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Equilibrium [OneShot 1611]

Previously on…

Dans le petit bureau des appartements de luxe pour invité de marque du QG de South Blue.

Vous auriez pu être amiral, Tahgel. Quinze, vingt, trente ans. Vous auriez pu. Mais après ce que vous venez de faire, et malgré ce que vous veniez de faire, dans cinq, dix ans maximum parce que vous êtes chanceux, vous serez colonel et puis ce sera tout. On vous oubliera. Et quand vous mourrez. Quand vous prendrez votre retraite si vous allez jusque-là, on vous sortira du placard où on vous aura rendu utile pour vous nommer Commodore. Pour ce que vous avez fait. Mais tant que Sentomaru Kenpachi sera à l’amirauté, en chair ou en portrait, vous n’y entrerez pas.
Autant dire jamais, hein ? Il est parti pour durer…
Tout juste.
Hn.

Souffler du nez, c’est tout un art. On peut vouloir dire ironie, colère, défiance, ou plusieurs choses à la fois. Là, c’est clairement du dédain qui s’exprime par les naseaux fumants du lieutenant-colonel Tahgel. En réponse, Shiro Fuuryuko tire une petite boîte d’un des pans de son uniforme et la pose sur le bureau entre eux deux avant de la pousser vers l’extrémité du meuble proche de son subordonné. Blanche et bleue, frappée du sceau du gouvernement mondial. Observation.

Pas du tout réglementaire mais je n’aime pas les conflits larvés. Alors voilà, une compensation, un aide-mémoire pour vous souvenir de ce que vous avez gâché. J’ai négocié. Bonne chance, Tahgel. Sincèrement.
Vous êtes trop gentil mon amiral. Ca vous perdra un jour.
Hn.

Ambiguïté.


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Dernière édition par Tahar Tahgel le Mar 25 Sep 2012 - 14:59, édité 1 fois
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Deux semaines avant, haute ville de Saint-Urea.

Les nobles sont les plus faciles à espionner. Revers de la médaille du succès. Personnage public par définition, l’homme d’élite ne peut déjà se cacher qu’en de rares occasions en temps normal. Et quand il est suspect, ces occasions sont réduites à néant par les bons soins des gens payés par ses impôts pour le surveiller. Cipher Pol, Marine classique, agents encore plus spéciaux, qu’importe qui s’en charge, le résultat est toujours le même. Des tonnes de rapports, des milliers de page raturées par l’effort des sténo, des dizaines d’heures à les éplucher, et puis la sentence enfin.

Coupable.

Vert. Noir comme le charbon. Cramoisi. Cramé. Violet avec des petits pois rose. Le mot qui veut dire toutes les couleurs les plus visibles au milieu des blancs comme neige, mais qui surtout, surtout emporte sanction. Coupable. Coupable. Coupable ! Et les sanctions… les sanctions, c’est l’apanage des gens qui comme Tahar Tahgel sont mus par la sensation d’accomplir une mission divine, une bonne mission de pacification des mœurs. Ou juste par le plaisir de taper sur des têtes avec un maillet, mais c’est moins vendeur pour les jeunes recrues dans les catalogues et sur les affiches de recrutement. Déjà un peu connu, le Tahar, tiens.

La nouvelle de sa prise du QG révolutionnaire introuvable de South Blue a déjà fait le tour de la mer. Et le tour de la mer, ça passe par Saint-Urea, poumon local. Fatalement. D’ailleurs, la nouvelle suivante qui n’a que quelques jours encore, celle de l’opération au cimetière d’épaves, y arrive en même temps que les trois bateaux conduit par sa douce férule de lieutenant-colonel encore dans ses pompes de commandant en charge de détruire la révolution cette année-là dans cette zone-là. Casquette lourde, CV encore gonflé, auréole de gloire ou de terreur. Il a fière allure, il a du panache quand il descend la passerelle et pose le pied sur la pierre du quai.

Face à lui, peu d’officiels. Réunis probablement au palais Stanhope. Un colonel par contre, un bon colonel. Un Colonel, même, avec une majuscule. On dit que c’est lui le plus fort des quatre, quoiqu’ils ne se soient jamais tapé les uns sur les autres. Les quatre colonels en charge des quatre divisions stationnées depuis toujours dans la ville. Au cas où. Pour le bien du peuple. Propagande. Accords avec le gouvernement mondial. Mh. Colonel McFly. Marty McFly.
Spoiler:
Tahgel je présume ?
C’est moi. Colonel McFly ?
Oui, c’est moi aussi.

