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[F]ather King.

« Shell Phillip ? »

Il leva un regard vers moi et me détailla. Il eut, l’espace d’une seconde, l’impression de voir une personne qu’il avait déjà vu par le passé. Vaguement. Puis, il se ravisa et me fit un grand sourire.

J’avais quitté les Ghost Dog trois jours avant, signifiant à mon capitaine que j’avais des choses à faire avant de partir sur Grand Line. L’homme, après la mission accomplie ensemble, n’eut aucun mal à me laisser y aller, s’assurant néanmoins que je rentre à temps avant le départ pour Reverse. Je m’étais arrangée pour laisser tout ce beau monde rapidement, prenant mes affaires et l’affiche que je gardais précieusement depuis quelques mois. L’arrivée sur North Blue et cette petite île hivernale se fit en deux jours, et à peine avais-je débarqué, toujours accompagné de mon fidèle ami, que je m’étais mise en chasse de l’homme sur mon avis de recherche. Le tenant fermement entre mes mains, demandant ci et là si quelqu’un l’avait vu récemment, l’on m’indiqua très vite un petit bistrot ou il dormait depuis quelques jours. L’homme s’était installé sur l’île il y avait à peine une semaine, prenant ses quartiers dans l’hôtel au-dessus du bar. N’ayant pour l’instant pas fait de vagues, et étant plutôt discret depuis son arrivée, bons nombres furent surpris par cette affiche, d’autant plus par le montant de la prime.
A raison, car cette dernière était exorbitante pour des petits foyers ou pour des petits gens. Même pour moi. Surtout pour moi.

Et je m’étais retrouvée là, en face de lui, l’affiche rangée dans la poche arrière de mon jean usé, encore emmitouflée dans ma veste et Bee toujours à mes côtés. Mon entrée ne passa pas inaperçu : seule fille assez tête brulée pour franchir les portes d’un bar rempli exclusivement d’hommes, je constatai l’affluence du soir, une bonne cinquantaine de têtes présentes qui parlait, çà et là. Et au comptoir, lui, plongeant ses lèvres dans un liquide ambré que je présumai être du Whisky.

Lorsque je m’étais approchée, m’adressant à lui directement, un vague air déterminé et les poings fermés enfoncés dans mes poches, il m’avait estimé un temps avant de me répondre :

« Oh mince, ça f’sait un paquet de temps qu’on m’avait pas appelé comme ça. »

Je n’aurais sut l’expliquer, mais il semblait agréablement surpris.

« Mah, on est pas à égalité : Tu sais qui je suis, et je sais pas qui t’es, chérie. T’me dis ton p’tit nom, qu’on puisse discuter, toi et moi ?
- Lilou.
- Enchanté Lilou, et qu’est-ce qui t’amène à moi ? »

Son sourire agréable, son air charmant, il avança la main vers moi sur le comptoir en bois, essayant de saisir la mienne. Devant mon visage horrifié, mon mouvement en arrière, il m’interrogea vaguement du regard. Puis, il eut un soupir et un petit sourire carnassier :

« Je vois. C’est pas le genre de la maison. Reste à savoir, c’est quoi ton genre… »

Son intonation me fit froid dans le dos. Je restai pourtant campé sur mes positions. Bee le regardait en tentant d’être aussi sérieux que moi. Punk lui jeta un rapide regard avant de rire. Et il crut comprendre. Se levant vaguement en s’appuyant sur le bar, il se tourna vers l’assemblée et clama haut et fort :

« Bon, ok. Qui ici est ici pour ma prime ? »

Il y eut un vague silence. On s’interrogea sur regard et d’un seul homme, la totalité des personnes présentes leva la main en même. L’image était incroyable, pourtant, elle n’étonna guerre le premier concerné. Punk fronça un sourcil :

« Ah d’accord. »

Se tournant vers moi, il remarqua que je n’avais pas bougé d’un pouce. Il revint, s’accouda, et me lança un regard presque charmeur avec un petit sourire en coin. Difficile d’imaginer à quoi est-ce qu’il pensait, mais il s’adressa de nouveau à moi avec une voix plus douce :

