Les dires d'une gamine l'avaient conduit jusqu'ici, sur l'île du croissant. Il en avait déjà entendu parler, mais ne s’était jamais rendu. Elle s'était formée il y a un peu plus de six cents ans, par une explosion volcanique. D'ailleurs, le volcan s'étendait sur une grande partie. Facilement un tiers. Au bord de l'eau, il y avait le village avec son port. Environ trois cents de personnes y résidaient. L'économie de l'île reposait sur la pêche. Inutile donc de vous dire le métier des villageois. Il avait aussi entendu dire que c'était un petit village très dynamique et accueillant. Malheureusement, il était éloigné et n'avait pas vraiment de quoi attirer les touristes.
Il accosta sur la rive en début de matinée. Il ne savait pas par où commencer à chercher. Et quand on ne sait pas où aller, il faut aller à la pêche aux indices. Il décida donc de faire un tour au village et de questionner quelques habitants. À sa grande stupéfaction, il n'y avait personne dans les rues. Elles étaient désertes. Comment était ce possible ? À cette heure-ci, ils y auraient dû avoir des commerçants ouverts, et même un marché. Peut-être était-il en mer ? Nein. Cela devenait inquiétant. Il commença à se gratter le menton et observa un peu plus les alentours. Les fenêtres et volets étaient fermés. Il toqua à une porte, mais personne ne vint ouvrir. Il essaya alors d'y entrer, mais elle était fermée. Il ne pouvait y avoir personne. Pourquoi ? Il se sentait épier depuis qu'il était arrivé. Comme ci les habitants s'étaient barricadés chez eux. Effrayés par quelque chose, ou quelqu'un. Mais quoi ?
« Je sais que je ne suis pas seul. Sortez donc, je ne compte pas vous faire de mal. »
Bien évidemment, personne ne dédaigna lui répondre. C'était louche. Une chose était sure : il ne pouvait pas compter sur l'aide des habitants du village pour l'instant. S'il voulait des informations, il allait devoir se démerder tout seul. Il parcourut le village dans l'espoir de trouver quelque chose, mais rien. Que dalle. Aucun signe de dojo ou de maître d'art martiaux. La demoiselle s'était-elle jouée de lui ? Il commençait à le croire.
« Finalement, c’était une fausse piste. Je vais donc retourner à Kage Berg. »
Il commença alors à faire demi-tour. Après tout, si cette île n'était pas la bonne, il n'avait rien à faire ici. Il regardait les maisons, comme s'il attendait que quelqu'un ait pitié de lui et vienne l'aider. Espoir vain. Personne ne vint. Il haussa les épaules. Il venait d'arriver sur la rive. Il allait mettre son embarcation à la flotte quand, tout à coup, un homme l’interpella.
« Petit effronté, où crois-tu aller ? »
Ylvikel se retourna et fixa l'homme. Il était accoutumé d'une drôle de façon. Il avait un long kimono blanc avec un drôle d'emblème. Ça ressemblait à une grue. Pourquoi mettre un tel oiseau ? Enfin, le maître devait tout simplement avoir mauvais goût. À sa ceinture, on pouvait y voir une hache. C'était plutôt original d'utiliser une telle arme. Mais savait-il s'en servir ? Son attention fut vite détournée quand il vit sa tronche. Il avait une coupe afro bien volumineuse avec des lunettes de soleil noires. C'en était trop, Ylvikel éclata de rire ! Il n'en pouvait plus, il était trop drôle. Quel énergumène pouvait oser se trimbaler avec une telle merde sur la tête ! L'homme avait bien remarqué qu'on se foutait de sa gueule et ça a eu le don de le mettre en colère. Comme par hasard, me direz-vous.
« Moi qui voulais simplement te piller et te laisser la vie sauve ! Maintenant, il va en être tout autrement ! Je vais te tuer et après je te dépouillerais ! »
Ylvikel s'arrêta aussitôt de rire. Il reprit son sérieux et le fixa dans les yeux. Celui-ci se mit alors à rire et prit son arme à la main. C'était une petite hachette. Il esquissa un sourire et mit sa main dans sa poche. De celle-ci il en sortit son scalpel et le pointa vers l'homme.