Car c’était lui. Des deux côtés. Grâce aux souffleurs, les présentations sont faites rapidement entre un peu tous les gradés, et les troufions on s’en fout. Coryn se terre avec une super lieutenante faite pour lui, et Marty et Tahar partent l’un et l’autre dans une discussion intense et un bar.

Non mais je veux pas le savoir il est à moi ce couillon, c’est la clef d
Vous avez déjà rencontré Stanhope, Tahgel ?
Non, pas encore eu ce plaisir je dois dire.
Eh bien vous verrez. Qu’il est difficile de lui faire changer d’avis.
Scrogneugneu.
Hein ?
Non, je disais scrogneugneu.
De quoi ?
Non rien laissez tomber…

Et goulot dessus goulot dessous parce qu’il faut bien récupérer après avoir tué trois cents pauvres anarchistes dans une des zones déjà parmi les plus déprimantes du globe rien que par le panorama qu’elle offre aux pauvres marins qui s’y retrouvent coincés, les deux hommes arrivent, sur ces entrefaites et pas loin de quelques heures passées à s’accorder sur le fait que Stanhope soit une vieille peau frigide plus loin, au pied du palais qu’il est imposant. Et après trois couloirs et deux salutations froides comme un coup de trique en glace, il se rend compte. Que le bourgeois Wilhelm von Siegfried a beau être la clef d , ça ne sert à rien, c’est mes services de sécurité qui le gardent en lieu sûr, et toc, c’est ma ville je fais ce que je veux, crétin.

Ou pas crétin, mais il le voit bien, dans les yeux de la vieille, qu’elle l’a pensé. Qui il est, d’abord, pour venir lui faire une réclamation pareille ? Qui il est, lui, jeune lieutenant-colonel même pas bien fini de promouvoir alors qu’il y a déjà quatre divisions de marins dans la ville pour coincer les méchants ennemis du gouvernement, sans compter les forces privées qu’elle commence à rassembler pour se faire sa propre milice… Hein, qui il est ? Rien, un gars qui sort d’un palais.

Pulu pulu !
Hm ?
Maman ?
Non c’est pas ta maman… Mais comment t’as eu cet identifiant, toi ? Et t’es qui d’abord ?
Maman ?
Rah…
Clac.

Rage sur les den den facétieux et cassage de tête à une gargouille qui passait par là pour se soulager de la frustration.

Pst, Tahgel ? Suis donc ton nouveau copain colonel tu veux…


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Dernière édition par Tahar Tahgel le Mar 25 Sep 2012 - 15:00, édité 1 fois
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Le lendemain matin, dans une rue glauque des beaux quartiers. Les mecs de la basse-ville se sont quillés aux aurores pour ramasser les ordures et autres joyeusetés déposés durant la nuit par les petites mains assignés à résidence pour servir les puissants. Ou les moyens puissants. Mais bref, des gars riches, qui font des déchets de riches, que leurs servants balancent dans les caniveaux au milieu des avenues. Qu’il faut ramasser pour que la ville garde une allure potable, au moins à ce niveau, et que donc ils ramassent. Ils, les pauvres.

Et au milieu de tout ça, Tahar Tahgel, un colonel guindé dans sa casquette-souvenir, et deux ou trois gros bras dont les noms sont pas importants. Coryn joue le rôle de l’arrière-garde, digérant sa nuit en suçotant une clope maquillée au rouge à lèvres. Amoureux, le bougre ? Bof, il tient de son supérieur, pas trop de risque qu’il s’attache vraiment, ça lui passera quand le jour du retour au QG sera sonné. Mais ce sera pas aujourd’hui. Aujourd’hui c’est aventure dans les beaux quartiers.

Quelques pas plus tard, une porte masquée par une pénombre de porche mal orienté et pas encore inondé de la lumière du jour. Toc toc, regards concernés, saluts militaires réflexes et camouflés en une sorte de toux grasse quand un éboueur regarde le groupe d’un air inquiet. Pas courant de voir des belles gens bouger si tôt… S’il savait ce qu’il y a derrière la porte, il n’en reviendrait pas. Car derrière la porte il y a…

Paf.
Tu vas parler bordel de con ?
Non.
Tu vas parler bordel de con ?
Nan.
Tu vas parler bordel de con ?
Nah !
Tu vas parler bordel de con ?
Hmfr.

