai ma prise. Une fois totalement immobilisée, je la posai par terre et fit signe à Jean Talcmez de me rejoindre. Il semblait vouloir me demander quelque chose, mais je l’interrompis. Il y avait plus urgent.

                          -Viens m’aider, on va le tirer de là. Attrape la jambe droite, je prends la gauche. A trois, on tire ! Un, deux, trois !
                            Moi c’est James Fermal. Pourquoi ? C’est juste pour savoir ça que tu m’as appelé ? Parce que si oui, je suis un peu occupé là. J’ai une bêbête qui court partout, suivie d’un squelette qui marche, suivit par une grosse dame avec un rouleau à pâtisserie, suivie par un charpentier en colère suivit par une foule d’au moins vingt personnes et visiblement, ils vont tout péter !

                            Suite à ces mots, Jean commença à regarder plus attentivement ce qui se passait autour de lui, prêtant plus d'attention aux différentes personnes et aux différentes actions, poussant sa compréhension de la scène à plus que "plein de bois s'est effondré". Tout le monde courrait dans tous les sens après un tout petit mammifère, pour des raisons qui lui étaient bien obscures. Tout cela était bien cocasse, se disait-il, et il avait sans aucun doute raison. James Fermal lui tendit la main pour l'aider à se relever, et Jean saisit l'occasion et la main tout à la fois et se retrouva en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire debout sur ses deux pieds. C'est le moment que choisit l'animal et son ami squelettique pour passer en courant très rapidement à côté de l'ange et l'humain. Si l'animal réussit facilement la manœuvre, on ne pouvait en dire autant du squelette qui trébucha sur le sceau quelque peu abîmé de l'infortuné pêcheur et finit sa course sous une maison. James s'éloigna de Jean pour aller vérifier l'état de santé du squelette. Si Jean n'avait pas déjà utilisé le mot "cocasse" pour le début des évènements, il l'emploierait sans aucun doute pour ce qui allait suivre. N'aimant pas se répéter, il préféra se dire que tout cela était loufoque. En effet, l'animal surexcité mordit les fesses du squelette qui, finalement, semblait ne pas être un vrai squelette puisqu'il y avait de toute évidence matière à croquer. James captura la bête et celle-ci tenta de capturer le pantalon du pseudo-squelette. Tout ce qu'elle obtint fut la découverte de ses fesses, masquées rapidement par le sceau qui avait pourtant déjà bien souffert, confirmant si c'était encore à faire que le squelette n'en était pas un. Amusé par tout cela, mais n'ayant pas oublié pourquoi il était venu parler à James, Jean décida de lui demander pour le bateau et Saphotis mais l'ange lui coupa la parole avant même qu'il ne la prenne.

                            Viens m’aider, on va le tirer de là. Attrape la jambe droite, je prends la gauche. A trois, on tire ! Un, deux, trois !

                            Docile et peu contrariant, Jean s'approcha prestement du sauveteur improvisé et saisit la jambe droite du prétendu squelette. N'étant pas doté d'une force musculaire très impressionnante, il n'était pas sûr d'être d'une très grande aide, mais après tout, seule la tête était bloquée, ça ne devait pas être bien difficile. D'ailleurs, le squelette-qui-n'en-était-pas-un avait l'air de commencer se dégager. Le sceau tanguait, et ne tarderait pas sûrement à tomber, ce qui n'était pas plus mal, pensa Jean. Il n'était pas très confortable à l'idée que son sceau soit ainsi mis en contact avec le postérieur d'un inconnu. Il n'était d'ailleurs pas très confortable à l'idée que son sceau soit mis en contact avec le postérieur de qui que ce soit, qu'il soit ou non un inconnu. Il pensa à enfin demander ce qu'il voulait savoir depuis le début mais décida rapidement que ce n'était pas le moment approprié, et que s'il posait la question une fois le trébuchant sorti d'affaire, il pourrait la poser aux deux en même temps, ce qui n'était pas plus mal en fin de compte.
                              Coincé. Pour l'être, ça, il l'était bien.