« Et toi, t’es là pour quoi, Chérie ?
- Votre tête. »

Il prit une mine horrifiée, complètement outré. Une main sur le cœur, il mima l’homme que l’on blesse de ce simple fait. Ma détermination n’avait pas l’effet que j’espérai, et qu’il se moque de moi ne faisait que me mettre un peu plus en colère. N’être pas prise au sérieux, je n’aimais pas trop. Mais il fallait avouer que mon physique chétif, la non-transformation de Bee, jouait beaucoup. Il tomba sur son tabouret et se passa les doigts dans les cheveux. Se raclant la gorge, il s’adressa de nouveau à tout le monde :

« Il va falloir vous battre, j’affronterai le meilleur et je lui donnerai la chance de mourir par ma main. Même toi, la rouquine. Désolé, j’t’appelle plus « chérie », t’es pas si gentille que ça, en fait. »

Autre regard narquois, provocant à souhait, il fit mine de regarder l’heure sur une montre qu’il n’avait pas au poignet :

«Dépêchez-vous, je pars dans vingt minutes. »

Il y eut une détonation sourde. Une balle vint se planter juste entre nous deux. Je reculai à peine, Punk ne bougea pas d’un pouce. Bee lança de gros yeux vers l’auteur de cet acte, caquetant bruyamment pour le menacer. Personne ne prêta attention à lui. Un grand barbu perça la foule, frôlant les deux mètres cinquante, il ficha un coup dans le bec à Bee et me poussa de sa grande main. Contrainte de reculer, je pestai à mon tour en tentant de me dégager de sa prise. Il me somma de me taire d’un regard noir. Reprenant le fil de la conversation, il recentra son attention sur sa cible initiale : Punk.

« Tu n’iras nulle part.
- Nous verrons bien, hinhinhin… »

Punk, lui, ne m’avait pas quitté des yeux une seule seconde. Il y avait, dans son regard, une singularité toute particulière, une curiosité étrange qui l’animait. La menace des cinquante autres hommes en colère n’avait pas l’air de l’intéressé, ma présence, ainsi que celle de Bee, par contre, accaparait toute son attention. Son regard pressant me mettait mal à l’aise mais je tentais de rester totalement impassible. Il y avait pourtant quelque chose de dérangeant, avec cet homme, comme la sensation qu’il lisait en moi comme dans un livre. Croisant les bras, fermant les poings, je tenais le regard sans ciller, pourtant pas aussi confiante à l’intérieur que ce que je pouvais l’être à l’extérieur.

Mon cœur oscillait entre deux sentiments contraires, deux sentiments qui me faisaient tourner la tête : La haine d’être face à un monstre, la joie d’être face à mon père.

Just woke up
You're still in my head
You were here with me
And I don't feel alone
No I don't fell alone
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« ‘Coute bien Gamine, ç’fait des mois qu’on l’traque le bonhomme, on’a pas trop envie d’partager, tu piges ?
- Et alors ?
- Et alors, chacun son tour ! Tu peux pas nous griller notre tour !
- Je ne vois pas le rapport ! La vie, ça marche pas comme ça, alors foutez-moi la paix et laisser moi lui botter le cul !
- C’pas une question, en fait. Nous, on veut sa thune ! Il nous doit tout !
- Et moi, je veux sa tête. Affaire personnelle.
- On a tous des affaires à régler avec lui. Des sales affaires.
- Ouais. »

Je me tournai vers les autres qui me regardaient tous. Et tous avaient l’air déterminé à mettre la main dans la merde pour s’en prendre à Punk. Tous, sans exceptions. Fronçant un sourcil, je les interrogeai du regard : vrai que l’homme était primé et sacrément casse-pied, mais au vu de la cinquantaine de gars présent dans ce bistrot, difficile d’imaginer qu’il avait pu mettre autant d’hommes en colère. Autant, si ce n’est plus, en fait.