Vrai, on est montés vite en jambes dans la pièce. Pas évident non plus de négocier un interrogatoire civilisé sur le quart d’heure top chrono cédé par simple courtoisie presque militaire entre le gardien du local où est stocké le nobliau avant son transfert et son jugement dans la matinée. Et puis bon, on dira ce qu’on voudra mais la technique de la punchline littérale a ses résultats. Sur les esprits faibles au moins… Un peu comme la Force, mais sans la majuscule.

Assis sur une chaise, les pieds plongés dans un bac d’eau glacée pour faire genre, la bouche un peu déformée autour de ses dents, le prisonnier commence d’ailleurs à se rendre compte que les gencives ont moins bon goût que le reste, par exemple la vie l’air pur, et que du goût il ferait mieux de parler. D’ailleurs il le dit, qu’il a envie de parler.

Pulu pulu !
Bon, jsuis en plein dossier, là, y a intérêt à y avoir une bonne raison pour me d
Maman ?

Maman ?
Comment tu t’appelles, petit ?
Sentomaru Kenpachi, m’sieur !
Okay, tu te fous de ma gueule en plus ? Bon, et pourquoi tu t’acharnes sur moi ?
Je m’acharne pas monsieur. Elle est pas là mam
C’est pas bien de mentir…
Je mens pas monsieur, c’est ma mam
Clac.

Regards étonnés alentour, scène surréaliste, même l’esbigné dans son fauteuil de douleur comprend pas trop comment il a pu avoir un sursis. Comprend pas trop mais comprend tellement mal en fait qu’il veut plus parler. Gloire à la rév

Tu vas parler bordel de con ?
Arhg !

Deux mots, ce sont deux mots qui répondent au double-cheese bacon-tomates qui s’abat sur l’arcade de l’indéfendable parce qu’attaché sympathisant. Le premier c’est un nom qui fait tiquer le mastard qui gardait le niais, le deuxième c’est un nom qui fait tiquer l’autre, le colonel. Un orfèvre, désigne le premier, et un commandant, précise le second. Rien que ça. Ca sent le grand ménage de printemps. Ou alors c’est dehors qu’ils aspergent les rues au parfum massif pour que ça fleure bon la belle matinée bien charmante, et ça rentre par la fenêtre. Mais dans les deux cas, ça va saigner.

Bon, tu te tiens bien pendant ton procès, hein ? Et merci pour ta collaboration…
Hmf…
Et le bonjour à ta juge, ouais… Comment je te remercie, colonel ?
En pourrissant l’orfèvre.
Tu te charges du commandant ?
Et comment !
Dans. Hahahaha !
Hein ?
Hum. Dans. Comment. Commandant ? Oublie…
Hum, je dois y aller, mon chien est en feu je crois… Merci Bob.


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Une semaine avant (ou après, selon le point de vue, mais chipotez pas, hein), étage intermédiaire de Saint-Urea.

Bob, c’était le molosse garde-chiourme gentil avec les militaires qu’il a toujours admirés sans pouvoir intégrer l’uniforme à cause d’une malformation du cortex et pourtant les dieux savent que y en a c’est pas des flèches, molosse de la scène avant.

Et une semaine après la masta gueulante de Stanhope suite à sa réalisation qu’on la faisait pas à Tahar Tahgel et que son protégé au sang bleu transparent a pris bien, bien cher malgré ses précautions, on se retrouve dans la ville moyenne, où vivent des gens moyens qui bossent pour gagner leur croûte, mais qui réussissent quand même à avoir la mie avec. Ca éponge mieux les assiettes, la mie. Bref, quartiers des orfèvres, on rigole plus trop.

A la tête d’une équipe fournie par les bons soins de l’ami Marty, Tahar y va en mode marin bourrin. La trouvaille d’infos c’est la tâche des agents d’infiltration, les gars qu’on voit jamais. Le repérage, c’est le boulot des mousses destinés au casse-pipe ou des mêmes agents d’infiltration, ou des deux quand ils sont compatibles. Le nettoyage fin et délicat, c’est pour les agents qu’on voit que quand il est trop tard. Le fameux 9 en particulier.