                              Skyle avait beau tenter d'utiliser ses lames pour se libérer, mais avec toute l'agitation qu'il y avait sur son visage et ses fesses, il n'arrivait que légèrement à entailler le bois ; chose bien peu suffisante pour s'en sortir. Il ne lui restait donc plus qu'à continuer à griffer le bas de la maison, en gigotant son derrière et sa face pour espérer qu'au moins, les bestioles viennent à lâcher prise. Chose qui semblait avoir fonctionné d'un côté, mais manque de bol, la bête avait embarqué un moreau de tissu, laissant ses fesses sentir la joie de la légère brise. Par chance -dans sa malchance- le problème avait rapidement été arrangé, car un objet –moins douloureux– avait été posé afin de l'empêcher de ressentir le vent.

                              Rapidement, on lui avait tenu les jambes pour le sortir de là. Au début, rien ne bougeait, un petit effort plus tard, seulement un craquement de bois s'entendait, puis au bout d'un plus gros effort de la part des tireurs, un bruit de bois cassé et le malheureux était (enfin) éjecté à quelques mètres de la maison.

                              Après une roulade, le jardinier s'était levé, d'un coup, content d'être libre en tentant très rapidement de lever les bras pour fêter son soulagement, mais c'était un échec. Il l'avait pas remarqué, mais il avait toujours la tête coincée : il possédait maintenant un grand et gros col de bois, dans lequel il venait de planter ses lames. En effet, sa tête n'avait pas réussi à sortir du trou, c'était le « trou » qui était sorti avec lui... Donc le bois qui avait cédé, probablement grâce à ses coups de griffes. De plus, le choc lors de la roulade avait fait s'encastrer le sceau sur ses fesses, lui donnant une allure courbée, l'empêchant de se tenir droit. Le voilà dans un bel état maintenant. Il ne pouvait bouger, ni la tête, ni les bras, ne pouvait que vulgairement bouger ses jambes et ne pouvait rien voir, car les bestioles s'acharnaient toujours sur son visage. C'était deux bébés castors, chacun avec ses dents plantées au niveau d'un des sourcils, le corps devant les yeux, bloquant la vue.

                              Seules sa bouche et ses jambes étaient libres et il n'hésitait pas à s'en servir. C'est donc inspiré d'un grand moment de panique et de désespoir qu'il s'était mis à courir en criant d'un son bien strident. La situation était horrible pour lui, mais d'un point de vue extérieur, voir un mec, les bras plantés dans son col, ne lui laissant bouger que ses bras, comme s'il battait des ailes, un sceau sur le derrière, lui imposant de les mouvoir qu'à partir des genoux, le tout, lui donnant une démarche de canard, semblait assez hilarant. La foule, jusqu'alors énervée, n'osait plus intervenir, perturbée par un fou-rire général, mélangé à une certaine gêne.
                                Punaise ! Il était vachement bien enfoncé, ce con ! On avait beau tirer comme des tarés, ça bougeait à peine ! C’était surement parce que l’autre là, il tirait rien du tout ! Ralala, on était pas aidé, je te jure ! D’accord il avait visiblement mal aux pieds mais tout de même ! C’est pas parce que j’étais le meilleur que je devais forcément me taper tout le boulot ! Je pris une jambe dans chaque main et me mis à tirer comme un dingue ! Un craquement se fit attendre ! Puis un autre ! Et... Hein ? Comment ça un craquement ?

                                CCCRRRRRAAACCCC !!!!