« Moi, il a brulé ma maison et égorgé ma femme.
- Il a p’llé mon vill’ge et mass’cré m’fam’lle…
- Ce con, il a violé ma fille.
- Moi, il a tué mon chien,… Mon p’tit Bucky…
- Il a vendu ma mère !
- Il a vendu mon équipage entier ! »

La liste ne s’arrêta pas là : meurtres, incendies criminels, viols, tortures, esclavagisme, vols, agressions,… Chacun prenait la parole pour rajouter un crime à l’impuni, rallongeant un peu plus les actes odieux qu’il avait osé commettre. On pouvait dire une chose : Punk était passé par tous. Tous les sales coups qu’il avait pu faire, il les avait fait et sans hésiter. Je jetai un coup d’œil en arrière : Il n’avait pas bougé d’un pouce, sirotant avec un sourire mesquin son whisky. Il narguait, rien que par sa présence et l’audace monstrueuse de ne pas s’enfuir devant tous ces gens qui voulaient sa peau ; remarquant mon regard, il me fit un clin d’œil. Un frisson me parcourut l’échine. Bee me fixait toujours pour savoir quoi faire, je pris la décision de faire face à mes adversaires :

« C’est malheureux et j’en suis désolée pour vous, mais j’ai la priorité.
- Ah ? Et pourquoi ? demanda l’un en se curant grassement le nez.
- Parce que.
- Cours toujours, sale gamine !
- Y’a une queue monstre pour lui botter le cul. Alors fais comme tout le monde : Attends. »

Alors que le débat continuait, l’homme au bar se pencha vers le criminel recherché, lui glissant un autre verre :

« Je pige pas, t’as une horde de gars qui veulent te tuer, et tu bouges pas. T’es cinglé ? Questionna le barman à l’intention de Punk. Pas que je t’aime bien, mais faudrait songer à partir…
- T’en fais pas pour moi. J’ai vu pire.
- Bon. C’toi qui vois. Mais pas de casse ici.
- Ahin… »

Toujours le même sourire narquois. Il se leva de son tabouret et s’avança vers nous, tapant dans ses mains pour attirer l’attention :

« Messieurs,… Mademoiselle… Je suis ravi de voir que vous vous souvenez tous de moi et que je vous ai marqué d’une façon ou d’une autre. Mais comme le dit mon ami Bob,…
- J’m’appelle Charlie…
- Ouais, c’est ça. Bref, comme dit l’autre, faudrait voir à pas faire trop de grabuges ici, vous voyez. Bob n’a rien fait pour voir son bar pillé, réduit en cendre et couvert de sang. Il est, comme qui dirait, totalement innocent. Un peu comme moi : je me souviens de vous tous –sauf de toi, la rouquine-, et je peux vous dire que tout ça, c’est qu’un malentendu. C’était pas moi.
- T’veux mon poing dans t’gueule ?
- Oh non, ça ferait un peu mal. Puis ça m’obligerait à être méchant. Et puis, laisse-moi causer, connard. »

Il lui colla une baffe. Baffe qui déstabilisa son vis-à-vis et qui surpris l’assemblée.

« Ouais, voilà. Donc je disais, c’était pas moi. Mais vrai que je me souviens de vous, et vrai aussi que je sais que vous m’en voulez. Sauf toi, j’sais pas c’que tu veux, la rouquine. Mais, bref, vous perdez votre temps : j’suis pas votre homme, et vrai que vous m’ennuyez. Je.. Eurk.. »

Le barbu le plus proche de moi attrapa Punk par le col de son T-shirt et le souleva à sa hauteur. Leurs visages à quelques centimètres, il était sur le point de le bouffer. Punk ne changea pourtant pas de faciès, toujours souriant. Je tirai de mon sac ma clef à molette et l’envoyai rencontrer le genou du barbu. Celui-ci, stupéfait par mon acte, plia la jambe et lacha sa cible, me permettant par la même occasion d’enchainer, de lui attraper la barbe et de saisir son regard :

