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Les révos sont des escrocs!

Février 1621 :

J’arrivais enfin en vue de cette fameuse Ohara. Une grande île et un putain d’arbre en plein milieu, visible à plusieurs dizaines de kilomètres de distance. On a connu plus discret comme coin pour parler renversement du gouvernement. Autant mettre un grand panneau « on cherche la merde », ca ira plus vite. Pas besoin de vous préciser que ça me chauffait les roustons d’devoir y aller, mais c’était un des seuls endroits où je pourrais trouver des mecs presque aussi vindicatifs que moi envers le gouvernement. Enfin non, sûrement pas autant, mais l’ambiance n’était pas à la balance et ça me suffisait très bien.

J’éprouvais pas une franche sympathie pour la révolution, j’vais pas le cacher. Voir des mecs gesticuler dans tous les sens en braillant que tout va mal,sans pour autant faire quoi que ce soit de concret, tout en s’emplissant les poches d’argent dérobé aussi sournoisement que ne le fait la Marine, ça me vrille les nerfs ! Ca critique, ça critique, mais ça fait rien pour arranger les choses et ça profite même un maximum du système. Faut pas me jouer de la flûte pour m’endormir, la révolution avait un budget extraordinaire pour une bande de bouseux et m’étonnerait franchement qu’ce soit du à une super opération berrys jaunes. Enfin, fallait bien leur concéder queq’chose, ils avaient tendance à être bien équipés et à connaître certains moyens de se procurer du matos sans se faire choper. Pot de vin, backchichs et corruption, sans aucun doute.

Pendant que le capitaine était occupé à faire trembler jusqu’à la rupture ses cordes vocales pour compenser un complexe sous le calbard, je luttais contre une crise d’angoisse qui me prenait sans prévenir. Ohara ! Des révolutionnaires ! Tous des pourris, des conspirateurs, de la sale racaille tout ça ! Ils allaient vouloir me voler mon or pour financer un nouveau projet bancal ayant pour but de jeter des œufs et du PQ sur la maison d’un des membres du conseil des 5 ! Ça, c’était hors de question ! Il fallait que je laisse mon or à bord, avant de débarquer. HHAAA !!! Mais le capitaine y a sûrement déjà pensé et à prévu de me piquer mon or pendant que je serais descendu….. !!! Ha !! Bordel ! BARREZ-VOUS LES BESTIOLES !!! J’AI PAS LE TEMPS LA !!!

Je n’eus pas le temps de tergiverser plus longtemps, le choc d’la coque sur le sable me fit basculer et le choc sur la tête me remit les idées en place. Bad trip… Je descendis en jetant un regard suspicieux au capitaine sous-membré, le sac d’or sous le bras, bien à l’abri des regards. A peine un pied posé sur le sable, toutes les paires d’yeux se braquèrent sur moi. Ha ouais merde, j’ai oublié de me mettre en mode jeune. Une vibration me secoua le visage et je parus cent ans de moins, ce qui restait bien au dessus de la moyenne d’âge environnante. Ça puait le jeune à plein nez. Normal, c’est les hormones et le sexe qui poussent tous ces gens à se prendre pour des rebelles ; Ça veut se sentir important pour attirer la femelle en fleur. Les phéromones en ébullition, des mecs se baladaient en bande, l’arme au poing, ça fait viril. Tu parles, une bande de mecs qui se battent avec un amour fraternel, l’un avec l’autre, confiant sa vie à ses camarades, ça fait plus tarlouze qui peut pas se démerder qu’autre chose.

Moi avec mon siècle et demi dépassé, je m’étais toujours démerdé tout seul, pas besoin qu’une bande de macaque se collent à moi pour avoir l’air plus important qu’individuellement. Un plus un plus un, certes ça fait trois, mais ça reste une accumulation de uns. Ça valait pas un trois direct. T’as suivi ? On passe. Les gens qui avaient assisté à ma transformation se reculaient sur mon passage. Bordel, être vieux ça fait peur maintenant ? Pourquoi fuir devant un mec qui à carrément du mal à se déplacer ? Moins couillus que des eunuques ceux-là ! De toute façon, j’étais pas venu me dorer la pilule et draguer la bourgeoise en manque d’aventure, j’avais un contact qui m’attendait et fallait que je m’y retrouve. Autant le cadre était sympa, autant la ville était un labyrinthe. Trouver ma destination s’annonçait aussi compliqué que de trouver le point G d’une femme obèse de soixante ans passés. Ça grouille, il fait chaud, c’est pas agréable et on s’y sent pas à l’aise. Me rappelait des mauvais souvenirs…