Et les descentes musclées, quand on est dans un coin plein de marins qui sont plus là pour la forme et pour respecter des accords de réciprocité à la teneur ultra confidentielle entre Saint-Urea et le gouvernement mondial, c’est le boulot du marin sagouin qui s’invite. Courtoisie militaire, encore une fois. Dans les rapports ça fait mieux que « Oh, t’es là, tu veux y aller, et en plus j’ai juste à te fournir des hommes et pas à me déplacer ? Tu me plais beaucoup mon petit Tahar, je t’aime bien. Tiens, prends deux lieutenants et allez me purifier les eaux usées. Non, désolé le commandant je peux pas, j’ai pas encore remplacé celui à qui j’ai cassé la tête y a trois jours. »

La rue, donc. Une rue banale, avec des fenêtres, des cris de gamins au nez crochu qui sortent des fenêtres, des mamas plus ou moins en laisse et sous foulard qui les torchent, des darons plus ou moins frisottés qui les cravachent, les violent en silence ou vendent des bijoux pour faire genre ils ont travail. Puis après vont jouer au cricket sur le terrain du quartier. Le quartier, le quartier qui regarde la troupe le pénétrer sauvagement. En mode bottes marrons sur la boue qui coule d’humidité. Les mêmes bottes marrons qu’il y a une quinzaine de jours au cimetière d’épaves. Icône de Tahar en première page, les feuilles de choux ont tout fait tourner. Les infos, les morts, le sang.

Alors on recule. Et on laisse passer. Les vieux calmes qui servent d’impérialistes de la pensée de groupe, ceux qu’on laisse d’ordinaire prendre la décision d’aller au devant des autorités pour les faire ployer et laisser à la zone sa liberté de faiseurs de richesses en breloques qui brillent, ceux-là même restent dans leurs coins. Se cachent, ne veulent pas aller au devant de cet homme, de ce mangeur d’enfants de révolutionnaires comme certains paragraphes l’ont appelé pour faire peur. Un gamin va pour récupérer son ballon en baudruche tombé au milieu du chemin par les hasards du scénario. On le retient de justesse avant qu’un pied rageur de commando l’écrase d’un mouvement innocent. Paf.

L’explosion résonne sèchement dans l’air et les quelques dizaines de paires de semelles s’arrêtent, quart de tour droit, stop. Le commandant-colonel, encore droit dans ses bottes et le visage un peu arrangé du sacrifice de l’autre fois, se méfie mais entre. Les orfèvres sont des lâches, c’est pour ça qu’ils sont larbins des riches et qu’ils se retiennent des les voler. Pas de raison que le suspect se fasse sauter cette fois, encore moins dans une boutique pleine de bagues en or. Ca rendrait les pompiers trop riches. Alors il entre. Tend la main, la pose sur la clenche et… Va entrer.

Pulu pulu !

Pousse la porte.

Pulu pulu !

Euh… vous répondez pas mon colonel ?
Mh…

Pulu pulu !

PULU PULU PULU PULU PUL
Zen… Si ça se trouve c’est quelqu’un de…
Maman ?
Zen… Zen…
Maman ?
Clac. Un rond est un carré, un carré est un rond. Salut, l’orfèvre, on peut te parler.

Pas une question, une affirmation. Les mâchoires serrées et les yeux tueurs du gradé qui le toise de sa taille moyenne le dissuadent de tenter de se la jouer innocent, il passe à table en moins de deux baffes et demande seulement qu’on lui garantisse une cellule pas trop sale. C’est pas de sa faute, il a commencé par faire du boulot honnête et puis après il a fallu faire manger la petite dernière, c’est la faute à la femme vi comprenez missieur l’officier ? Elle est tombée enceinte par sa faute et a pas voulu avorter… La faute aux femmes ji vous dit comme dans un gros cliché bien gras, toujours. Et puis ce noble qui lui a demandé de faire l’intermédiaire entre les bas quartiers où vivent les révos, les vrais, et le haut quartier où lui s’arrangeait pour trouver du pognon, de l’or et d’autres trucs pas très réglos à leur faire passer. L’histoire d’une vie. Mais me tuez pas missieur l’officier, je vais vous balancer tous les noms, oui oui oui. Et gratuit c’est sur la note de la maison…

… Des bottes, des cris. Du feu et des flambeaux partout dans la ville. La chasse aux rats est ouverte, tout le monde descend.


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Dernière édition par Tahar Tahgel le Mar 25 Sep 2012 - 15:00, édité 1 fois
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La semaine suivante ou précédente toujours selon le point de vue, basse-ville de Saint-Urea.

Il y a eu le quartier des tanneurs.