« Tu le touches pas, compris ? »

Les Hommes autour me regardèrent un instant avant de sortir fusils, épées et autres armes contendantes en les pointant dans ma direction. Ma main s’aventura à la ceinture de l’homme que j’avais mis à terre, j’attrapai son épée et fis face à la cinquantaine d’adversaires. En observant le nombre, l’angoisse me prit, mais à ma grande surprise, Bee et Punk s’interposèrent tous deux. Bee, entre le monde et moi. Punk, juste devant, les mains en l’air en essayant de temporiser le nombre :

« Les gars, les gars, calmos. C’est qu’une gamine voyons.
- Elle nous pompe l’air, alors tu bouges, on la plombe et on en parle plus.
- Mais je vous attends, ouais !
- Soyez Gentlemen, elle est juste… un peu trop insolente. Mais une simple correction la calmerait.
- Pourquoi tu prends sa défense ? C’est qu’une gosse qui veut te tuer ! Maintenant, pousse-toi !
- J’ai dit, on se calme. »

Il y eut dans l’air une sensation étrange. Tellement que je sentis un poids tomber sur mes épaules, la tête se mit à tourner, le monde se mit à bouger. Une douzaine d’hommes s’évanouit, la bave aux lèvres, les yeux révulsés. Personne ne comprenait ce qu’il se passait, moi encore moins que les autres. Je sentais mon cœur battre plus vite, plus fort, sur le point d’exploser dans ma cage thoracique. Ma vue se troublait, mes sens me faisaient défaut. Je crus partir en arrière, et juste à temps, cette sensation disparut. Et lorsqu’il n’y eut plus rien, le sol se déroba sous mes pieds. Mes fesses rencontrèrent le parquet. Bee se retourna et me regarda pour voir si j’allai bien, inquiet de m’avoir vu chuter. Le barbu à côté prit la parole :

« Ce con… Ce con possède le Haki des rois… »

Il était complètement abasourdi. Puis, il se releva en tentant de reprendre ses esprits. Il m’arracha des mains son arme et la leva au ciel :

« Le plan ne change pas, nous l’attaquons, et tous ensemble ! »

Les autres suivirent le mouvement, levant armes au ciel pour confirmer les dires du chef de la meute. Secouant la tête, je me levai à mon tour et attrapai le Barbu par le bras pour le retenir :

« Une minute ! »

Il me repoussa et manqua de me faire tomber de nouveau. Bee vit rouge et se tourna vers le gus en avançant dangereusement :

« Ta gueule, Gamine. T’as pas le niveau, et c’est pas avec ton canard de… ton canard… »

Le vague regard qu’il avait jeté vers Bee lui fit comprendre l’erreur qu’il avait commise. Grave erreur de sous-estimer ses adversaires, de les juger d’un coup d’œil, alors que n’importe quels ennemis réservent son lot de surprises. Pour Bee, la surprise était l’une des plus immenses. Il se déplia de toute sa longueur, se mua en cette créature de métal qui atteignait les quatre mètres, facilement. Lorsque sa grande main d’acier dut se poser au sol pour tenir dans la pièce, trop petite pour sa taille, juste en face du barbu, celui-ci compris qu’il était mal barré. Et quand son autre bras fit choir sa mimine métallique pour dévoiler la gueule d’un canon de douze armée et prête à tirer, l’Homme n’avait plus qu’une chose à faire…

Ses prières.
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« Attention Chérie ! »

