-90 berrys pour un café?! Mais c’est du vol!
-Non monsieur. Ce sont les affaires. Pour vous c’plus cher, v’là tout.
-Étouffez-vous avec bon sang!
Je lançai l’argent à la tête du commerçant et repartit, mes deux cafés en mains. L’un sentait bon la douceur alors que l’autre venait amèrement picoter les narines. L’un était accompli, vieux et dur alors que l’autre devait encore être mieux dilué. L’un m’appartenait, l’autre revenait à rin, Aeko Rin.
Voilà maintenant deux semaines que je l’avais pris sous mon aile. L’entraînement que je lui avais promis semblait pour lui beaucoup plus éprouvant que je ne l’aurais cru. Il avait dès le début éprouvé des difficultés dans tous ce qui demandaient de bonnes caractéristiques physiques.
Je me rembrunis un instant. Rin éprouvait autant des problèmes au niveau psychologique que physique, au fond. Une vraie plaie de l’enseignement. Je me surpris à me demander si il n’avait ne serait-ce qu’un peu progressé en ces deux semaines. Mais seul lui pourrait me répondre.
« Quoi qu’il en soit, j’crois que tu devrais ajouter plus de caractère définitif au cour d’aujourd’hui »
-Qu’est-ce que tu veux dire Dark?
« Que tu vas pas entraîner éternellement c’môme nan? Il faut qu’il apprenne par lui-même! »
Ça me semblait juste, il me faudrait clore ces sessions un jour. Et commencer par évaluer jusqu’où Aeko avait développé ses compétences me semblait aussi la meilleure idée. L’entraînement d’aujourd’hui serait un combat qui l’opposerait à moi. Ainsi, je pourrais aisément observer à quel points mon entraînement avait porté ses fruits.
Je me souvenais que deux semaines auparavant, le jeune artiste de rue avait insisté pour apprendre à se déplacer rapidement en combat et disparaître aux yeux de son adversaire. C’était ce que je lui avais appris à faire en premier. Chaque jour je le faisais courir de courte distance à haute vitesse, le tout empli d’obstacle que je trouvais ça-et-là. Au bout de la distance, habituellement il devait rapidement porter plusieurs coups rapides à une cible. Parfois la cible n’était qu’une poubelle ou encore un tas d’objets hétéroclites, ou dans d’autre cas c’était moi. Une cible qui se défend représentait déjà un meilleur défi au jeune artiste, cependant celui-ci ne put jamais se résoudre à me frapper. J’avais beaucoup de difficulté à cerner ce qui pouvait bien se passer dans la caboche de Rin lorsqu’il se retrouvait confronté à quelqu’un de plus puissant ou menaçant que lui. C’était comme si son organisme au grand complet refusait de coopérer et d’abattre son ennemi. Évidemment j’aurais bloqué la plupart des attaques du bonhomme, mais pourtant jamais une d’elle ne vint après deux semaines. Sinon, il y avait eu les tests de force. Je faisais de lui peu à peu une personne plus résistante, endurante et musclée par l’ajout aux entraînements des séries de pompes, de redressements et de différents enchaînements de coups sur un punching-ball improvisé.
Je traversai le marché aujourd’hui désert depuis une bonne demi-heure, les meilleures offres envolées avec les acheteurs les mieux nantis. Je ne croisai que quelques citadins qui vaquaient à leurs occupations habituelles dans ce milieu d’après-midi, de milieu de semaine, de milieu de mois, de milieu d’année. Comme quoi rien ne changeait à Luvneel. Peu importe la saison, on verrait toujours les mêmes hommes et femmes travailler sans relâche pour survivre dans le monde sans pitié de la rue. Aeko Rin était de ces gens là, et par mon aide, il pourrait peut-être en sortir. Du moins, c’est ce que j’espérais.
Je m’arrêtai devant un bâtiment des plus normaux. Rien n’aurait put laisser entendre qu’un jeune homme approchant la vingtaine s’entraînait au combat jours et nuits depuis près d’un demi mois en son sommet. En effet, j’avais aménagé le toit de l’édifice de cinq étages pour en faire un court de pratique. On y retrouvait des parcours de courses de fortunes, des cibles de fortunes et plusieurs autres items de pratiques faits de matières plus ou moins recyclées.
Je gravissais les marches, toujours songeur par rapport à ce que Dark m’avait conseillé de faire. Était-il près? Après seulement deux semaines? Je l’espérais mais n’y mettais pas beaucoup de bonne volonté. À croire que moi-même n’avait pas confiance en ma doctrine improvisée, incroyable.
Arrivé sur le toit, je surpris Rin qui enfilait des enchaînements presque fluides à l’aide de son bâton, arme que je considérais inutile mais à laquelle le jeune artiste tenait assez pour que je ne passe pas sur le sujet. Je me raclai la gorge pour attirer l’attention de mon élève, m’approchai pour lui tendre et le café et lui expliqua la prochaine leçon.
-Aeko, il y a un moment où toute personne doit progresser. Je ne pourrai pas t’enseigner toute mon existence à te battre, une grande partie de cette progression, tu devras la faire toi-même. Sans l’aide de personne.
J’eu un pincement en m’entendant proférer la fin de ma phrase. Jamais personne ne m’avait aidé ni aimé au long de ma vie, sauf Dark. Dark qui m’avait enseigné à devenir un homme, à devenir Double Face, le fléau de la marine.
-Cependant, il y a un mur qui te retient dans ton développement que je dois impérativement t’aider à franchir avant mon départ. Je ne resterai pas bien longtemps encore sur Luvneel avant de me faire à nouveau réaffecter, personne ne m’aime beaucoup ici tu vois? Mais passons. Ce mur que je dois t’aider à franchir, c’est ta peur du vrai combat Aeko. Tu as l’art, l’agilité et la dextérité requise pour bien te défendre, ‘fin j’crois bien. Mais ce qu’il te faut, c’est le courage qui vient avec.
Me rattrapant, je retirai le café des mains avides de mon élève et les déposai à l’écart. Une idée m’éclaircissant l’esprit.
-Si tu veux ton café, vient le chercher. Mais ne compte pas sur moi pour te laisser gentiment faire mon grand.
Je me postai devant les breuvages encore chauds, puis enlevai mon manteau de marine ainsi que mon costard bicolore sous ce dernier. Maintenant torse nu, exposant mon corps couleur échiquier au soleil qui entamait sa descente, j’affichai mon sourire carnassier habituel que j’adorais exposer lorsqu’un combat s’enclenchait.
« HÉHÉHÉÉÉÉ! C’est partie mon kiki!! »