                                Tout lâcha d’un coup et en moins de temps qu’il le faut pour comprendre quoi que ce soit, soit environ dix secondes pour mon cas, je me retrouvais le cul par terre, avec un squelette portant un collier de planches autour du cou et des petites bestioles oranges sur le visage qui volait au dessus de moi. J’entendis un « paf » sourd qui me fit savoir qu’il avait bien atterrit... quelque part. Je me retournai et vis que lui aussi avait atterrît sur les fesses, sauf que pour son cas, ça l’avait enfoncé dans le seau. Du coup, il pouvait même plus se tenir droit, je me demande d’ailleurs comment il est parvenu à se relever. Surement à cause de la panique qu’il éprouvait. Il était en train de se faire grignoter le visage par des versions miniatures de la créature qu’on pourchassait depuis le début. Je crois que son but premier était de les enlever, mais ses griffes se plantèrent dans le rond de bois qu’il avait toujours autour du cou et, visiblement, il n’arrivait plus à les en retirer.

                                Je me relevai en me frottant la tête, et commençai à avoir un fou rire. Non mais franchement, c’était quoi ça ? J’éais venu pour engager un squelette terrifiant dans mon équipage et je me retrouvais face à... ça ! Un truc blanc et très mince en train de battre des bras comme s’il avait des ailes, les griffes plantées dans son collier et la vue bouchée par des bêbêtes qui lui mordaient la figure. Du grand n’importe quoi ! Je dus me rasseoir tellement je rigolais ! J’aurais bien voulu l’aider mais j’avais trop mal au ventre ! Lorsque je parvins à retrouver mon calme pendant quelques instants, je sortis deux balles de ma cartouchière et saisit ma batte. Essuyant une larme au coin de mon œil, je lâchai nonchalamment la balle.

                                -Halala ! Quel con...

                                Encore secoué de petits rires incontrôlés, je frappai la balle qui vint dégommer la première petite bestiole. La deuxième balle s’occupa, vous l’aurez deviné, de la deuxième bestiole. Par contre, il me semble que Skelettor se les ai mangé aussi, mais on fait pas d’omelette sans casser des œufs, hein ? Je me levai et frappa un grand coup derrière la tête du prisonnier et le libérai de ce rond de bois. Pour le seau, il allait se démerder quand même, j’allais pas lui tripoter les fesses, non plus ! Je ramassai les deux bestioles qui se mirent à me mordre le doigt comme des déjantés ! Un simple claquement de main suffit à les assommer toutes les deux. Je les mis aux cotés du gros truc orange, les attachai ensemble et me retournai vers Jean. J’allais peut-être enfin savoir ce qu’il me voulait !

                                -Bon ! Si tu me disais pourquoi tu mas appelé maintenant ?

                                Du coin de l’œil, je scrutai les environs. Avec tout le bois qui trainait par terre, on allait pouvoir en récupérer pas mal pour se construire un bateau. J’étais sûr qu’Alphonse se débrouillerait très bien pour nous créer un magnifique galion avec huit mats, vingt voiles, six cents canons et une vitesse de pointe de deux cent kilomètres à l’heure. Ben oui, c’était pas un surhomme non plus, j’allais pas trop lui en demander. Le minimum vital pour un groupe de cinq quoi !
                                  Jean tirait du mieux qu'il pouvait mais ça ne semblait pas être du goût de James Fermal car il se mit à tirer tout seul sur les deux jambes. Un peu vexé au début, Jean le fit encore plus quand cette technique fit ses preuves, libérant le squelette de son emprise. Enfin presque. Plutôt que de sortir l'étrange personnage, on avait sorti le trou. Pour ajouter du ridicule à la situation, il tomba les fesses dans le seau, s'y encastrant puissamment, et se leva, pour courir partout, en criant, les yeux recouverts de bébés castors. Jean commença à rire mais, voyant tous les autres qui se moquaient aussi de l'énergumène hors du commun, il fut pris de façon passagère d'un sentiment de culpabilité. Il savait ce qu'enduraient les moqués, et ça ne le faisait plus du tout rire. Il fut même pris de pitié pour le pauvre individu qui, décidément, n'avait vraiment pas de chance. Tout cela rappelait à Jean les fois où les enfants du village se moquaient de lui. Ainsi que les fois où les adultes du village se moquaient car il se laissait faire par des enfants. Ou les fois où les enfants du village se moquaient de lui car leurs parents se moquaient de lui. Autrement dit, cela lui rappelait les fois où on se moquait de lui, quelles qu'en soient les raisons. Comme si cela ne suffisait pas, l'ange semblait avoir décidé de le prendre pour cible ! Il s'empara d'une batte et de quelques balles, et en projeta une à pleine puissance vers le malheureux ! Mais enfin, James était-il devenu fou ?