« Écoute, pyjama boy, je ne suis pas d'humeur. Je te laisse trois secondes pour t'enfuir. Trois. Deux. Un ... »
Fou de rage, l'homme se jeta sur Ylvikel. Il attaquait de façon frénétique, mais ce n'était guère précis. De plus, il faisait des mouvements amples et larges, ce qui réduisait considérablement sa vitesse de frappe. Il évita sans problèmes les attaques de l’homme qui s’essouffla très rapidement. La sueur commençait à perler son front. Ylvikel prenait petit à petit le dessus sur lui. Tous deux savaient qui allait remporter la victoire. Pourtant, il ne se découragea pas et continua ses attaques. Elles étaient plus maladroites les unes que les autres. Fatigué et lassé par ce combat inutile, il y mit fin d'un simple mouvement et lui planta son scalpel au niveau de la pomme d’Adam. Il s'écroula alors comme une merde au sol. Son sang coulait abondamment. Même mort, il continuait à faire chier. Maintenant, qu'il s’était débarrassé du gêneur il allait enfin pouvoir se barrer d'ici. Soudain, des cris de joie se firent entendre au loin. Ylvikel se retourna, et, qu’elle ne fut sa stupéfaction quand il vit tous les villageois dans la rue. Ils étaient en train de l'applaudir. Mais pourquoi ? Qu'avait-il fait ? Et puis il réalisa. Il venait de tuer cet homme. Était-il un oppresseur ? Il ne savait pas. Mais, même si c'était le cas, il n'avait guère envie de les aider. Cependant, maintenant qu'ils étaient sortis. Il allait pouvoir leur demander quelques renseignements. Il s'avança lentement vers eux, tout en leur souriant et en faisant un signe de la main. Puis, quand il fut à leur niveau, il prit la parole.
« Ce n'était rien, je vous en prie. Dites-moi, qui était-ce cet homme ? »
Les villageois perdirent aussitôt leur bonne humeur. Et tout le monde se tut. Ils n'osaient plus parler. Soudain, un vieil homme sortit de nulle part et prit la parole.
« Je suis le maire de ce village. L'homme que vous avez tué là-bas appartient à l'école de la grue. C'est une école d'assassin. Nous sommes oppressés depuis leur arrivée, il y a maintenant six mois. »
Assassin ? Il venait de dire qu'elle s'était spécialisée dans cet art. La jeune fille s'était décrite comme telle avant de crever. Il le sentait bien. Il était bien au bon endroit, et les villageois allaient certainement pouvoir l'aider. Si ça se trouve, ils avaient même vu son oncle !
« Avez-vous un vieil homme passer par ici récemment ? Il est à moitié chauve, assez grand et barbu. »
« Oui, nous l'avons vu. Il est passé par ici il y a trois jours. Il était accompagné de deux jeunes hommes. Il a dit qu'il allait affronter le maître de ces voyous, mais il n'est jamais revenu depuis ce jour. »
Ceci ne présageait rien de bon. Ylvikel ne voulait pas douter de son oncle, mais là c'était inquiétant. Il était certainement dans la mouise ! Il fixa le maire et posa ses deux mains sur ses épaules.
« Je vous en prie, indiquez-moi le chemin ! »
Le maire hocha de la tête comme pour approuver. Il lui montra une petite route qui était derrière lui. Il expliqua à Ylvikel qu'il devait l'emprunter. C'était le chemin le plus rapide pour aller à l'endroit désiré. Ylvikel le remercia et se mit en route. Pourquoi oppresser un tel village ? Et surtout, son oncle était-il toujours vivant ? Tant de question, et si peu de réponses. Il fallait se hâter, le temps était certainement compté …
Dernière édition par Ylvikel Strauer le Jeu 27 Déc 2012 - 9:33, édité 1 fois