Il a été envahi à l’aube du surlendemain, le temps de faire cracher tous les morceaux à l’intermédiaire et au traître à la marine et de les aligner dans le bon sens avec leurs dents à tous les deux sur la table d’opération. Ils ont parlé beaucoup, il a fallu beaucoup de feuilles pour tout noter et beaucoup de linge pour éponger.

Beaucoup de bottes encore se sont fait entendre encore une fois, beaucoup d’empreintes ont marqué le sol et les visages. Les cris des enfants n’avaient d’égaux que ceux de leurs mères et ceux des fusils. Quelques morts, pas trop car les tanneurs ont une connaissance aiguë du peu de résistance d’un cuir à la traversée par une balle. On les a mis en prison pour les plus importants, les autres ont disparu sans que la population soit informée. Certains ont eu la chance d’atterrir dans les cales du Tambour Battant et des deux autres navires à destination prochaine du QG de South Blue. Ceux-là ont un sursis.

Il y a eu le quartier des tisserands.

Le jour d’après, le feu a pris dans un local de confection de vêtements pour la masse laborieuse. C’était le signal, toutes les fabriques même les innocentes ont été envahies par des forces militaires gonflées des effectifs de Stanhope, qui ne voulait pas rester sans rien faire alors qu’un jeune officier allait accomplir ce que personne n’avait réussi à faire depuis plusieurs décennies : une action à la renommée mondiale contre la révolution.

Les tisserands savent aussi ce que fait une aiguille dans un corps étranger, a fortiori un sabre dans la couche de graisse qui sous-tend les pourpoints. Les coupables, et même quelques autres qui n’avaient rien à se reprocher, se sont rendus sans faire d’histoire. Un seul est mort, un pauvre enfant qui jouait du flûtiau dans la rue alors que le premier bâtiment s’effondrait sous les assauts du feu. On a murmuré mais personne n’a osé protester.

Il y a eu le quartier des artistes.

Les artistes eux n’ont rien compris. Croient en les vertus des arts pour apaiser les souffrances et les haines, croient qu’il suffit de parler pour arrêter une troupe armée jusqu’aux dents. Quand les foudres du gouvernement mondial sont tombées le jour encore d’après, il y a eu quatre cents morts stupides. Toutes, dues à des gens qui n’ont pas su se rendre ni sortir les mains des poches quand il le fallait. L’odeur du sang s’est répandue dans la ville et même quelques nobles de la haute cité ont été incommodés. Mais il fallait poursuivre parce qu’on touchait au but, alors bon, prenons sur nous.

Il y a eu le quartier portuaire.

Les docks et les abords ont opposé la plus vive résistance de la semaine rouge. Il faut dire qu’ils avaient eu trois jours pour se laisser encercler, profiter du spectacle des autres districts se faisant pilonner, et s’armer en conséquence puisqu’on ne leur laissait pas le choix. La sortie en mer était bloquée par un massif dispositif commandé par le colonel McFly en personne et un de ses collègues colonel. Les deux autres de la ville, en partenariat appuyé avec le lieutenant-colonel, menaient l’opération terrestre. Et comme il n’était pas question de canoniser à tour de bras bien qu’on soit dans une ville sainte, et surtout peut-être parce qu’on était dans une ville sainte, tout s’est fait à la régulière. Au fusil et à la baïonnette.

Pertes sévères. Des deux côtés, mais plus de l’un que de l’autre. Gains indéniables, tous les cinq ou six pâtés de maisons gagnés on trouvait une planque, des armes et du matériel. Du gros travail de fond, avec des grumeaux qui remontent à la surface, des sacrifices encore, et des attaques surprises la nuit pour augmenter les morts chez les marins avant la fin.

La fin fut rude. Le cinquième jour de la semaine, les détonations ont claqué de l’aube au crépuscule, et encore un peu dans la nuit. Le dernier révolutionnaire est mort bras debout et tête dans l’eau. Et c’était bon. Pas de clameurs, pas de cris de victoires, les morts sont restés morts. Les blessés ont survécu, pas tous, et les vivants ont dormi. Juste dormi. Là où ils étaient. Qui sur un banc, qui dans un cratère, qui sous une ruine. Au matin, tout le monde s’est levé avec le visage gris des jours où le ciel ne se lève pas. Et puis, le présent est revenu.

Le présent où on a gagné, où les infirmiers brûlent les cadavres, où les galonnés se congratulent entre eux puisque les politiques ne le feront pas, trop occupés à gérer les conséquences d’une opération militaire de grande ampleur. Conséquences dont ils blâment lesdits galonnés faute d’autres têtes encore irriguées en sang à faire tomber.