                                  Halala ! Quel con...

                                  Finalement, la balle servit à libérer l'ancien squelette d'un de ses parasites, ce qui eut pour effet secondaire de soulager Jean, craignant que l'ange sur lequel il comptait pour lui apporter de l'aide serait en réalité une brute sans foi ni loi. Bien qu'une brute sans foi ni loi serait sûrement plus pratique pour retrouver Saphoris car, Jean en était convaincu, les criminels formaient un raison et se connaissaient tous, il y avait aussi de fortes chances qu'il s'en prenne à Jean et lui déchire ses vêtements. Non pas que Jean tienne particulièrement à ces vêtements en particulier, mais il n'en avait pas de rechange sur lui et il préfèrerait ne pas se retrouver tout nu. Il refit la même chose, s'occupant du deuxième animal, et pour finir disposa des planches piégeuses de cou à l'aide d'un coup de pied bien placé. Jean s'attendait alors à ce que James libère son seau des fesses de l'individu, mais il n'en fit rien. À la place, il ramassa les pauvres castors, les assomma et les lia tous les deux. Ce n'est qu'une fois tout ceci fait qu'il s'adressa à Jean :

                                  Bon ! Si tu me disais pourquoi tu m'as appelé maintenant ?

                                  Mince, c'était James qui avait démarré la discussion. Maintenant que Jean n'allait que répondre, c'était sûr qu'il ne serait pas maître de la conversation. Tant pis, de toute façon il n'était pas fait pour diriger quoi que ce soit d'aussi incontrôlable et imprévisible qu'une discussion. Quoi qu'il en soit, il allait enfin pouvoir demander à l'ange ce qu'il comptait demander depuis si longtemps. Enfin, pas si longtemps que ça en réalité, mais assez pour s'impatienter.

                                  Je voudrais savoir si vous pourriez me donner un bateau pour que je puisse capturer Saphotis. Ou bien me donner Saphotis.

                                  Excellent ! Cette phrase était parfaite ! Claire, concise, l'ange ne pourrait se méprendre sur ses ambitions. Jean ne voulait pas tergiverser et avoir l'air d'un imbécile qui ne sait pas ce qu'il veut. Là, au moins, il était sûr qu'on le comprenne parfaitement. Oh ! Comme il lui tardait que James lui offre un bateau ! Il n'en pouvait plus d'attendre. Et même s'il n'en avait pas, avec tout le bois qu'il y avait dans les environs, il pourrait toujours lui fabriquer. Il avait l'air costaud après tout. Jean, lui, était sûr et certain qu'il ne pourrait pas construire de bateau. Il fallait au moins une dizaine de planches, peut-être même encore plus, et il ne pouvait pas porter une dizaine de planches à la fois sinon il aurait mal au dos.
                                    Libre, libre, il était libre ! Enfin... presque.

                                    Après avoir reçu deux gros impacts, lui causant des dégâts et lui faisant certainement perdre quelques neurones, il avait récupéré la vue et avait perdu son col grâce à un troisième impact lui infligeant presque le coup du lapin, pouvant briser sa nuque. Il avait toujours les griffes coincées, mais une fois éloigné de la tête, il lui était facile de s'en débarrasser. Ce qui gênait, c'était plutôt le fait qu'il avait toujours les fesses coincées et qu'il n'arrivait pas à retirer le sceau, de crainte de se trancher le derrière avec ses doigts tranchants. Skyle tentait de le retirer avec les paumes, mais rien à faire, il glissait. Fallait vraiment qu'il pense à s'installer des antidérapants.