Je me baissai brutalement tandis que Punk passait au-dessus de moi pour assener un coup violent à un borgne. Le combat avait éclaté juste après le coup de canon : les hommes s’étaient rués les uns sur les autres, à la base sur Punk, Bee et moi-même, mais tout avait plus ou moins dégénéré. Devoir faire alliance avec la personne que je visais me semblait particulièrement étrange, être associé avec mon père, tout autant. Je ne savais pas trop quoi penser de la situation, et de toute manière, la situation ne prêtait pas à la réflexion. Nous couvrions nos arrières, l’un l’autre, enchainant mouvements et coups bas pour éviter les assauts de nos adversaires. J’étais dans une panade monstrueuse, mais la force de Punk, couplé à l’efficacité de Bee, firent que rapidement, le nombre d’ennemis diminua. Je n’étais pas la plus utile au combat, à lancer ma clef à molette et les quelques clous que j’avais caché. J’attrapai au bout d’un moment l’arme, un fusil à pompe, d’un des hommes tombé à terre pour m’en servir. Vrai que je n’avais jamais tué un homme, vrai aussi que j’hésitai toujours longuement avant de tirer, sursautant à chaque détonation. Punk me fixait du coin de l’œil et riait aux éclats, certainement ravi de voir que son adversaire de fin, ça serait moi et un robot canard de quatre mètres.

« GRENADE ! »

Le mot coupa court à quasiment tout. L’objet glissa entre les jambes de personnes présentes avant d’arriver jusqu’aux miennes. Je regardai la bombe qui était juste devant mes yeux. Punk eut un sursaut et fonça jusqu’à la vitre la plus proche avant de la traverser. Bee regarda à terre, puis me regarda, et n’hésita pas une seconde. Il fonça dans ma direction, m’attrapa et me lança à travers une seconde vitre. Je sentis les éclats de verre s’enfoncer dans ma peau et lorsque je touchai le sol, les cailloux et autres gravats me firent souffrir le martyr.
Et enfin, la grenade explosa. Il y eut un bruit étouffé, puis un fracas immense, suivant le souffle de l’explosion qui souleva poutres en bois, vitres cassées, chaises en morceaux et qui nous les envoya dessus. L’une des planches s’abattit sur moi, me fit très mal aux côtes, mais par chance, elle me protégea des autres projections. Et quand enfin, la bâtisse s’effondra totalement, il n’y eut plus un bruit autour.

Plus un son. Plus un signe de vie. Rien, sinon le silence.

Et ma respiration. Sous ma planche. Reprenant mes esprits, je touchai maladroitement le sol, cherchant quelque chose pour me sortir de là. Mes doigts ne se posèrent que sur mes cheveux salis et la terre retournée, quelques pierres, rien en tout cas pour me tirer d’affaire. Je pris la peine de me mettre sur le dos en essayant de soulever la planche qui me couvrait. Poussant de toutes mes forces, je ne réussis qu’à me faire hurler de douleur. Vraisemblablement, deux de mes côtés s’étaient brisées lors de mon lancée : je n’avais pas pris le temps de me réceptionner. J’étais prise au piège… Jusqu’à quelques bruits, par ci, par là…

« Bee … ? »

Quelques minutes,… Je sentis au-dessus de moi une présence qui attrapait les objets qui m’encombraient et qui les dégageait. Petit à petit, le poids qui m’empêchait de bouger fut totalement enlevé, jusqu’à ce que la planche, dernière étape avant ma libération, ne soit elle aussi retirée. La personne essoufflée qui se tenait près de moi me tendit la main pour me sortir de mon piège. Je reconnus celle bandée de Punk, ensuite son regard et son sourire narquois et satisfait. Tous ses adversaires avaient été mis à mal, tous, sauf moi :

« Merci chérie pour ton coup d’main. J’sais pas trop qui t’es, mais c’était bien marrant. Un peu déçu par la fin, j’aurais pensé ton machin un peu plus… musclé, tu suis ? Bref, t’es mignonne, ça m’embêterait de devoir te faire du mal… Oh… »

J’étais en colère, dans une fureur sans nom. Je n’avais peut être pas la force de le terrasser, mais je fantasmai sur quelques coups bien placés. A peine sur mes jambes, j’avais vaguement tenté de lui coller une gifle. Il l’évita de justesse, le sourcil froncé. Il avait été surpris par mon geste, mais très vite, son regard se mua en un masque de colère. Il se mordit la lèvre nerveusement et lâcha d’une voix froide :

« Si tu le prends comme ça,… »