Et sur les ruines de ce présent où on l’appelle « héros » faute de mieux et parce qu’on se demande qui sera le prochain sur la liste en souhaitant que ce ne soit pas soi-même, maudissant en silence le gamin qui l’appelle sans arrêt sur son Den Den depuis dix jours, même et surtout en opération, Tahar Tahgel s’apprête à allumer la cigarette du devoir bien accompli.

Et ensuite mon colonel ?
Déjà fini avec ton donzelle, Coryn ?

C’était fini avant d’être commencé. Comme la Révolution, finie avant d’être commencée. Sacrifices. Idéaux. Du vent pour les deux soldats qui contemplent l’œuvre au noir. Au blanc bientôt, car les cendres des tisons qui meurent se mettent à voler. Il va être temps pour eux de repartir, auréolés de leur gloire chez les collègues, inscrits dans la légende ailleurs. La bonne ou la mauvaise, suivant le camp. Souvent la mauvaise quel que soit le camp, celle brutale qui fait peur aux enfants et qu’on ne raconte que dans les classes de stratégie militaire, jamais le soir pour endormir le rejeton. Trop violente pour ça…

Tensions au palais.
Trois croiseurs à l’horizon.
Poor lonesome Tahar.


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Dernière édition par Tahar Tahgel le Mer 28 Nov 2012 - 17:32, édité 3 fois
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Un jour avant, QG de South Blue.


Un homme marche dans une coursive avec vue sur la mer. Dans sa poche un escargot s’agite soudain.

Pulu pulu.
Shiro Fuuryuko, oui ?
Sentomaru Kenpachi. J’ai entendu dire qu’un colonel de votre ressort s’était particulièrement illustré ces jours derniers ?
Lieutenant-colonel, monsieur. Oui, c’est vrai. Tahar Tahgel, de son nom.
C’est le nom que mes oreilles ont entendu, oui… Bien, il est rentré de sa mission ?
Non monsieur, pas enc-Ah, si, le voilà je crois. A l’horizon.
Bien, prévenez-le donc que je l’appellerai en personne pour le féliciter dès qu’on m’aura fourni son identifiant.

Formules de politesse.

(…)

Plus tard, sur un quai du QG.

Pulu pulu !

(…)

Pulu pulu !

Mon colonel, vous devriez répondre.
Rien à foutre.
PULUPULUPULUPULUPULUPULUPULUPULUPULUPULPULUPULPU !
Je vais devenir dingue, putain…
PUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUULUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUU
… Vous voulez que je réponde, mon colonel ?
… Pff, vas-y, tiens, ouais…

Changement de main. Signal de décrocher.

Oui ?
Sentomaru Kenpachi. Tahar Tahgel ?

Clong. Loin, très loin, sur une île dont tout le monde se fout un ressort a lâché en faisant ce bruit. Là, juste dans la scène en question, c’est un plomb qui vient de céder. Un beau plomb, taille moyenne, grain moyen. Noir de colère contenue.
MAIS QUOIII TAHAR TAHGEL !? MAIS QUOIIII ? TU LUI VEUX QUOI A TAHAR ? TU LUI VEUX QUOIII ??? C’EST PAS TA MERE QUE TU VEUX AUJOURD’HUI PUTAIN DE COUILLON !? C’EST PAS ELLE BORDEL ?? JE T’AI FAIT QUOI, MOI ?! TU VAS ME LACHER UN PEU, DIS ? UN PEU… MAMAN ? MAMAN ? MAMAN ? JE VAIS LA TRINGLER TA MAMAN, TU M’ENTENDS SENTOMARU KENPACHI !? TU M’ENTENDS !! CONTINUE, CONTINUE A M’APPELER BORDEL ET JE JURE QUE MEME TOI JE TE RETROUVE ET JE TE FAIS PARTICIPER A LA CHOSE, VU ? VU ?!! PUTAAAAAIN
Clac.

Ahh… Wohputainçafaitdubien… Du putain d’bien, ouais… … Quoi ? Qu’esse z’avez à m’regarder comme ça, eh ? Kéya ?

(…)

Quelque part dans le QG, quelques temps après.

Ah, Colonel !
Mon amiral ?
Je dois vous prévenir, j’ai une excellente nouvelle pour vous…

(…)

Quelque part dans le QG, quelques temps mais vraiment pas beaucoup après.

Euh…


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