                                    Bref, si on oubliait le sceau lui imposant une démarche de canard et les dents de lait des bébés castors restées coincées sur sa face, le jardinier était presque libre. Dans sa posture, toujours des plus ridicules, Skeleton s'était rendu -au ralentit bien sûr, après tout, on ne marche pas bien vite lorsqu'on est coincé dans une bassine- auprès du Castor adulte afin de lui parler.

                                    - J'ai réussi les épreuves... Je peux être ton esclave ?

                                    Le castor ne répondit pas. À la place, un duel de regard s'était lancé. Était-ce un nouveau test ? Quoi qu'il en soit, Skyle ne comptais pas fléchir, il était déterminé !

                                    Il se retrouvait donc accroupi dos à l'oiseau et l'ancien coincé, le sceau pointé vers eux et figé, regardant fixement l'animal attaché ; lien auquel l'esclave n'avait pas prêté attention. Il ne bougeait tellement pas que, les mouettes, toujours attirées par l'odeur de poisson, l'avaient pris pour une statue et alternaient entre divers coups de becs pour tenter de le picorer et des attaques de fientes -bah oui, une statue c'est cool pour faire ses besoins-.

                                    - Je vois... C'est donc tes amies... Je ne craquerais pas !
                                      Ma question sembla avoir un effet bloquant sur le Jean parce qu’il mit au moins dix secondes à me répondre. Il avait l’air perturbé, ma question n’était pourtant pas très compliquée. Ma question était « quelle était ta question ? ». A ce jeu là, on aurait pu tenir longtemps. Je me promis que si sa question avait été « Quelle était ta précédente question ? », je le tapais sans réfléchir. Par chance pour lui, ce ne fut pas le cas, ce qu’il me voulait était bien plus surprenant. Il voulait que je lui offre un bateau pour capturer un certain Saphotis. Aucune idée de qui c’était ce gars là... Je passai la main vers la poche intérieure de ma veste et pris mon tas de fiche. Quand on était un chasseur de prime, on recevait un tas de papier avec la tête de tous les mecs qui valaient de l’argent si on leur bottait le cul. Je me mis à les regarder, balançant les pages les unes après les autres par-dessus mon épaule.

                                      -C’est pas lui... Lui non plus... Pas lui... Toujours pas... Pas ça... Ha ! Ha non... Lui c’est Saphonet Danladoush... Beaucoup de victimes, lui ! Bon... Ben je le trouve pas ton bonhomme !

                                      Mon regard tomba sur le squelette. Il était plié en deux, les yeux au niveau de la bestiole rongeuse de bois et il ne bougeait plus. Décidément, je ne savais pas ce qui se passait dans sa tête, mais ça devait pas être bien folichon. Au moins il se tenait tranquille pendant ce temps là. Je reportai mes yeux sur le petit mec qui me fixait de ses yeux ronds. Ce type connaissait un mec recherché qui ne faisait pas partie de ma liste. C’était surement un gros, qui valait plein de pognon ! Il fallait que je m’incruste dans le coup. Il allait venir avec nous, je l’avais décidé et ma décision était irrévocable. Comme toujours. Mais pour ça, il fallait qu’il croie que j’étais justement sur le point de l’attraper sans lui. Comme ça, il n’aurait plus d’autre choix que de me suivre ou de le perdre complètement. Quel plan génial mon cerveau supérieur d’ange venait encore de créer !

                                      -Ha ouiiii! Saphotis ? Ce Saphotis là? Bien sûr que je le connais! Tu arrives juste un petit peu trop tôt, on ne l’a pas encore attrapé, sinon cela aurait été avec plaisir. Mais nous allons justement acquérir un bateau très prochainement ! Pourquoi ne pas venir avec nous et le chercher ensemble ?