Il m’attrapa par la gorge férocement et me releva d’un coup. Je sentais les muscles de mon dos s’étirait dangereusement, mon poids aller vers le sol, me faisait mal, très mal. J’avais aussi de grosses difficultés à respirer : sa poigne était violente, je craignais qu’il ne me brise la nuque en serrant un peu plus sa prise autour de ma gorge. Je voulais crier, mais aucun son ne sortit de ma bouche. Mes mains accrochées à la sienne, serrant ses doigts si forts que je crus pouvoir les lui briser, je battais des jambes dans le vide en essayant de me libérer… Et alors qu’il fermait son poing pour me le porter au visage, l’on entendit derrière nous, dans les gravats du bistrot ou l’affrontement avait fait rage, un bruit sinistre. Punk s’arrêta net dans son mouvement et tourna le regard.

« Putain… »

L’injure sortit de ses lèvres lorsqu’il constata, comme moi, qu’il y avait quelqu’un en dessous, quelqu’un qui avait survécut et qui avait la ferme intention de revenir sur le devant de la scène. Un petit sourire barra son visage sale, sa prise à ma gorge se fit moins forte, j’haletai quand même. On voyait tous les deux les gravats bouger, doucement, glisser, sans vraiment savoir qui en sortirait. Je savais, je sentais que c’était lui…
Bee…

« Putain de merde… »

Il s’échappa d’un coup, se relevant totalement en attrapant ce qu’il avait sous la main : un pan du plafond. Il l’agita en l’air et poussa un cri déchirant qui impressionna mon paternel. Punk me lâcha. Totalement. Je tombai à terre en me tenant la gorge. Il fit face à Bee qui reprenait son souffle et tenter de se calmer. Lorsque le regard de la bête se posa sur nous deux, un éclat de folie traversa ses yeux bleus. Un éclat fou dans lequel Punk se retrouvait bien. Le robot tendit son bras vers nous, dévoila la gueule d’un autre canon. Mais quelque chose dans la tête du bandit tinta : ce n’était pas un boulet qui allait en sortir, pour sûr. Il comprit quand il entendit le son aigu de ces canons sophistiqués qui chargent. Et trop captivé pour pouvoir réagir, il n’eut pas le temps d’éviter le souffle brulant qui fusa vers lui.
Il fut envoyé quelques mètres plus loin, roulant-boulant sur le sol, heurtant les pierres et la terre morcelées, s’arrêtant au bout de quelques sauts, à genoux. Bee s’extirpa de sa cage de bois, avançant vers moi, son bras toujours armé.
Punk se remit sur ses jambes avec difficultés, toussotant, essayant de rester fier.

Fier, il l’était. Il ne s’était pas attendu à devoir affronter un jour un monstre d’acier.

Mais reculer devant les titans n’était absolument pas son genre. Il attrapa une grosse poutre à côté de lui, la prit dans une seule main, s’essuya sa lèvre ensanglantée de l’autre, fit un sourire carnassier et chargea en direction de Bee.


Dernière édition par Lilou B. Jacob le Jeu 11 Oct 2012 - 7:46, édité 1 fois
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Il fonça, tête baissée en direction de son adversaire. Il se rua sur lui, sauta sur les gravats pour prendre de l’élan et bondit droit sur le géant d’acier. Bee le réceptionna dans sa grande main, l’enserrant dans ses doigts avant de l’écraser férocement sur le sol. Jamais il n’avait été autant en colère, jamais il n’avait eu autant envie d’enterrer quelqu’un sans prendre la peine de creuser une tombe avant. Il rêvait de le faire passer trente-six pieds dessous, juste par la force de son bras. Il aurait pu. Punk poussa un hurlement. Cela faisait longtemps qu’il n’avait pas eu autant mal, mais cette décharge de douleur lui donnait la force de continuer. Il tenait toujours dans sa main la poutre qu’il envoya dans la tête de Bee. Le robot ne prit pas la peine d’éviter, mais fut totalement pris au dépourvu lorsque l’impact eut lieu. Il n’avait pas mesuré la puissance du lancer.
Et il avait mal, au point que son armure soit cabossée.