Mes jambes me faisaient un mal de chien et je sentais mes cellules en manque d’oxygène. Putain, faudrait pas vieillir, je vous le déconseille, ça apporte rien de bon. Ça se rouille, ça frotte, ça se fatigue… Que de la merde ! Il fallait que je me pose quelque part, mais je craignais que les chauves-souris qui me voletaient autour ne me fassent remarquer. Je posai une fesse sur un banc et pris sur moi de ne pas réagir lorsque les chiroptères se posèrent sur mes épaules. Personne ne sembla rien remarqué, mis à part le fait que je regardais de tous les cotés à la recherche d’éventuels espions. Mon contact était sensé me trouver de lui-même mais comment le pourrait-il ? Il m’avait jamais vu ce couillon !

Soudain, une main jaillit de sous le banc et me chopa le mollet. Je te raconte pas la crise cardiaque que je me suis payé ! On n’a pas idée de faire une peur pareille à un mec qu’à plus de seize décennies derrière lui, bon sang ! Tandis que mes vaisseaux se collapsaient sous l’effet de l’arrêt de ma circulation sanguine et que toutes mes cellules commençaient à manquer d’oxygène, je ressentais un bien-être profond qui me fit hésiter. Devais-je me laisser aller pour un monde meilleur où je pourrais enfin reposer en paix ? Ou au contraire me battre, faire repartir ce palpitant poussif et continuer cette vie de merde ? Hahaha ! J’avais pas fait tout ce chemin pour crever d’un sursaut à la con ! Je me concentrai sur mes cardiomyocytes et les forçai à se remettre en marche. Le sang se remit à circuler dans mes veines et je pus reprendre mon souffle et me remettre à bouger.

Mon premier mouvement fut d’écraser violemment les doigts qui s’étaient refermés sur ma jambe. U grand cri s’éleva et je me remis debout brusquement. Enfin… pour moi, ça a pris quelques secondes quand même. Je vis alors une tête apparaître de sous le banc. D’un geste que je crus tout d’abord obscène, le type me fait signe de ne pas faire de bruit et de le suivre avant de disparaître. Il y avait sûrement un tunnel creusé en dessous mais là…Pendant que la matière grise de ce jeune con était en pleine ébullition, je ramassai mes petites affaires. C’était un peu long… Je commençais à me faire chier quand il réapparut avec un air en colère.

-Ben alors ! Qu’est ce que vous foutez !?
-Mais réfléchis jeune trou du cul ! Tu crois vraiment que je vais me mettre à ramper et tomber tête la première dans ton tunnel froid et humide ? T’as pas trouvé plus discret comme plan ? Et moins inconfortable pour mes rhumatismes tant qu’à faire ?

Ba ouais ! Pas l’habitude de réfléchir plus loin que l’bout de son pif le gars. Il se mit à se gratter la tête comme face à une équation du douzième degré et finit par se barrer pour réapparaître derrière moi, par une porte dérobé de la maison d’en face. On croit rêver… Ravalant la nuée de commentaires et de critiques qui ne demandait qu’à lui pleuvoir sur la gueule, je le suivis. C’était tout un labyrinthe de couloirs sombres qui se croisaient et se mêlaient dans un bordel pas possible, là-dessous. Tout en marchant, je retenais l’enchaînement des virages pour tenter de modéliser une carte mentalement. On sait jamais, avec ces trous d’cul, j’allais peut-être devoir me barrer en quatrième vitesse. On finit par arriver dans une grande salle. Enfin grande, non, c’est façon de parler, disons qu’on pouvait se tenir debout, ce qui était déjà pas mal. Disons une vingtaine de mètres carrés pour être généreux. Ca sentait la merde, l’humidité était presque oppressante, des rats se disputaient ce qui ressemblait à un doigt humain… Cool quoi !

-Pas mal hein ? Bienvenu dans mon palace !! Un peu rudimentaire, mais je me développe avec le temps.
-…ahem.. t’as le matos ?
-Ouais, là, sur la table. T’as le pognon ?
-Ouais, ouais tiens !

