Rappel du premier message :
Ryuuku faisait bien son travail. Lui en tant que cap, Pingouin muet en tant que gouvernail, la petite barque avançait à la force des bras de Rachel. Bien sûr. Allez demander à un pingouin de ramer. Au moins cette fois-ci n'avait-elle pas le risque de se faire dévorer par un léviathor sauvage. Et puis elle avait une barque et pas un dos de roi des mers écailleux. Et pas de putain de nuage qui la suivait.
Non, en clair, cette fois-ci, tout allait pour le mieux. Elle avait même une petite gourde, non d'eau, mais de la liqueur de fruit noir qui n'en finissait de l'étonner par son goût et sa douceur. Alors elle chantait, notre lieutenant. Elle chantait, accompagnée par le pingouin dont les pieds palmés sonnaient comme les basses sur les planches du canot.
-...On ira pendre des révos sur la Grande Vergue... ~
Pas vraiment le genre de chansons qui la touchaient, mais la seule qu'elle connaissait -du moins partiellement- pour l'avoir tant entendue ces derniers temps avec les Sea Wolves. Sûre que les paroles n'était pas du grand art ni même la méthode d'action qu'elle-même préconisait pour mater des révolutionnaires, mais le rythme était entraînant et le Pingouin savait magistralement ajouter quelques nuances à l'arrière.
Chanter la détendait étrangement. Pourtant, elle avait toujours du mal à dire du mal des révolutionnaires, même en chanson. Alors après l'avoir chantée trois ou quatre fois en boucle, elle commença à en changer les paroles par excès de conscience. Et la voilà qui pendait allègrement des pirates sur la grande vergue. Parce qu'il ne faut pas déconner non plus, tous les Révos n'étaient pas non plus de la crevure de chiottes ou de la raclure d'escargot anémique. Sûr qu'il devait en exister de bons bougres. Alors que les pirates... enfin, c'était une race à part et même si certains se disaient enfants de la liberté, se jouer ainsi des lois et les détourner à son propre profit avec des actions peu recommandables et des délits plus ou moins grave suffisait à la classer automatiquement dans la catégories des monstres de foire à abattre ou tout au moins à enfermer à double tour à Impel Down.
Alors que les révos. Des communistes. Des rouges. Qui, ne supportant pas la suprématie du gouvernement mondial, on délaissé les tracts et la propagande pour les armes et la guerre. De grands enfants capricieux qu'il fallait juste corriger une bonne fois pour toute pour qu'enfin ils acceptent l'autorité. Ce genre de bougre seraient capables de ne pas être d'accord sur quel chef écouter une fois le gouvernement renversé et de Monarchie, basculer dans l'Anarchie. Un monde dans lequel les pirates seraient les plus heureux. Pas question de les laisser faire, certes, mais de là à les pendre sans tenter de comprendre ou de les raisonner...
-...On ira pend' des pirat's sur la Grand' Vergue... ~
Finalement, c'est vers l'heure du déjeuner que le Fenrir fut en vue. Au grand soulagement de Rachel. Car si le Pingouin avait pêché un petit poisson rouge à tête humaine pour le second petit déjeuner, notre faucheuse, en plus d'être tout simplement éreintée par de tels efforts -comprenez qu'elle n'était pas Jack Baueur- n'avait rien eu d'autre que sa gourde de liqueur à se mettre au fond du gosier. Autant vous dire que le ventre vide de l'alcool, même à très faible teneur en degrés, restait de l'alcool. Et puis il y avait le soleil qui commençait à la brûler sérieusement. C'était décidé, en rentrant elle demanderait de la crème de marron. Ah, et de la biafine contre les brûlures de soleil.
-... Et il paraît que l'Amiral est fier de nous... ~
Je l'avais bien dit, une connaissance toute relative des paroles de la chanson...
Elle se rapprochait de plus en plus et pouvait voir l'agitation à bord. Une étrange agitation d'ailleurs. Tous avaient dû la voir arriver maintenant, surtout la vigie et surtout voir Ryuuku qui venait de se poser à bord. Et comme il s'ébouriffait les plumes, se re transforma en homme sous l’œil intriguée de Rachel. Elle réprima un frisson. Cette époque où elle avait peur des fruits du Démon était révolue. Et puis, avec trois à bord, il aurait été dur d'en avoir peur longtemps encore.
Au bastingage, presque tous les matelots, tous les loups, venaient s'y pencher à tour de rôle pour l'accueillir. Ils semblaient heureux ou... elle se faisait des idées ?
Une échelle de cordes lui fut envoyée avant même qu'elle ne se soit arrimée au navire. Le Pingouin la dépassa et saisissant le sac de toile (qui contenait tout ce dont Lin aurait besoin pour recouvrir la coque du Fenrir) et se le nouant autour du cou, Rachel, telle une mère Noël toute de noire vêtue, sa hôte gigantesque sur l'épaule, fit irruption sur le navire. Et l'accueil chaleureux des loups la surprit d'autant plus que Toji était absent. Relation de cause à effet ? En tout cas, à peine pied sur le pont qu'ils se sont dépêchés de lui confisquer son sac de toile et de remonter le canot. Un de plus, on ne va pas cracher dessus, si ? Certains s'extasient de la qualité de la soie qu'elle porte. Non loin, Ryuuku regarde la scène et elle le salua d'un signe de tête à prendre comme un remerciement. Le Pingouin, lui, est allé rejoindre Red, sûrement pour lui raconter ses deux derniers jours.
Puis, Xan s'approcha. Si un sourire éclaira fugacement son visage, il l'effaça sitôt le salut effectué. Pour lui annoncer que Toji l'attendait dans ses quartiers. Le bureau du capitaine. De mémoire, elle n'y avait jamais mis les pieds. Son regard se perdit dans cette direction et avec un sourire qu'elle voulait rassurant, autant pour elle que pour lui, elle lui confia ses affaires. Lin saurait en faire bon usage. Inspirant profondément, elle mit le cap vers la salle des cartes. Là où le Capitaine l'attendait. Et sans se départir de sa faux, elle avala la distance qui la séparait de la salle en quelques secondes. Et devant la porte, elle prit une minute pour en admirer le bois et les nœuds. Elle soupira. Que pouvait-il bien lui vouloir ? Elle avait fait son travail, et la raison principale de sa punition était maintenant loin. Il faudrait juste affronter la leçon de morale. Très bien. Elle inspira profondément et frappa à la porte. Et quand on l'autorisa à entrer, Elle le fit sans crainte. Appréhension, peut-être, mais crainte, nulle.
-Mission accomplie, Amiral !