Il lâcha l’homme et mit sa main devant son visage, comme faisait les hommes. Il était inquiet. Pour la première fois de sa vie, il avait été touché, et plutôt sévèrement. Jamais cela ne lui était arrivé, et jamais personne n’avait eu l’occasion de l’atteindre de la sorte. Bee était choqué. Assez pour permettre à son adversaire d’attaquer. Punk grimpa sur son bras et alla jusqu’à son cou. Il passa la main dans l’encolure de sa protection et attrapa la première chose qui lui tomba sous la main : un vérin qui tenait et aidait à faire bouger son épaule. Il tira dessus, fort, très fort, au point de tordre l’objet. Bee chargea le canon à air et tira sur Punk. L’homme évita de justesse en se faisant tomber en arrière. Il s’écrasa contre une planche qui céda sur son poids et rentra dans sa peau. Les éclats de bois, de verre, de pierre, lui faisaient un mal de chien. Mais devant le monstre d’acier, il ne voulait céder devant rien.
Alors il rusa et se plongea dans les décombres du bistrot, se terra à l’intérieur. Bee ne le vit pas. Mais il savait qu’il était là. Alors, il tapa, dans tout ce qu’il trouvait, tout ce qui était à portée. Et il continua, encore, encore, jusqu’à réduire certaine poutre à l’état de simples échardes. Et lorsqu’il pensa en avoir terminé, Punk sortit des décombres, un barre en fer en main, bondit sur Bee, planta la barre dans l’espace entre son bras et son buste, fit levier. Il força, força, et força comme une véritable brute, au point ou l’armure commença à grincer, et à se plier, pour enfin céder. Et il se laissa tomber à terre, attrapa un autre pan massif et l’envoya dans les pieds du géant d’acier. Et lorsque la créature fut à terre, il lui attrapa la tête entre des chaines en acier, pour le passer autour de son bras, et de son buste, puis de sa jambe, pour enfin le nouer si solidement que Bee fut contraint et forcé de se recroqueviller et de rester immobile.

Lorsque le géant chuta, Punk toucha le sol lui aussi. Essoufflé, il se releva difficilement, un sourire satisfait sur les lèvres et prêt à affronter le monde.

Et quand il se retourna pour terminer le travail, il vit pointer entre ses deux yeux le canon d’un fusil, armé et prêt à envoyer la sauce. Et au bout de ce mécanisme de bois et d’acier, moi.

« T’es sérieuse ? »

L’arme tendue vers lui, le doigt sur la gâchette, je le tenais en ligne de mire, sans ciller. J’avais le souffle lent, je tentais de garder mon calme et d’être en pleine possession de mes moyens. C’était dur. Dur de le regarder dans les yeux en le visant avec le canon d’une arme capable de lui éclater la cervelle et de la rependre sur le sol. Dur de se dire qu’appuyer résoudrait tous les problèmes de tout le monde, que la terre entière irait certainement mieux sans lui. Dur de se dire qu’un monstre, ou tout du moins ce que des centaines de personnes nommaient « monstre », était mon père.

« Tu vas tirer, toi ? »

Sa provocation m’énerva plus qu’autre chose. Comme si je n’en étais pas capable. En pensant cela, mes mains devinrent moites, je tremblai légèrement. Je perdais mon calme par la même occasion et je le regardai droit dans les yeux en essayant de rester digne. Il ne souriait pas, il était tout à fait sérieux. Je savais qu’il était temps, je savais que je devais le faire. Je devais m’en débarrasser, faire ce que j’avais promis pour sortir de ma vie ces gens qui avaient légitimement une place à l’intérieur. Alors, je pris une grande bouffée d’air et fermai les yeux, appuyant sur la gâchette.

Le coup partit.