J'lui balançai le sac de Berrys et me précipitai vers les pièces mécaniques qui se trouvaient devant moi. Classe !!! Des moteurs miniaturisés, des pistons, des rotors, des valves à sens unique… Tout ce qu’il me fallait pour travailler tranquillement sur mon projet « fin du monde avec beaucoup de souffrance mais pas de scrupules». HinhinhinhéhéhéhohohohAHAHAHAHAHAHA !!! Euh… ? Hein ? Ha oui ! HAHAHAHAHAHAHAHA ! Une main se posa soudain sur mon épaule pour que je me retourne. Le petit révolutionnaire me regardait en soupesant l'sac de pièces.

-Hé papy ! Ton sac me semble bien léger. Mes tarifs ont augmentés récemment.
-Écoute mon petit. J’arnaquais déjà les gens que ton grand-père sortait tout juste de la burne de ton arrière grand-père, alors essaye pas d’me la faire à l’envers, okay ?
-Je suis pas en train de te demander ton avis là ! Aboule la pépètte avant que je me fâche !

Je levai le bras droit et lui collait sous le nez le canon de mon arme fétiche. Je pus voir une grosse boule descendre dans sa gorge. D’un simple regard, je lui fis comprendre qu’il ferait mieux de lâcher la lame qu’il tenait derrière son dos pour espérer atteindre au moins le quart de mon âge. Je pris le sac sur mon épaule, sans le quitter des yeux et me dirigeai vers la sortie. La gosse reculait, les mains en l’air lorsque son pied heurta un petit boîtier. Et merde… Pas besoin d’être devin pour savoir que ça allait puer du cul violemment d’ici quelques secondes. Des aboiements se répercutaient sur les murs et l’intensité sonore augmentait très rapidement. Je tirai une balle en direction de l’entrejambe l’autre enfoiré et me mis à courir à la recherche de la sortie. Mais avec le poids du sac et celui harassant des années, j’étais d’une lenteur pitoyable !

Lorsque j’entendis un chien me talonner, je sortis une lame de mon bras et me retournai d’un coup. Surpris en plein saut, le cleps s’empala dans une giclée de sang sur mon bras. Son poids me fit vaciller et je m’écroulais sur le cul lorsqu’un deuxième clebard me fonça dessus. Dans la précipitation, j’enclenchai mon chalumeau au lieu du fusil. La flamme stoppa le chien dans sa course et le fit reculer en grognant. C’était toujours ça. Je vis un rai de lumière au dessus de moi. Pas trop le choix, il fallait que je sorte de là. Si ma mémoire était bonne, la sortie était encore loin. Je pris un barreau de l’échelle murale avec mon bras gauche et me mis à grimper. Pas évident de grimper, tenir le sac et repousser le chien avec mon chalumeau. J’vous raconte pas la galère… Heureusement, passé les trois premiers barreaux, le chien ne pouvait plus me suivre.

Dans un gros effort, je m’insérai dans le petit passage qui donnait dehors. La lumière du jour paraissait on ne peut plus aveuglante. Les gens passaient sans me voir, trop occupés à poursuivre leur routine abrutissante et sans le moindre intérêt. Pas un seul qui aurait proposé de l’aide à un senior en difficulté. Moi, j’étais sorti, mais le sac coinçait. Il était trop gros pour passer sous ce… BANC ! Putain, c’était le banc où l’autre con avait voulu me faire ramper ! Si ça c’est pas l’ironie du sort, franchement ! Mais mon problème était toujours entier. Il fallait que je vide un peu le sac pour pouvoir le faire sortir, mais là, tout le monde allait voir ce que je transportai. Certes, les passants portaient tous des œillères qui les rendaient indifférents à tous ce qui se passait autour d’eux tant que cela ne les concernait pas différemment, mais cette île avait également sa dose d’espions de la révolution qui ne manquerait pas de me voir sortir d’une de leur cachette avec un sac de matériel scientifique.

Je commençai à stresser !! Je sentais des regards se poser sur moi de tous les cotés, des bribes de conversation me parvenaient, des gens s’approchaient !! D’un coup de mon bras métallique, je fis voler le banc en éclat et tirai le sac de toutes mes forces. Le port n’était pas très loin. Je me mis à courir comme un dératé, jetant des coups d’œil derrière moi toutes les 0,128 secondes. Arrivant haletant sur le pont du bateau, j’intimais au capitaine l’ordre de lever l’ancre. Laissant mon rythme cardiaque retomber, je me rendis compte qu’en fait… personne ne me suivait. Je m’affalai contre le bastingage et grattai sous le menton le petit mammifère volant qui s’était posé sur mon épaule. J’étais crevé, bordel…