« Shell Phillip ? »
Il leva un regard vers moi et me détailla. Il eut, l’espace d’une seconde, l’impression de voir une personne qu’il avait déjà vu par le passé. Vaguement. Puis, il se ravisa et me fit un grand sourire.
J’avais quitté les Ghost Dog trois jours avant, signifiant à mon capitaine que j’avais des choses à faire avant de partir sur Grand Line. L’homme, après la mission accomplie ensemble, n’eut aucun mal à me laisser y aller, s’assurant néanmoins que je rentre à temps avant le départ pour Reverse. Je m’étais arrangée pour laisser tout ce beau monde rapidement, prenant mes affaires et l’affiche que je gardais précieusement depuis quelques mois. L’arrivée sur North Blue et cette petite île hivernale se fit en deux jours, et à peine avais-je débarqué, toujours accompagné de mon fidèle ami, que je m’étais mise en chasse de l’homme sur mon avis de recherche. Le tenant fermement entre mes mains, demandant ci et là si quelqu’un l’avait vu récemment, l’on m’indiqua très vite un petit bistrot ou il dormait depuis quelques jours. L’homme s’était installé sur l’île il y avait à peine une semaine, prenant ses quartiers dans l’hôtel au-dessus du bar. N’ayant pour l’instant pas fait de vagues, et étant plutôt discret depuis son arrivée, bons nombres furent surpris par cette affiche, d’autant plus par le montant de la prime.
A raison, car cette dernière était exorbitante pour des petits foyers ou pour des petits gens. Même pour moi. Surtout pour moi.
Et je m’étais retrouvée là, en face de lui, l’affiche rangée dans la poche arrière de mon jean usé, encore emmitouflée dans ma veste et Bee toujours à mes côtés. Mon entrée ne passa pas inaperçu : seule fille assez tête brulée pour franchir les portes d’un bar rempli exclusivement d’hommes, je constatai l’affluence du soir, une bonne cinquantaine de têtes présentes qui parlait, çà et là. Et au comptoir, lui, plongeant ses lèvres dans un liquide ambré que je présumai être du Whisky.
Lorsque je m’étais approchée, m’adressant à lui directement, un vague air déterminé et les poings fermés enfoncés dans mes poches, il m’avait estimé un temps avant de me répondre :
« Oh mince, ça f’sait un paquet de temps qu’on m’avait pas appelé comme ça. »
Je n’aurais sut l’expliquer, mais il semblait agréablement surpris.
« Mah, on est pas à égalité : Tu sais qui je suis, et je sais pas qui t’es, chérie. T’me dis ton p’tit nom, qu’on puisse discuter, toi et moi ?
- Lilou.
- Enchanté Lilou, et qu’est-ce qui t’amène à moi ? »
Son sourire agréable, son air charmant, il avança la main vers moi sur le comptoir en bois, essayant de saisir la mienne. Devant mon visage horrifié, mon mouvement en arrière, il m’interrogea vaguement du regard. Puis, il eut un soupir et un petit sourire carnassier :
« Je vois. C’est pas le genre de la maison. Reste à savoir, c’est quoi ton genre… »
Son intonation me fit froid dans le dos. Je restai pourtant campé sur mes positions. Bee le regardait en tentant d’être aussi sérieux que moi. Punk lui jeta un rapide regard avant de rire. Et il crut comprendre. Se levant vaguement en s’appuyant sur le bar, il se tourna vers l’assemblée et clama haut et fort :
« Bon, ok. Qui ici est ici pour ma prime ? »
Il y eut un vague silence. On s’interrogea sur regard et d’un seul homme, la totalité des personnes présentes leva la main en même. L’image était incroyable, pourtant, elle n’étonna guerre le premier concerné. Punk fronça un sourcil :
« Ah d’accord. »
Se tournant vers moi, il remarqua que je n’avais pas bougé d’un pouce. Il revint, s’accouda, et me lança un regard presque charmeur avec un petit sourire en coin. Difficile d’imaginer à quoi est-ce qu’il pensait, mais il s’adressa de nouveau à moi avec une voix plus douce :
« Et toi, t’es là pour quoi, Chérie ?
- Votre tête. »
Il prit une mine horrifiée, complètement outré. Une main sur le cœur, il mima l’homme que l’on blesse de ce simple fait. Ma détermination n’avait pas l’effet que j’espérai, et qu’il se moque de moi ne faisait que me mettre un peu plus en colère. N’être pas prise au sérieux, je n’aimais pas trop. Mais il fallait avouer que mon physique chétif, la non-transformation de Bee, jouait beaucoup. Il tomba sur son tabouret et se passa les doigts dans les cheveux. Se raclant la gorge, il s’adressa de nouveau à tout le monde :
« Il va falloir vous battre, j’affronterai le meilleur et je lui donnerai la chance de mourir par ma main. Même toi, la rouquine. Désolé, j’t’appelle plus « chérie », t’es pas si gentille que ça, en fait. »
Autre regard narquois, provocant à souhait, il fit mine de regarder l’heure sur une montre qu’il n’avait pas au poignet :
«Dépêchez-vous, je pars dans vingt minutes. »
Il y eut une détonation sourde. Une balle vint se planter juste entre nous deux. Je reculai à peine, Punk ne bougea pas d’un pouce. Bee lança de gros yeux vers l’auteur de cet acte, caquetant bruyamment pour le menacer. Personne ne prêta attention à lui. Un grand barbu perça la foule, frôlant les deux mètres cinquante, il ficha un coup dans le bec à Bee et me poussa de sa grande main. Contrainte de reculer, je pestai à mon tour en tentant de me dégager de sa prise. Il me somma de me taire d’un regard noir. Reprenant le fil de la conversation, il recentra son attention sur sa cible initiale : Punk.
« Tu n’iras nulle part.
- Nous verrons bien, hinhinhin… »
Punk, lui, ne m’avait pas quitté des yeux une seule seconde. Il y avait, dans son regard, une singularité toute particulière, une curiosité étrange qui l’animait. La menace des cinquante autres hommes en colère n’avait pas l’air de l’intéressé, ma présence, ainsi que celle de Bee, par contre, accaparait toute son attention. Son regard pressant me mettait mal à l’aise mais je tentais de rester totalement impassible. Il y avait pourtant quelque chose de dérangeant, avec cet homme, comme la sensation qu’il lisait en moi comme dans un livre. Croisant les bras, fermant les poings, je tenais le regard sans ciller, pourtant pas aussi confiante à l’intérieur que ce que je pouvais l’être à l’extérieur.
Mon cœur oscillait entre deux sentiments contraires, deux sentiments qui me faisaient tourner la tête : La haine d’être face à un monstre, la joie d’être face à mon père.
Just woke up
You're still in my head
You were here with me
And I don't feel alone
No I don't fell alone
You're still in my head
You were here with me
And I don't feel alone
No I don't fell alone