Le noir total. Et je sentis une force tirée sur le canon, avec tant de puissance que j’eus du mal à le retenir. Je rouvris les mires en regarder Punk tenir le bout du canon, fumant, légèrement écarté de sa tête, les yeux furibonds : à la fois étonné et en colère de savoir que j’en avais été capable. Je l’aurais fait, oui.

« Tu l’aurais fait en plus, p’tite conne ! »

Il me gifla de son autre main. Fort. Si fort que j’en lâchai le fusil. Le bras ballant, je me tins la joue de l’autre, regardant mon paternel brisé l’arme d’un coup de genou. Et puis, embarqué dans sa colère, il se rua dans ma direction et m’attrapa la gorge de ses deux mains, serrant de toutes ses forces pour m’étrangler.
Je sentais ses doigts autour de mon cou, appuyer un peu plus pour m’empêcher de respirer. Je ne compris pas toute de suite, mes deux mains l’agrippèrent, mes yeux le fixèrent. J’étais totalement interloquée, mais pire que ça, j’avais du mal à respirer. Je sentais l’affolement prendre le dessus, je sentais que je perdais totalement mes moyens, mais surtout que j’allai mourir aussi bêtement. A mi-voix, j’essayai de dire quelque chose, le dissuader de continuer, l’empêcher de faire tout ça. Aucun mot ne voulait sortir, alors les larmes commencèrent à couler, jusqu’à ce qu’enfin, j’appelle…

« P-Papa… »

Qui est-ce que j’appelais ? Dans ma tête, ce n’était pas défini. Yumen, Harry ou lui ? Je voyais la silhouette courbée de celui qui m’avait recueilli, ces années heureuses. Je ressentais la présence massive de celui qui m’avait adopté, de ce colosse. Et je voyais le père de sang, le père de chair, complètement abasourdi en m’entendant l’appeler. Lui ? Il relâcha la pression, mais me tint toujours à bout de bras. Sa main s’aventura à ma joue, l’autre à mon épaule. J’avais un équilibre précaire, mais je faisais face. Mes idées se chamboulaient, mes pensées se heurtaient les unes aux autres. J’aurais été incapable de m’expliquer.

Still your Princess.

Le roi père ne savait plus quoi dire non plus. Il se contentait de me regarder, retrouvant progressivement son souffle. La colère avait laissé place à l’incompréhension, quand tout un coup, il comprit l’ampleur du problème. Ce que j’étais, ce qu’il avait fait. Il se décomposa et se rappela, par le même fait, ce qu’il avait engendré. Il était le roi, il était le père. Et par ses actes, il avait créé quelque chose que personne n’avait désiré, sauf lui, plus ou moins.
Je ne pouvais pas dire à quoi il pensait. A vrai dire, je ne savais pas vraiment ce que moi je pensais, ni ce que je voyais en face moi. Ma vision était troublée, mes sens confus ; je perdis mon équilibre et me retrouvai le nez contre son torse. Jusqu’à ce que je ferme les yeux et que mes jambes ne plient totalement sous mon poids. Punk me rattrapa de justesse et m’aida à m’installer par terre. Dégageant mes cheveux de mon visage, il fut plus doux, comme changé. Il se posa à côté de moi, croisant les bras autour de ses jambes, respirant lentement. Il leva le regard vers le ciel dégagé, la température fraiche de l’île hivernale était marquée par la buée s’échappant de ses lèvres…

« C’était peut-être trop tôt.
- Je n’avais pas la patience d’attendre Grand Line, dis-je à mi-voix. »

Il marqua une pause.

« Grand Line, hein… »

Grand Line.
Mieux qu’une destination, qu’une mer, ou qu’un autre monde.
Il se passa la main dans les cheveux et attendit. Et je ne sais pas à quel moment je perdis connaissance, ou je m’assoupis, ni quand il partit sans demander son reste. Ni comment Bee réussit à se libérer de ses chaines, ni comment il me ramena jusqu’à la cabine au navire accosté au port.
Je savais juste que Grand Line était mieux qu’une destination.

C’était un rendez-vous.
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