                                      Ce n’était pas tout à fait vrai, on allait plutôt en fabriquer un à moins de trouver un bateau vraiment pas trop cher. Mais ça, il n’avait pas besoin de le savoir. Je lui offrit mon sourire le plus faux-cul que je pus produire et attendit de voir s’il était prêt à partager ses informations sur ce fléau des mers de Saphotis. Avec un nom pareil, aucun doute que c’était un pirate super dangereux et très difficile à trouver. La récompense était surement à la hauteur d’un tel challenge !
                                        C’est pas lui... Lui non plus... Pas lui... Toujours pas... Pas ça... Ha ! Ha non... Lui c’est Saphonet Danladoush... Beaucoup de victimes, lui ! Bon... Ben je le trouve pas ton bonhomme !

                                        James disait cela totu en fouillant dans une pile de papiers assez impressionnante. Peut-être étaient-ce des informations sur les humains ? Les anges étaient drôlement bien organisés. Jean se demanda si sa fiche existait elle aussi, mais il se dit que si c'était le cas, James l'aurait probablement reconnu. C'était sûrement un autre ange qui l'avait. Pendant ce temps là, celui-qui-n'était-en-fin-de-compte-pas-un-squelette regardait attentivement le castor. C'était une personne très étrange. Peut-être que les gens avaient raison de se moquer de lui finalement. Quoi qu'il en soit, l'attention de Jean était plutôt dirigée vers James Fermal à ce moment, et il ne se soucia donc que très peu de temps de l'étrange personne qui avait déjà maintes fois prouvé cette étrangeté à présent.

                                        Ha ouiiii! Saphotis ? Ce Saphotis là? Bien sûr que je le connais! Tu arrives juste un petit peu trop tôt, on ne l’a pas encore attrapé, sinon cela aurait été avec plaisir. Mais nous allons justement acquérir un bateau très prochainement ! Pourquoi ne pas venir avec nous et le chercher ensemble ?

                                        Jean ouvrit grand la bouche et les yeux tout à la fois : il était en effet extrêmement satisfait de cette réponse. Il allait partir sur les flots avec cet ange à la poursuite de Saphotis : quel aventure palpitante cela allait être ! De plus, tout cela lui confirmait ce qu'il pensait : Saphotis était un ignoble personnage, et il n'était sûrement pas la première personne lésée par ce voyou. Le fait que même un ange était à ses trousses en était la preuve. Mais à bien y réfléchir, Jean avait eu de la chance de n'avoir subi qu'un larcin. Peut-être le bandit était-il un individu particulièrement dangereux et que, sans le savoir, il avait frôlé la mort en le côtoyant. Et c'était lui, Jean Talcmecz, qui allait mettre fin à sa série de délits odieux ? Mais pas tout seul : accompagné de ce James qui semblait aussi fort que plein d'assurance ? Sa réponse, pour une fois, ne se fit pas attendre plus de quelques secondes :

                                        Avec grand plaisir ! Je serais très honoré de chasser ce brigand à vos côtés !

                                        Ce satané mécréant ne perdait rien pour attendre ! Jean était convaincu qu'un jour ou l'autre, il l'attraperait, et il lui ferait cracher jusqu'à la dernière pièce pour rembourser sa canna à pêche. Ensuite, lui et l'ange riraient, emplis de triomphe, et se raconteraient des plaisanteries vraiment très amusantes. On pouvait lire la joie sur le visage du pauvre pêcheur, qui se voyait déjà justicier des mers. Il serait alors un héros du peuple pour l'avoir ainsi délivré du fléau qu'était Saphotis. Les gens lui offriraient des seaux et des cannes à pêche en guise de remerciements à tel point qu'il ne saurait plus quoi en faire. Ou bien il s'imaginait trop de choses. Il avait souvent tendance à imaginer beaucoup de choses, comme la fois où, en discutant avec un clochard, ce dernier lui avait demandé des sous pour manger. Jean avait alors cru que le clochard allait manger ses sous, et s'était dit que celui-ci était vraiment dérangé. Après avoir alerté les gens du village, il s'était rendu compte qu'il n'en était rien, et tout le monde s'était moqué de lui. Jean ne voulait pas qu'on se moque encore de lui, alors il décida d'arrêter d'imaginer pour le moment.
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